La Commission européenne fait un petit pas pour restreindre le

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La Commission européenne fait un petit pas pour restreindre le
22/11/2016 17:41
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La Commission européenne fait un petit pas pour
restreindre le brevetage du vivant
L'exécutif européen a réduit les possibilités d'appropriation de gènes natifs.
Pour confirmer la tendance, la Commission doit s'exprimer sur les New Plant
Breeding Techniques. Un sujet sensible sur lequel l'institution planche depuis
2007.
© © tilialucida
Rarement l'exécutif européen a été si unanimement loué. La Commission
européenne a publié le 3 novembre un avis concernant la protection juridique
des inventions biotechnologiques. Y est réaffirmé que les produits issus de
procédés essentiellement biologiques (croisement et/ou sélection) ne sont pas
brevetables. Dans le domaine pourtant ultra-sensible du brevetage du vivant,
comment la Confédération paysanne a-t-elle pu partager la satisfaction de
l'Association Française des Biotechnologies Végétales (AFBV)? Le syndicat
d'agriculteurs soutenait en 2014 les faucheurs de colza génétiquement
modifié. L'AFBV qualifiait, dans sa dernière publication trimestrielle, les
risques sanitaires et environnementaux associés aux OGM de "légende tenace
et ancrée dans une majorité des cerveaux de nos concitoyens". L'unanimité
apparente masque, en réalité, de profondes divergences sur un sujet lié et on
ne peut plus pressant : les New Plant Breeding Techniques (NPBT).
"Un embryon d'avancée"
Le fait est que les préoccupations de tous ces acteurs sont déjà bien loin de
l'avis du 3 novembre. Les technologies permettant de modifier le génome de
matières animales ou végétales ont évolué. Le débat aussi. Or, concernant les
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NPBT, qui permettent des modifications génétiques sans introduire de gènes
étrangers, la législation européenne est à la traine. D'où les salutations polies
d'acteurs, qui espèrent tous que la prochaine directive européenne sur les
NPBT ira dans leur sens.
Interrogée à propos de l'avis de la Commission, Christine Riba, secrétaire
nationale de la Confédération paysanne, maintient tout d'abord sa
satisfaction : "Pour nous, c'est une victoire parce que cela faisait un sacré
bout de temps qu'on se battait pour empêcher les procédés naturels de
donner lieu à des brevets". La secrétaire nationale relativise tout de même la
portée du texte : "c'est un embryon d'avancée". Une victoire d'autant plus
embryonnaire que l'exécutif européen, à travers cette clarification sur la
protection juridique des inventions biotechnologiques, impose une réflexion
sur la Convention de l'Office Européen des Brevets (OEB). L'avis du 3
novembre est en effet contraire à une décision de la Grande Chambre de
l'OEB datant de mars 2015. L'office avait alors décidé que les procédés
essentiellement biologiques étaient brevetables, à certaines conditions.
"Cet avis est l'occasion d'ouvrir un débat afin de réformer la convention de
l'OEB", affirme Yvette Dattee. Pour la secrétaire générale de l'AFBV, une telle
occasion n'ira pas sans aborder la problématique des NPBT. Du fait du vide
juridique européen sur le sujet, ces nouvelles techniques de modification
génétique sont actuellement couvertes par les mêmes réglementations que
les OGM, "de plus en plus lourdes et de plus en plus absurdes" selon la
secrétaire générale. L'opportunité, d'après Yvette Dattee, est donc de voir les
produits des NPBT classifiés comme non-OGM tout en laissant la possibilité
aux semenciers de déposer des brevets sur leurs découvertes.
Une réglementation attendue de toutes parts
La Commission européenne travaille sur le sujet depuis 2007. Une analyse
juridique devait être publiée à la fin de l'année 2015, avant d'être promise
pour mars 2016 pour être finalement reportée sans date précise. L'enjeu est
de taille. Les ONG de défense de l'environnement pointent du doigt les
dangers potentiels de ces "nouveaux OGM". A l'opposé, le lobby New
Breeding Techniques Platform invoque des investissements dans la recherche
et le développement des NPBT, des emplois et des équipements qui seraient
menacés par la décision de l'exécutif européen. De même, l'argument invoqué
par la secrétaire générale de l'AFBV est d'ordre économique : "si un
inventeur dépense de grandes sommes pour créer une variété, il doit y avoir
un retour sur investissement".
Guy Kastler, délégué général du Réseau Semences Paysannes, voit dans ces
nouvelles techniques "des OGM qui ne disent par leur nom". Peu lui importe
le retour sur investissements si "les coûts écologiques se révèlent au final
beaucoup plus élevés que le gain financier des semenciers". Plusieurs
organismes scientifiques se sont d'ores et déjà exprimés quant aux NPBT.
Ainsi TestBiotech, un institut indépendant pour l'évaluation d'impacts des
biotechnologies, indique qu'"il n'y a aucun doute sur l'existence d'incertitudes
et de risques liés à l'application [des NPBT]". De même, en Autriche, le
bureau fédéral de l'environnement souligne les "effets non-désirables que
peuvent engendrer les NPBT".
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Le flou règne toujours autour de la date à laquelle le statut juridique des
NPBT sera enfin entériné. Le service communication de l'Autorité
européenne de sécurité des aliments (EFSA) indique "attendre les
conclusions de la Cour de Justice de l'UE", saisie sur le sujet par le Conseil
d'Etat français en octobre dernier. Le sujet cristallise les attentes de retour
sur investissement des industriels et les craintes associatives concernant les
effets néfastes sur la santé et l'environnement. Nul doute que les réactions
seront alors plus contradictoires qu'elles ne l'ont été début novembre.
Article publié le 22 novembre 2016
Guillaume Krempp , journaliste
Rédacteur spécialisé
Actu-Environnement
© 2003 - 2016 COGITERRA - ISSN N°2107-6677
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