Vers une charte du travail saisonnier

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Vers une charte du travail saisonnier
Carif-Oref des Pays de la Loire
n° 191 - janvier 2007
Le travail saisonnier en Anjou
Vers une charte
du travail saisonnier ?
Sommaire
Le travail saisonnier en Anjou
4Vers une charte
du travail saisonnier ?
p.1
Le DIF dans la distribution alimentaire
4Des salariés acteurs de leur
parcours professionnel
p.3
0 800 200 303
4Région formation
à votre écoute
p.4
La Région anticipe le transfert des actions
de formation de l’AFPA
4Un accès à la qualification
renforcé
p.6
Les ateliers de pédagogie personnalisée
en Vendée
4Ils accueilleront un public
plus large
p.8
www.cariforef-pdl.org
Réunies en séminaire à Angers, plus de 150 personnes (saisonniers et salariés agricoles, employeurs, élus locaux, prescripteurs
de l’emploi, responsables professionnels) étaient conviées par les
partenaires de Saisons en Anjou à réfléchir et à débattre sur le
travail saisonnier et les itinéraires professionnels qu’il propose.
E
n Anjou, les productions végétales spécialisées (horticulture
et pépinières, arboriculture fruitière, viticulture, semences,
maraîchage) drainent un nombre considérable d’emplois saisonniers :
environ 40 000 contrats temporaires (CDD) qui, une fois cumulés,
représentent 3 200 équivalents temps plein. Un emploi émietté qui
suscite une question immédiate : qui sont ces travailleurs saisonniers ?
À question simple, réponse complexe.
Si l’on interroge l’imaginaire collectif, le travail saisonnier est souvent
assimilé au job d’été qui va permettre à l’étudiant de se faire un
peu d’argent de poche ou encore à l’emploi rural que le voisin de
l’exploitant agricole et, plus certainement la voisine, mère au foyer,
va saisir pour mettre du beurre dans les épinards. Pour bousculer ces
représentations, Bertrand Hervieu, ancien président de l’Inra (Institut
national de la recherche agronomique) et sociologue, a ouvert le
séminaire en rappelant le scandale dévoilé par les medias au cours
de l’été 2006 : l’organisation, pour la récolte des tomates, d’un trafic
esclavagiste de travailleurs polonais dans la région des Pouilles
en Italie. On protestera que de telles pratiques sont inconnues à
ce jour dans notre pays, mais, dans un espace européen partagé,
on n’échappera pas à la réalité révélée par ces pratiques. Le travail
saisonnier s’inscrit aujourd’hui dans un environnement économique
dont les caractéristiques sont similaires à celles de n’importe quelle
autre activité, en matière de globalisation des marchés et de circulation
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Saisons en Anjou est un
projet du PIC Equal,
réunissant autour de
la problématique du
travail saisonnier, un
partenariat
territorial composé depuis
2002, du comité d’expansion économique,
de la Msa (Mutualité
sociale agricole), de
la chambre d’agriculture, de l’Adefa
(Association départementale pour l’emploi et la formation en
agriculture), du Cnph
(Centre national de
promotion horticole),
des Pays des Vallées
d’Anjou, Saumurois
et Loire-en-Layon et
de la mission locale
Layon, Lys, Aubance.
Le Programme d’initiative communautaire (PIC) EQUAL est
destiné à lutter contre
les discriminations et
les inégalités les plus
accentuées dans le
monde du travail et à
constituer un outil à
haute valeur ajoutée
dans le cadre de la
stratégie européenne
pour l’emploi, comme
du plan national d’action pour l’emploi.
des personnes. Les entreprises, soumises
à l’impératif de rentabilité et à une
gestion en flux tendu, transfèrent cette
contrainte dans la gestion des emplois et
des recrutements. Dans les productions
végétales, les statistiques montrent une
croissance des effectifs
de salariés saisonniers,
tandis que ceux des
permanents (salariés ou
familiaux) stagnent ou
régressent. Autrement dit,
la sai-sonnalité n’est pas
qu’une donnée naturelle
immuable : elle s’inscrit
dans un environnement
concurrentiel
et
participe grandement
à la problématique de
flexibilité de l’emploi.
Qui sont les travailleurs
saisonniers ?
Travaux horticoles
En cherchant désespérément un profil type de saisonnier, les repères finiront de s’effondrer. Un participant
du séminaire a eu cette expression
« le travailleur saisonnier, c’est Bac -10 à Bac
+10 !». Rmiste de l’agglomération d’Angers, travailleur polonais ou africain, étudiant-chômeur, cadre licencié, saisonnier
« en attendant »… On pourra dérouler
à l’infini cette liste à la Prévert pour ne
retenir en fin de compte qu’une chose :
travailleur saisonnier rime aujourd’hui
avec diversité et groupe social indéterminé. Ce n’est pas le travail d’une journée
de séminaire qui aura démêlé l’écheveau
de cette réalité multiforme, mais il aura
eu le mérite de clarifier la méthode pour
s’inscrire dans une démarche de progrès.
Quatre mots la caractériseront :
Ecoute et participation
« Les travaux difficiles sont pour nous,
nous n’avons pas de mutuelle, pas de cadeau
de Noël, nous ne sommes pas conviés aux
réunions avec le patron.» Ces paroles
d’une saisonnière participant au séminaire, amplifiées par la vidéo introductive (Saisonniers d’Anjou) éclairent
brutalement les enjeux. Il faut créer les
conditions pour que la parole des acteurs
concernés émerge et soit entendue.
Observation
Comprendre les dynamiques de
l ’e m p l o i s a i s o n n i e r, c ’e s t r e n t r e r
dans les pratiques de gestion des
2
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ressources humaines des entreprises. Xavier Berton, directeur de
l’ARACT (Agence régionale pour
l’amélioration des conditions de travail), l’a souligné : « Au sein d’entreprises
de
toutes
dimen-
Réussir-Racines 85
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sions, à commencer par les très
petites entreprises, ces pratiques sont
multiples, le plus souvent peu stabilisées, elles ont besoin d’être explic i t é e s . I l s ’ a g i t d ’ o b s e r v e r, p o u r
confronter et évoluer. »
Expérimentation
« Nous avons un pôle d’excellence du végétal
(Végépolys), avec sa charte, et c’est très bien.
Mais pourra-t-il se développer et éviter les
pièges de la délocalisation, si nous ne sommes
pas capables d’y adosser une véritable charte
du travail saisonnier.» Lancée lors de la
table ronde du matin par André Seguin,
président du Pays des Vallées d’Anjou,
cette idée a trouvé un écho politique, le
soir même, dans les propos conclusifs de
Christophe Béchu, président du Conseil
général. Derrière cette idée, il s’agirait
de définir un véritable statut professionnel pour le travailleur saisonnier et d’en
assurer la garantie au travers du partenariat territorial. Ce serait alors la concrétisation d’une démarche portée par Saisons
en Anjou, qui se veut expérimentale et
fondée sur un nouveau triptyque structurant pour l’emploi : l’entreprise, le salarié
et le territoire.
Hervé Cogné
Chargé de mission à l’Adefa (Association
départementale pour l’emploi et la formation en
agriculture) du Maine-et-Loire
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