L`ARTHROSE : UN PROBLEME DE SANTE

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L`ARTHROSE : UN PROBLEME DE SANTE
L’ARTHROSE : UN PROBLEME DE SANTE PUBLIQUE
Véritable problème de santé publique, l’arthrose est la plus fréquente des maladies
articulaires. Elle représente la seconde cause d’invalidité après les maladies
cardio-vasculaires et touche environ 10 % de la population des plus de 60 ans. En
France, pour le Centre de Recherche, d’Etude et de la Documentation en
Economie de la Santé (C.R.E.D.E.S), il y a 6 millions d’arthrosiques : 3,4 millions
de Français consultent pour arthrose chaque année. Très répandue, cette
affection reste cependant mal connue ; les facteurs prédictifs en particulier.
Entretien avec le Professeur Claude Vielpeau, chef du département
d’orthopédie du C.H.U de Caen et directeur de projet de l’étude ARTHROS,
programme de recherche subventionné par la Fondation de l’Avenir.
Quelles sont les causes de l’arthrose du genou?
Pr. Claude Vielpeau - Elles sont mal connues mais on pense qu’il existe une
imbrication de phénomènes biologiques et mécaniques.
Dans l’arthrose dite primitive un déséquilibre enzymatique entraînerait une
disparition progressive du cartilage, dont la fonction d’amortissement des chocs se
trouve altérée. Quand le cartilage a disparu, l’os s’use à son tour et, dans la forme
d’arthrose du genou la plus fréquente, qui siège sur la moitié interne de
l’articulation, cela entraîne une incurvation du membre inférieur. Cette incurvation
du membre augmente les contraintes mécaniques sur la partie interne du genou,
ce qui exagère l’usure. C’est un cercle vicieux.
L’arthrose peut également être d’origine mécanique. De nombreuses personnes
ont naturellement les jambes arquées, ce qui peut constituer une cause de
l’arthrose. D’autres facteurs mécaniques - séquelles de fractures et de lésions
ligamentaires - sont également identifiés comme responsables de l’arthrose du
genou.
Enfin, la notion, encore vague, de "terrain arthrosique" est cependant une réalité.
Cela cache vraisemblablement une composante génétique qui peut être masquée
par des phénomènes purement mécaniques.
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Y a-t-il des traitements efficaces de l’arthrose ?
Pr. C.V. - Il faut, d'abord, parler de prévention.
Il s’agit avant tout d’éviter les cals vicieux lors du traitement des fractures
articulaires (risquant d’altérer le contour de la surface) et des fractures situées
près du genou.
Le traitement des laxités du genou dues à une rupture du ligament croisé antérieur
semble également un moyen préventif de l’arthrose, surtout si le capital méniscal a
été préservé.
Dans le cas d'une arthrose déjà établie, le traitement est essentiellement
symptomatique (antalgiques, anti-inflammatoires) et fait appel à des mesures
hygiéno-diététiques.
Une nouvelle molécule, inhibant la cyclo-oxygénase 2, semble avoir une action
anti-inflammatoire plus sélective avec un espoir de diminuer les effets secondaires
comme le risque gastro-intestinal. Les traitements de fond, dits "structuromodulatoires", ont une efficacité discutée.
Et la chirurgie ?
Pr. C.V. - Au stade débutant, la chirurgie a des indications limitées. Les
ostéotomies, cherchant à corriger un vice architectural, peuvent être indiquées ;
correction d’un cal vicieux du genou par exemple.
Au stade évolué, il reste encore des indications de chirurgie conservatrice
notamment chez le sujet jeune (la jeunesse étant définie en comparant
l’espérance de vie du patient à celle de la prothèse qui serait l’autre élément de
l’alternative). Ce sont surtout les prothèses qui sont indiquées à ce stade. Elles
remplacent les surfaces articulaires et donnent régulièrement de bons résultats.
Pour l'avenir, les greffes de cartilage constituent une voie de recherche
intéressante. Elles consistent à prélever des cellules cartilagineuses dans une
zone peu porteuse, de les cultiver en laboratoire pour qu’elles se multiplient puis
de les réimplanter. Cette technique est testée actuellement sur des pertes de
substance localisées mais nous sommes encore loin de son utilisation en routine
dans l’arthrose. En effet, cela ne règle pas les causes génétiques ou biochimiques
ni les origines mécaniques éventuelles qui ont occasionné le processus
dégénératif.
Existe-t-il une corrélation entre ostéoporose et arthrose du genou ?
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Pr. C.V. - A Caen, le Pôle de Recherche dans les maladies de l'Appareil
Locomoteur (PRAL) du Centre hospitalo-universitaire conduit actuellement un
programme de recherche intitulé l’étude ARTHROS soutenu par la Fondation de
l'Avenir.
L’objectif de ces recherches est de mieux comprendre les liens qui existent entre
l'ostéoporose et l'arthrose du genou afin de mieux prévenir et mieux soigner cette
maladie particulièrement invalidante.
De fait, plusieurs faits scientifiques sont établis et tendent à montrer qu'il existe
des liens statistiques entre ostéoporose et arthrose.
Ainsi, le Professeur Christian Marcelli, du même CHU de Caen, a montré que,
statistiquement, les sujets qui ont des signes d’arthrose des doigts sont moins
souvent atteints de fractures du col fémoral. De même, la survenue de fractures du
col est exceptionnelle quand la hanche est arthrosique.
En revanche, l’ostéoporose est accusée de provoquer des microfractures de
l’extrémité supérieure du tibia, de nature à provoquer une incurvation de l’os, ellemême génératrice d’arthrose du genou.
Dans l’arthrose du genou, mon équipe a démontré que la densité minérale
osseuse est très élevée dans le tibia du côté du pincement articulaire alors
qu'elle est, au contraire, diminuée du côté sain.
Dans ce dernier cas, est-ce l'ostéoporose qui est à l'origine de l'arthrose ou
l'inverse ? C'est ce que l'étude ARTHROS s'attachera à mettre en évidence après
avoir suivi, pendant cinq années, cent volontaires sains de plus de 60 ans dont les
genoux seront comparés à des sujets atteints d'arthrose sévère.
Christelle CROS
Fondation de l’Avenir
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