La troisième directive européenne sur le permis moto

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La troisième directive européenne sur le permis moto
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La troisième directive européenne sur le permis moto
La troisième directive européenne sur le
permis moto actuellement en préparation
La troisième directive européenne sur le permis de conduire
est actuellement en préparation. La raison première de cette
‘refonte’ de la directive existante semble être avant tout la
volonté d’harmoniser le permis de conduire et de remplacer
l’actuel permis papier par une carte plastifiée. Mais il semblerait que l’harmonisation s’arrête là. La nouvelle proposition est en effet trop lourdement influencée par les traditions anciennes des différents Etats membres, alors qu’elle
néglige l’essence même du permis de conduire qui est de
garantir la sécurité de tous les usagers de la route. Telle est
la conclusion de l’évaluation du texte de la directive par la
Commission des transports du Parlement européen. La
Commission ne dit pas si les mesures proposées auront
également un impact réel sur la sécurité routière.
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Impact limité sur la sécurité routière
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La communauté motocycliste européenne, à savoir tant
l’industrie que les associations motocyclistes, considère
que la Commission des transports du Parlement européen
néglige certains éléments essentiels, tels que la vulnérabilité des motocyclistes, les arguments scientifiques tirés
des analyses d’accidents et les avantages pratiques du
moyen de transport individuel. Sans oublier l’importante
contribution économique du secteur qui, en Europe, représente un chiffre d’affaires de plus de 10 milliards EUR,
plus de 200 000 emplois directs et indirects et plus
de 30 millions de propriétaires de motocycles. Ces arguments fondamentaux n’ont pas été pris en considération
dans les multiples amendements déposés. En revanche, la
proposition s’est retrouvée déséquilibrée et a perdu en
clarté. Le texte actuel compromet l’avenir du motocyclisme et de l’ensemble du secteur, sans pour autant
améliorer la sécurité.
Absence totale d’harmonisation
La proposition de la Commission des transports tend à
laisser aux Etats membres le libre choix de l’âge auquel
leurs citoyens peuvent accéder aux différentes catégories de
deux-roues motorisés. L’âge minimum pour pouvoir conduire une moto pourrait même être porté à 26 ans. Ce libre
choix quant à l’âge d’accès aux deux-roues motorisés est
contraire à la volonté d’harmonisation de la réglementation. Il représente un pas en arrière par rapport à la situation actuelle et une discrimination illégitime des citoyens
de l’Union européenne. La flexibilité au niveau de l’âge
n’aura aucune incidence positive sur la sécurité routière.
L’âge n’est en effet pas un facteur direct de la survenance
d’un accident. L’expérience, en revanche, joue un rôle
important. Le relèvement de l’âge d’accès ne fera que
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déplacer le phénomène des accidents vers une catégorie
d’âge supérieure. Il convient de s’atteler à l’élaboration
d’une formation de base à la fois sérieuse et abordable
pour les motocyclistes débutants. Telle est également la
conclusion de l’étude "Initial Rider Training" réalisée par
l’ACEM et cofinancée par la Commission européenne1. On
peut notamment y lire qu’il n’existe dans nombre d’Etats
membres aucune formation structurée, souvent parce que
la demande de permis moto est trop faible que pour justifier commercialement la formation au niveau local. Il
semblerait également que les formations existantes ne
répondent pas aux attentes : trop chères, pas assez accessibles et trop hétérogènes en termes de qualité de l’offre
et d’exigences posées aux instructeurs. En outre, nombre
d’Etats membres, dont la Belgique, n’ont pas encore
procédé à l’implémentation à la fois complexe et coûteuse
des épreuves motos de l’examen, telles qu’elles ont été
décrites à l’annexe 2 de la deuxième directive sur le permis de conduire (2000/56/EC).
Il serait dès lors prématuré d’inclure d’emblée des conditions supplémentaires en matière de formation dans le
projet de troisième directive, lesquelles constitueraient
une barrière financière inacceptable pour la communauté
motocycliste sans aucune garantie d’amélioration de la
sécurité routière.
D’autres facteurs jouent un rôle beaucoup plus important
dans la prévention des accidents impliquant des deuxroues motorisés : expérience, vigilance des autres usagers
de la route et infrastructure. L’étude MAIDS (Motorcycle
Accidents In-Depth Study, ACEM 2004) révèle notamment
que, dans 70 % des accidents entre un motocycliste et un
autre usager de la route, la cause directe de l’accident est
le manque de vigilance de l’autre usager. Un problème que
l’adaptation des conditions d’accès au permis de conduire
ne résoudra pas. La sensibilisation de tous les usagers de la
route aux caractéristiques spécifiques des motocycles, en
revanche, y contribuerait plus efficacement.
Le rapport peut être consulté sur http://fema001.kaalium.com/issues/docs/irt_finalreport.PDF.
"La nouvelle directive accorde trop peu d’attention à l’harmonisation
et à l’uniformité européennes"
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La troisième directive européenne sur le permis moto
Etape par étape
La Commission des transports a confirmé la proposition de
la Commission européenne de fixer les exigences minimales auxquelles doivent satisfaire les véhicules d’examen,
ce tant en ce qui concerne la cylindrée que la puissance
minimale des différents véhicules d’examen. Le deuxroues motorisé le plus utilisé dans la plupart des Etats
membres est le scooter de 200 à 250 cc. Cela poserait
donc problème si les candidats devaient passer l’examen
avec un véhicule d’examen d’un autre type, par exemple
un véhicule d’une cylindrée de plus de 375 cc, c’est-à-dire
un véhicule totalement différent de celui avec lequel ils se
déplacent quotidiennement dans la circulation.
L’idée de limiter l’utilisation du cyclomoteur aux titulaires d’un permis de conduire B (voiture) est disproportionnée par rapport aux caractéristiques de ce
véhicule. Les cyclomoteurs roulent à une vitesse ne
dépassant pas 45 km/h et ont une cylindrée et une
puissance ne dépassant pas respectivement 50 cc et
4 kW. Les cyclomoteurs assurent la mobilité de base
de leurs usagers et sont simples d’utilisation. Ils sont
dotés d’une faible puissance et sont équipés d’une
transmission automatique. Les permis de conduire de
toutes catégories devraient donc également être valables pour les cyclomoteurs. En Belgique, seuls les
automobilistes sont autorisés à conduire un cyclomoteur de catégorie A (25 km/h) sans permis supplémentaire.
Il devrait également demeurer possible pour les titulaires d’un permis de conduire B de conduire des
scooters légers ou des motocycles d’une cylindrée et
d’une puissance ne dépassant pas respectivement
125 cc et 11 kW (alignement des permis B et A1). Les
épreuves en vue de l’obtention du permis moto ne
sont en effet pas adaptées à cette catégorie de
véhicules. L’obligation de passer un examen constitue un frein pour ces usagers qui, pour des raisons
de mobilité, préfèrent un scooter à la fois léger, pratique et maniable à leur voiture.
"Accroître la sécurité des motards ne semble pas être
une priorité dans la nouvelle directive"
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Examen de conduite avec un véhicule
représentatif
Le cyclomoteur, une forme de mobilité de
base
De
La communauté motocycliste soutient le principe du
permis de conduire par étapes. Un accès progressif que
prévoit déjà la législation actuelle en fixant à 18 ans
l’âge d’accès au permis de conduire A2 (motocycles
d’une puissance ne dépassant pas 35 kW et d’un rapport puissance/poids ne dépassant pas 0,2 kW/kg) et
à 21 ans l’âge d’accès au permis de conduire A
(motocycles toutes catégories). Une disposition qui
confirme que l’expérience importe plus que l’âge.
Selon la communauté motocycliste, les âges minimums devraient être fixés comme suit :
- 16 ans pour le permis AM (cyclomoteurs) ;
- 16 ans pour le permis A1 (motocycles légers et
scooters d’une cylindrée ne dépassant pas 125 cc et
d’une puissance ne dépassant pas 11 kW) ;
- 18 ans pour le permis A2 (motocycles d’une puissance ne dépassant pas 35 kW et d’un rapport puissance/poids ne dépassant pas 0,2 kW/kg) ;
- 21 ans pour le permis A (motocycles toutes catégories).
Afin de parvenir à un compromis entre les différents
Etats membres, les exceptions suivantes peuvent être
formulées à titre optionnel et laissées à l’appréciation
autonome de chaque Etat membre :
- 14 ou 15 ans pour le permis AM (inconditionnel) ;
- 17 ans pour le permis A1 ou A2 (afin de maintenir le
système d’accès progressif, les Etats membres
devraient se limiter à une seule des deux options) ;
- accès direct au permis A entre 21 et 24 ans.
L’accès progressif aux différentes catégories de deux-roues
motorisés laisse espérer une adaptation des aptitudes de
conduite et de la mentalité du conducteur, qui constituent
deux éléments clés de l’amélioration de la sécurité routière.
La double condition de cylindrée et de puissance limite
seulement le choix du véhicule d’examen et n’offre
aucune garantie de sécurité supplémentaire. Seule la
puissance minimale des véhicules d’examen devrait être
imposée.
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La troisième directive européenne sur le permis moto
Conclusion : la proposition de troisième directive européenne sur le permis de conduire doit aboutir à une solution à
la fois juste et réaliste qui soutienne la sécurité spécifique des deux-roues motorisés tout en tenant compte des avantages de ces véhicules tant en termes de mobilité qu’en termes de contribution à l’économie. Le morcellement qui résulte
de la possibilité offerte aux Etats membres de donner une interprétation propre au permis moto et le refus de prendre
la sécurité comme critère engagent le dossier dans une mauvaise voie.
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Maintien du cyclomoteur de catégorie A
en Belgique
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Les cyclomoteurs sont des véhicules dont la cylindrée
ne dépasse pas 50 cc. En Belgique, on distingue la
catégorie A (vitesse limitée à 25 km/h) et la catégorie
B (vitesse limitée à 45 km/h). Outre dans la vitesse, la
grande différence entre les deux catégories réside
dans le fait que, pour la catégorie A, aucun permis de
conduire n’est requis, de sorte que les cyclomotoristes sont autorisés à emprunter les pistes
cyclables au même titre que les cyclistes (faible différence de vitesse entre les deux). En agglomération,
les cyclomotoristes de la catégorie B sont obligés de
rouler sur la chaussée. Le port du casque et l’assurance sont obligatoires pour les deux catégories. La
différence entre les deux types de cyclomoteurs n’est
plus aussi marquée depuis l’instauration du port
obligatoire du casque, mais reste importante aux
yeux de nombreuses personnes.
Les cyclomotoristes de la catégorie A préfèrent souvent
ce type de véhicule dont la faible vitesse, plus proche
de la vitesse d’un vélo, rassure. En outre, cette faible
vitesse leur permet de circuler sur les pistes cyclables où
ils sont mieux protégés du reste de la circulation.
Certaines personnes souhaitent par ailleurs rester
mobiles, mais ne sont pas (plus) physiquement aptes à
pédaler. La catégorie A est fort demandée dans les
régions vallonnées ou les zones où de longues distances séparent les villes et villages (Wallonie). Il ne
faut pas non plus oublier que le permis de conduire
n’est pas à la portée de tout le monde. Il est certes
logique que les personnes qui échouent à l’examen ne
puissent conduire une voiture, mais elles ne doivent pas
pour autant être privées de mobilité. Prétendre que ces
personnes n’ont qu’à se déplacer en vélo ou en transports en commun, est un peu réducteur. En effet, le
réseau de transports en commun n’est pas aussi
développé dans toutes les régions et l’utilisation du
vélo limite fortement le nombre de kilomètres que l’on
peut parcourir.
La Belgique n’est par ailleurs pas le seul pays
européen à avoir une catégorie A. Des cyclomoteurs
limités à 25 km/h circulent également en Allemagne,
aux Pays-Bas et en Suède.
La troisième directive européenne sur le permis de conduire pourrait prévoir une option permettant à chaque
Etat membre d’ouvrir l’accès aux cyclomoteurs à partir
de l’âge de 14 ans. Il serait alors bien que la Belgique
puisse autoriser les jeunes à partir de 14 ans à conduire
des véhicules dont la vitesse est fortement limitée. Ces
jeunes pourraient ensuite, à partir de l’âge de 16 ans,
passer à des véhicules d’une puissance supérieure. Ils
auront non seulement deux ans d’expérience de conduite derrière eux, mais leurs aptitudes et leur mentalité
auront elles aussi évolué. Il s’agit en l’occurrence d’accompagner intelligemment les jeunes dans la circulation
tandis qu’ils font leur apprentissage. Dans des pays
comme la France, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie, l’âge
d’accès aux cyclomoteurs est aujourd’hui déjà inférieur à
16 ans. La polémique qui règne autour des cyclomoteurs
concerne invariablement l’augmentation de la puissance
de ces véhicules. Moyennant quelques petites interventions techniques, la vitesse de ces véhicules pourrait être
facilement augmentée. En Belgique, les distributeurs
sont encore trop souvent responsables du réglage des
cyclomoteurs. La vitesse des véhicules devrait être
"Un permis de conduire par étapes: c’est la bonne piste"
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La troisième directive européenne sur le permis moto
réglée dès la sortie de l’usine, sans intervention du distributeur. Plusieurs marques ont ainsi développé un
bloc moteur spécifique de sorte que les pièces des catégories A et B ne sont plus interchangeables, ce qui limite les possibilités d’augmentation de la puissance des
cyclomoteurs. La vente de kits d’augmentation de la
puissance en vue d’une utilisation sur la voie
publique est interdite.
Sans doute, le problème de l’augmentation de la
puissance des cyclomoteurs est-il quelque peu
exagéré. Les services de police ne mesurent pas tous
la vitesse de manière ad hoc et parviennent alors à
des résultats de mesure parfois faussés. Les curvomètres sont certes étalonnés, mais s’ils ne sont pas
utilisés correctement, les mesurages sont faussés et
les cyclomotoristes accusés d’avoir trafiqué leur
véhicule. Cette mauvaise utilisation a été déjà été
confirmée à plusieurs reprises par les tribunaux.
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Stijn Vancuyck
Conseiller Moto et Vélo
Un tas de questions autour des cyclomoteurs trouveraient des réponses si ces véhicules étaient immatriculés auprès de la DIV et qu’ils se voyaient
attribuer un numéro d’immatriculation à un prix
raisonnable.
Les contrôles de vitesse pourraient alors s’effectuer à
l’aide des systèmes de radars habituels et
deviendraient plus efficaces. D’autres infractions au
code de la route pourraient également être constatées sans que le conducteur doive être arrêté pour
identification. Les cas de fraude à l’assurance et de
vol pourraient être plus facilement décelés. Le registre
de la DIV pourrait, à terme, refléter une image précise du nombre de véhicules et du nombre d’usagers,
chiffres qui aujourd’hui ne reposent que sur des estimations.
Les cyclomoteurs et scooters sont d’importants
moyens de mobilité, comme l’ont révélé les importants travaux de voirie réalisés sur le ring d’Anvers.
Les gens veulent rester mobiles et choisissent pour
cela un moyen de transport adapté. Pendant la période des travaux, les ventes de scooters ont explosé
dans la région. ◗
De
La sécurité s’en trouverait également accrue si les
véhicules de la catégorie B pouvaient rouler à 50 km/h
plutôt qu’à 45 km/h. A une vitesse de 50 km/h, les
usagers peuvent plus facilement suivre le flot de la
circulation et sont donc plus en sécurité, surtout
depuis qu’il leur est interdit d’emprunter les pistes
cyclables en agglomération. Du fait de leur vitesse
limitée, les conducteurs de cyclomoteurs sont sou-
vent dépassés par d’autres usagers et chaque
dépassement constitue une situation potentiellement
dangereuse.
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