Madame, Monsieur
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Madame, Monsieur
Madame, Monsieur, Le présent message s'inscrit dans le cadre de la collecte de points de vue proposée par la commission européenne dans son "appel à commentaires". Vous trouverez ci-dessous nos commentaires articulés en 3 paragraphes : 1-une brève mise en perspective du "livre vert". 2-les bases d'un autre raisonnement. 3-une conclusion et des propositions. Afin de situer l'angle sous lequel nous intervenons, voici en quelques mots ce qui constitue nos métiers : -activités : création, diffusion et médiation par internet de travaux artistiques et culturels conçus spécialement pour ce média. -mots clés : professionnels, culture, nouvelles technologies, nouveaux modèles économiques, veille technologique, recherche, droit d'auteur, philosophie du "libre", éducation, coopération internationale. Vous souhaitant bonne réception de ces éléments, nous vous présentons, Madame, Monsieur, nos sincères salutations. Isabel Saij Jean Pierre Dubois Artiste numérique Médiateur art numérique Niort France Niort France Sites copyleft : http://www.saij-copyleft.net http://bigsheep.blogspot.com http://www.saij-copyleft2.net Autres sites : http://www.saij-netart.net http://www.saij-photos1.net Contribution Isabel Saij et Jean Pierre Dubois : 1-Le "livre vert" : une mise en perspective Les bases sur lesquelles le "livre vert" est construit ne laissent aucun doute : au centre de l'édifice le droit d'auteur, à la périphérie une évolution technologique, internet, phénomène perturbateur, qu'il faut faire "rentrer" dans l'empilement juridique des traités internationaux régissant le droit d'auteur. La justification de cette approche est dictée par "l'économie", un des 4 substantifs du titre. L'omniprésence d'un vocabulaire commercial montre que le cadre juridique concerne essentiellement les droits voisins et assez peu le droit d'auteur. Dans la même ligne on peut remarquer comment les "titulaires de droits" sont opposés aux "utilisateurs/consommateurs"(*) et (**) Toutefois les changements générés par la numérisation et internet sont tels que des exceptions ont été définies. Poursuivant cette évolution ce sont ces exceptions sur lesquelles portent les questions du livre vert. Il faut aller à la dernière page du document pour y constater une nuance : le questionnement sur les pratiques sociales et culturelles liées aux technologies numériques car elles peuvent remettre en question l'équilibre établi. (*) la note 1 en page 1 précise qu'il est normal de "considérer la connaissance et l'éducation comme des biens marchands ou comme des produits ou des services" (**) l'OCDE définit, en page 18, le "contenu créé par l'utilisateur" : c'est une "création [qui] intervient en dehors des pratiques et habitudes professionnelles" 2-Les bases d'un autre raisonnement : Partant du juste questionnement sur les pratiques sociales et culturelles (p 19 du "livre vert"), il nous paraît opportun de poser le problème en l'élargissant à d'autres considérations factuelles. a)-les aspects techniques : La duplication d'un fichier numérique s'effectue à l'identique et à coût presque nul. Le résultat est une multiplication, jamais une soustraction, puisque le possesseur du fichier original le conserve. Cette caractéristique centrale des biens immatériels empêche toute comparaison avec les biens matériels. La protection des fichiers par des DRM est un échec technique complet. La sécurisation juridique des DRM n'a servi à rien (cf loi DADVSI en France). b)-les aspects liés aux utilisateurs : Toutes les évolutions récentes d'internet viennent des utilisateurs, ou du moins de leur adoption ou non des nouveautés proposées. Les succès du navigateur "firefox" ou de l'encyclopédie "wikipedia" résultent des choix des utilisateurs et/ou contributeurs Le succès du web social tient à l'adhésion des utilisateurs. Les informations contenues sur de nombreux blogs relèvent de l'expertise de leurs auteurs. Les créations artistiques tirant parti des caractéristiques d'internet et de la technologie ont le degré d'excellence d'artistes hautement qualifiés, autrement dit des acteurs professionnels. Les conditions d'un accès facile à la diffusion des connaissances se trouvent réunies. Le public le plus large peut donc en bénéficier. On voit bien les avantages sociaux de cette situation : pour l'enseignement et pour la réduction de la fracture numérique. c)-les aspects juridiques : Le contexte du droit d'auteur a permis la mise en forme de "licences de libre diffusion". Ces licences appliquent le modèle des licences gérant le "logiciel libre" en le transposant aux créations numériques : textes, son/musique, photos, vidéo, etc... Des licences telles que la "licence art libre" ou la licence "creative commons by-sa" organisent parfaitement l'équilibre entre le respect du droit d'auteur et la diffusion, la transformation (oeuvres dérivées) des créations. Ces licences sont totalement adaptées aux biens immatériels et aux caractéristiques d'internet. d)-les aspects innovants : Un nouveau cercle d'innovation s'est mis en marche, mêlant les technologies de l'information et de la communication, la culture, le droit, les pratiques sociales des internautes. Ces pratiques ont pour initiateurs des personnes seules ou des petits groupes. La comparaison peut être faite avec des micro-laboratoires exerçant une activité de recherche liée en parallèle à une veille technologique. e)-les aspects économiques : L'exemple du logiciel libre montre qu'une approche spécifique à l'environnement informatique et internet débouche sur une création de valeur et sur des activités créatrices d'emploi, dans le sens classique ou dans celui de l'économie sociale. Il est alors clair que les licences de libre diffusion vont également donner le jour à de nouveaux modèles économiques pour le partage et la diffusion des connaissances. Il est à souligner que ces modèles concernent aussi bien les pays "développés" que les pays "en voie de développement". 3-Conclusion et propositions : Les faits rapportés dans notre paragraphe 2 méritent de bien plus longues explications. Nous regrettons d'ailleurs d'avoir dû procéder à certains raccourcis qui rendent certainement difficiles la compréhension de chaque point. Il faut savoir que de nombreux écrits étayent nos remarques, et que nous pouvons fournir une première bibliographie sur ces sujets. Nos explications ont pour but de montrer qu'il existe une seconde façon de faire évoluer le droit d'auteur. Afin que les choses soient bien claires, il ne s'agit pas d'annuler l'existant et de le remplacer par une absence de cadre légal. Notre propos a pour objet de permettre à la Commission Européenne de découvrir comment le droit d'auteur s'accommode aisément d'internet dans un système "gagnantgagnant" pour les auteurs et les utilisateurs. Nous attendons de la Commission Européenne qu'elle reconnaisse et encourage cette pratique. Un exemple simple et rapide à mettre en oeuvre : ouvrir "Europeana" aux contenus sous licences de libre diffusion. Quantité de connaissances et de créations seraient ainsi préservées, disponibles pour le plus grand nombre sans les difficultés liées au droit d'auteur. Cette proposition répond aux souhaits émis par Mme Reding dans son discours du 17/11/2008 à Avignon (speech/08/621). Extraits et remarques: -“A terme, elle mettra à disposition du public de plus en plus de contenus sous droits, grâce à une collaboration avec les ayants droits“. Les contenus étant placés sous des licences de libre diffusion, la seule décision à prendre est la mise en ligne sur Europeana. -“Un autre modèle consiste à obtenir une licence des ayants droits pour rendre les contenus accessibles“. Les licences existent déjà (exemple la licence art libre*). Il ne reste à la Commission Européenne qu'à les prendre en compte dans ses textes et sa pratique. Nous tenons enfin à souligner que nos recommandations s'appuient également sur une expérience concrète. En effet, nous avons été reçus par un membre de cabinet d'un commissaire européen accompagné de 2 chefs d'unité. Cet entretien a permis de constater que les bases sur lesquelles nous développons nos activités ne sont pas connues de la Commission Européenne (à savoir les licences de libre diffusion). Il faut également savoir qu'aucune structure n'existe à la Commission Européenne pour prendre connaissance des pratiques innovantes. Quand on sait enfin que la commission procède par „appels d'offre“, il y a là une situation pour le moins paradoxale qui bride (empêche?) le développement d'innovations. A travers la question du droit d'auteur, la Commission Européenne a une opportunité de montrer sa compréhension des pratiques sociales et culturelles liées à internet, de l'acter en mentionnant les licences de libre diffusion et de promouvoir l'innovation et le partage des connaissances en ouvrant "europeana" aux créations actuelles "libres". Restant à la disposition de la Commission Européenne pour apporter notre expérince et nos compétences, nous attendons, maintenant que les enjeux sont clairs, des orientations et décisions adaptées. (*) licence art libre : http://artlibre.org