Désaffleurements admissibles entre carreaux céramiques collés
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Désaffleurements admissibles entre carreaux céramiques collés
CT Revêtements durs de murs et de sols Les désaffleurements entre carreaux adjacents peuvent engendrer divers désagréments. En particulier dans le cas de carreaux à bords droits posés à joints serrés (1), ils peuvent être considérés comme inesthétiques, gênants pour la marche, voire entraîner des dégradations lors du passage d’engins de manutention munis de petites roues dures. Il importe dès lors de définir des méthodes d’évaluation et des critères objectifs, afin d’établir des conventions claires au préalable et d’éviter ainsi les discussions sur chantier. Désaffleurements admissibles entre carreaux céramiques collés 1 Paramètres d’influence Bien que l’on ait vite fait d’attribuer la responsabilité des désaffleurements entre carreaux au carreleur, le soin apporté à la mise en œuvre est rarement le seul facteur en cause. De nombreux autres paramètres doivent en effet être pris en compte. Considérons, dans un premier temps, la planéité de la chape. En cas de pose du revêtement au moyen d’une fine couche de colle, les irrégularités du support ne pourront être éliminées que dans une faible mesure (voir figure 4, p. 3). Dans ce contexte, on obtiendra des résultats légèrement meilleurs avec un double encollage ou avec un mortier‑colle appli‑ qué en couche plus épaisse. D’après la NIT 189 [3], les chapes peuvent être réalisées selon différentes classes de planéité. Lorsque la chape est destinée à recevoir un revêtement collé en carreaux d’une superficie supérieure à 300 x 300 mm², on privilégiera la classe de planéité 1 (voir tableau A), pour laquelle les irré‑ gularités sous la latte de 2 m de long peuvent atteindre au maximum 3 mm. Les écarts de planéité (mesurés au niveau des bords du carreau ou des diagonales) (voir figure 1) et l’épaisseur des carreaux mis en œuvre peuvent également être à l’origine de désaf‑ fleurements. Les tolérances applicables aux carreaux sont énoncées dans la A | Classes de planéité et écarts de planéité admissibles pour la chape. Classes de planéité Écarts de planéité admissibles sous la latte de 2 m (en mm) Classe 2 4 Classe 1 3 norme NBN EN 14411 [2]. En ce qui concerne les carreaux de grand format, les écarts de planéité peuvent être très élevés (jusqu’à 2 mm, voir figure 1). Lorsque des exigences de planéité sévères sont posées au revêtement de sol fini, il y a lieu de choisir des carreaux répondant à des tolérances plus strictes (voir tableau B, p. 3). Étant donné que les différences d’épais‑ seur des carreaux au sein d’une même fourniture se limitent généralement à quelques dixièmes de millimètre (avec un maximum de 0,5 mm), elles peuvent en principe être reprises sans difficulté lors de la pose. L’influence de l’appareillage sur les désaffleurements entre deux carreaux adjacents ne peut pas non plus être sous-estimée. Elle se fait principalement ressentir lorsque les carreaux montrent des écarts de planéité importants. Si l’on opte pour un appareillage à joints croisés (voir figure 2), il est impossible, 1 | Carreau céramique de grand format pré- sentant un écart de planéité important. 2 | Pose de carreaux avec un appareillage à joints croisés. même avec une mise en œuvre parfaite sur un support totalement plan, d’éviter que les défauts de planéité des carreaux engendrent des désaffleurements aux endroits où les joints se croisent. Notons que l’utilisation de carreaux à arêtes biseautées ou arrondies permet, d’une part, de rendre les désaffleure‑ ments moins visibles et, d’autre part, de réduire les risques de détérioration (1) Par exemple, carreaux rectifiés à surface lisse et à bords droits, posés à joints minces. Les Dossiers du CSTC 2015/3.12 1 CT Revêtements durs de murs et de sols des arêtes et de trébuchement. La pose du carrelage à joints larges aura égale‑ ment un effet favorable à cet égard. La NIT 237 [4] stipule ainsi que la tolérance applicable pour les désaffleurements entre carreaux adjacents dépend de la largeur du joint (2). Une approche similaire est appliquée dans les pays voisins. La norme fran‑ çaise NF DTU 52.2 P2 [1] prévoit, par exemple, que le désaffleurement admis‑ sible entre carreaux adjacents équivaut à 0,5 mm plus un dixième de la largeur du joint (avec un maximum de 1,5 mm), tandis que le Nederlandse Handboek Keramische tegelvloeren [6] considère que le désaffleurement maximal entre carreaux adjacents varie entre 0,5 et 2 mm, et ce, respectivement pour une largeur de joint de moins de 2 mm et de plus de 6 mm. 2 Méthodes de mesure Les méthodes de mesure courantes pour le contrôle in situ des écarts dimensionnels des carrelages de sol ont déjà fait l’objet d’un article paru dans le CSTC‑Contact n° 25 [5]. Ainsi, le désaffleurement entre carreaux adjacents est mesuré au moyen d’une règle droite de longueur adaptée, que l’on place sur le carreau le plus élevé et que l’on maintient en contact avec ce dernier (voir figure 3). On mesure ensuite l’écart entre la règle et le bord du carreau adjacent à l’aide de cales calibrées ou, mieux, d’un pied à coulisse. 3 Combinaison de différentes tolérances Comme indiqué plus haut, les désaf‑ fleurements entre carreaux adjacents peuvent être dus à divers facteurs, qui doivent impérativement être pris en compte dans l’évaluation du résul‑ 3 | Mesure du désaffleurement entre deux carreaux adjacents. tat final. Lors de la vérification d’un revêtement de sol carrelé, on ne peut toutefois pas se contenter d’effectuer la somme des tolérances relatives au support, aux carreaux et à la pose, sans quoi les valeurs seraient trop larges et peu réalistes. En pratique, il s’avère que les tolérances de fabrication et de mise en œuvre des matériaux de construction ont géné‑ ralement une répartition statistique ‘normale’. Comme expliqué dans le CSTCContact n° 25 [5], on peut considérer la racine carrée de la somme des carrés de ces tolérances (3) pour autant que : •les écarts sur le support, sur les car‑ reaux et sur la mise en œuvre aient une répartition normale et soient indépendants les uns des autres •le contrôle des écarts s’opère à des endroits sélectionnés au hasard. En s’appuyant sur cette approche, on peut fixer des critères réalistes pour déterminer les désaffleurements entre carreaux adjacents (voir § 4, p. 3). Il importe toutefois que la personne qui procède au contrôle possède un bagage théorique suffisant, de façon à ce qu’elle puisse nuancer ses conclusions lorsque les conditions limites prescrites ne sont pas respectées. C’est notamment le cas lorsque tous les carreaux d’une fourni‑ ture déterminée présentent un cintrage répétitif (écart systématique). L’approche proposée se base en outre sur les écarts types des carreaux mis en œuvre, ce qui suppose que ceux-ci sont connus. Si ces écarts ne sont pas repris dans la fiche technique du fabricant et qu’il est fait référence uniquement aux tolérances de planéité (larges) issues de la norme européenne, on peut décider de vérifier in situ si les carreaux posés répondent à des exigences plus sévères. Le cas échéant, le nombre de résultats de mesure sera néanmoins insuffisant (en règle générale, seule une dizaine de carreaux est contrôlée) pour obtenir une somme quadratique pertinente. D’un point de vue statistique, même si les travaux sont bien exécutés, cer‑ tains dépassements par rapport aux tolérances fixées sont donc toujours possibles. En pratique, les tolérances sont souvent considérées comme la limite au-delà de laquelle les travaux sont refusés, ce qui ne correspond pourtant pas tout à fait à la théorie. En d’autres termes, les acteurs concernés doivent appliquer les limites de tolé‑ (2) Cette tolérance – à laquelle on ajoutera les écarts de planéité et les écarts sur l’épaisseur du carreau – est de 1 mm pour des largeurs de joint inférieures ou égales à 6 mm et de 2 mm pour des largeurs de joint supérieures à 6 mm. (3) Selon la formule st = ∑ si2= s21 + s22 + ... + sn2 où : •st = la tolérance combinée •si = les tolérances individuelles. 2 Les Dossiers du CSTC 2015/3.12 CT Revêtements durs de murs et de sols rance avec bon sens, de manière à ce que le moindre dépassement de celles-ci ne donne pas nécessairement lieu à un refus des travaux. La méthode de contrôle du carrelage joue également un rôle important dans ce contexte. Lorsqu’on effectue un contrôle sur un grand nombre d’endroits choisis de manière aléatoire, le risque de dépassement de la tolérance sera, par exemple, bien moindre que si les mesures se limitent simplement aux zones ‘problématiques’. Soulignons par ailleurs que certains écarts sont accentués lors de la pose des carreaux. Ainsi, une irrégularité relativement restreinte dans le support peut créer un désaffleurement impor‑ tant entre deux carreaux adjacents, en particulier lorsqu’il s’agit de grands carreaux mis en œuvre sur une mince couche de colle (voir figure 4). Dans ce cas aussi, la somme quadratique des tolérances donnera une sous-estimation des écarts pouvant être rencontrés dans la pratique. Afin de localiser ces irrégu‑ larités, il est vivement recommandé de procéder à une inspection préalable du support, en particulier pour les carreaux de grand format. Notons cependant que ce contrôle ne remplace en aucun cas la réception des travaux par le maître d’ouvrage. 4 | Désaffleurement entre deux carreaux adjacents dû à une irrégularité au sein du support. 4 Critères Selon la classe de planéité du support, les tolérances de planéité des carreaux et l’appareillage choisi (joints continus ou croisés), on distingue plusieurs classes de tolérance pour le sol carrelé. Ces classes permettent d’orienter les choix initiaux (largeur de joint, car‑ reaux à arêtes biseautées) en fonction du résultat final souhaité. On pourrait ainsi fixer des exigences plus strictes lorsque les carreaux doivent subir le passage de matériel roulant (dans les cuisines de collectivités, les espaces commerciaux, etc.) ou lorsque les désaf‑ fleurements peuvent poser problème aux utilisateurs (dans les établissements de soin, par exemple). Le tableau B reprend les tolérances sur les matériaux et la mise en œuvre, et ce, compte tenu de l’approche théorique décrite ci-avant et des considérations pratiques. Ces tolérances étant plus sévères que les écarts admissibles selon une approche purement théorique, il convient de garder à l’esprit que de légers dépassements ne sont jamais exclus. Sauf spécifications contraires dans les documents contractuels, la classe de tolérance ‘normale’ sera généralement d’application. Si le maître d’ouvrage privilégie toutefois la classe de tolé‑ rance ‘sévère’, il y a en outre lieu de réaliser une chape répondant à la classe de planéité 1 (3 mm/2 m) et d’utiliser des carreaux aux écarts dimensionnels réduits. Il revient au carreleur de vérifier au préalable si les carreaux choisis et le support sont compatibles. Rappelons que les tolérances des carreaux figurant dans le tableau B sont parfois bien plus strictes que les écarts admis repris dans la norme NBN EN 14411 [2]. La classe de tolérance ‘large’ (lorsque les carreaux choisis et/ou le support pré‑ B | Tolérances de planéité d’un carrelage collé constitué de carreaux céramiques et désaffleurements admissibles entre carreaux adjacents. Classe de tolérance Large (1) Tolérances sur le sol fini Planéité 5 mm / 2 m Exigences relatives au support, aux carreaux et à la méthode de pose Désaffleu‑ rement Chape 2 mm • Classe de planéité 2 pour des carreaux jusqu’à 300 x 300 mm² • Classe de planéité 1 pour des carreaux plus grands Normale 4 mm / 2 m 1,5 mm • Classe de planéité 2 pour des carreaux jusqu’à 300 x 300 mm² • Classe de planéité 1 pour des carreaux plus grands Sévère 3 mm / 2 m 1 mm Classe de planéité 1 Tolérance sur les carreaux (2) Appareillage Max. 1,4 mm Joints continus Max. 1,2 mm Joints coupés Max. 1,0 mm Joints continus Max. 0,8 mm Joints coupés Max. 0,6 mm Joints continus Max. 0,4 mm Joints coupés (1) Seulement avec l’accord du maître d’ouvrage. Dans ce cas, il est préférable de réaliser des joints épais, afin de limiter les nuisances liées aux désaffleurements. (2) Tolérance de planéité recommandée pour les carreaux jusqu’à 1.200 x 1.200 mm². Les Dossiers du CSTC 2015/3.12 3 CT Revêtements durs de murs et de sols sentent d’importants écarts de planéité, par exemple) ne peut être appliquée qu’avec l’accord du maître d’ouvrage. Dans ce cas, il est préférable de pré‑ voir des joints larges (> 6 mm), afin de limiter les nuisances liées aux éventuels désaffleurements. 5 Conclusion En fixant les désaffleurements admis‑ sibles entre carreaux adjacents, il est possible d’adapter les choix initiaux (type de carreaux, planéité du support et appareillage) aux attentes exprimées et d’éviter de longues discussions une fois les travaux achevés. y Exemples Si l’on se base sur le tableau B (p. 3), pour une maison de repos, par exem‑ ple, on pourrait prévoir un carrelage de sol à joints continus répondant à une classe de tolérance sévère. Dans le cahier spécial des charges, on exigerait alors une classe de tolérance 1 pour la planéité de la chape et on choisirait des carreaux présentant des écarts de planéité de maximum 0,6 mm. À l’inverse, on peut aussi déterminer quelles tolérances seront applicables au sol fini après avoir choisi les carreaux. Si l’on souhaite, par exemple, poser des carreaux qui comportent des irrégularités pouvant atteindre 1 mm selon un appareillage à joints continus, on atteindra au mieux une classe de tolérance ‘normale’. Bibliographie 1. Association française de normalisation NF DTU 52.2 P2/A1 Travaux de bâtiment. Pose collée des revêtements cérami‑ ques et assimilés. Pierres naturelles. Partie 2 : cahier des clauses administra‑ tives spéciales types. Amendement 1. Paris, AFNOR, 2014. T. Vangheel, ir., chef adjoint du laboratoire Matériaux de gros œuvre et de parachèvement, CSTC J. Van den Bossche, ing., conseiller principal, division Avis techniques, CSTC J. Wijnants, ing., chef de la division Avis techniques, CSTC Pour de plus amples informations à ce sujet, nous renvoyons le lecteur intéressé aux Antennes Normes Tolérances et aspect (Eye Precision) et Parachèvement subsidiées par le SPF Économie. 4 Les Dossiers du CSTC 2015/3.12 2. Bureau de normalisation NBN EN 14411 Carreaux céramiques. Définitions, classification, caractéristiques, évaluation de la conformité et marquage. Bruxelles, NBN, 2012. 3. Centre scientifique et technique de la construction Les chapes pour couvre-sols. 1re partie : matériaux - performances - réception. Bruxelles, CSTC, Note d’information technique, n° 189, 1993. 4. Centre scientifique et technique de la construction Revêtements de sol intérieurs en carreaux céramiques. Bruxelles, CSTC, Note d’information technique, n° 237, 2009. 5. Centre scientifique et technique de la construction Tolérances dans la construction. Bruxelles, CSTC, CSTC-Contact, n° 25 (édition spéciale), 2010. 6. SBRCURnet Handboek Keramische tegelvloeren. Delft, SBRCURnet, 2009.