Anthony Abraham, superphilanthrope américain, originaire de Batroun

Transcription

Anthony Abraham, superphilanthrope américain, originaire de Batroun
Les Libanais dans le monde
lundi 5 décembre 2011
Anthony Abraham, superphilanthrope
américain, originaire de Batroun
5
Disparition Au Liban, moult associations de bienfaisance ont fait part de son décès dans la presse. Idem
en Haïti. Aux États- Unis, elles sont plus d’une centaine à graver sa mémoire dans leur vie.
WASHINGTON,
d’Irène MOSALLI
Cet être d’exception, de par
sa générosité sous toutes les
latitudes, est un citoyen américain, à l’origine un fils du
Liban : Anthony Abraham.
Le 25 février dernier, il fêtait
en Floride son centième anniversaire en compagnie de 375
personnes, parents et amis,
dans un cadre à thème arabe. Il
est décédé en octobre dernier.
Parce que la vie lui avait tout
donné, il a voulu rendre au
centuple à ceux qui n’avaient
pas été ainsi favorisés.
Anthony Abraham est l’un
des plus grands philanthropes
que comptent les États-Unis.
Toujours très élégamment vêtu
et le cigare en main, il était né
à Youngstown (Ohio). Quatrième enfant d’une famille
d’émigrés libanais, (George
et Sophie Abraham, venus
de Batroun en 1890), qui en
comptait huit, il a été le seul
à fréquenter l’université, celle
de Detroit. Après avoir fait de
la « kaché » (commerce ambulant de la valise), son père avait
ouvert une épicerie. Processus
qu’ont suivi la plupart des émigrés libanais de l’époque. On
parlait beaucoup arabe dans ce
foyer, on mangeait libanais et
l’on était très dévoué à l’Église
maronite. Le jeune Anthony
avait choisi d’interrompre ses
études universitaires et de travailler avec un journal du soir,
le Chicago Evening American,
puis il lance sa propre publica-
tion, le Help Wanted News. En
le vendant, il se retrouve à la
tête d’une grosse fortune. Avec
son épouse Geneviève (également libanaise, née Harris), ils
décident, en 1951, d’aller vivre
dans le sud de la Floride, parce
que l’aîné de leurs cinq enfants,
George, était asthmatique. À
noter que le couple avait choisi
d’adopter cinq enfants du Liban, qui sont donc devenus les
leurs. Au bout d’un moment,
Anthony Abraham se lasse de
cette retraite prématurée au
soleil. Il ouvre alors à Little
Havana (banlieue de Miami),
une agence de représentation
de la marque de voiture Chevrolet. C’est à nouveau la prospérité et son agence devient la
plus importante de la Floride
du Sud.
Devant son célèbre agence Chevrolet.
« Je nourrirais les
pauvres et j’aiderais
les malades »
Tout au long de sa vie, ce
brillant businessman à l’éternel
cigare a été parallèlement dévoué à d’innombrables causes
humanitaires. Enfant, il avait
juré que, « si par la grâce de
Dieu, je le pourrais, je nourrirais les pauvres et j’aiderais les
malades ». Il était notamment
le dernier survivant des membres fondateurs de St. Jude
Children’s Research Hospital
(Memphis), une réalisation
initiée par le comédien d’origine libanaise, Danny Thomas.
Il était également membre de
l’ordre de Malte, de l’ordre du
Saint-Sépulcre, des Chevaliers
de Colomb et des Chevaliers
de Saint-Grégoire. Et il avait
été consul honoraire de Haïti et
président de l’Union culturelle
mondiale. En 1976, Anthony
Abraham et son épouse ont
créé la « Anthony R. Abraham
Foundation » qui a octroyé
des millions à des centaines
d’organismes caritatifs de par
le monde (des États-Unis au
Liban en passant par Haïti) :
orphelinats, hôpitaux et autres
centres à diverses vocations.
Il a fait la part belle au Liban
dans ce domaine avec son apport consistant, notamment au
Centre spastique de Bhannès,
l’Hôpital libanais, l’Institut des
sourds et d’autres instituts similaires à travers tout le Liban.
Sa générosité et son implication dans plusieurs domaines
en ont fait un détenteur d’une
collection de médailles et de
distinctions honorifiques. Il a
aussi été le président de l’Union
culturelle mondiale.
Le vice-président du Brésil, Michel Temer, accompagné de son épouse Marcela
Tedeschi Araujo, a effectué une visite remarquée au Liban.
Michel Temer était accompagné d’une délégation de 36 personnes comprenant un groupe
de députés brésilien d’origine
libanaise : Ricardo Izar Junior,
Jorge Tadeu Mudalen, Gabriel
Chalita, Beto Mansur, Guilherme Mussi, Fabio Faria et
Newton Cardoso. Il a effectué
une visite officielle au Liban
du 18 au 22 novembre, sur
invitation du président de la
République Michel Sleiman.
Il a été également reçu par le
président du Parlement Nabih
Berry et le Premier ministre
Nagib Mikati.
Le vice-président Temer,
qui est d’origine libanaise
(voir notre édition du 17 janvier 2011), a été accueilli avec
beaucoup d’émotions à Btaaboura, région de Koura et
village natal de son père qui
avait émigré en 1924. Une
manifestation populaire l’attendait, en présence de l’ambassadeur William Habib, du
président de la municipalité
Bassam Barbar et du maire
Élias Béchara. Inaugurant la
rue Michel Temer après avoir
visité la maison de ses parents
et ses trois premiers frères nés
au Liban, il a assuré : « Une
fois de retour au Brésil, je ferai
en sorte que mon village soit le
plus célèbre. »
Élu vice-président en 2010
avec la présidente Dilma
Roussef, Michel Temer a
également présidé une cérémonie officielle, en compagnie du président Sleiman et
de l’ambassadeur du Brésil
Paulo Roberto da Fontura, à
bord de la frégate União de la
marine brésilienne, qui vient
renforcer la flotte navale de la
Finul. Il a qualifié ce moment
d’historique pour le Brésil, vu
que c’est la première fois que
des militaires brésiliens participent à une force navale pour
la paix dans le cadre des Nations unies au Moyen-Orient.
Le lendemain, Michel Temer
a assisté, aux côtés du chef de
l’État, au défilé traditionnel du
22 novembre.
Avec le Conseil des
citoyens brésiliens
Le vice-président Temer,
qui s’était déjà rendu une première fois au Liban en 1997
alors qu’il était président du
Parlement brésilien, a rencontré, en présence de son
équipe personnelle de travail
dont le chargé de presse Bernardo de Castro, les membres du Conseil des citoyens
brésiliens à Beyrouth (CCB),
présidé par le consul général
du Brésil, Renato Menezes,
les consuls Luiz Eduardo Villarinho Pedroso et Gustavo
Barbosa, et les conseillers du
CCB, Edgar Harb, Joseph
Le vice-président Michel Temer (3e à partir de la gauche) et le président Michel Sleiman recevant les
invités à bord de la frégate brésilienne.
avait commencé par l’inauguration du Centre culturel
Brésil-Liban à Beyrouth, installé dans une belle résidence
ancienne joliment restaurée
à Achrafieh, premier centre
culturel brésilien au MoyenOrient. Puis le vice-président
avait inauguré le centre commercial Prime Center et son
« Espace Brésil » à Chtaura,
propriété du groupe Zoghbi
libano-brésilien, ayant décidé
d’investir au Liban pour fortifier les relations commerciales
entre les deux pays.
Le député Ricardo Izar
à l’USEK
Dans le cadre de ce voyage,
le député Ricardo Izar Junior
s’est rendu à l’Université SaintEsprit de Kaslik pour visiter le
Centre des études et cultures
de l’Amérique latine (Cecal).
Le député fédéral Izar était accompagné du maire de la ville
de Juquiá, São Paulo, Mohsen
Hojeij, d’un groupe d’hommes
d’affaires et de l’évêque maronite au Brésil, Mgr Edgar
Madi. Il a été accueilli par le
président de l’USEK, le père
Hady Mahfouz, ainsi que par
le directeur du Cecal, Roberto
Khatlab, et par le directeur
de l’Institut d’histoire le père
Jean-Maroun
Maghamès.
Le père Mahfouz lui a offert
une médaille en signe d’amitié avec le Groupe des parlementaires brésiliens d’origine
libanaise et la communauté libanaise au Brésil, en insistant
sur le renforcement des liens
avec le Brésil à travers les réseaux académique, culturel et
économique.
Annuaire et dîner RJLiban-ULCM à Paris
Le secrétaire exécutif du CCB, Roberto Khatlab, remettant
l’écusson du Conseil des citoyens brésiliens au vice-président
Temer, en présence du consul Renato Menezes (à gauche) et de
Khaled Haymour.
Plongée au cœur de la communauté
libanaise à Paris, New York et Montréal
Parution Le nouveau livre d’une chercheuse d’origine
égyptienne, Dalia Abdelhady, montre comment, sans
renier leur identité, les émigrés libanais s’adaptent et
exercent une influence sur leurs sociétés d’accueil.
Pauline M. KARROUM
Romanos, Khaled Haymour,
Najua Bassi, Osmat Charaffedine, Ramez Labaki, ainsi
que Roberto Khatlab et Siham
Harati, membres du Conseil
des représentants des Brésiliens à l’extérieur (CRBE).
Les activités du consulat général lui ont été présentées, ainsi
que celles du groupe Alecrim
(www.alecrimbrasil.org)
en
présence de la coordinatrice
générale Katcha Osório, qui
diffuse la culture brésilienne
aux enfants. Un écusson a été
offert au nom du CCB et de
la colonie brésilienne à Michel
Temer, troisième haute autorité brésilienne à visiter le pays
du Cèdre après l’empereur du
Brésil Dom Pedro II (1876) et
le président Luiz Inácio Lula
da Silva (2003).
La visite de Michel Temer
L’annuaire en ligne des amis du Liban sur le site
www.rjliban.com vient de s’enrichir d’une nouvelle rubrique, « Association », qui permet aux
personnes inscrites de se reconnaître à travers les
associations dont elles sont membres, en plus de
leurs familles et villages d’origine, dans leur pays
de résidence et au sein de leur profession.
L’homme à l’éternel cigare.
Avec ses parents Georges et Sophie.
Avec le président George Bush.
Visite politique et culturelle du vice-président
du Brésil, Michel Temer, au Liban
Roberto KHATLAB
Il faut dire qu’Anthony
Abraham, nommé le « Tycoon de la Chevrolet », avait
plusieurs cordes à son arc :
il a été conseiller vénéré de
plusieurs chefs d’État, investisseur immobilier de grande
envergure, éditeur talentueux
et un extraordinaire connaisseur du marketing. L’art était
aussi inscrit à son agenda : il
avait contribué, avec 400 000
dollars, à l’établissement d’une
galerie au sein du musée de la
ville de Coral Gables à qui l’on
a donné son nom.
Aujourd’hui, ses cinq enfants
(George, Tom, Norma, Judy
et Marion) ne dérogent pas de
la voie qu’il poursuivait. Tom
et Norma en particulier sont
directement impliqués dans la
fondation de leur père et vivent
dans la ville où il a passé son
existence et où il a œuvré.
Une rencontre « Spécial jeunes » sera organisée
le samedi 10 décembre dans l’après-midi à Paris
pour une plus grande implication des jeunes de
18 à 30 ans dans les actions de l’association
RJLiban et de l’Union libanaise culturelle mondiale. Renseignements : Edmond Abdel Massih,
tél : +33.6.62.03.28.17
Êtes-vous intéressés par les
expériences migratoires libanaises ? Avez-vous envie de
comprendre pourquoi parle-ton d’une diaspora libanaise et
quelles sont ses spécificités ?
À moins que vous vouliez découvrir comment les migrants
libanais installés à Montréal,
New York et Paris vivent
leur attachement à leur pays
d’origine et d’accueil ? C’est à
toutes ces questions et à bien
d’autres que la chercheuse
Dalia Abdelhady répond. Son
livre intitulé L’expérience des
immigrés arabes à Montréal,
New York et Paris : la diaspora
libanaise*, édité par New York
University Press, est à dévorer
sans modération.
Égyptienne d’origine, Dalia
Abdelhady est chercheuse au
Centre d’études sur le MoyenOrient à l’Université de Lund
en Suède. Elle est également
coordinatrice académique de
l’initiative pour la croissance
durable et les femmes, organisée en collaboration avec
l’Université de Yale aux ÉtatsUnis et de l’Université Zayed
aux Émirats arabes unis. Elle
a reçu son doctorat en sociologie de l’Université d’Albany.
Ce n’est pas une histoire
facile que tente de raconter
la chercheuse dans son livre
publié tout récemment. Mais
cette étude, effectuée auprès
de 87 migrants, âgés entre 20
et 50 ans, menée durant plus
de 6 ans entre 2001 et 2007,
est à découvrir inévitablement
si on veut se renseigner davantage sur notre migration. Le
style académique et le passage
obligé par la définition des
concepts n’ôtent pas au livre
son intérêt. On y découvre la
composition de la diaspora et
ses particularités.
Historiquement,
New
York et Montréal étaient les
principales destinations des
Libanais. Mais c’est durant
la guerre de 1975 que nos
concitoyens ont été nombreux
à choisir Paris. Au sein de ces
trois villes, les Libanais sont
venus s’enraciner mais aussi
s’exclure par divers moyens.
Grâce à cette recherche, on
comprend comment un même
groupe de migrants s’est adapté à des contextes sociaux divers. Comment, au quotidien,
il négocie sa propre appartenance culturelle avec celle de
son pays de résidence.
À New York, Abdelhady
nous présente une communauté « blanche mais non
silencieuse ». Les Arabes
américains sont en effet classés comme appartenant à la
catégorie des Caucasiens. Si
les Libanais ne contestent pas
cette catégorisation, ils insistent sur le fait qu’ils n’ont pas
la mentalité des Blancs. Leur
différence culturelle avec ces
derniers est liée à leurs désaccords politiques et parfois à
leurs distinctions religieuses.
À Montréal, la politique
étatique multiculturelle et
l’identification des Libanais
en tant que membres d’une
minorité visible leur permet
de se sentir plus facilement
canadiens.
La France, pour sa part,
rejette le modèle nord-américain de multiculturalisme ; la
place est au modèle républicain. Ici, les Libanais insistent
sur la proximité culturelle qui
les lie à leur pays d’accueil et
tiennent à se distancier des
Arabes maghrébins. Pour définir leur identité, les Libanais
de Paris insistent aussi sur leur
religion. À Montréal, dans la
ville aux cents clochers, être
libanais passe selon les migrants par l’attachement aux
valeurs familiales.
Mais quelle que soit leur
perception de leur libanité,
les immigrés ont tenu dans
ces trois villes à s’engager
dans l’espace public au sein
de leur pays d’accueil. Un
engagement qui s’effectue via
des organisations et qui vise à
combattre la stigmatisation et
à modifier la perception que
les populations de ces pays
d’accueil peuvent avoir du
Moyen-Orient. Outre leurs
pays de résidence, les immigrés tiennent évidemment
à maintenir le lien avec leur
pays d’origine. Pour certains,
grâce à leurs familles ou leurs
amis. Pour la majorité, grâce à
leur implication dans ces associations dédiées au Liban.
Ces immigrés transforment
donc non seulement leurs
pays d’origine et de résidence,
mais construisent aussi des
relations globales en créant
une communauté mondiale
dépassant les frontières. Abdelhady étudie d’ailleurs avec
brio la contribution des artistes, membres de la diaspora
libanaise, à ce « transnationalisme » en montrant leur militantisme au sein de mouvements sociaux mondiaux. Que
ce soit à Paris, Montréal ou
New York, leur art les engage
dans des causes universelles et
leurs préoccupations ne sont
plus seulement liées à leurs
pays d’origine et d’accueil.
Désormais, le monde entier
s’ouvre à eux.
(*) « The Lebanese Diaspora :
The Arab Immigrant Experience
in Montreal, New York and
Paris ». Dalia Abdelhady. New
York University Press, 2011.
Cette page (parution les premier et troisième lundis de chaque mois) est réalisée en collaboration avec
l’Association RJLiban. E-mail : [email protected] – www.rjliban.com