Rôle des investisseurs institutionnels et performances des

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Rôle des investisseurs institutionnels et performances des
African Training and Research
Centre in Administration for
Development
‫اﻟﻤﺮآﺰ اﻹﻓﺮﻳﻘﻲ ﻟﻠﺘﺪرﻳﺐ‬
‫و اﻟﺒﺤﺚ اﻹداري ﻟﻺﻧﻤﺎء‬
Centre Africain de Formation et de
Recherche Administratives pour le
Développement
Rôle des Investisseurs Institutionnels et
Performances des Entreprises Tunisiennes
Par: Mohammed Ali OMRI
Tanger
Maroc - 2002
Bd. Mohammed V, Pavillon International
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Rôle des Investisseurs Institutionnels et Performances des Entreprises Tunisiennes, Par, Mohammed Ali OMRI
Table des Matières
RESUME .................................................................................................................................... 3
ABSTRACT ................................................................................................................................ 3
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 4
IMPLICATION DES INVESTISSEURS INSTITUTIONNELS .................................................. 4
INVESTISSEURS INSTITUTIONNELS ET PERFORMANCE DES ENTREPRISES ............... 6
ETUDE EMPIRIQUE RELATIVE AU POUVOIR DES ACTIONNAIRES INSTITUTIONNELS
ETPERFORMANCE DES ENTREPRISES TUNISIENNES ...................................................... 8
CONCLUSION ........................................................................................................................ 10
BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................... 12
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RESUME
La relation conflictuelle entre actionnaires et dirigeants, au cœur des développements de la théorie
d’agence, sera gérée en incitant le dirigeant à prendre les décisions conformes aux intérêts des actionnaires.
L’objectif de cet article est de déterminer l’effet des différentes structures de propriété et surtout à dominante
institutionnelle ou managériale sur la performance des entreprises tunisiennes et le comportement des dirigeants.
Nos résultats montrent une relation positive et significative entre les mécanismes internes de contrôle des
investisseurs institutionnels tel que la structure de propriété et le conseil d’administration, et la performance de
l’entreprise ainsi qu’une corrélation négative des investisseurs institutionnels avec la propriété des dirigeants.
ABSTRACT
The conflicting relationship between shareholders and managers is managed via a set of incentives to
ensure that managers pursue shareholders interests. The aim of this paper is to study the impact of alternative
ownership structures on Tunisian firm performance and managerial behavior, We particularly focus on institutional
and managerial ownership.
We find a positive impact of institutional ownership on the value of the firm explained essentially by
internal mechanism of control. We also find that highly managerial ownership have lower institutional ownership.
Cahiers Africains d’Administration Publique, No. 58, pp. …. à …..
Rôle des Investisseurs Institutionnels et Performance des Entreprises Tunisiennes
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INTRODUCTION
Le rôle des investisseurs institutionnels a été examiné par plusieurs chercheurs. Ces derniers se sont
intéressés principalement à l’étude de l’impact de ce type d’investisseurs sur la performance des entreprises
américaines.
La montée des investisseurs institutionnels a été soulignée par Berle (1959) dans une remise en perspective
du contrôle managérial. Il a évoqué quatre phases. Après une première phase de contrôle absolu de l’entreprise,
succède une phase de contrôle de fait, caractérisée par une participation minoritaire du groupe de contrôle et la
coopération des dirigeants de l’entreprise avec ce groupe. La troisième phase, celle du contrôle interne, est
caractérisée par une séparation totale entre le pouvoir et la propriété : ce sont les dirigeants de l’entreprise qui
détiennent l’essentiel des pouvoirs. Enfin, dans une quatrième phase, les entreprises passent sous le contrôle des
institutions financières, par l’intermédiaire des fonds de pension notamment.
Cette conception sera confirmée par l’étude de Chevalier (1970) qui a montré que 16% des grandes
entreprises industrielles américaines sont contrôlées par des banques et d’autres institutions financières. Pour lui, la
quatrième phase décrite par Berle (1959) est entamée et les institutions financières et les fonds de pensions
occupent une place de plus en plus importante dans les mécanismes de contrôle. Les banques commerciales
domineraient déjà une grande partie des entreprises industrielles américaines grâce à leur activité de gestion de
fonds et à l’exercice de droits de vote y afférant. Quant aux fonds de pension, ils pourraient détenir suffisamment
d’actions pour être en mesure de contrôler l’économie américaine.
Avec la globalisation, la restructuration et la mise à niveau, la Tunisie a adopté une nouvelle orientation en
matière de contrôle et gestion des entreprises. Cette orientation a été introduite dans le code des sociétés
commerciales (2000). L’importance de cette réforme découle principalement des mutations profondes que connaît
la Tunisie à divers plans technologiques, économiques, mais aussi en terme de la structure de l’actionnariat et
l’émergence des investisseurs institutionnels.
Notre objectif est d’étudier le pouvoir disciplinaire qu’exerce les investisseurs institutionnels sur les
dirigeants dans le cadre des entreprises tunisiennes. Ce choix se justifie par la montée spectaculaire des
investisseurs institutionnels comme une force de gouvernement d’entreprises (Gompers et Metrick ; 1999). Nous
allons procéder dans un premier temps à étudier l’importance des investisseurs institutionnels et leur implication
dans l’amélioration de la performance de l’entreprise. En deuxième temps, étudier l’impact des différentes
structures de propriétés et surtout à dominante institutionnelle sur la performance des entreprises. Enfin, étudier
l’impact des investisseurs institutionnels sur la performance des entreprises tunisiennes.
IMPLICATION DES INVESTISSEURS INSTITUTIONNELS
Le développement et l’évolution de l’environnement commercial de l’entreprise à un seul dirigeant
propriétaire a donné lieu à de nouvelles formes d’entreprises modernes où sont combinés un capital dispersé, un
actionnariat diffus et des dirigeants professionnels habiles.
Berle et Means (1932) ont déjà suggéré qu’il existe une divergence entre la propriété et le contrôle, avec
une propriété qui intéresse les actionnaires et un contrôle qui est convoité par l’équipe dirigeante.
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Une relation agent-principal est créée quand les actionnaires délèguent la prise de décision au dirigeant. Les
actionnaires perçoivent l’entreprise comme véhiculaire d’investissement et attendent que le dirigeant gère
efficacement et d’une manière optimale cette dernière dans le but de maximiser la valeur des actions.
Les dirigeants, de leur côté, perçoivent l’entreprise comme source d’avantages multiples, parmi lesquels
peut figurer la maximisation de leur rémunération. Donc, ces derniers peuvent prendre des décisions dans leur
propre intérêt au dépend des actionnaires, ce qui augmente inévitablement les coûts d’agence.
Les coûts d’agence peuvent devenir plus importants en cas d’actionnariat externe diffus à cause du coût
élevé de l’information et de l’hétérogénéité des intérêts des actionnaires externes. La présence des investisseurs
institutionnels peut alors avoir un effet direct sur les coûts d’agence résultant de la séparation entre propriété et
contrôle. La manière avec laquelle les investisseurs institutionnels influencent le comportement des dirigeants n’est
qu’une évidence empirique puisqu’on peut trouver le cas d’une politique passive (Porter, 1992) et le cas d’un
contrôle actif de la part de cette catégorie d’investisseurs (Bushee, 1998)
.
Deux dimensions caractérisent la propriété (Mintzberg ; 1983). Il s’agit de l’implication (par opposition au
détachement) et la concentration (par opposition à la dispersion).
L’implication fait référence à l’importance du contrôle exercé par les actionnaires sur les dirigeants. Un
actionnaire impliqué est un actionnaire soucieux d’exercer une influence sur les dirigeants, notamment en exerçant
ses droits de vote ou en siégeant au conseil d’administration. Un actionnaire détaché est un actionnaire passif,
éloigné des décisions de l’entreprise.
La concentration désigne la plus ou moins importante diffusion du capital parmi les actionnaires. Pour
Mintzberg (1983), la concentration peut se substituer à l’implication, dans la mesure où un actionnaire important
peut créer un lien étroit avec les dirigeants en dehors de l’exercice effectif des droits de vote ou de la présence au
conseil. Dès lors, plus l’actionnariat est concentré et les actionnaires impliqués, plus leur pouvoir sur une entreprise
est important.
La diffusion du capital ne doit pas systématiquement être interprétée comme une baisse de l’influence des
actionnaires (Chaganti et Damanpour ; 1991). Il s’agit des entreprises au capital largement diffus parmi des
individus et des investisseurs institutionnels. Les investisseurs institutionnels se contentent souvent, aux EtatsUnis, d’une fraction n’excédant pas 3 à 5% du capital.
La propriété d’une fraction des actions d’une entreprise met ces actionnaires en « position stratégique » en
vue d’influencer les décisions soit indirectement par la menace de pression, soit directement, en votant lors des
assemblées générales ou en siégeant au conseil d’administration de l’entreprise.
Jensen (1993) militait désormais pour « la résurrection d’actionnaires actifs » afin de pallier l’insuffisance
de la discipline exercée par les marchés. Pour lui, ces actionnaires actifs ne sont autres que les investisseurs
institutionnels.
L’exercice du droit de vote constitue pour les actionnaires, le moyen le plus direct de contrôler l’action des
dirigeants. L’implication des institutionnels se traduirait par leur propension à voter en assemblée générale
(Brickley, Lease et Smith, 1988).
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Contrairement à l’idée couramment répandue que les investisseurs institutionnels ne votent qu’à Wall
Street, leur étude démontre qu’ils exercent leurs droits de vote beaucoup plus fréquemment que les actionnaires
individuels et qu’ils n’hésitent pas à s’opposer à certaines décisions des dirigeants afin de défendre leurs intérêts.
La performance des entreprises est de plus en plus liée à la présence des investisseurs institutionnels. En
cas d’insatisfaction, il leur est difficile de se débarrasser de titres sans que cela n’affecte le prix des actions et ne
les pénalise. Les investisseurs institutionnels s’intéresseraient alors à l’exercice direct de leur pouvoir de contrôle
des entreprises.
La motivation pour le contrôle des dirigeants de la part des investisseurs institutionnels résulte du fait que,
ayant des proportions de capital de plus en plus importantes, l’option de sortie devient plus coûteuse à cause des
pertes considérables suite à la vente de bloc d’actions.
De plus, la grande valeur monétaire de la propriété des investisseurs institutionnels rend ceux-ci plus
vulnérables aux pertes que les petits investisseurs au cas où ils resteraient passifs ou moins informés. D’ailleurs,
Pound (1988) indique qu’il est moins coûteux pour les investisseurs institutionnels de se procurer l’information
que de vendre leurs actions. L’action collective des investisseurs institutionnels devient moins coûteuse lorsque la
propriété est concentrée entre les mains d’un nombre réduit d’investisseurs.
Les institutionnels qui investissent dans une entreprise avec l’intention de maintenir les actions sur un
horizon assez long ont intérêt à contrôler ces entreprises. Ceux-ci comparés aux investisseurs individuels,
disposent d’économies d’échelle dans l’obtention de l’information ainsi que son analyse pour entreprendre des
actions de contrôle.
INVESTISSEURS INSTITUTIONNELS ET PERFORMANCE DES ENTREPRISES
L’importance du contrôle exercé par les investisseurs institutionnels ainsi que son impact sur la
performance de l’entreprise ont été étudiés par plus qu’un chercheur. Cet impact est, cependant, de nature ambiguë
(Dahia, Lonie et Power, 1998 ; Denis, Denis et Sarin, 1997).
Mikkelson et Rubach (1985) ont trouvé des rendements positifs anormaux associés à l’annonce
d’acquisition d’une part égale ou supérieure à 5% des actions d’une entreprise donnée par une autre entreprise.
McConnel et Servaes (1990) ont trouvé de leur côté une relation positive entre actionnariat des investisseurs
institutionnels et la performance de l’entreprise mesurée par le Q de Tobin. Cependant, ils reconnaissent que cela
pourrait être du, simplement, au fait que les investisseurs institutionnels achètent les actions des entreprises qui ont
réalisé de bonnes performances.
Cependant, Pound (1988), Barclay et Holderness (1991) ; Loderer et Martin (1993) prétendent que
l’intensité de cette relation dépend du comportement de ces investisseurs, et que ces derniers n’ont d’effets sur la
performance de l’entreprise que lorsqu’ils sont impliqués de façon active dans le gouvernement d’entreprise.
Wruck (1989) a étudié un échantillon de 128 entreprises qui ont procédé à de nouvelles émissions d’actions
qui ont été acquises en partie par des investisseurs institutionnels. Il a trouvé que la réaction des cours boursiers
associées aux nouvelles émissions faites par les entreprises dépend de l’effet de cette émission sur la concentration
de la propriété dans l’entreprise. En effet, quand la nouvelle émission augmente le niveau de concentration de la
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propriété au-delà de 25%, il y a une réaction positive des cours à cette annonce. Inversement, lorsque la
concentration de la propriété augmente au taux compris entre 5% et 25%, il a été constaté une réaction négative au
niveau des cours boursiers. Un changement de la concentration inférieur au taux de 5% avait été associé à une
variation non significative des cours boursiers. Ainsi, la détention d’une part supérieure à 25% des actions de
l’entreprise est considérée comme étant une bonne nouvelle par le marché boursier, vraisemblablement du fait que
ces investisseurs vont contrôler les activités de gestion et ce afin de garantir que les dirigeants ne se dérobent pas
de leurs responsabilités.
Del Guercio et Hawkins (1999) constatent que les propositions des actionnaires sont généralement suivies
par des activités de contrôle, comme le changement du conseil d’administration, la vente des actions et la
restructuration de l’entreprise. Ces auteurs concluent que les activités de contrôle entreprises par les investisseurs
institutionnels conduisent généralement à la maximisation de la valeur de marché de l’entreprise dans laquelle ils
sont actionnaires.
De même, Hudson, Parrino et Starks (1998) ont trouvé que les investisseurs institutionnels constituent un
des paliers essentiels dans la discipline des hauts dirigeants. D’autres évidences empiriques sont en accord avec
l’importance du contrôle joué par les investisseurs institutionnels. Cependant, il est à remarquer que Denis, Denis
et Sarin (1997) ont trouvé que la rotation des hauts dirigeants n’est pas liée à l’actionnariat des investisseurs
institutionnels. Neumann et Voetmann (1998) qui ont étudié ce lien sur le marché boursier de Copenhague ont
trouvé que l’accroissement de la propriété des investisseurs institutionnels est de nature à protéger les hauts
dirigeants des activités de contrôle. La contribution des investisseurs institutionnels dans la définition et
l’établissement des politiques et stratégies des entreprises dans lesquelles ils détiennent des parts d’actions non
négligeables semble inexistante dans le processus de limogeage des dirigeants. La présence d’investisseurs
institutionnels semble limiter l’effet des mécanismes de contrôle plutôt que de les renforcer.
Ce lien entre nature des actionnaires et rotation des dirigeants est, également, valable pour des marchés non
américains. Tel est le cas de l’étude menée par Kang et Shivdasani (1995) concernant les mécanismes de
gouvernement d’entreprise au Japon. En effet, les entreprises japonaises ont mis en place, depuis longtemps, un
système de financement dont les traits essentiels se résument en un fort endettement auprès des banques et un
faible recours aux émissions de valeurs mobilières. Les banques principales jouent un rôle essentiel dans la
discipline et la rénovation des dirigeants s’ils échouent à atteindre les objectifs qui leurs ont été confiés ou sont
associés à une performance médiocre.
En définitive, l’effet des investisseurs institutionnels, simples gestionnaires de fonds, sur la performance
n’est pas neutre. Il leur est attribué, souvent la responsabilité d’un brusque mouvement boursier, d’une
restructuration importante mais également l’éviction des dirigeants. Ainsi, les investisseurs institutionnels ont à
jouer un important rôle dans le gouvernement d’entreprise. Un constat de plus en plus souligné par les codes des
sociétés de plus d’un pays. A titre d’exemple, pour le cas anglais, le code Cadbury (1992) réclame que les
investisseurs institutionnels usent de leur influence comme propriétaire pour garantir que les entreprises dans
lesquelles ils ont investi se conforment aux exigences du code. Le code Bosh (1993) pour le cas australien où l’on
trouve que les investisseurs institutionnels, du fait de leur pouvoir croissant, devraient occuper une place
prépondérante dans le gouvernement d’entreprise et développer leurs propres principes de bonne conduite.
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ETUDE EMPIRIQUE RELATIVE AU POUVOIR DES ACTIONNAIRES INSTITUTIONNELS ET
PERFORMANCE DES ENTREPRISES TUNISIENNES
L’objectif de cette recherche est d’étudier l’effet de la présence des investisseurs institutionnels sur la
performance des entreprises tunisiennes.
Pour se faire, nous avons choisi comme indicateur de mesure de la performance, le ratio de Marris qui
combine les mesures comptables et les mesures boursières. En effet, l’utilisation des mesures boursières comme
indicateurs de performance est fort controversée (Igalens & Pillard, 1996 ; Charreaux, 1998). De même, les
indicateurs comptables communiquent très peu d’informations et reflètent une performance périodique sans aucune
considération de la performance future qui pourra être affectée par des décisions managériales présentes ou passées
(Chakravarthy, 1986).
RMRSi,t : Ratio de Marris. Il permet de comparer la valeur boursière à la valeur comptable des actions. Il
est mesuré par le rapport : Valeur du marché des actions / Valeur comptable des actions.
De même, nous avons retenu, comme variables explicatives, trois variables relatives à la structure de
propriété et deux variables de contrôle.
KINSi,t : Pourcentage du capital détenu par les investisseurs institutionnels, mesuré par le rapport suivant :
Nombre d’actions détenues par les investisseurs institutionnels/ Nombre total des actions. Les investisseurs
institutionnels retenus sont les banques, les sociétés d’investissement, les compagnies d’assurances et les caisses de
sécurités sociales. Cette variable reflète l’importance du contrôle exercé sur le dirigeant. Les investisseurs
institutionnels qui détiennent une participation importante sont impliqués dans le contrôle et la gestion de
l’entreprise et cherchent à améliorer sa performance.
KDIRi,t : Pourcentage du capital détenu par les dirigeants, mesuré par le rapport suivant : Nombre d’actions
détenues par les dirigeants/ Nombre total des actions. Cette variable mesure l’importance de la propriété
managériale et son influence sur l’amélioration de la performance. Une augmentation de la propriété managériale
aura pour effet de réduire les conflits d’intérêt entre actionnaires et dirigeants.
PMAJi,t : Présence des majoritaires. Cette variable prend la valeur 1 s’il existe un actionnaire qui détient un
pourcentage supérieur à 20% du capital ; 0 dans le cas contraire. (Laporta, Lopez-de-Silanes et Shleifer, 1999). Ce
ratio mesure l’importance du contrôle auquel fait face le dirigeant. L’actionnaire majoritaire a des motivations
directes et un pouvoir pour contrôler activement le dirigeant.
PRCAi,t : Présence des investisseurs institutionnels au conseil d’administration de l’entreprise. Cette
variable prend la valeur 1 s’il existe un ou plusieurs investisseurs institutionnels qui sont membres du conseil
d’administration ; 0 dans le cas contraire. Cette variable mesure l’importance du contrôle et de gestion. Les
investisseurs institutionnels sont plus impliqués par leur participation aux travaux du conseil d’administration.
TAILi,t : Taille de l’entreprise mesurée par le logarithme du chiffre d’affaires. Le chiffre d’affaires pourrait
refléter la taille de l’entreprise. A mesure que la taille de l’entreprise augmente, la dilution du capital est
importante, le pouvoir du dirigeant sera élevé et la performance diminue.
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Pour mesurer l’influence de ces différentes variables explicatives sur la performance mesurée par le ratio de
Marris, nous avons utilisé des techniques économétriques d’estimation sur données de panel incomplet. Les indices
i,t représentent respectivement l’entreprise et la période considérée. Les données ont été collectées à partir des états
financiers publiés par les entreprises et les informations boursières fournies par le Conseil du Marché financier sur
une période de 5 ans de 1996 à 2000 et portent sur 42 entreprises tunisiennes cotées en Bourse.
Le modèle à estimer se présente comme suit :
RMRSi,t = B0 + B1* KINSi,t + B2* KDIRi,t + B3* PRCAi,t + B4* PMAJi,t + B5* TAILi,t + µi + vi,t
Où µi représente un effet spécifique à l’entreprise supposé être fixe ou aléatoire, vi,t est un terme résiduel standard
et B0 B1, B2, B3, B4 et B5 constituent les paramètres inconnus du modèle.
Les résultats de l’estimation à partir des données de panel incomplet indiquent que la prise en compte de la
spécificité individuelle des entreprises sous forme d’un effet aléatoire donnent de meilleurs résultats sur le plan de
significativité statistique en comparaison à un modèle à effet individuel fixe.
Modèle à effet individuel aléatoire
Variables
B
Signification
Constante
KINS
KDIR
PRCA
PMAJ
TAIL
Wald Chi 2
Signification K2
3.053
0,398
- 0,785
0,958
0,964
0,010
107,28
0,000
0,520
0,021
0,097
0,018
0,057
0,549
Les principaux résultats obtenus de l’estimation peuvent être interprétés comme suit :
•
•
Les variables KINS, KDIR, PRCA et PMAJ ont un impact statistiquement significatif sur la performance
des entreprises ;
La présence des investisseurs institutionnels a un effet positif sur la performance des entreprises
tunisiennes. En Tunisie, les investisseurs institutionnels sont impliqués dans le contrôle et la gestion des
entreprises. Les mutations touchant essentiellement le secteur d’assurance et le secteur bancaire, affectent
probablement le degré d’intérêt que porte les institutionnels auprès des entreprises dont ils sont
actionnaires. D’ailleurs, les pouvoirs publics en Tunisie poussent ces institutions, qui sont en majorité des
entreprises publiques, à participer au capital de certaines entreprises et à faciliter leur financement, soit par
l’achat de billets de trésoreries émis par ces entreprises dont ils sont actionnaires, soit par la facilité d’octroi
de crédit. De même, la majorité des entreprises de l’échantillon ont des crédits à court terme et des
concours bancaires importants. Les investisseurs institutionnels peuvent influencer les modes
d’organisation en faisant bénéficier les entreprises de leurs compétences dans les domaines variés. Ceci
pourrait améliorer la performance.
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•
•
•
•
La participation des dirigeants au capital de l’entreprise a un effet négatif sur la performance des
entreprises tunisiennes. Ce résultat confirme différentes études empiriques dans différents contextes
(Shleifer et Vishny, 1989 ; Morck, Shleifer et Vishny, 1990 ; Paquerot, 1997). En Tunisie, quand la
propriété des dirigeants augmente, l’effet d’enracinement peut s’établir et conduire vers un niveau plus
élevé d’opportunisme managérial et par conséquent un niveau faible de performance. En effet, les
dirigeants ayant des parts importantes dans la propriété peuvent privilégier leurs intérêts personnels et font
passer la maximisation de la valeur de l’entreprise au second plan.
La présence des investisseurs institutionnels au conseil d’administration a une relation statistiquement
significative avec la performance de l’entreprise. Ils auront tendance à siéger au conseil d’administration
pour exercer un contrôle actif des activités du dirigeant. Ils sont membres du conseil d’administration des
sociétés dont ils sont actionnaires et ce même lorsque leur participation est peu importante. En effet, la
présence de ces investisseurs au conseil d’administration leur donne un pouvoir de vote dans les
importantes décisions relatives aux recrutements, rémunérations et révocations des dirigeants ainsi que la
politique des dividendes. Aussi, ils peuvent disposer des informations internes de l’entreprise et demander
des explications concernant les opérations de l’entreprise.
La présence d’un actionnaire majoritaire augmente la performance de l’entreprise. En Tunisie, les
dirigeants améliorent la performance avec la présence d’un actionnaire majoritaire impliqué et actif. Les
actionnaires majoritaires peuvent réduire les problèmes de free riding en s’engageant à effectuer un
contrôle actif. Les actionnaires majoritaires sont les plus concernés par l’amélioration de la performance.
De ce fait, leurs activités sont en faveur de la surveillance et le contrôle des dirigeants pour limiter et même
éliminer le gaspillage. Les actionnaires majoritaires ont un rôle majeur dans l’amélioration de l’efficacité
du management, la restructuration de l’entreprise et un moyen pour se défendre contre des prises de
contrôle. Les actionnaire qui détiennent une part significative d’actions ont la motivation et la capacité de
surveiller les dirigeants et si c’est nécessaire, utiliser leur droit de vote pour révoquer les dirigeants inaptes
à créer de la richesse aux actionnaires. En Tunisie, le contrôle direct par les principaux actionnaires semble
être le moyen le plus efficace pour discipliner le dirigeant.
Enfin, la performance n’est pas influencée par la taille de l’entreprise.
CONCLUSION
L’objectif de cette recherche est d’étudier le pouvoir exercé par les investisseurs institutionnels sur les
dirigeants et son impact sur la performance des entreprises tunisiennes. Pour se faire, nous avons analysé, en
premier lieu, l’implication des investisseurs institutionnels dans les activités de contrôle et de surveillance. Ces
institutionnels sont des actionnaires actifs qui participent à la bonne marche de l’entreprise et peuvent influencer la
gestion et le contrôle de celle-ci. Ils jouent un rôle important dans le contrôle et la rotation des dirigeants. En
second lieu, nous avons analysé la relation entre la présence des investisseurs institutionnels et la performance des
entreprises. Cette relation n’a pas été clairement identifiée. Ces investisseurs peuvent, soit acheter des actions
d’entreprises performantes, soit influencer positivement la gestion de ces entreprises dans le cas où ils sont
impliqués et actifs.
Enfin, à la lumière des éléments de base théorique, nous avons mené des tests de validation empirique
relatives à l’étude de l’effet de la présence des investisseurs institutionnels sur la performance des entreprises
tunisiennes. La performance est expliquée par des mécanismes internes de contrôle tel que la structure de propriété
et le conseil d’administration. Seule la variable taille n’a pas d’effet significatif sur la performance de l’entreprise.
En Tunisie, la relation entre l’actionnariat des investisseurs institutionnels et la performance des entreprises
est significative et positive. En effet, les pouvoirs publics les incitent à participer dans les différents projets de
développement économique ou régional. Ils siègent généralement au conseil d’administration de ces sociétés et
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cherchent ainsi à contrôler la gestion de l’entreprise. Cet actionnariat pourrait réduire l’enracinement des dirigeants
qui devraient chercher à maximiser la valeur de l’entreprise devant la présence d’actionnaire majoritaire qui est
impliqué de façon active dans la gestion de l’entreprise.
Notre recherche aurait gagné en portée exploratoire en étudiant l’effet de la nature des investisseurs
institutionnels et le degré de concentration de leur propriété sur la performance de l’entreprise.
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BIBLIOGRAPHIE
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