14 | Dossier : coordination SPS - s aig prevention conseils securite
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14 | Dossier : coordination SPS | Prévention btp – Numéro 175 – Mai 2014 | 15 | Sommaire 14 La mission du coordonnateur SPS dès la phase de conception 18 Jean-François Bertin, responsable de domaine CSPS à l’OPPBTP 19 Reportage : la CSPS au cœur du projet du Laser mégajoule La fonction de coordonnateur SPS a 18 ans. La profession a mis de nombreuses années à être reconnue et à s’imposer. Le mouvement est en marche mais l’implication de la maîtrise d’ouvrage fait partie des écueils qui subsistent : comment relever le défi de l’association ? DOSSIER RÉALISÉ PAR GÉRARD GUÉRIT Coordination SPS renforcer le lien avec la maîtrise d’ouvrage © Xavier PIerre A ujourd’hui encore, le coordonnateur en matière de sécurité et de protection de la santé (CSPS) est trop souvent perçu comme un mal nécessaire ». Cette remarque, régulièrement entendue par les intéressés, démontre à quel point un important travail reste à réaliser. Si dans les faits, le CSPS doit former un tandem avec le maître d’œuvre sous la direction du maître d’ouvrage, dans la réalité, il reste encore sur la touche. Antonio Pereira, directeur du département CSPS et diagnostics chez BTP Consultants, se veut néanmoins optimiste : « Il faut encore expliquer et sensibiliser, mais ces dernières années, la situation des coordonnateurs SPS évolue plutôt positivement », explique-t-il. Une collaboration dès le début de la phase conception avec les différents acteurs reste la base d’une coordination SPS réussie. Convaincre les intervenants Selon lui, le lien avec la maîtrise d’ouvrage est fondamental, tant au niveau des conditions de travail que du respect du planning et de la rentabilité de l’opération. Pour Daniel Marietis, directeur de la région Centre-Est chez BECS au Bourget-du-Lac (Savoie), spécialiste des missions SPS en travaux de montagne, cette coopération ne peut exister que si le coordonnateur fait un travail de pédagogie suffisant, explique les fondements de sa mission et démontre au maître d’ouvrage la plus-value qu’il amène dans la gestion globale de la coactivité. « Si ce lien n’a pas lieu, précise-t-il, et que de surcroît on nous sollicite lorsque les entreprises sont déjà choisies, nous en sommes >>> Mai 2014 – Numéro 175 – Prévention btp 16 | Dossier : coordinationn SPS | L’essentiel a collaboration entre maître d’œuvre, dLmaître d’ouvrage et coordonnateur SPS doit se nouer dès le début de la phase conception. très en amont du CSPS, dLen’implication plus d’être un gage de sécurité, fait gagner du temps, de la méthode et de la productivité. a mission de CSPS ne doit pas être dLbradée et les tâches sont à définir précisément. réduits à jouer les pompiers : c’est la pire des situations. » Un gage d’efficacité et de rentabilité Lorsque le coordonnateur a les moyens d’effectuer sa mission en phase de conception, l’entreprise dispose d’éléments clés pour répondre à l’appel d’offres. Cette organisation permet d’arriver sur un site balisé, avec des procédures et des enclenchements de tâches déjà validés. Un gain de temps pour l’entreprise et donc une meilleure rentabilité. « La sécurité doit être un objectif latent », remarque Jean-François Pruvost, chef du service CSPS Picardie du Bureau Veritas et formateur de coordonnateurs. Il faut d’abord amener les entrepreneurs vers des questions évocatrices comme l’organisation, les méthodes de travail et la productivité. Le sujet de la coactivité peut ensuite être abordé avec intérêt. « Le CSPS permet de structurer la sécurité de manière globale et cohérente. Sans sa présence, l’entreprise se contenterait trop souvent d’une prévention au jour le jour, sans suffisamment de recul et de vision d’ensemble », explique Alain Ollivier, inspecteur du travail à Rennes. La gestion de la coactivité est ici prépondérante. Un souci que partage Géraldine Gourville, assistante à la maîtrise d’ouvrage à Aéroports de Paris (ADP) : « Nous devons gérer des coactivités inhérentes aux chantiers en milieu aéroportuaire (travaux dans des aérogares en service, sur les zones de circulation avions ou à proximité…). La liaison entre ADP et le CSPS désigné est permanente, aidée en cela par le fait Réglementation © Xavier PIerre >>> – La loi du 6 décembre 1976 demande au maître d’œuvre d’établir une notice d’hygiène et de sécurité. – La loi du 31 décembre 1993 apporte une approche globale et systémique de la prévention. – L’arrêté du 26 décembre 2012 redéfinit la formation des CSPS et celle des formateurs de CSPS. Prévention btp – Numéro 175 – Mai 2014 a Amener les entrepreneurs vers des questions comme l’organisation, les méthodes de travail et la productivité est l’une de missions du coordonnateur SPS . que nous sommes à la fois maître d’ouvrage, maître d’œuvre et exploitant ». Communiquer, l’atout sécurité « Progressivement, constate Alain Ollivier, sur des petits chantiers isolés, grâce au travail À SAVOIR Une formation pour des missions spécifiques Le domaine de la construction de maisons individuelles en secteur diffus, longtemps parent pauvre de la coordination SPS, nécessite une approche différente. Pour cela, l’Union des maisons françaises (UMF) a mis en place, avec l’aide du Centre de recherches d’études de diagnostics et de formation (Credef) et de l’OPPBTP, un contenu de formation sur cinq jours. L’objectif est de permettre aux conducteurs de travaux, d’opérations et d’affaires, d’assurer la mission de coordination, mais aussi la rédaction du plan général simplifié de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé (PGS CSPS) sur ce type de chantiers. « Parallèlement, l’UMF s’est impliquée dans la mise en place d’une licence professionnelle de conducteur de travaux maisons individuelles, avec des résultats probants sur le terrain », précise Claudy Chenelat, référent national CSPS de l’UMF. Formation Depuis le 1er janvier 2013, la formation SPS est ouverte aux jeunes titulaires d’un diplôme de niveau au moins égal à une licence en architecture ou à ceux issus du secteur du BTP ou encore de la prévention des risques professionnels. | 17 Prix de vente horaire HT pratiqué par les CSPS La FAP entend promouvoir et faire progresser la prévention La Fédération des acteurs de la prévention (FAP) est née, le 12 décembre 2012, de la rencontre d’acteurs de la construction animés par la volonté de promouvoir et de faire progresser la prévention. Elle regroupe des maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre, institutionnels, CSPS, préventeurs, fabricants… Ses objectifs sont simples : mettre en œuvre les moyens nécessaires pour installer une culture prévention. L’association souhaite également engager un processus de reconnaissance universelle de la spécialité de « préventeur », soutenir les droits et intérêts matériels et moraux des personnes physiques et morales, salariées ou employeurs, qui exercent la spécialité de préventeur en matière de risque au travail. Elle vise aussi à assurer une veille réglementaire et technique et à agir auprès des juridictions compétentes, afin d’exercer toute action nécessaire à l’application et à l’évolution des directives et textes légaux ou réglementaires liés au développement de la prévention des risques professionnels. de fond engagé avec les coordonnateurs SPS et les préventeurs, la protection des trémies se banalise. Nous arrivons à ce que les accès empierrés, les remblaiements de fouilles, le maintien des protections après le gros œuvre deviennent des habitudes ». L’entreprise Quille, basée à Rouen, mise sur une communication permanente entre l’entreprise, la maîtrise d’ouvrage, la maîtrise d’œuvre et le CSPS. Ce partenariat est devenu un standard. Mis en œuvre en phase de conception, il permet de faire évoluer la réalisation des bâtiments, des équipements et du dossier d’interventions ultérieures sur ouvrage (DIUO). « Sur les grosses opérations d’héliportage, nous arrivons à convaincre maintenant certains maîtres d’ouvrage de l’intérêt d’un lot spécifique “héliportage”, explique Daniel Marietis. Cela aide à planifier l’organisation de colisages, à réduire les coactivités, à proposer au pilote un interlocuteur unique équipé d’un matériel radioprofessionnel intégré, et à diminuer le stress de tous les intervenants ». Le sentiment de non-responsabilité de la maîtrise d’ouvrage est souvent évoqué par >>> 29 % 24 % 16 % 12 % 8% 5% 1% 2% De 90 à 100 € 100 € et plus 2% Moins de 30 € De 30 à 40 € De 40 à 50 € De 50 à 60 € De 60 à 70 € De 70 à 80 € De 80 à 90 € 39% des répondants présentent un taux horaire à moins de 50 euros (prix médian). Les minima sont déclarés dans les bureaux de contrôle, les sociétés unipersonnelles et les SARL, les maxima dans les cabinets d'architecte et les bureaux d'études. Source : bilan de la mission CSPS/INRS/2009 Appréciation de la dépendance au maître d’ouvrage 79 % C'est une bonne chose C'est un pis-aller Il vaudrait mieux que le coordonnateur dépende du maître d'œuvre 17 % 6% Une majorité est en accord avec la dépendance de la fonction au maître d'ouvrage. Source : bilan de la mission CSPS/INRS/2009 Critère de choix le plus couramment utilisé par les maîtres d’ouvrage 89 % Prix Référence 26 % Méthodologie 24 % Autres critères 9% Le prix est le critère de choix plus couramment utilisé par les maîtres d'ouvrages. Source : bilan de la mission CSPS/INRS/2009 © Graphes Placide EN CLAIR Accès, formation et recyclage Depuis le 1er janvier 2013, les conditions d’accès à la profession de CSPS ont évolué. Le nouveau dispositif s’ouvre aux titulaires de licences HSE-génie civil-bâtiment, pour les formations de CSPS de niveau 3. L’arrêté du 26 décembre 2012 rend le recyclage des formateurs de CSPS obligatoire, la durée des formations initiales augmente pour chaque niveau. Un niveau de maîtrise des connaissances générales en prévention et BTP est obligatoire avant toute formation. Les organismes de formation sont audités et certifiés par un organisme indépendant. Mai 2014 – Numéro 175 – Prévention btp 18 | Dossier : coordination SPS | DR AVIS D’EXPERT JEAN-FRANÇOIS BERTIN, RESPONSABLE DE DOMAINE CSPS À L’OPPBTP Quels sont les points à améliorer pour que les coordonnateurs SPS trouvent leur place au sein de tous les chantiers ? Il est d’abord important d’arrêter de tirer les missions SPS vers le bas. En 2014, une mission bien vendue doit se situer entre 70 et 80 euros de l’heure, certaines se traitent entre 15 et 20 euros. Pour des maîtres d’ouvrage, la coordination SPS reste une mission subie. Le CSPS n’est pas leur priorité, qui se situe d’abord dans le respect de l’enveloppe de départ et de la tenue des délais. Les questions de coactivité sont secondaires. Avec de tels cas de figure, il paraît illusoire de vouloir s’échapper de ce cercle vicieux. Il importe également de faire la chasse aux désignations tardives. Une CSPS sérieuse et Il faut arrêter de tirer les missions SPS vers le bas. >>> les coordonnateurs SPS, même si des jugements récents démontrent une certaine évolution. Pour Alain Ollivier, « en cas d’accident grave, la recherche de responsabilité peut effectivement dépasser l’entreprise, et impacter la maîtrise d’œuvre. Néanmoins, l’absence courante de sanction pénale en dehors de l’entreprise, peut expliquer en partie une sensibilisation encore insuffisante à la prévention sur de nombreux chantiers ». De l’avis de nombreux acteurs, trop de missions sont encore vendues au rabais. De plus, le développement de la sous-traitance n’aide pas au maintien d’un niveau suffisant de prévention et de sécurité. La maîtrise d’œuvre semble en revanche moins impactée par d’éventuels manquements. « En l’absence de CSPS, le rapport direct avec l’entreprise m’impose de sensibiliser les compagnons qui prennent des initiatives dangereuses, avec néanmoins une limite forte, celle d’être présent sur le chantier de façon régulière, mais en aucun cas permanente. S’il y a en a un, je vérifie que chaque entreprise inter- Agrément Qu’attendez-vous des évolutions de la réglementation ? Elles devraient permettre d’aller de l’avant. Déjà, l’arrêté du 26 décembre 2012 redéfinit les conditions de formation et les contrôles vis-à-vis des organismes de formation. Ils pourront ainsi développer les savoirs, les savoir-faire et surtout les savoir-être des futurs CSPS. Ensuite, nous attendons depuis deux ans une évolution importante de la réglementation, qui imposera dans les textes une coopération plus forte et tracée entre le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre et le CSPS, ce qui ne se vérifie pas toujours aujourd’hui. venante, qu’elle soit titulaire d’un marché ou sous-traitante, a bien réalisé son PPSPS, tout en évitant que ce document ne soit qu’un copier-coller du chantier précédent », témoigne Sylvain Pardo, architecte à Paris et particulièrement présent sur des opérations de rénovation. De nouvelles attentes La profession attend donc beaucoup de l’évolution de la réglementation. La nomination concomitante de la maîtrise d’œuvre et du CSPS permettrait une réelle coordination en phase de conception, mais aussi une organisation établie dès le dépôt du dossier de consultation des entreprises (DCE). Enfin, Alain Ollivier, souhaiterait également que le positionnement des CSPS qui exercent dans des sociétés devant assurer leur rentabilité soit revu. Cela impliquerait des compromis. « Une plus grande indépendance aiderait à faire avancer la coordination SPS, du moins pour les niveaux 1 et 2 », conclut l’inspecteur du travail. n Le décret du 10 janvier 2011 modifie les procédures d’agrément des organismes de formation des CSPS, en les remplaçant par un dispositif de certification. Pour exercer la fonction de formateur de coordonnateur, la personne doit justifier d’un niveau de compétences et d’un stage de formation de formateurs auprès de l’OPPBTP et de l’INRS. Prévention btp – Numéro 175 – Mai 2014 efficace se met en place en phase de conception, pas au démarrage des travaux. Enfin, les missions devraient souvent être requalifiées avec plus de précision. Outil d’évaluation La Carsat Rhône-Alpes a mis en ligne un outil pour aider à analyser et à évaluer la qualité des prestations proposées par les CSPS. Le but est simple : étudier le contenu des prestations proposées afin de vérifier la qualité et la cohérence des offres. | 19 REPORTAGE Un contrat CSPS rigoureux pour un site imposant ● Bordeaux (33) Sur le site classé « défense » du Laser mégajoule, la coordination SPS a permis de répondre aux exigences d’un chantier marqué par une forte coactivité. Des contraintes particulières L’installation doit impérativement répondre à des exigences de propreté, de stabilité et d’étanchéité aux vibrations. La maîtrise d’œuvre a mis en place une cellule de planification détaillée, avec examen de toutes les coactivités possibles. Le chantier est divisé en cent cinquante secteurs, chacun étant affecté, selon la période, d’un statut spécifique : travaux, essais et utilisation. Pour le statut « travaux », une réunion de lancement est considérée comme suffisante pour autoriser le démarrage de l’activité. Pour celui des « essais », il est imposé à l’entreprise intervenante de réaliser une demande de travaux décrivant la nature des essais et la configuration des DR Au sud de Bordeaux, le Laser mégajoule (LMJ), élément-clé du programme de simulation des armements nucléaires français, abritera l’un des deux lasers les plus puissants du monde. La construction de ce bâtiment, long de trois cents mètres, démarrée en 2003, devrait s’achever cette année. Six cents personnes travaillent sur le site, la coordination SPS aura été au cœur de ce projet nécessitant donc une forte coactivité entre les équipes de « culture BTP » et celles travaillant dans des domaines tels que la mécanique de précision, l’optique et l’informatique industrielle. Le contrat CSPS est étendu au-delà des obligations réglementaires du maître d’ouvrage, par des missions à caractère plus techniques telles que les analyses préliminaires de risque, pour les activités considérées comme porteuses d’un risque particulier. L’équipe sous la responsabilité du CSPS est constituée de six personnes affectées à temps plein. Des mesures de contrôles quotidiennes sont complétées par des réunions hebdomadaires et des suivis de visites techniques et de sécurité. Un reporting très détaillé est adressé au maître d’ouvrage, au CISSCT, au chef de projet, qui représente la maîtrise d’œuvre, et au directeur du centre CEA, qui assure un contrôle de deuxième niveau. Sur le chantier du Laser mégajoule, qui doit répondre à des exigences de propreté, de stabilité et d’étanchéité aux vibrations, une équipe de six personnes, placées sous la responsabilité du CSPS, a été affectée à temps plein. équipements. Pour le statut « utilisation », l’entreprise doit faire préalablement une demande d’accès, en précisant les modifications de configuration prévues. « Nous étions dans un mode de fonctionnement plus proche de celui d’une industrie de pointe, que d’un chantier classique de génie civil », conclut Jean-Louis Gaussen, représentant de la maîtrise d’ouvrage pour le chantier. n Les niveaux de compétence La fonction de coordonnateur SPS comporte trois niveaux de compétence : – niveau 1 : aptitude à coordonner toutes opérations ; – niveau 2 : aptitude à coordonner les opérations des 2e et 3e catégories ; – niveau 3 : aptitude à coordonner les opérations de 3e catégorie. Pour ce qui concerne les opérations des 1re et 2e catégories, l’aptitude à coordonner est distincte pour la phase de conception, d’étude et d’élaboration du projet et pour la phase de réalisation de l’ouvrage. Mai 2014 – Numéro 175 – Prévention btp