CHAPITRE I : L`identité organique de la fonction publique

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CHAPITRE I : L`identité organique de la fonction publique
UNIVERSITÉ
TOULOUSE 1 CAPITOLE
ANNÉE UNIVERSITAIRE
2012-2013
MASTER 1
DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE
(Cours de M. Coulibaly, professeur)
CHAPITRE I :
L’identité organique de la fonction publique
Année 2012 – 2013
www.lex-publica.com
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Partie I
STATIQUE DE LA FONCTION
PUBLIQUE
Chapitre I
L’identité organique de la fonction publique
Version :
mardi 19
février
2013
10:57
Nota bene :
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Il s’agira de mettre au jour les critères de l’appartenance à la fonction publique.
Les mots de fonction publique sont susceptibles de revêtir plusieurs acceptions, tant d'un
point de vue organique - celui de l’employeur - que d'un point de vue matériel - celui des règles.
Du point de vue organique et latissimo sensu, par « fonction publique », on entend parfois l’ensemble des personnes qui participent à l’action publique ou administrative. Dans ce sens,
emplois de la fonction publique serait synonyme d’emplois du secteur public voire d’emplois de
service public – Cf. Introduction générale.
Avec une telle définition, la fonction publique perd de sa spécificité. En effet, toute personne peut être conduite un jour ou un autre à prêter son concours à l’action publique. Pourtant, il
est constant que cette collaboration ne suffit pas à lui conférer la qualité de fonctionnaire.
Aussi est-on tenté de retenir une définition organique moins large. Cette dernière est obtenue par élimination. Se trouvent ainsi exclus de la fonction publique (sans y être entrés juridiquement) :
les détenteurs de l’autorité politique : membres du gouvernement, parlementaires,
élus locaux…,
les cocontractants de l’administration ayant la qualité de fournisseurs, d’entrepreneurs
de travaux publics, de délégataires de services publics…,
les collaborateurs occasionnels, qu’ils soient bénévoles ou requis.
En somme, la nature de la situation juridique vis-à-vis de l’administration importe quant à
la définition de la fonction publique.
Le point de vue matériel doit s’ajouter au point de vue organique pour aider à mettre au
jour la spécificité de la fonction publique.
On obtient alors une première approximation :
L’expression fonction publique désigne un ensemble de personnes liées à
l’administration par des rapports de subordination de droit public (ce qui exclut la
majorité des détenteurs de l’autorité publique) voués à une certaine permanence (ce
qui exclut les cocontractants sus-désignés et les collaborateurs occasionnels).
Bref, la fonction publique rassemble des agents de droit public ayant vocation à faire
carrière dans l’action publique.
Cette définition n’est, il faut le réitérer, qu’approximative.
Elle gagne à être affinée du point de vue organique et du point de vue matériel.
En effet, si tous les fonctionnaires sont des agents publics, tous les agents publics ne
sont pas des fonctionnaires.
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Sommaire
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CHAPITRE I : L’identité organique de la fonction publique ................................. 5
SECTION I : Le fonctionnaire, un agent de droit public ................................................ 7
I - L’identification de l’agent public dans les services publics à caractère
administratif ................................................................................................................... 8
A - Le byzantinisme initial......................................................................................... 8
1 - Le critère tiré de la nomination ....................................................................... 8
2 - Les critères tirés des clauses et de l’objet du contrat d’engagement ....... 12
a – Le critère tiré des clauses du contrat d'engagement ....................................... 12
b – Le critère tiré de l’objet du contrat d'engagement.......................................... 12
B - La simplification actuelle .................................................................................. 13
1 - La nécessité du revirement de jurisprudence ............................................. 13
2 - Le critère de l’emploi dans un service public administratif géré par une
personne publique............................................................................................... 14
3 - L’aménagement législatif des effets du critère jurisprudentiel .................. 16
II - L’identification de l’agent public dans les services publics à caractère industriel
et commercial .............................................................................................................. 19
A - Le critère du niveau hiérarchique de l'emploi ................................................. 19
1 - Un critère jurisprudentiel ............................................................................... 19
2 - Une jurisprudence controversée .................................................................. 20
B - Les solutions particulières ................................................................................ 20
1 - Les dérogations aux principes...................................................................... 20
2 - L’application dérogatoire des principes ....................................................... 21
SECTION II : Le fonctionnaire, un agent de droit public titulaire ............................... 23
I – Le fonctionnaire, un agent de droit public non contractuel ................................ 23
A – Le contrat de fonction publique : une thèse irrecevable ............................... 23
1 - L’économie de la thèse ................................................................................. 23
2 - Les apories de la thèse ................................................................................. 23
B - Le caractère statutaire et réglementaire de la situation du fonctionnaire .... 25
1 - La mesure du principe statutaire .................................................................. 25
2 – Le caractère relatif du particularisme statutaire ......................................... 26
II - Le fonctionnaire, un agent public voué à une carrière....................................... 29
A - La nomination dans un emploi permanent à temps complet ........................ 29
1 - La nomination................................................................................................. 29
2 - L'occupation permanente d'un emploi permanent ...................................... 32
B - La titularisation dans une hiérarchie administrative ....................................... 34
1 - Le caractère inclusif de l’opération .............................................................. 34
2 - L’exclusion de certaines catégories ............................................................. 34
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CHAPITRE I : L’identité organique de la fonction
publique
Question initiale :
Quelle est la définition juridique du fonctionnaire ?
Réponse soutenue :
Un fonctionnaire est un agent public nommé dans un emploi permanent et titularisé dans un grade au sein d'une administration publique.
Le présent chapitre sera consacré à l'analyse de chacun des éléments de
cette définition.
Quelques principes :
1. Tous les fonctionnaires sont des agents publics (on dit aussi : agents de droit
public), mais tous les agents publics ne sont pas des fonctionnaires ;
2. Certains agents publics ont été recrutés par voie de nomination (acte unilatéral), d'autres par contrat ; seuls les agents publics recrutés par voie de nomination peuvent avoir ab initio la qualité de fonctionnaires ;
3. Tous les agents publics sont, en principe, des agents recrutés par des personnes publiques ou pour le compte de personnes publiques. Cependant, tous les agents
recrutés par des personnes publiques ou pour le compte de personnes publiques ne sont
pas des agents publics.
Développement
La définition du fonctionnaire détermine le plan du présent chapitre :
1. un agent public [SECTION I]
2. nommé dans un emploi permanent et titularisé dans un grade au sein d'une administration publique [SECTION II]
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SECTION I : Le fonctionnaire, un agent de droit public
Précision sans doute superflue : « agent public » et « agent de droit public » sont synonymes, comme le sont « personne publique » et « personne morale de droit public ».
La jurisprudence pose un préalable : sauf disposition législative contraire, seul
l’engagement par une personne publique peut conférer ab initio la qualité d’agent public TC, 4 mai 1987, Patrice du Puy de Clinchamps, n° 02246 :
« Considérant que malgré diverses particularités contenues dans les statuts de
l’Association "France-Information-Loisirs" - A.F.I.L. -, et alors même qu’elle pouvait être
investie d’une mission de service public, cette association, régie par la loi du 1er juillet
1901, est un organisme de droit privé ; que par suite le contrat de travail qu’elle a conclu avec M. du Puy de Clinchamps, est un contrat de droit privé ; que, dès lors, le litige
né de la rupture de ce contrat passé entre personnes privées, ressortit à compétence
des tribunaux de l’ordre judiciaire ; »
Cf. aussi TC, 7 juin 1999, M. Myrat c/ Association orchestre régional de Picardie "Le Sinfonieta", n° 03117.
Pour identifier l’employeur public, le juge prend en considération plusieurs critères :
l’autorité signataire de l’acte de recrutement,
le budget sur lequel l’agent est rémunéré,
les fonctions de l’agent.
Le poids reconnu à ces critères, dont aucun n’est déterminant, est affaire d’espèce. C’est
ainsi que le Conseil d’État a pu juger qu’un agent formellement engagé par une personne morale
de droit privé avait été en fait recruté pour le compte de l’État :
«[Considérant que] Mme A doit être regardée comme ayant été recrutée par la fédération départementale des groupements de défense contre les ennemis des cultures des
Yvelines, [association régie par les dispositions de la loi du 1er juillet 1901], pendant la
période considérée, pour le compte de l’État ; qu’eu égard à l’ensemble des circonstances de l’espèce, en jugeant que l’État ne pouvait être regardé comme le véritable
employeur de Mme A pour ces périodes, le tribunal administratif a entaché son jugement d’une inexacte qualification juridique des éléments qui étaient soumis à son appréciation ; que, par suite, son jugement doit être annulé ; » - CE, 1er juin 2011, Mme
A., n° 332036.
Ainsi donc, tous les agents publics sont, en principe, des agents recrutés par des personnes publiques ou pour le compte de personnes publiques.
Cependant, tous les agents recrutés par des personnes publiques ou pour le compte de
personnes publiques ne sont pas des agents publics.
En effet, les personnes publiques recrutent et emploient aussi bien des agents de droit public que des agents de droit privé.
Au sein des personnes publiques, comment identifier les agents publics ?
À nouveau, il convient de conjuguer « critère organique » et « critère matériel ».
En fait, la distinction des agents de droit public et des agents de droit privé repose, en partie, sur la summa divisio « services publics à caractère administratif et services publics à caractère
industriel et commercial » (SPA-SPIC) - TC, 22 janvier 1921, Colonie de la Côte d’Ivoire c. Société commerciale de l’Ouest africain, n° 00706 – arrêt dit du Bac d’Eloka ; CE, Ass., 16 novembre
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1956, Union syndicale des industries aéronautiques ; TC, 29 décembre 2004, Époux Blanckeman,
n° C34161 (voir infra I et II).
Signalons qu’il faut comprendre les critères de la distinction SPA-SPIC de la manière indiquée par le commissaire du gouvernement Didier Chauvaux dans ses conclusions sur l’avis
n° 222672 rendu par le Conseil d’État le 27 octobre 2000 :
« Un service public est présumé présenter un caractère administratif.
Cette présomption ne cède que si trois conditions se trouvent remplies simultanément.
Pour reprendre les termes utilisés par le président Odent dans son Cours de contentieux administratif, il faut que le service public "ne se distingue pas d’une entreprise privée,
1. en premier lieu par son objet (c’est-à-dire que les opérations auxquelles il se livre doivent
être de la même nature que celles auxquelles une entreprise privée pourrait se livrer),
2. en second lieu par ses modes de financement (c’est-à-dire qu’il doit être principalement
alimenté par les redevances payées par les usagers en rémunération des services qu’il leur assure et non
par des subventions budgétaires),
3. en troisième lieu enfin par ses procédés de gestion (c’est-à-dire qu’il doit être géré selon les
règles du droit privé)". » (AJDA n° 4 2001, p. 396).
La Cour de cassation adhère à cette présomption du caractère administratif des services publics :
« [I]l incombe à la partie qui se prévaut du caractère industriel et commercial d’un service
public d’établir ses modalités de fonctionnement et de financement […] » - Cass. civ., 1e,
31 mars 2010, pourvoi n° 09-12821
I - L’identification de l’agent public dans les services publics à caractère administratif
A - Le byzantinisme initial
Le service public administratif est globalement soumis à un régime de droit public. Ce
principe fonde une présomption jurisprudentielle : l'exécution des services publics administratifs
est confiée, en principe, à des agents publics. Mais pendant longtemps il ne s’est agi que d'une
présomption simple (d’abord plutôt faible, puis renforcée) ; elle admettait bien souvent la preuve
contraire. D'où le recours à certains indices tenant au mode de recrutement.
Byzantinisme : le commissaire du gouvernement Chardeau qualifie de byzantine (c’est-àdire d’excessivement subtile) la ligne jurisprudentielle étudiée ici – voir infra, page 12.
1 - Le critère tiré de la nomination
Il a été longtemps admis comme principe que l'acte de nomination conférait à la personne
bénéficiaire la qualité d'agent public.
Ce principe cadre bien avec la nature juridique de l'acte de nomination. En effet, il s’agit
d’un acte administratif unilatéral.
Étymologie oblige, on présente parfois l’acte unilatéral comme émanant d’un seul côté,
l’acte plurilatéral (plus communément appelé contrat) comme émanant de plusieurs côtés – dans
« unilatéral » et dans « plurilatéral », on rencontre le latin latus qui signifie côté.
La formule prête à confusion.
1
« Considérant que lorsqu'un établissement public tient de la loi la qualité d'établissement public industriel et
commercial, les litiges nés de ses activités relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire, à l'exception de
ceux relatifs à celles de ses activités qui, telles la réglementation, la police ou le contrôle, ressortissent par leur nature de prérogatives de puissance publique ; » - TC, 29 décembre 2004, Époux Blanckeman, n° C3416.
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Ce n’est pas le nombre de leurs auteurs qui distingue substantiellement l’acte unilatéral de l’acte plurilatéral - le critère n’est pas quantitatif.
Bien entendu, un acte qui n’a qu’un seul auteur est nécessairement unilatéral.
Mais un acte qui a plusieurs auteurs n’est pas nécessairement un acte plurilatéral. En effet,
comme l’acte plurilatéral, l’acte unilatéral peut fort bien avoir plusieurs auteurs.
Exemple d’actes administratifs unilatéraux ayant plusieurs auteurs: un arrêté interministériel ou un arrêté pris conjointement par deux maires pour réglementer un espace
commun à leurs deux communes.
Ce n’est pas non plus l’absence de consentement du destinataire qui distingue substantiellement l’acte unilatéral de l’acte plurilatéral.
Certes, beaucoup d’actes administratifs unilatéraux sont pris sans le consentement de leurs
destinataires.
Mais il existe un grand nombre d’actes administratifs unilatéraux qui n’ont pu être pris
qu’avec le consentement de leurs destinataires.
Exemples d’actes administratifs unilatéraux ne pouvant être pris qu’avec le consentement de leurs destinataires:
une autorisation administrative peut résulter d’un acte administratif unilatéral. Pourtant, le plus souvent, elle est bel et bien sollicitée par son destinataire.
la nomination d’un fonctionnaire prend la forme d’un acte administratif unilatéral.
Cependant, de jurisprudence constante, elle ne produit des effets juridiques que si elle
est acceptée par le candidat. Rapporté au nombre de fonctionnaires, cela fait 5 229 040
actes administratifs unilatéraux qui n’ont pu être pris qu’avec le consentement de leurs
destinataires !
Ainsi, l’acte administratif unilatéral n’est-il pas toujours un acte pris sans le consentement
de son destinataire.
On ne peut donc définir l’acte administratif unilatéral
ni comme un acte pris sans le consentement de son destinataire, sinon on laisserait de
côté les actes administratifs unilatéraux pris avec le consentement de leurs destinataires ;
ni comme un acte pris avec le consentement de son destinataire, sinon on laisserait de
côté les actes administratifs unilatéraux pris sans le consentement de leurs destinataires.
Logiquement, on ne peut définir l’acte administratif unilatéral que sur la base de ce qui est
commun à la fois aux actes administratifs unilatéraux pris sans le consentement de leurs destinataires et aux actes administratifs unilatéraux pris avec le consentement de leurs destinataires.
Évidemment, ce qui vient d’être dit vaut aussi pour le nombre d’auteurs (voir plus haut).
Le véritable critère de distinction, c’est la situation juridique du destinataire de l’acte.
En effet, un acte a toujours un destinataire : la personne dont il régit le comportement. Cette
personne est identifiable ou non.
Mais, ce qui compte au regard de la distinction acte unilatéral - acte plurilatéral, c’est la réponse à la question suivante : est-ce que le destinataire est aussi, juridiquement, l’auteur de
l’acte ?
Si oui, on est en présence d’un acte plurilatéral, d’un contrat, avec au moins deux parties,
deux côtés. Sinon, il s’agit d’un acte unilatéral.
Définition de l’acte unilatéral en général : un acte unilatéral est un acte destiné à
régir le comportement d’une ou plusieurs personnes qui, tantôt étrangères tantôt associées à son édiction, n’en sont pas, juridiquement, les auteurs.
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Définition de l’acte administratif unilatéral : un acte administratif unilatéral est
un acte de droit public (non législatif et non juridictionnel) destiné à régir le
comportement d’une ou plusieurs personnes qui, tantôt étrangères tantôt associées à son édiction, n’en sont pas, juridiquement, les auteurs.
L’acte administratif unilatéral est caractéristique de l'exercice d'une prérogative de puissance publique. Sa nature et ses effets expliquent que la nomination (unilatérale par définition
même) emporte soumission au droit public.
Il en a été jugé ainsi dans les affaires suivantes :
CE, 18 mai 1960, Dame Gossay : qualité d’agent public reconnue à une femme de
service nommée par arrêté (acte unilatéral, évidemment) ;
CE, 9 mars 1973, Commune de Trinité, n° 83448 :
« Considérant que la dame X... a été nommée agent stagiaire de la commune de Trinité par
un arrêté du 10 mai 1966 pris par le maire de cette commune en application des dispositions statutaires applicables au personnel communal ; que la dame X..., bien qu’elle ait été
recrutée comme “femme de service” avait ainsi la qualité d’agent public ; que la commune
de Trinité n’est donc pas fondée à soutenir que la juridiction administrative serait incompétente pour connaître du licenciement de l’intéressée prononcé par l’arrêté du maire du 23
décembre 1969 ; »
Mais l'état du droit n'est pas rigide. Le Conseil d’État a pu juger que la nomination
n’entraînait pas ipso facto la qualité d'agent public - CE, 20 septembre 1991, Mme Boulanger,
n° 109728 :
« [Considérant] que la circonstance que le maire de la commune de Labry ait donné au recrutement de l’intéressée la forme d’un arrêté en date du 23 novembre 1981 n’était pas
par elle-même de nature à la placer dans une situation exorbitante du droit commun et, de
ce fait, différente de celle d’un salarié de droit privé ; que, dès lors, le litige qui l’oppose à la
commune de Labry ne ressortit pas, en ce qui concerne les décisions du maire de ladite
commune réduisant l’horaire de travail de la requérante puis la licenciant, à la compétence
de la juridiction administrative ; »
La solution s'explique peut-être par le caractère positivement fictif que revêt, parfois,
l’unilatéralité.
La définition même de l’acte administratif unilatéral illustre toute la distance qui sépare le
droit du réel. Dans les faits, nombre d’actes unilatéraux sont négociés par leurs destinataires.
Mais, juridiquement, ceux-ci ne sont pas considérés comme les auteurs de ces actes, qui restent
donc, toujours juridiquement, des actes administratifs unilatéraux.
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Remarques incidentes :
Quelques rares administrativistes soutiennent que seuls les actes administratifs décisoires ont
droit à la qualification d’actes administratifs unilatéraux.
Déduction logique : les actes non décisoires (mesures d’ordre intérieur) ne seraient donc pas des
actes unilatéraux.
Observations :
Ces administrativistes ne contestent point que les actes non décisoires soient des actes juridiques ;
Tout comme un acte décisoire, un acte non décisoire a bien un auteur et un destinataire ;
On qualifie un acte décisoire d’acte unilatéral en raison des positions respectives de son auteur et de son destinataire. Rappel : un acte administratif unilatéral est un acte de droit public (non législatif et non juridictionnel) destiné à régir le comportement d’une ou plusieurs
personnes qui, tantôt étrangères tantôt associées à son édiction, n’en sont pas, juridiquement, les auteurs ;
D’un strict point de vue logique, rien n’empêche de s’intéresser également aux positions respectives de l’auteur et du destinataire d’un acte administratif non décisoire ;
Toujours d’un strict point de vue logique, rien ne s’oppose à l’affirmation suivante : un acte
administratif non décisoire est un acte de droit public destiné à régir le comportement
d’une ou plusieurs personnes qui, tantôt étrangères tantôt associées à son édiction, n’en
sont pas, juridiquement, les auteurs ;
En conséquence, un acte administratif non décisoire est bel et bien un acte administratif unilatéral.
Questions :
Quel intérêt juridique ou jurisprudentiel y a-t-il réellement à s’opposer à la qualification
d’acte unilatéral donnée majoritairement par la doctrine à l’acte non décisoire ?
Quel est le fondement juridique ou jurisprudentiel d’une telle opposition ?
Ces questions n’ayant pas encore reçu de réponses qui emportent l’adhésion, force est de
maintenir la qualification d’actes unilatéraux donnés aux actes non décisoires, lesquels, en
bonne logique, ne peuvent de toute façon pas recevoir le label d’actes plurilatéraux.
*
Notre position rejoint celle que le Conseil d’État a défendue comme étant caractéristique du droit public français :
« Les actes administratifs unilatéraux sont nombreux et variés. Certains sont purement déclaratifs — vœux pris par une assemblée. D'autres sont préparatoires
— avis, instructions. Certains même, les actes-types, permettent à l'autorité administrative supérieure de proposer — et en fait d'imposer — soit à une autorité
hiérarchiquement subordonnée, soit à une autorité décentralisée, des "modèles"
pour les décisions entrant dans leur compétence. D'autres actes administratifs suivent les décisions, sans rien y ajouter— notification. » - Rapport du Conseil d’État,
présenté par Martine de Boisdeffre, sur L'exécution de l'acte administratif individuel et l'intervention des tribunaux dans l'exécution de l'acte, Association des Conseils d’États, 11e colloque tenu du 17 au 19 mai 1988 à Lisbonne.
http://www.juradmin.eu/fr/colloquiums/colloq_fr_11.html
***
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2 - Les critères tirés des clauses et de l’objet du contrat d’engagement
Dans le contentieux de la fonction publique - au sens large - le critère de l’engagement
contractuel trouve plus souvent application que le précédent, celui de la nomination.
L'agent sera considéré comme un agent public si son contrat de recrutement est administratif. Et le contrat peut revêtir ce caractère en raison soit de ses clauses, soit de son objet.
a – Le critère tiré des clauses du contrat d'engagement
Le contrat de recrutement renfermant des clauses exorbitantes du droit commun est un
contrat administratif. Et l'agent recruté en vertu de ce contrat sera considéré comme un agent public.
À signaler que seule la présence de telles clauses peut conférer un caractère administratif
au contrat impliquant l’agent dans la gestion du domaine privé : TC, 10 janvier 1983, Caule,
n° 02273. Cette exigence se justifie par le refus jurisprudentiel de considérer la gestion du domaine privé comme un service public.
Selon la célèbre formule du Conseil d’État, est exorbitante « la clause ayant pour objet de
conférer aux parties des droits ou de mettre à leur charge des obligations, étrangers par leur
nature à ceux qui sont susceptibles d'être librement consentis par quiconque dans le cadre des
lois civiles et commerciales» - CE, Sect. 20 octobre 1950, Stein - Rec. p. 505.
Exemples de clauses exorbitantes : les stipulations contractuelles subordonnant la démission de l’agent à l’acceptation du chef de service ; celles qui restreignent l’exercice du droit de
grève ou de la liberté syndicale.
b – Le critère tiré de l’objet du contrat d'engagement
Initialement, ce critère participait de « la méthode du faisceau d'indices ». Le juge prenait en
considération
le mode de rémunération,
le caractère durable ou précaire du lien avec le service public
ainsi que la nature et le niveau hiérarchique de l'emploi.
Par suite, ne pouvaient revêtir un caractère administratif
ni les contrats essentiellement précaires : CE, 28 mai 1952, Choppin de Janvry, p. 282,
ni les contrats confiant aux intéressés des fonctions subalternes et non des fonctions
de direction, de contrôle ou d’inspection.
Les affaires Affortit et Vingtain ont été l’occasion d’un revirement de jurisprudence.
Dans ses conclusions, le commissaire du gouvernement 1 J. Chardeau dénonce « une jurisprudence nuancée et fluctuante dont les subtilités risquent de passer pour byzantines ».
Il propose alors de reconnaître que « relèvent du droit public tous les agents, quelles que
soient les clauses de leur contrat, qui ont pour mission d'assurer le fonctionnement d'un service
public ».
Autrement dit, il recommande le critère de la participation directe à l’exécution du service
public. Le Conseil d’État l’a implicitement suivi dans les deux décisions qu’il a rendues sur ses
conclusions : CE, Sect., 4 juin 1954, Affortit et Vingtain (deux espèces : n° 8208 et 17329).
1
On dit aujourd’hui « rapporteur public » au lieu de « commissaire du gouvernement ».
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Le raisonnement qui sous-tend le critère de la participation directe à l’exécution du service
public se laisse décrire simplement :
un contrat de recrutement doit être regardé comme administratif, en raison de son
objet, s'il fait participer directement l'agent à l'exécution du service public ou s'il le fait participer à l'exécution même du service public. Ces deux formules, qui sont synonymes, signifient
que l’agent exercera les fonctions qui procèdent de la spécialité du service public qui
l’emploie ;
l'agent signataire d’un tel contrat est un agent public.
Il est généralement admis que le recours à ce (nouveau) critère de la participation directe à
l’exécution du service public a eu pour effet
d'étendre quelque peu la compétence de la juridiction administrative, en permettant
une reconnaissance plus large qu'auparavant de la qualité d'agent public,
de rendre moins opaque la distinction entre agents de droit public et agents de droit
privé, « en focalisant le débat sur le seul critère de la participation directe au service public, alors
qu'auparavant la jurisprudence combinait, de façon sinon aléatoire du moins peu prévisible, divers éléments tenant à la nature des fonctions, aux clauses du contrat, à la précarité de l'emploi »1.
Certes, le critère de la participation directe à l’exécution du service public n'a été qu'implicitement consacré par le Conseil d'État dans les affaires Affortit et Vingtain, mais il a fait ultérieurement l’objet d’une confirmation expresse de la part du Conseil d'État lui-même 2, du Tribunal des conflits3 et de la Cour de cassation4.
B - La simplification actuelle
1 - La nécessité du revirement de jurisprudence
En proposant, dans ses conclusions sur les affaires Affortit et Vingtain5, le critère de la
participation directe à l’exécution du service public, le commissaire du gouvernement Chardeau
escomptait une simplification,
d’abord, « dans l'intérêt des requérants et de leurs conseils qui hésitent, on le comprend, à déterminer la juridiction qu'ils doivent saisir »,
ensuite, dans l'intérêt du Conseil d'État. En effet, « il est regrettable qu'à chaque cas
d'espèce il soit nécessaire de se livrer au préalable à une délicate appréciation de la
situation du requérant, pour affirmer ou dénier la compétence de la juridiction administrative. »
De toute évidence, cet espoir a été déçu. À preuve, la fréquence des interventions du Tribunal des conflits : vingt-cinq décisions publiées de 1986 à 1996.
Dans bien des cas, les juges paraissent vouloir « éclairer l’obscur par le plus obscur ».
1
Jacques-Henri Stahl et Didier Chauvaux, Chronique, AJDA 1996 p. 355.
CE, 2 novembre 1956, Maurisset, Rec. p. 412 ; CE, 5 juillet 1957, Evrard, Rec. p. 446 ; CE, 2 novembre 1957, Bertault, Rec. p. 575 ; CE, 20 mars 1959, Lauthier, Rec. p. 198.
3
TC. 23 novembre 1959, Dlle Santelli, Rec. p. 871 ; TC, 25 novembre 1963, Dame veuve Mazerand c/ Commune de
Jonquières, Rec. p. 792.
4
Cass. soc. 15 février 1961, Bull. cass. IV, n° 206 ; Cass. soc. 17 février 1979, Haut-Commissaire de France en Indochine, Bull. cass. IV, n° 179 ; Cass. soc. 29 janvier 1969, Hourdeaux c/ Ministre des Affaires sociales et agent judiciaire du Trésor, Bull. cass. IV, n° 58.
5
CE, Sect., 4 juin 1954, Affortit et Vingtain (deux espèces : n° 8208 et 17329).
2
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Par exemple, se sont vu reconnaître la qualité d’agent public :
un agent chargé de fonctions d'enseignement dans une université - TC, 29 juin 1987,
Mlle Ficheux, n° 02481 ;
l’entraîneur national de tir à l'arc recruté en vue de la préparation des Jeux olympiques - TC, 11 octobre 1993, Barlet, n° 02882 ;
un agent de service chargé de la surveillance du restaurant (cantine) scolaire d’une
commune - TC, 22 juin 1992, Mme Rouquier, n° 02693 ;
un agent de service qui, lié à la caisse des écoles d’une commune par un contrat verbal, était chargé « non seulement du ménage et de la vaisselle mais également de la
collecte des tickets représentant le prix des repas et du service des repas aux enfants » - TC, 4 novembre 1991, Mlle de Guerequiz, n° 02669 ;
un concierge engagé par un office public HLM pour assurer le nettoyage et la surveillance d'un groupe d'immeubles - CE, Sect., 20 mars 1959, Lauthier, Rec. p. 198.
En revanche, se sont vu dénier la qualité d’agent public :
une serveuse de restaurant universitaire - TC, 19 avril 1982, Mme Robert c/ CROUS
de Rennes, n° 022231 ;
un plongeur travaillant dans un restaurant universitaire - TC, 13 février 1984, Cvetkowski, RDP 1985, p. 517 ;
un « ouvrier professionnel » engagé par l’Office public départemental d’habitations
à loyer modéré du Territoire de Belfort pour « assurer l’entretien des immeubles et
des espaces extérieurs » - TC, 26 mars 1990, Rambur, n° 02608.
Vu la longueur habituelle des procédures, cet excès de subtilité (ce « byzantinisme ») frise
le déni de justice.
Le Tribunal des conflits n’a sans doute pas été insensible à cet argument.
2 - Le critère de l’emploi dans un service public administratif géré par une
personne publique
Déjà, en 1954, dans ses conclusions sur les affaires Affortit et Vingtain, le commissaire du
gouvernement Chardeau envisageait deux solutions radicales : « Soumettre tous les agents des
services publics recrutés sur contrat, sans distinction, soit au droit privé soit au droit public ».
En faveur du droit privé, il soulignait « la tendance générale de l'État à se placer de
plus en plus largement sur le même plan qu'un patron de droit privé [...] ».
Il en déduisait : « On peut dire que du moment qu'un service public administratif de l'État recrute certains agents par voie contractuelle, sans avoir recours aux modes spéciaux prévus par le
statut de la fonction publique, c'est qu'il entend renoncer à se prévaloir des règles spéciales du droit
public et à demeurer sur le terrain du droit commun ».
1
« Considérant que Mme Ludmilla Robert était employée comme serveuse dans un restaurant universitaire ; que la
nature de son emploi ne la faisait pas participer directement à l’exécution du service public dont le Centre régional
des œuvres universitaires et scolaires de rennes a la charge ; que son contrat ne comportait pas de clause exorbitantes du droit commun ; qu’ainsi elle se trouvait dans la situation d’un salarié de droit privé lié au Centre régional
des œuvres universitaires et scolaires par un contrat de travail et que le litige qui l’oppose audit centre à la suite de
son licenciement ressortit à la compétence des tribunaux de l’ordre judiciaire ; » - TC, 19 avril 1982, Mme Robert c/
CROUS de Rennes, n° 02223.
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A l’inverse, on peut rattacher tous les agents contractuels au droit public, « si l'on met
l'accent sur la qualité de l'employeur, toute personne employée par un service public administratif
ayant automatiquement la qualité d'agent de droit public ».
Le caractère révolutionnaire de ces deux solutions a fait reculer le commissaire du gouvernement Chardeau : « Nous ne nous faisons guère d'illusions sur la possibilité de voir triompher une de
ces solutions, sans doute trop simplistes, car on ne peut faire absolument table rase de vingt ans de
jurisprudence ».
Pourtant, certains auteurs ont préconisé la solution du droit privé. Ils tiraient argument
de l’ancien article L. 511 - I du Code du travail, qui disposait : « les personnels des services publics, lorsqu'ils sont employés dans les conditions du droit privé, relèvent de la compétence du
conseil de prud'hommes ».
Pour les tenants de cette approche, par personnels employés dans les conditions du droit
privé, il fallait comprendre ceux dont le contrat ne comportait pas de clauses exorbitantes du droit
commun.
Une telle interprétation s’est heurtée au refus du Tribunal des conflits :
« [Considérant qu’] il résulte des termes mêmes des dispositions [de l'article
L. 511-I du Code du travail] qu'elles se bornent à attribuer compétence aux conseils
de prud'hommes pour connaître des litiges concernant les agents des services publics qui n'ont pas la qualité d'agent public, et qu'elles n'ont ni pour objet, ni pour
effet de modifier la règle en vertu de laquelle les agents qui participent à l'exécution même d'un service public administratif ne peuvent être employés dans les
conditions du droit privé et ont la qualité d’agent public, quelles que soient les
clauses de leur contrat […] » - TC, 19 février 1990, Centre national pour
l’aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) c/ Mlle Fillion,
02591.
Finalement, le dénouement de la casuistique (du byzantinisme) se produit avec l’arrêt TC,
25 mars 1996, Préfet de la région Rhône-Alpes, préfet du Rhône et autres c/ Conseil de
prud'hommes de Lyon, n° 3000 - dénommé arrêt « Berkani », du nom d'un aide de cuisine du
CROUS à l'origine de l'affaire.
Dans une formule lapidaire, le Tribunal des conflits indique le nouveau critère : « Les
personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère administratif sont des agents contractuels de droit public quel que soit leur emploi. »
Un arrêt ultérieur précise que le service public administratif en question doit être géré
par une personne publique : TC, 3 juin 1996, Préfet des Yvelines c/ Conseil de prud'hommes de
Saint-Germain-en-Laye, n° 03019.
Ainsi donc, par un revirement de jurisprudence, le Tribunal des conflits a décidé de ne
plus se fonder sur un critère exclusivement matériel pour la qualification d’agent de droit public
dans un service public à caractère administratif, mais sur un critère organico-matériel :
Sauf dispositions législatives contraires, sont agents contractuels de droit public, quel
que soit leur emploi, les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service
public à caractère administratif géré par une personne publique.
Selon le Tribunal des conflits, « une telle situation peut résulter, s'agissant d'un salarié
mis à la disposition d'un employeur public par une entreprise de travail temporaire, de la mé-
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connaissance des règles dont la violation a légalement pour conséquence la substitution de l'utilisateur, en qualité d'employeur, à l'entreprise de travail temporaire » – TC, 2 mars 2009, Mme
Desbordes c/ Ministère de la défense, n° 36741.
La Cour de cassation, qui, comme le Conseil d’État, a naturellement fait sien ce critère organico-matériel, l’a rappelé le 23 septembre 2008 dans une espèce concernant une violoniste qui
avait été « employée, par contrats à durée déterminée successifs, à compter de mars 1993 jusqu'en avril 2005 en qualité de violoniste exerçant au sein du nouvel orchestre de Saint-Etienne,
devenu à la fin de l'année 2004 l'Orchestre symphonique de Saint-Etienne (OSSE) lequel dépend
de l'Esplanade, opéra-théâtre géré en régie directe par la ville de Saint-Etienne » - Cass. soc. 23
septembre 2008, n° 07-445082.
À côté d’avantages indéniables (clarté, simplification), la nouvelle solution présente un certain nombre d’inconvénients qui justifient la réaction du législateur.
3 - L’aménagement législatif des effets du critère jurisprudentiel
La jurisprudence « Berkani » n’a pas d’incidence sur la situation des agents contractuels
occupant des emplois de catégorie A ou B. Exerçant des missions d'encadrement, ces agents participent directement à l'exécution du service public, et ont donc déjà la qualité d’agents publics en
vertu de l’ancienne jurisprudence « Affortit et Vingtain».
La nouvelle solution concerne, en fait, les agents exerçant des fonctions de catégorie C. En
leur conférant la qualité d’agents publics dans les conditions décrites ci-dessus, elle fragilise leur
situation :
1. impossibilité de cumuler des emplois,
2. impossibilité de se prévaloir d’un contrat à durée indéterminée.
1
De 1991 à 2001, la requérante, Mme Desbordes, avait travaillé de manière ininterrompue au service du bureau de
l’action sociale de la circonscription militaire nord-ouest de l’armée de terre, en qualité de conseillère en économie
sociale et familiale et en exécution de contrats de travail temporaires successifs conclus avec les associations ATCS
puis Tremplin, entreprises agréées de travail temporaire liées à l’administration militaire par des contrats de mise à
disposition conclus chaque année, jusqu’au 31 décembre 2000. Ses fonctions ont pris fin le 7 février 2001, à la demande de l’administration dont elle relevait. Soutenant qu’elle était alors employée par le bureau d’action sociale,
en raison de l’irrégularité de son statut de travailleur temporaire, Mme Desbordes a saisi le juge judiciaire de demandes indemnitaires dirigées notamment contre l’État, puis après que celui-ci s’est déclaré incompétent, le juge
administratif pour faire annuler la décision de rupture de son contrat.
Le Tribunal des conflits tranche la question du statut de la requérante et, par voie de conséquence, celle de la juridiction compétente dans les termes suivants :
« Considérant que la demande de Mme Desbordes ayant précisément pour objet de faire reconnaître sa qualité de
salariée du ministère de la défense, en raison du fait que l’emploi qu’elle occupait correspondait à l’activité normale et permanente de l’administration utilisatrice et que le travail s’est poursuivi pour le compte du bureau
d’action sociale au-delà du terme du dernier contrat, sans convention de mise à disposition, le litige relève de la
compétence du juge administratif ; » - TC, 2 mars 2009, Mme Desbordes c/ Ministère de la défense, n° 3674
2
La Cour de cassation n’a pas suivi le raisonnement des juges d’appel :
« Attendu que pour dire le conseil de prud'hommes compétent pour connaître du litige, l'arrêt retient, d'abord, que
la relation contractuelle est expressément et à plusieurs reprises définie entre les parties en référence à des dispositions du code du travail et les actes signés ne comportent aucune disposition de droit public ; ensuite, que le
moyen tiré de la forme d'exploitation en régie par l'Esplanade, de l'OSSE n'est pas fondé dans la mesure où le juge
judiciaire est seul compétent pour connaître d'une demande en requalification de contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et de demandes au titre de la rupture dès lors que le salarié
n'a jamais été lié à la personne morale de droit public, en l'espèce la ville de Saint-Etienne, par un rapport de droit
public ; enfin que la relation contractuelle n'a jamais été novée en une relation contractuelle de droit public ;
Attendu cependant que les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère
administratif géré par une personne publique sont des agents contractuels de droit public, quel que soit leur emploi ; » - Cass. soc. 23 septembre 2008, n° 07-44508.
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1. L’impossibilité de cumuler des emplois :
Les « nouveaux » agents publics – de la jurisprudence « Berkani » – ne pouvaient plus
continuer à cumuler les emplois. En effet, le cumul d'emplois publics ou d'emplois public et privé
était [une évolution a eu lieu] interdit par deux textes : le décret-loi du 29 octobre 1936 relatif
aux cumuls de retraites, de rémunération et de fonctions, et la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
portant droits et obligations des fonctionnaires. Selon le premier texte, il ne peut être exercé simultanément plusieurs emplois rémunérés sur fonds publics ; aux termes du second, les fonctionnaires doivent consacrer l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées et ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative (Cf. Partie II, Chapitre
II).
2. L’impossibilité de se prévaloir d’un contrat à durée indéterminée :
Exemple : CE, 14 mars 1997, Mme Rietsch-Cavrois, n° 147572. Sur la base de
contrats renouvelés chaque mois, la requérante avait été employée par la commune
de Nieppe depuis le 1er octobre 1987 jusqu’au 18 août 1990.
À compter de cette dernière date, le maire a décidé de ne plus renouveler son contrat.
Ses fonctions ne l’amenaient pas à participer directement à l’exécution du service
public.
Sous l’empire de l’ancienne jurisprudence « Affortit et Vingtain», elle aurait donc été
considérée comme un agent contractuel de droit privé, et son action aurait relevé
du juge judiciaire. Appliquant les dispositions protectrices du code du travail, le juge
judiciaire aurait
requalifié cette succession de contrats à durée déterminée en contrat à durée
indéterminée,
et considéré, par voie de conséquence, comme un licenciement ce qui était
présenté par la commune comme un simple refus de renouvellement.
Avec le nouveau critère de l’arrêt Berkani, la requérante est un agent public dont
l’action contentieuse ressortit à la compétence du juge administratif.
Ce dernier estime : « […] les décisions successives par lesquelles le maire a engagé
Mme R. comportaient un terme certain ; […] ainsi et alors même que cet engagement a été renouvelé sans interruption, l’intéressée ne saurait prétendre qu’elle
était liée à la commune par un contrat à durée indéterminée […] »
En droit public, le contrat à durée déterminée est la règle - même si l’agent
est employé au-delà du terme initial du contrat.
Il importe tout de même de rappeler (Cf. Introduction générale) que la loi n° 2005-843 du
26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction
publique dispose
que si « l'agent est en fonction depuis six ans au moins, de manière continue,
son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que par décision expresse et
pour une durée indéterminée »,
et que « lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de
droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée
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déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires. »1
Ultime précision sur la durée des contrats de recrutement : un contrat comportant une
clause de tacite reconduction n'est pas pour autant un contrat à durée indéterminée – CE, Sect., 27
octobre 1999, M. Bayeux, n° 178412 :
« Considérant qu’il résulte des dispositions législatives précitées que les contrats passés
par les collectivités et établissements publics territoriaux en vue de recruter des agents
non-titulaires doivent, sauf disposition législative spéciale contraire, être conclus pour
une durée déterminée et ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse ;
que, par suite, dans le cas où, contrairement à ces prescriptions, le contrat de recrutement d’un agent non-titulaire comporte une clause de tacite reconduction, cette stipulation ne peut légalement avoir pour effet de conférer au contrat dès son origine une durée indéterminée ; que le maintien en fonction à l’issue du contrat initial a seulement
pour effet de donner naissance à un nouveau contrat, conclu lui aussi pour une période
déterminée et dont la durée est soit celle prévue par les parties, soit, à défaut, celle qui
était assignée au contrat initial ; […] »
Les deux inconvénients susanalysés de la jurisprudence "Berkani - l’impossibilité de
cumuler les emplois et l’impossibilité de se prévaloir d’un contrat à durée indéterminée ont suscité une réaction législative.
La loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations
avec les administrations
1. stabilise la situation d’un certain nombre d’agents concernés par la jurisprudence « Berkani », à savoir ceux d’entre eux qui sont en fonctions à la date de
la publication de la loi, au service de l’État ou d’une collectivité territoriale : ils
bénéficient, par dérogation, d’un contrat à durée indéterminée ;
2. et leur offre la possibilité de cumuler les emplois : ils peuvent demander que
le contrat de travail sur la base duquel ils ont été engagés soit (ou reste) un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail (ce qui autorise le
cumul d’emplois). Les intéressés disposent d'un délai d'un an à compter de la
date de publication de la loi pour présenter leur demande. Le bénéfice de
l’option leur est reconnu à compter de la date de leur engagement initial
(articles 34 et 35 de la loi du 12 avril 2000).
1
Cette loi transposait la directive communautaire 1999/70/CEE du 28 juin 1999.
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II - L’identification de l’agent public dans les services publics à caractère industriel et commercial
Il existe un principe et quelques exceptions.
A - Le critère du niveau hiérarchique de l'emploi
1 - Un critère jurisprudentiel
Les services publics à caractère industriel et commercial sont, globalement, soumis à un régime de droit privé.
Par suite, leurs personnels relèvent, en principe, d'un statut de droit privé.
Toutefois, certains d'entre eux ont la qualité d'agents publics.
Leur identification jurisprudentielle résulte d’une évolution en trois étapes :
i. 1e étape : CE, 26 janvier 1923, De Robert-Lafrégeyre, n° 62529. Le requérant avait été
engagé par la colonie de Madagascar pour exercer les fonctions de chef de service aux
chemins de fer. Il sollicitait l’allocation de dommages et intérêts pour méconnaissance
fautive de son contrat. Le Conseil d’État a fondé sa compétence sur une règle simple:
tous les agents chargés de fonctions de direction dans un service public à caractère
industriel et commercial sont des agents publics.
ii. 2e étape : CE, Sect., 25 janvier 1952, Boglione, p. 55. Le Conseil d’État dénie la qualité
d’agent public au chef du service de l'exploitation et de l'outillage d'une chambre de
commerce, motif pris de sa subordination au directeur des services techniques. L’arrêt
pose une nouvelle règle : seuls relèvent d’un statut de droit public les agents exerçant
des fonctions de direction à la tête du service - les occupants des plus hauts emplois.
La catégorie des agents publics se trouve rétrécie.
iii. 3e étape : CE, Sect., 8 mars 1957, Jalenques de Labeau, p. 158. L’évolution en entonnoir
se confirme. La qualité d'agent public est réservée d’une part à l'agent chargé de la direction de l'ensemble des services de l'établissement, et, d’autre part, au chef de la
comptabilité s'il possède la qualité de comptable public. Voir, aussi, CE, Sect., 15 décembre 1967, Level. Bien évidemment, les juridictions judiciaires sont compétentes pour
les litiges entre un service public industriel et commercial et le personnel, même pour le
personnel de direction et le comptable si des dispositions expresses de la loi leur appliquent un statut de droit privé – CE, Sect., 22 janvier 1954, Wittwer, Rec. p. 42.
Actuellement, la règle est donc que, dans les services publics à caractère industriel et
commercial, seuls relèvent d’un statut de droit public
les agents chargés de la direction de l’ensemble des services de l’établissement
et le chef de la comptabilité, lorsque ce dernier possède la qualité de comptable
public (formule tautologique).
Bien entendu, les fonctionnaires employés dans le service conservent leur statut de droit
public - TC, 4 juillet 1991, Dame Pillard, n° 02670. Toutefois, le juge judiciaire a compétence
pour statuer sur les litiges opposant l’établissement industriel et commercial aux fonctionnaires
détachés auprès de lui - TC, 20 juin 1994, Barlaud, n° 02862.
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2 - Une jurisprudence controversée
La jurisprudence Jalenques de Labeau se fonde sur la considération suivante : il est opportun que soit soumis à un statut de droit public l’agent qui assure la liaison entre le service et
l’autorité de tutelle.
Mais la règle dégagée par le Conseil d’État ne cadre pas toujours avec la structure actuelle
des entreprises publiques. A la tête de celles-ci, se trouvent souvent non seulement un directeur
général mais encore un président de conseil d’administration. Est-il logique de soumettre ce dernier à un statut de droit privé ? N’assure-t-il pas, au même titre que le directeur général la liaison
entre le service et l’autorité de tutelle ?
Cette jurisprudence introduit ainsi un certain byzantinisme dans le contentieux des services
publics à caractère industriel et commercial. Le Tribunal des conflits semble apprécier au cas par
cas l’opportunité d’appliquer la règle, en prenant en considération les rôles effectifs, dans une espèce donnée, du directeur et du président.
Exemple : TC, 15 Novembre 2004, Mme Pons c/Office municipal de Tourisme de Carcassonne, n° C3425 :
« Considérant que l'office municipal du tourisme de Carcassonne constitue, par application de l'article L. 2231-9 du code général des collectivités territoriales, un établissement public à caractère industriel et commercial ; que les litiges relatifs à la situation individuelle des agents d'un tel établissement relèvent de la compétence des
juridictions de l'ordre judiciaire, à l'exception de ceux qui intéressent l'agent comptable, s'il a la qualité de comptable public, et l'agent chargé de la direction de l'ensemble des services de l'établissement ; que les mesures destinées à la mise en œuvre
de la règle posée par l'article L. 2231-13 du code général des collectivités territoriales
en vertu duquel le fonctionnement de l'office du tourisme est assuré par le directeur
sous l'autorité et le contrôle du président ne sont pas de nature à lui retirer la qualité
d'agent chargé de la direction de l'ensemble des services de l'établissement ;
Considérant que Mme X a été engagée par contrat en qualité de directrice de l'office
municipal du tourisme de Carcassonne dans les conditions prévues au code général
des collectivités territoriales ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le litige
qui l'oppose à l'office à l'occasion de la résiliation de son contrat de travail relève de
la compétence des juridictions administratives ;[…] »
Le rétablissement du principe posé par l’arrêt Boglione ne serait sans doute pas contreindiqué.
B - Les solutions particulières
1 - Les dérogations aux principes
Le personnel des services publics à caractère industriel et commercial est, en principe, exclu de la catégorie des agents publics. Mais cette mise à l'écart n'est pas absolue. Des dérogations
y sont apportées.
Exemples :
l’article 1er-IV de la loi du 23 décembre 1964, devenu l’article L. 122-3 du Code forestier, pour les agents de cet établissement public industriel et commercial qu’est
l’Office National des Forêts,
les dispositions des articles 29 et suivants de la loi du 2 juillet 1990 relative à
l’organisation du service public de la poste et des télécommunications, pour les
agents de La Poste et de France Telecom recrutés dans le cadre des corps spécifiques
de ces organismes.
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D'une manière générale, lorsqu'un établissement public administratif est transformé en établissement à caractère industriel et commercial, le personnel ne change de statut juridique que si
l’autorité compétente le précise - CE, Ass., 29 janvier 1965, L’Herbier, à propos de la Caisse nationale des marchés.
Signalons de nouveau que la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 transposant la directive
communautaire 1999/70/CEE du 28 juin 1999 dispose :
« Lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé
est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre
d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer
à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la
nature du contrat dont ils sont titulaires. »
Il arrive qu’un service public soit inexactement qualifié par les textes de service public à
caractère industriel et commercial ou de service public à caractère administratif.
Si la qualification émane d’une autorité administrative, le juge se reconnaît le pouvoir de
la modifier. Il considérera qu'il s'agit en réalité, selon les cas,
soit d'un service public administratif, et que donc ses employés sont des agents publics - CE, 13 novembre 1970, Dame Conqui, n° 76187 ;
soit d’un service public à caractère industriel et commercial, dont on sait qu’en principe les agents relèvent d’un statut de droit privé, à deux exceptions près – Cf. supra.
2 - L’application dérogatoire des principes
Outre le fait qu’elle sert à identifier les fonctionnaires, la distinction agents publics - agents
de droit privé présente un intérêt contentieux.
L'agent public étant soumis au droit public, les litiges l’opposant à son employeur sont
portés devant la juridiction administrative.
L'agent de droit privé relevant du droit privé, les différends d’ordre professionnel auxquels il est partie ressortissent à la compétence des juridictions judiciaires.
Mais la compétence ne suit pas toujours le fond.
La liaison du fond et de la compétence est rompue, par exemple, dans le cas des « recrutés
locaux ».
La pratique est devenue courante pour les administrations françaises exerçant leur activité
à l'étranger de recruter certaines catégories de personnel dans les conditions du droit local.
Il s'agit non seulement d’agents de service et autres personnels chargés de tâches d'exécution, mais également de chercheurs, d'enseignants, de surveillants, qui participent donc directement à l'exécution du service public.
Ces « recrutés locaux » peuvent être de nationalité étrangère, mais aussi de nationalité
française ; dans ce dernier cas, il peut s'agir, par exemple, de conjoints d'expatriés ou de personnes ayant de façon permanente le centre de leurs intérêts familiaux et professionnels dans le
pays de recrutement.
La reconnaissance jurisprudentielle de cette pratique est ambiguë. Le juge administratif
français semble, en effet, faire prévaloir l'application d'un régime de droit public français et a été
amené à condamner les administrations françaises à l'étranger qui avaient contourné les principes
en ayant recours au droit local (CE, 27 mars 1985, Ministre des relations extérieures c/ Sakaï,
n° 53674). Dans d'autres cas, en revanche, il a considéré que des agents publics pouvaient être
soumis au droit local étranger, en l'absence de toute stipulation en ce sens d'une convention internationale (CE, 7 janvier 1987, Mme Félicien, n° 32262 ; CE, 10 mars 1997, Mme de Waele,
n° 163182 - application du droit mexicain du travail au cas d’une enseignante belge).
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Enfin, par le passé, le partage juridictionnel des compétences a révélé ses limites rationnelles.
Hypothèse souvent réalisée : un agent ayant recruté par une personne publique change
de statut. Quelle sera la juridiction compétente lorsque surviendra un litige relatif aux statuts
successifs de l'intéressé ?
nelle :
Le Tribunal des conflits a posé, successivement, deux solutions d’inégale valeur ration-
1e solution : TC, 25 novembre 1963, Dame veuve Mazerand c/ Commune de Jonquières. Une femme a été recrutée par une commune. De 1942 à 1946, elle s'occupe du nettoyage des locaux scolaires, de l’allumage et de l’entretien des appareils de chauffage. De 1946
à 1952, elle a en charge la garderie d'enfants de cette école.
Pour le Tribunal des conflits, la requérante avait la qualité agent de droit privé jusqu'en
1946, puis celle d’agent de droit public jusqu'en 1952. En conséquence, elle devait engager deux
procédures : l’une devant les juridictions judiciaires et l’autre devant les juridictions administratives.
Cette solution a été confirmée : TC, 29 juin 1987, Bungener, n° 02473. En l’espèce, un
professeur avait été engagé par un hôpital public pour donner des cours de français et de calcul.
Pendant un an, il avait pour élèves à la fois les personnels paramédicaux et les personnels de
ménage. Puis, son auditoire s’est réduit à ces derniers, ce qui a fait de lui un agent de droit privé.
2e solution : TC, 26 novembre 1990, Mlle Salliège, 02633. Engagée par le Centre de
cure médicale de Pignelin, la requérante avait été « chargée, du 1er septembre au 4 octobre
1988, d'assister les malades dans leurs déplacements et de travaux à la buanderie puis, du 5 octobre 1988 au 31 mars 1989, date de son licenciement, exclusivement affectée à la buanderie
où elle repassait le linge ». Cette dernière affectation lui a conféré la qualité d’agent de droit
privé. Le Tribunal des conflits renverse sa jurisprudence ; une seule juridiction connaîtra du litige, et cette juridiction sera celle que désignera le dernier statut de l’agent :
« [Considérant] que, s'agissant de déterminer les droits qu'ouvre au salarié la rupture de
son contrat, il y a lieu, pour déterminer la compétence juridictionnelle, de se référer aux
fonctions qu'exerçait l'intéressée au cours de la période précédant immédiatement le licenciement ; que les fonctions qu'exerçait, en dernier lieu, Mlle Salliège à la buanderie
de l'établissement ne la faisaient pas directement participer à l'exécution même du service public hospitalier ; qu'en l'absence de clauses exorbitantes du droit commun, le
contrat était, par suite, régi par le droit privé ; qu'il suit de là que le litige relève de la
compétence des tribunaux judiciaires ; »
Ces cas de dédoublement statutaire ne devraient plus se présenter après l’arrêt
« Berkani » du 25 mars 1996 - Cf. supra, p. 15.
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SECTION II : Le fonctionnaire, un agent de droit public titulaire
I – Le fonctionnaire, un agent de droit public non contractuel
A – Le contrat de fonction publique : une thèse irrecevable
1 - L’économie de la thèse
L'entrée dans la fonction publique met incontestablement en présence deux volontés, celle
du candidat et celle de l'administration.
L'une et l'autre volonté sont libres.
L'administration n'a pas l'obligation de pourvoir aux vacances d'emploi - même après
un concours, sauf disposition législative contraire.
Le candidat peut priver d'effet sa nomination en la refusant – on ne devient pas fonctionnaire à son corps défendant.
Cette rencontre de volontés donne-t-elle naissance à un contrat ?
Le Conseil d’État a cru devoir répondre par l’affirmative : - CE, 7 août 1909, Winkell et
Rosier, n° 37317 (deux espèces).
Explication des deux espèces :
En mars et en mai 1909, une série de grèves paralysent - certains diront ironiquement
« déjà » ! - l'administration des postes.
Le Gouvernement réprime le mouvement en révoquant près de 600 grévistes. Deux
d’entre eux, Winkell et Rosier, défèrent leur révocation à la censure du Conseil d’État, motif pris
de la violation de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 qui dispose :
« Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques, ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les
notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être
l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardés dans
leur avancement à l'ancienneté ».
Le Conseil d’État rejette les recours :
« [Considérant] qu'en se mettant en grève, les agents préposés au service public, sous
quelque dénomination que ce soit, ne commettent pas seulement une faute individuelle, mais
qu'ils se placent eux-mêmes, par un acte collectif, en dehors de l'application des lois et des règlements édictés dans le but de garantir l'exercice des droits résultant pour chacun d'eux du
contrat de droit public qui les lie à l'Administration ; […] ».
Les conclusions du commissaire du gouvernement Tardieu explicitent la relation contractuelle : « C’est cet accord de volontés qui se produit lors de la nomination acceptée par le fonctionnaire, accord générateur d’obligations réciproques, qui constitue ce qu’on appelle le contrat
de fonction publique. »
2 - Les apories de la thèse
La théorie du contrat de fonction publique a été vivement critiquée par une partie de la doctrine.
Hauriou a même proposé une solution de rechange. Selon lui, le fonctionnaire se trouve
dans une situation de réquisition consentie. En effet, la puissance publique disposerait d’un droit
de réquisition à l’effet de pourvoir les emplois publics. Mais la demande étant au moins égale à
l’offre, le droit de réquisition ne s’exerce qu’à l’égard de ceux qui le veulent bien.
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La thèse du Doyen Hauriou procède d’une pure fiction : en droit positif, on ne trouve nulle
trace d’une quelconque réquisition consentie.
De son côté, le Conseil d’État ne tire pas toutes les conséquences de sa qualification de
contrat de fonction publique. Ainsi, affirme-t-il parallèlement
que tous ceux qui occupent des emplois identiques sont nécessairement soumis à des
normes identiques,
que le contrat de fonction publique ne peut être résilié ou modifié suivant l'accord des
parties.
Finalement, ces difficultés logiques (ces apories) ont déterminé le Conseil d’État à rompre
avec la théorie du contrat de fonction publique : CE, Sect., 22 octobre 1937, Dlle Minaire et
autres, Rec., p. 843)
Les faits de l’espèce rappellent, à bien des égards, les affaires, précitées, Winkell et Rosier.
Le Conseil d’État se borne à estimer : « [Considérant] qu'en se mettant en grève, les
agents préposés au service public ne commettent pas seulement une faute individuelle, mais
qu'ils se placent eux-mêmes, par un acte collectif, en dehors de l'application des lois et règlements édictés afin de garantir l'exercice des droits qui leur appartiennent à l'égard de la puissance publique ; […] »
L’absence de toute référence, implicite ou explicite, au contrat de fonction publique a été
considérée comme un revirement de jurisprudence. Les décisions ultérieures corroborent cette
interprétation.
*
En définitive, des deux catégories d'agents publics –
1. ceux qui ont été nommés (par voie d’actes unilatéraux)
2. et ceux qui ont été recrutés par contrat –
seuls les premiers peuvent être ab initio des fonctionnaires.
Juridiquement, le principe du caractère statutaire (et donc non contractuel) de la situation
n’est pas battu en brèche par la politique de la concertation.
L’article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation
du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique, souligne :
« Les organisations syndicales de fonctionnaires ont qualité pour participer au niveau national à des négociations relatives à l'évolution des rémunérations et du
pouvoir d'achat des agents publics avec les représentants du Gouvernement, les
représentants des employeurs publics territoriaux et les représentants des employeurs publics hospitaliers. »
Il résulte de cette politique de gestion une sorte de contractualisation des rapports collectifs de l’administration avec ses agents. Il n’y a pas pour autant mutation de la situation individuelle des fonctionnaires. Les engagements pris par le gouvernement n’ont pas de portée juridique contraignante : CE, 15 octobre 1971, Syndicat national indépendant des C.R.S., n° 78788.
Seule leur concrétisation par des textes législatifs ou réglementaires les rend opposables ou invocables.
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B - Le caractère statutaire et réglementaire de la situation du fonctionnaire
Aux termes de l'article 4 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations
des fonctionnaires, « le fonctionnaire est, vis-à-vis de l'administration, dans une situation statutaire et réglementaire ».
La formule est reprise de l'article 5 de la loi du 19 octobre 1946 portant statut général des
fonctionnaires de l'État.
Ainsi se trouve légalement écartée l'idée même de contrat de fonction publique.
1 - La mesure du principe statutaire
Le principe est que la situation juridique du fonctionnaire procède exclusivement des lois
et règlements – actes juridiques unilatéraux par excellence.
A l'appui de cette solution, on invoque généralement des raisons tirées des exigences du
service public :
la nécessaire primauté de l'intérêt général sur les intérêts particuliers des fonctionnaires,
la nécessité et l’obligation d'adapter le service public en modifiant ses règles d'organisation et de fonctionnement.
Des stipulations contractuelles ne pourraient que faire obstacle à ces visées d'intérêt général.
Au contraire, le régime statutaire permet l'application de principes et de règles de droit
public propres à sauvegarder l'intérêt général.
Quels sont ces règles et principes ? En d'autres termes, quelles sont les conséquences du
caractère légal et réglementaire de la situation du fonctionnaire ?
- 1e conséquence : la situation juridique du fonctionnaire - c'est-à-dire ses droits et
obligations - est déterminée à l'avance par la loi et le règlement. En raison de cette détermination
générale et impersonnelle, elle est la même pour tous les fonctionnaires appartenant au même
groupe statutaire.
- 2e conséquence : la situation juridique du fonctionnaire peut être modifiée unilatéralement par son employeur. Juridiquement, l'invocation de droits acquis ne saurait y faire obstacle.
En effet, d'une manière générale, il n'y a pas de droits acquis au maintien d'une réglementation quelconque.
Illustrations :
CE, 4 mai 1960, Jaffray : « Il appartient au gouvernement, sous réserve des dispositions
législatives, de modifier à tout moment, suivant les besoins du service, les règlements en vigueur, et notamment les règlements relatifs à la carrière des fonctionnaires. »
CE 7 juillet 1999, M. Glaichenhaus, n° 197499 : « Considérant, d'une part, que les droits
et obligations des fonctionnaires sont définis par des textes législatifs ou réglementaires et
que les avantages que les agents tirent de leur statut sont subordonnés au maintien en vigueur des textes qui les confèrent ; que, par suite, le moyen tiré par M. Glaichenhaus de ce
que les décisions susmentionnées porteraient atteinte à des droits acquis en ce qu'elles prévoient, pour certains agents, une réduction du niveau des primes d'activité et ne maintiennent que temporairement un régime de primes ancien ne peut être accueilli ; »
Ce principe s'applique même si le requérant est entré dans la fonction publique en considération d’avantages déterminés.
Toutefois, trois tempéraments existent - ils permettent d'adoucir la rigueur de la règle :
1. La non-rétroactivité. Les modifications réglementaires sont certes, en principe, d'application immédiate. Mais elles n'ont de portée rétroactive que si le législateur l'a décidé sans ambiguïté.
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2. Le respect du principe de sécurité juridique : CE, Ass., 24 mars 2006, Société KPMG et
autres, n° 288460. Il incombe à l’autorité investie du pouvoir réglementaire d’édicter,
pour des motifs de sécurité juridique, les mesures transitoires qu’implique, s’il y a
lieu, une réglementation nouvelle.
3. Le respect des droits individuels. Hypothèse : l'autorité supérieure fait application des
lois et règlements à la situation d’un fonctionnaire. Elle prend, par exemple, une décision de nomination, de titularisation, de promotion ou d'octroi de congé. Le bénéficiaire acquiert un droit au maintien de la nouvelle situation ainsi créée. Le retrait de
ces décisions individuelles n'est pas discrétionnaire : CE, 2 juin 1937, Puyaubreau.
- 3e conséquence : sauf dispositions législatives contraires, les conventions particulières, les arrangements passés entre l'administration et le fonctionnaire sont nuls. Le juge leur
dénie tout effet juridique. Ils ne sont opposables ni à l'administration ni au fonctionnaire - CE, 11
janvier 1946, Gérald. Si l'engagement de l'administration cause un préjudice au fonctionnaire,
celui-ci peut en obtenir réparation.
- 4e conséquence : le recours pour excès de pouvoir est recevable contre les décisions
administratives prises en méconnaissance des dispositions statutaires. Cf. l’intérêt de l’arrêt CE, 8
mars 1912, Lafage, n° 42612.
2 – Le caractère relatif du particularisme statutaire
Au niveau des principes, l’opposition situation statutaire - situation contractuelle est réelle.
Toutefois, en pratique, la situation de l'agent public contractuel rappelle, à bien des égards
celle du fonctionnaire. En réalité, l'agent contractuel se trouve dans une situation partiellement
contractuelle et partiellement statutaire. Le contrat n'en régit que certains éléments : par exemple,
la durée de l’engagement ou la définition du poste occupé.
Les autres éléments sont déterminés ou modifiés unilatéralement par l'administration :
obligations de service, mutation, régime des congés.
Par exemple, les dispositions réglementaires qui se rapportent aux modalités de calcul et
de paiement de l'indemnité éventuellement due, en cas de licenciement, aux agents intéressés présentent un caractère d'ordre public.
Par suite, la collectivité publique qui a conclu, avec un agent non titulaire, un contrat stipulant des modalités de calcul de cette indemnité différentes de celles prévues par ces dispositions, est tenue de proposer à l'agent une modification des stipulations correspondantes.
Une telle modification portant, en outre, sur un élément essentiel du contrat, la collectivité
est en droit de licencier l'agent qui la refuse - CE, 14 juin 2004, Leplâtre, n° 2506951.
De même, les parties ne sauraient assigner au contrat une durée différente de celle qui a
été fixée par les ministres compétents – CE, Sect. 25 mai 1979, Mme Rabut, n° 06436, 06437.
Il arrive même que les règlements fixent entièrement la situation de certains agents contractuels de droit public.
1
Cf. aussi CE, 1er octobre 2001, Commune des Angles et Régie autonome des sports et loisirs de la commune des
Angles, n° 221037.
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Quel que soit le cas de figure, il en résulte des conséquences incompatibles avec une situation purement contractuelle :
1. la décision de conclure ledit contrat est créatrice de droits, comme l’est la nomination
d’un fonctionnaire : CE, 2 avril 1971, Tlatli, n° 78203. Dans une décision Cavallo fort remarquée,
le Conseil d’État précise l’interaction entre le caractère créateur de droits du contrat et les irrégularités susceptibles de l’entacher :
« Considérant, en premier lieu, que, sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le
contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de celui-ci ;
que, lorsque le contrat est entaché d'une irrégularité, notamment parce qu'il méconnaît une disposition législative ou réglementaire applicable à la catégorie d'agents dont relève l'agent contractuel
en cause, l'administration est tenue de proposer à celui-ci une régularisation de son contrat afin
que son exécution puisse se poursuive régulièrement ; que si le contrat ne peut être régularisé, il
appartient à l'administration, dans la limite des droits résultant du contrat initial, de proposer à
l'agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande,
tout autre emploi, afin de régulariser sa situation ; que, si l'intéressé refuse la régularisation de son
contrat ou si la régularisation de sa situation, dans les conditions précisées ci-dessus, est impossible,
l'administration est tenue de le licencier ; » - CE, Sect., 31 décembre 2008, M. Cavallo, n° 283256 ;
2. l’administration a le droit de modifier unilatéralement la situation de l'agent public
contractuel dans l’intérêt et pour les besoins du service : CE, 24 avril 1964, Syndicat national des
médecins des établissements pénitentiaires, Rec. p. 342 ;
3. la rupture du contrat peut être décidée à tout moment par l'administration dans l'inté-
rêt du service. La décision Cavallo précitée précise toutefois :
« Considérant, en deuxième lieu, que, lorsque le juge est saisi par un agent contractuel de
droit public d'une demande tendant à l'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait
d'une décision de l'administration de mettre fin à son contrat, il lui appartient d'apprécier le préjudice effectivement subi par l'agent ; que, dans le cas où l'administration fait valoir, à bon droit, que
le contrat de l'agent méconnaissait des dispositions qui lui étaient applicables et était, par suite, entaché d'irrégularité, une telle circonstance ne saurait, dès lors que l'administration était tenue de
proposer la régularisation du contrat de l'agent, priver celui-ci de la possibilité de se prévaloir, pour
établir son préjudice, des dispositions qui ont été méconnues et des clauses de son contrat qui ne
sont affectées d'aucune irrégularité ; que, dans le cas où l'administration fait valoir à bon droit que
l'agent occupait un emploi auquel un fonctionnaire pouvait seul être affecté et se trouvait ainsi dans
une situation irrégulière, et que, à la date à laquelle il a été mis fin à son contrat, aucun autre emploi
ne pouvait lui être proposé dans les conditions définies ci-dessus, aux fins de régularisation de sa
situation, l'agent ne peut prétendre avoir subi aucun préjudice du fait de la décision de mettre fin
à son contrat, mais seulement demander le bénéfice des modalités de licenciement qui lui sont applicables ; » - CE, Sect., 31 décembre 2008, M. Cavallo, n° 283256 ;
4. l’annulation du licenciement d’un agent public contractuel impose sa réintégration
dans un emploi équivalent : CE, 1er juin 1956, Leroux ;
5. le recours pour excès de pouvoir est recevable à l'encontre
o du contrat lui-même : CE, Sect., 30 octobre 1998, Ville de Lisieux, n° 1496621 ;
1
« Considérant, d'une part, qu'eu égard à la nature particulière des liens qui s'établissent entre une collectivité publique et ses agents non titulaires les contrats par lesquels il est procédé au recrutement de ces derniers sont au
nombre des actes dont l'annulation peut être demandée au juge administratif par un tiers y ayant un intérêt suffisant; que, par suite, l'annulation des contrats par lesquels le maire de Lisieux a procédé au recrutement d'agents
communaux pouvait être demandée aux premiers juges par M. Fanton, qui invoquait sa qualité de conseiller municipal et soutenait que ces décisions avaient été prises en méconnaissance des compétences du conseil municipal;[…] » - AJDA n° 12 1998.
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o du refus de modifier certaines stipulations du contrat afin de les rendre conformes aux prescriptions réglementaires applicables : CE, Sect., 25 mai 1979,
Mme Rabut, n° 06436, 06437 ;
o de la décision de résilier le contrat : CE, 8 décembre 1948, Dlle Pasteau ;
o de la nomination à un emploi que l’agent contractuel pourrait occuper : CE, Sect.,
29 mars 1991, Fraisse, n° 77652.
Bruno Genevois observe à juste titre : « L’aspect proprement contractuel est illusoire.
Derrière le contrat, il y en fait un statut qui se dessine. » - Conclusions sur l’arrêt CE, Sect., 25
mai 1979, Mme Rabut, n° 06436, 06437, arrêt précité.
Un point sépare tout de même le contrat du statut : l’agent contractuel peut nouer des arrangements particuliers avec l’administration dans la mesure où…les règlements le permettent.
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II - Le fonctionnaire, un agent public voué à une carrière
L'article 2 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à
la fonction publique de l'État souligne :
« Le présent titre s'applique aux personnes qui [...] ont été nommées dans
un emploi permanent à temps complet et titularisées dans un grade de la
hiérarchie des administrations centrales de l'État, des services déconcentrés en dépendant ou des établissements publics de l'État. »
De cette définition implicite du fonctionnaire, on peut retenir deux éléments (A et B).
A - La nomination dans un emploi permanent à temps complet
Deux éléments peuvent être mis en exergue (1 et 2).
1 - La nomination
Elle distingue le fonctionnaire
de l'agent public contractuel,
du fonctionnaire de fait.
Ce dernier assure une fonction publique (ici, l’expression désigne une activité) à la suite
d'une investiture irrégulière.
La théorie du fonctionnaire de fait, qui trouve son fondement dans l'adage Error communis facit jus, accorde une grande importance aux apparences. Elle permet de « regarder »
comme légales les décisions prises par une autorité illégalement investie des pouvoirs qu'elle a
exercés.
La doctrine distingue, pour l'application de cette théorie, les « périodes normales » et les
périodes de circonstances exceptionnelles.
Le caractère hautement dérogatoire des périodes de circonstances exceptionnelles étant
bien connu, l’attention se portera sur les applications qui sont faites de la théorie du fonctionnaire
de fait en « période normale ».
S’agissant donc des « périodes normales », Gaston Jèze1 distingue trois hypothèses :
1. le « fonctionnaire de droit », qui dispose d’un titre d'investiture régulier,
2. l'« usurpateur de fonction », qui agit sans aucune investiture
3. et le « fonctionnaire de fait », qui, « dans certaines conditions de fait, occupe la fonction, exerce la compétence, accomplit l'acte, à la suite d'une investiture irrégulière »,
que cette investiture ait été irrégulière dès l'origine ou qu'elle soit devenue caduque.
Pour que la théorie du « fonctionnaire de fait » trouve à s'appliquer, il faut
1. que l'acte accompli l'ait été « dans les formes et dans les conditions légales, dans les
limites de la compétence dont sont investis les agents réguliers »
2. et que l'agent ait exercé sa fonction « en vertu d'une investiture plausible ».
Le caractère plausible de l'investiture recouvre, selon Edmond Jouve,
a. un élément visible, l'exercice de la fonction devant être « public, paisible, normal »
b. et un élément psychologique qui consiste en « la bonne foi des tiers et de l'autorité de
fait ».
1
Les situations juridiques apparentes R.D.P. 1968
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L'une des illustrations les plus fameuses de la théorie du « fonctionnaire de fait » est
l'œuvre du juge judiciaire. Il s'agit de l'affaire dite des mariages de Montrouge. Un conseiller
municipal, à qui le maire de Montrouge avait irrégulièrement délégué les fonctions d'officier de
l'état civil, avait célébré un certain nombre de mariages dont le tribunal de la Seine prononça, sur
la demande du ministère public, la nullité.
Mais, par un arrêt en date du 7 août 1883, la Cour de cassation (chambre civile) décida
que les mariages étaient valables.
Pour sa part, la jurisprudence administrative, quoique assez abondante en la matière (Cf.
par exemple CE, 2 novembre 1923, Association des fonctionnaires de l'administration centrale
des postes et des télégraphes et sieur Bousquié, Leb. p. 699), ne fournissait guère d'illustrations
récentes.
Puis est intervenue la décision CE, Sect., 16 mai 2001, Préfet de police c/ M. Mtimet,
n° 231717.
Faits de l'espèce
M. Massoni est nommé préfet de police en 1993. Par décret du 11 janvier 2001, il est admis à
faire valoir ses droits à la retraite à compter du 14 janvier, date à laquelle il a atteint la limite d'âge de
son grade.
Le 12 janvier, le ministre de l'Intérieur lui demande, par lettre personnelle, de bien vouloir assurer l'intérim des fonctions de préfet de police.
Le 19 février 2001, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris annule
pour incompétence un arrêté de reconduite à la frontière signé par un des agents de la préfecture de
police, en vertu de l'une des délégations de signature consenties par M. Massoni. Le conseiller délégué
avait en effet estimé que, compte tenu des termes de l'article 3 du décret du 5 mai 1972 relatif à la délégation de signature ou à la suppléance du préfet de police, le ministre de l'Intérieur ne pouvait légalement confier l'intérim de ces fonctions à une personne autre que le directeur de cabinet.
Après avoir relevé appel de ce jugement, le préfet de police choisit finalement de se désister.
L'article 3 du décret du 5 mai 1972 est alors modifié par un décret du 28 février 2001. Il est désormais prévu que, « en cas de vacance momentanée de l'emploi de préfet de police, sans qu'une personne ait été chargée de l'intérim [...], le directeur de cabinet [...] exerce les fonctions du préfet de police ». Le décret est publié au Journal officiel du 1er mars 2001. Le même jour, par une décision publiée
partiellement au Journal officiel et intégralement au Bulletin officiel de la ville de Paris, le ministre de
l'Intérieur charge à nouveau M. Massoni, «dans l'intérêt du service [...], d'assurer l'intérim des fonctions
de préfet de police jusqu'à la nomination du titulaire de ce poste». Celui-ci délègue à nouveau sa signature à certains agents de la préfecture.
Par jugement du 20 mars 2001, le tribunal administratif de Paris annule, toujours pour incompétence, l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mtimet. Mais le raisonnement qui conduit à
l'annulation a changé. Le tribunal a en effet considéré que les nouvelles dispositions de l'article 3 du décret du 5 mai 1972 ne permettaient la désignation d'un intérimaire que si la continuité du service était
menacée, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.
Le préfet de police relève appel de ce jugement devant le Conseil d’État.
Solution de l’espèce :
La jurisprudence est fort restrictive en ce qui concerne les conséquences de la survenance de la
limite d'âge des fonctionnaires civils et militaires (Cf. Partie II, Chapitre I).
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Celle-ci « entraîne de plein droit la rupture du lien de ces agents avec le service » et la nullité
« des décisions administratives individuelles prises en méconnaissance de la situation née de la rupture
de ce lien » (CE, Sect. 3 février 1956, Sieur de Fontbonne, Leb. p. 45).
Le Conseil d’État juge
1 - que M. Massoni ne bénéficiait pas d’une investiture régulière : « […] il ne ressort pas des
pièces du dossier que des circonstances particulières au premier trimestre 2001 aient pu justifier légalement que M. Massoni fût maintenu dans les fonctions de préfet de police jusqu'à la nomination de son
successeur […]»
2 - et que, néanmoins, l’acte pris sur le fondement de cette investiture régulière était parfaitement légal : « Considérant cependant qu'un fonctionnaire irrégulièrement nommé aux fonctions qu'il
occupe doit être regardé comme légalement investi de ces fonctions tant que sa nomination n'a pas été
annulée; que c'est dès lors à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce que l'arrêté du 1er mars
2001 par lequel M. Massoni a délégué sa signature à M. Szollosi aurait été entaché d'incompétence pour
annuler l'arrêté attaqué, signé sur le fondement de cette délégation […] ».
Ainsi donc, pour le Conseil d’État, à défaut d'annulation contentieuse de la décision de maintenir
M. Massoni dans ses fonctions au-delà de l'âge légal de sa retraite, l'illégalité de son maintien ne vicie
pas par elle-même les actes qui ont été pris par lui ou sous son autorité dans la période correspondante.
Notons que, même dans l'hypothèse d'une telle annulation, les actes pris antérieurement à celleci resteraient valables, la théorie du fonctionnaire de fait apportant une atténuation à l'effet rétroactif
des annulations contentieuses.
***
Exceptionnelle, réaliste et pragmatique, la théorie du fonctionnaire de fait se fonde sur des
raisons difficiles à récuser :
le fonctionnement régulier des pouvoirs public - qui est, en effet, d'intérêt public ;
comme l’a souligné Edmond Jouve, « il serait fastidieux - et, en outre, impossible que tout particulier ait la possibilité, avant une quelconque démarche, de vérifier
l'investiture des agents avec lesquels il entre en relation. Le fonctionnement régulier,
continu et paisible de l'administration s'y oppose. De tels comportements créeraient
une situation contraire aux intérêts supérieurs de la société. La solidarité sociale serait
mise en danger et la primauté de l'intérêt public compromise »1. On imagine mal en
effet chaque administré s’évertuer à vérifier que le préfet de police n'avait pas atteint
la limite d'âge de son grade avant d'exécuter ses décisions.
En définitive, la théorie du fonctionnaire de fait permet de sauver de l’annulation les actes
d’un individu irrégulièrement investi.
On peut tout de même espérer que, pour parer à toute dérive, le juge veillera méticuleusement à s’assurer, dans chaque espèce, que ses conditions d’applications sont réunies.
Rappelons, avec Jèze, que ces conditions sont au nombre de deux :
1. l'acte litigieux doit avoir été accompli « dans les formes et dans les conditions légales,
dans les limites de la compétence dont sont investis les agents réguliers »
2. et il faut que l'agent ait exercé sa fonction « en vertu d'une investiture plausible »2.
1
2
Les situations juridiques apparentes R.D.P. 1968
Essai d'une théorie générale des fonctionnaires de fait. RDP 1914
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2 - L'occupation permanente d'un emploi permanent
Cette double permanence est un élément de la définition même du fonctionnaire - CE, 24
mars 1950, Vauthron.
Au demeurant, l'article 3 de la Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des
fonctionnaires réserve aux fonctionnaires les emplois civils permanents de l'État et des collectivités locales.
Toutefois, l'interprétation jurisprudentielle ne confond pas occupation permanente, occupation à temps complet et emploi à temps complet.
Seule la première expression importe pour la définition du fonctionnaire. D'ailleurs, sous
certaines conditions, le travail à temps partiel (occupation à temps non complet) est accessible
aux fonctionnaires.
Seulement, dans la fonction publique de l'État, tout emploi budgétaire est à temps complet
même s'il est occupé simultanément par des agents travaillant à temps partiel.
L'occupation permanente d'un emploi permanent distingue d’abord les fonctionnaires de certains membres des cabinets ministériels ou présidentiels. La nomination de ces
derniers est à la discrétion des autorités politiques. Celles-ci doivent toutefois s'assurer qu'ils
jouissent de leurs droits civiques et qu'ils se trouvent en position régulière au regard du code du
service national. Le Conseil d’État leur reconnaît la qualité d'agents publics. Mais cette reconnaissance est subordonnée à la régularité de leur désignation.
L'occupation permanente d'un emploi permanent distingue ensuite les fonctionnaires des vacataires. Ces derniers travaillent et sont rémunérés à la vacation. Une tâche est exécutée à la vacation lorsque cette exécution se réalise par unités de temps - vacations - et donne
lieu à une rémunération calculée sur la base du nombre d'unités effectuées. Le terme de vacation
est donc polysémique : mode d'exécution, unité de durée, rémunération forfaitaire attachée à cette
unité. Dans certaines administrations, les vacataires sont dénommés parfois « décisionnaires »
ou « tas de cailloux » - aux Ponts et chaussées, parce qu’ils sont rémunérés sur les crédits de matériel, et donc assimilés à des pierres.
Le recours à des vacataires constitue souvent une manière de contourner l'interdiction de
recruter des non-titulaires.
Normalement, les vacataires travaillent à titre temporaire et à temps incomplet.
L'occupation permanente d'un emploi permanent distingue enfin les fonctionnaires
des auxiliaires. Il s'agit en principe d'un personnel d’appoint. Ils forment une catégorie très hétérogène. Leur recrutement résulte soit d'un acte de nomination (auxiliaires au sens strict) soit d'un
contrat.
À l'origine, l'engagement d'auxiliaires procédait des considérations suivantes :
facilité de recrutement. C’était souvent une manière de surmonter la rigidité des procédures : on recrutait des agents sans créer d’emplois, en les payant par exemple sur
des crédits de matériels ;
facilité de licenciement si les besoins venaient à disparaître ;
pénurie de candidats justifiant des qualités exigées des fonctionnaires – argument
sans pertinence à l’heure actuelle ;
faiblesse du coût de l'emploi d'auxiliaires.
En somme, les auxiliaires constituaient une sorte de « sous-fonction publique » - toutefois,
il y avait et il y a encore des contractuels de luxe.
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Progressivement, cependant, la jurisprudence a amélioré leur statut en dégageant, le plus
souvent du code du travail, des principes généraux du droit et des règles :
le principe obligeant l'administration à verser à ses agents une rémunération au
moins égale au SMIC : CE, Sect., 23 avril 1982, Ville de Toulouse c/ Mme Aragnou,
n° 36851 ;
le principe interdisant, sauf nécessité propre au service et seulement dans certains
cas, de licencier une salariée en état de grossesse : CE, Ass., 8 juin 1973, Dame Peynet, n° 80232. Cette protection a été inscrite dans les textes. Par exemple, le décret
n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux agents non titulaires de l'État dispose en son
article 49 : « Aucun licenciement ne peut être prononcé lorsqu’un agent se trouve
en état de grossesse, médicalement constatée, ou pendant une période de quatre
semaines suivant l’expiration du congé de maternité ou d’adoption. » Voir aussi
respectivement, s’agissant des fonctions publiques territoriale et hospitalière, l’article
41 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 et l’article 45 du décret n° 91-155 du 6 février 1991. Ces dispositions sont méconnues dès lors que la décision de licenciement
est notifiée à l'intéressée pendant son congé de maternité, alors même qu'est fixée
une date d'effet du licenciement postérieure à la fin de ce congé - CE, 4 octobre 1996,
Mme Moestus, n° 149704. Le commissaire du gouvernement Jean Massot justifie
dans les termes suivants l’impossibilité de prononcer le licenciement ou de le notifier
par avance : « Éviter que la femme enceinte ne subisse le traumatisme qui peut résulter de la simple annonce d’un licenciement, même si l’effet de ce licenciement est
différé à la fin de la période de protection » - Conclusions sur CE, 24 avril 1981,
F.O.R.M.A., n° 17038 ;
le principe interdisant à l’employeur d’infliger une sanction pécuniaire à ses salariés : CE, Ass., 1er juillet 1988, Billard et Volle c/ SNCF, n° 66405 ;
la règle selon laquelle une convention collective ne peut comporter que des dispositions plus favorables aux salariés que celles qui résultent des lois et règlements : CE,
Ass., 8 juillet 1994, CGT, n° 105471 ;
le principe interdisant de résilier un contrat de travail pour des motifs tirés du sexe
ou de la situation de famille de l’intéressé : CE, 27 mars 2000, Mme Brodbeck,
n° 155831.
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B - La titularisation dans une hiérarchie administrative
1 - Le caractère inclusif de l’opération
La titularisation, c'est l'opération, et, partant, l'acte juridique qui a pour objet de conférer à
une personne un grade dans un corps de fonctionnaires. Elle se distingue de la nomination qui
attribue un emploi - et, bien sûr, le grade est différent de l'emploi.
Il y a tout de même un lien entre la titularisation et la nomination : l'agent ne saurait être
titularisé sans avoir été nommé dans un emploi permanent - CE, 19 février 1925, Bellec.
La titularisation a été étendue à toutes les fonctions publiques. Naguère, les fonctionnaires
municipaux étaient seulement titulaires d'emplois. La titularisation constitue aujourd'hui un élément de la définition du fonctionnaire en tant qu'elle pérennise les rapports de ce dernier avec la
collectivité publique.
2 - L’exclusion de certaines catégories
Références textuelles communes aux trois versants de la fonction publique :
Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (dite « loi Le Pors »)
Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique.
Il s’agit des non-titulaires : contractuels, vacataires, ouvriers de l'État. Ces catégories
d’agents oscillent en permanence entre inflation et déflation.
Les pouvoirs publics souhaitent les réduire à la portion congrue tout en améliorant leur situation.
Le recours à des agents non-titulaires n’est pas laissé à la discrétion des collectivités publiques.
Rappelons que l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 réserve les emplois permanents aux
fonctionnaires.
Toutefois, des dérogations sont prévues par les trois lois statutaires, ce qui a accentué la
précarité dans les trois versants de la fonction publique.
*
Aussi, le gouvernement a-t-il décidé d’engager en 2010 une négociation avec les partenaires sociaux sur la question des emplois précaires dans la fonction publique.
Une négociation engagée par le gouvernement en 2010 avec les partenaires sociaux a débouché le 31 mars 2011 sur un protocole d'accord signé par six organisations représentatives sur
huit (CFTC, CFDT, CGC, CGT, FO, et UNSA).
C’est sur la base de cet accord qu’a été adoptée la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à
l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la
fonction publique.
Pour l’essentiel, cette loi a pour principes directeurs la titularisation et la « CDI-sation ».
Elle comporte plusieurs dispositions visant à améliorer les conditions d'emploi des agents contractuels :
1. Titularisation. Accès à la fonction publique ouvert pendant 4 ans (c’est-à-dire
jusqu’au 13 mars 2016) au bénéfice des agents contractuels en fonction à la date du 31 mars
2011.
1.1 Modes de recrutement : examens professionnalisés réservés, concours réservés, recrutements réservés sans concours.
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1.2 Conditions d’éligibilité des agents :
Les agents employés en contrat à durée indéterminée (CDI) au 31 mars 2011 sont
admis à concourir auprès de l’administration dont ils relèvent, à la date de clôture des inscriptions
au recrutement, quelle que soit l’ancienneté acquise auprès d’elle.
Pour les agents employés en contrat à durée déterminée (CDD) au 31 mars 2011, le
bénéfice de l'accès à la fonction publique est subordonné à une durée de services publics effectifs
au moins égale à quatre années en équivalent temps plein ;
2. Transformation en CDI, à la date de publication de la loi (13 mars 2013), des CDD des
agents justifiant d’une durée de service auprès de leur employeur d’au moins six ans (trois
ans pour les agents âgés de plus de 55 ans;
3. Clarification et harmonisation des cas de recours aux agents contractuels dans les
trois fonctions publiques, notamment lorsqu’il s’agit de faire face à des besoins temporaires ;
4. Redéfinition des conditions de renouvellement des contrats en CDI au terme d’une durée de 6 ans ;
5. Reconnaissance de la « portabilité » du CDI par fonction publique, à l’occasion de la
mobilité des agents en CDI.
Ne pas chercher à retenir, en vue de l’examen, les tableaux qui suivent.
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Cas et conditions de recrutement d’agents contractuels dans la fonction publique de l’État
Références textuelles :
Loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de
l'État ;
Loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique ;
Décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'État pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;
Décret n° 2005-902 du 2 août 2005 pris pour l'application de l'article 22 bis de la loi n° 84-16 du 11
janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;
Décret n° 2012-631 du 3 mai 2012 relatif aux conditions d'éligibilité des candidats aux recrutements
réservés pour l'accès aux corps de fonctionnaires de l'État des catégories A, B et C et fixant les conditions générales d'organisation de ces recrutements en application de la loi n° 2012-347 du 12 mars
2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;
Décret n° 2013-106 du 30 janvier 2013 relatif à l'ouverture de recrutements réservés pour l'accès à
certains corps de fonctionnaires de l'État relevant du ministre chargé de l'agriculture et de l'Office
national des forêts ;
Circulaire du 26 juillet 2012 relative à la mise en œuvre du dispositif d’accès à l’emploi titulaire dans
la fonction publique de l’État prévu à l’article 1er de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à
l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la
fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la
fonction publique.
Fonction publique de l’État : recrutement d’agents contractuels
Motifs du recrutement
Absence de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les
fonctions correspondantes - Article 4.
Recrutement justifié par la nature des fonctions ou les besoins des
services (sur des emplois de catégorie A et, dans les représentations de l'État à l'étranger - ambassades et consulats -, également
sur des emplois de catégories B et C) - Article 4.
Conditions de recrutement
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou du 13 mars 2012 au 12
mars 2016 directement en CDI,
Ou automatiquement
en CDI lorsque l'agent justifie déjà de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou automatiquement en
CDI lorsque l'agent justifie déjà
de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
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même catégorie hiérarchique
Les fonctions, correspondant à un besoin permanent, impliquent un
service à temps incomplet d'une durée n'excédant pas 70 % d'un
service à temps complet - Article 6.
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou directement en CDI
Remplacement momentané de fonctionnaires ou d'agents contractuels autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé annuel, d'un congé de maladie, de
grave ou de longue maladie, d'un congé de longue durée, d'un
congé de maternité ou pour adoption, d'un congé parental, d'un
congé de présence parentale, d'un congé de solidarité familiale, de
l'accomplissement du service civil ou national, du rappel ou du
maintien sous les drapeaux, de leur participation à des activités
dans le cadre des réserves opérationnelle, de sécurité civile ou sanitaire ou en raison de tout autre congé régulièrement octroyé en
application des dispositions réglementaires applicables aux agents
contractuels de l'État - Article 6 quater.
CDD renouvelable par décision expresse dans la limite de la durée de
l'absence du fonctionnaire ou de
l'agent contractuel à remplacer
Recrutement justifié par la nécessité de faire face à une vacance
temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire (Article 6 quinquies).
CDD d'un an maximum renouvelable par décision expresse pour un
an maximum
Recrutement justifié par la nécessité de faire face à un accroissement temporaire d'activité lorsque cette charge ne peut être assurée par des fonctionnaires (Article 6 sexies)
CDD de 10 mois maximum, renouvellement inclus, au cours d'une
période de 12 mois consécutifs
Recrutement justifié par la nécessité de faire face à un accroissement saisonnier d'activité lorsque cette charge ne peut être assurée
par des fonctionnaires (Article 6 sexies)
CDD de 6 mois maximum, renouvellement inclus, au cours d'une
période de 12 mois consécutifs
Pourvoir des emplois permanents à temps complet d'enseignantschercheurs d’établissements d'enseignement supérieur et de recherche (personnels associés ou invités n'ayant pas le statut de
fonctionnaire) - Article 5.
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou automatiquement en
CDI lorsque l'agent justifie déjà
de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
Pourvoir certains emplois particuliers : emplois supérieurs dont la
nomination est laissée à la décision du Gouvernement ; emplois ou
catégories d'emplois de certains établissements publics figurant, en
raison du caractère particulier de leurs missions, sur une liste établie par décret en Conseil d'État ; emplois ou catégories d'emplois
de certaines institutions administratives spécialisées de l'État ; emplois occupés par les assistants d'éducation, les maîtres d'internat
et les surveillants d'externat des établissements d'enseignement…
Article 3.
CDD ou CDI selon les dispositions
applicables à ces emplois
Recrutement dans le cadre du PACTE (parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d'État) Article 22 bis.
CDD de 12 à 24 mois
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Cas et conditions de recrutement d’agents contractuels dans la fonction publique territoriale
Références textuelles :
Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier
1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif
aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;
Décret n° 2012-1293 du 22 novembre 2012 pris pour l'application du chapitre II du titre Ier de la loi
n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions
d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et
portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.
Fonction territoriale : recrutement d’agents contractuels
Motifs du recrutement
Absence de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les
fonctions correspondantes - Article 3-3.
Recrutement justifié par la nature des fonctions ou les besoins des
services (sur des emplois de catégorie A), sous réserve qu'aucun
fonctionnaire n'ait pu être recruté - Article 3-3.
Conditions de recrutement
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou automatiquement
en CDI lorsque l'agent justifie déjà de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou automatiquement en
CDI lorsque l'agent justifie déjà
de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
Remplacement temporaire de fonctionnaires ou d'agents contractuels autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé annuel, d'un congé de maladie, de
grave ou de longue maladie, d'un congé de longue durée, d'un
congé de maternité ou pour adoption, d'un congé parental ou d'un
congé de présence parentale, d'un congé de solidarité familiale ou
de l'accomplissement du service civil ou national, du rappel ou du
maintien sous les drapeaux ou de leur participation à des activités
dans le cadre des réserves opérationnelle, de sécurité civile ou sanitaire ou en raison de tout autre congé ouvert aux agents contractuels - Article 3-1.
CDD renouvelable par décision expresse dans la limite de la durée de
l'absence du fonctionnaire ou de
l'agent contractuel à remplacer
Recrutement justifié par la nécessité de faire face à une vacance
temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire - Article 3-2.
CDD d'un an maximum renouvelable par décision expresse pour un
an maximum
Recrutement justifié par la nécessité de faire face à un accroissement temporaire d'activité - Article 3.
CDD de 12 mois maximum, renouvellement inclus, au cours d'une
période de 18 mois consécutifs
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Recrutement justifié par la nécessité de faire face à un accroissement saisonnier d'activité - Article 3.
Emploi de secrétaire de mairie d'une commune de moins de 1 000
habitants ou emploi de secrétaire d'un groupement composé de
communes dont la population moyenne est inférieure à 1 000 habitants - Article 3-3.
Emploi à temps non complet dont la durée de travail est inférieure à
50 % d'un temps complet dans une commune de moins de 1 000
habitants ou dans un groupement composé de communes dont la
population moyenne est inférieure à 1 000 - Article 3-3.
Emploi dans une commune de moins de 2 000 habitants ou dans
un groupement de communes de moins de 10 000 habitants dont la
création ou la suppression s'impose à la collectivité - Article 3-3.
Recrutement dans le cadre du PACTE (parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d'État) Article 38 bis.
Emploi fonctionnel (directeur général des services, directeur général des services techniques, etc.)
Emploi de collaborateur de cabinet
Emploi de collaborateur d'un groupe d'élus
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CDD de 6 mois maximum, renouvellement inclus, au cours d'une
période de 12 mois consécutifs
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou automatiquement en
CDI lorsque l'agent justifie déjà
de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou automatiquement en
CDI lorsque l'agent justifie déjà
de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou automatiquement en
CDI lorsque l'agent justifie déjà
de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
CDD de 12 à 24 mois
CDD dans la limite de la durée du
mandat de l'autorité territoriale
Passage automatique en CDI après
6 ans de CDD
CDD dans la limite de la durée du
mandat de l'autorité territoriale
Passage automatique en CDI après
6 ans de CDD
CDD de 3 ans maximum renouvelable dans la limite du terme du
mandat électoral de l'assemblée
Passage automatique en CDI après
6 ans de CDD
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Cas et conditions de recrutement d’agents contractuels dans la fonction publique hospitalière
Références textuelles :
Loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant
dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Décret n° 2013-121 du 6 février 2013 pris pour l'application du chapitre III du titre Ier de la loi
n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions
d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et
portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.
Fonction publique hospitalière : recrutement d’agents contractuels
Motifs du recrutement
Recrutement justifié par la nature des fonctions ou les besoins du
service, notamment lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires
hospitaliers susceptibles d'assurer ces fonctions ou lorsqu'il s'agit
de fonctions nouvellement prises en charge par l'administration ou
nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées
- Article 9.
Conditions de recrutement
CDI ou CDD de 3 ans
maximum renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum. Passage automatique en
CDI après 6 ans de CDD
Ou automatiquement en
CDI lorsque l'agent justifie déjà
de 6 ans de services publics
dans des fonctions relevant de la
même catégorie hiérarchique
Remplacement momentané de fonctionnaires ou d'agents contractuels autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé annuel, d'un congé de maladie, de
grave ou de longue maladie, d'un congé de longue durée, d'un
congé pour maternité ou pour adoption, d'un congé parental, d'un
congé de présence parentale, d'un congé de solidarité familiale, de
l'accomplissement du service civil ou national, du rappel ou du
maintien sous les drapeaux ou de leur participation à des activités
dans le cadre des réserves opérationnelle, de sécurité civile ou sanitaire ou en raison de tout autre congé régulièrement octroyé aux
agents contractuels de la fonction publique hospitalière - Article 9-1.
CDD renouvelable par décision expresse dans la limite de la durée de
l'absence du fonctionnaire ou de
l'agent contractuel à remplacer
Recrutement justifié par la nécessité de faire face à une vacance
temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire - Article 9-1.
CDD d'un an maximum renouvelable par décision expresse pour un
an maximum
Recrutement justifié par la nécessité de faire face à un accroissement temporaire d'activité lorsque celui-ci ne peut être assuré par
des fonctionnaires - Article 9-1.
CDD de 12 mois maximum, renouvellement inclus, au cours d'une
période de 18 mois consécutifs
Pourvoir un emploi à temps non complet d'une durée inférieure au
mi-temps et correspondant à un besoin permanent - Article 9.
CDD de 3 ans maximum
renouvelable par décision expresse pour 3 ans maximum.
Passage automatique en CDI
après 6 ans de CDD
Ou directement en CDI
Recrutement dans le cadre du PACTE (parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d'État) Article 32-2.
CDD de 12 à 24 mois
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CDD de 3 ans maximum renouvelable par décision expresse pour 3
ans maximum
Occuper un emploi de directeur d'établissement
**
Il convient de signaler une règle posée dans une espèce plutôt étrange : est nul le contrat par lequel un agent titulaire est recruté comme agent contractuel par sa propre administration, fût-ce après un détachement. Cette nullité peut être constatée sans formalité, notamment
sans communication préalable du dossier et à tout moment - CE, 23 février 1966, Dlle Brille,
n° 64259.
***/***
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