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elle LIVRES
TRIPLETTE
MÉMOIRES D’ÉLÉPHANTS
Ils ont atteint richesse et gloire à la force de
leur plume et reviennent chacun sur ce qui a
marqué leur existence. Fight !
MARIE SEGURA
EDNA O’BRIEN la grande
dame des lettres irlandaises
Ses amis. Les listes ! Comme s’il voulait
épuiser ce qui a fait la substance de sa vie,
Auster cite tous les lieux qu’il a habités, les
aliments qu’il a goûtés, les voyages qu’il a
faits, ... Étonnamment, il parle peu de ses
influences littéraires ou de ses amitiés.
Ses amours. Sa mère. Son épouse, la
romancière Siri Hustvedt (il faut lire absolument les drôlissimes minutes de leurs réunions de copropriétaires, écrites par elle :
Auster, admiratif, les reproduit telles quelles).
Et puis… lui-même.
Ses emmerdes. Les accidents de jeunesse (un clou qui lui érafle le visage à cinq
ans), un peu d’antisémtisme, des crises de
panique, une certaine hypocondrie : un
quotidien assez plat. Dommage !
Verdict. Pour les fans. Les autres (re)liront
son œuvre, plus féconde à notre avis.
Q« Une fille de la campagne », Edna O’Brien
(Sabine Wespieser).
Q« Chronique d’hiver », Paul Auster (Actes Sud).
>LES BELGES DU MOIS
UMBERTO ECO l’essayiste
italien érudit
Ses amis. Les livres : ah, il en cite, des bouquins… et pas seulement les siens ! Ses
« Confessions » ne sont pas une autobiographie, mais une série de conférences sur
l’art d’écrire. Le début du livre comprend la
liste des quatre ingrédients indispensables
pour ficeler une bonne intrigue et s’assurer
de pondre un best-seller… ou pas.
Ses amours. Les auteurs (Borges, Rabelais,
Joyce…). Les mots compliqués : Eco n’est
pas chercheur en sémiologie par hasard.
Il connaît son Derrida sur le bout des doigts.
Les listes (une passion qu’il a en commun
avec Auster) : le dernier chapitre fait une liste
de listes, toutes plus savoureuses les unes
que les autres.
Ses emmerdes. Les lecteurs qui pensent
que l’auteur est tout-puissant : pour Eco, ce
qu’il a voulu dire est totalement hors de propos, seul ce que le texte dit importe. À bon
entendeur…
Verdict. Pour les romanistes, les apprentis
auteurs et les amoureux des livres !
Q« Confessions d’un jeune romancier », Umberto Eco
(Grasset).
> Dimitri Verhulst, l’auteur de « La Merditude des choses », se prend de passion pour Jésus : inspiré par le fameux tableau
de James Ensor, « L’Entrée du Christ à Bruxelles » (Denoël) cloue au pilori les travers de nos compatriotes. Drôle, féroce, improbable. > François Emmanuel fait court dans « Les Murmurantes » (Seuil) : trois nouvelles « amoureuses », tout en désir et
en mots justes, qui sont autant de points d’entrée plus aisés que « Cheyenn » pour découvrir l’œuvre subtile du psychanalyste.
> Il faut absolument lire « Les Boîtes en carton », de Tom Lanoye. Franchement, on n’avait plus pleuré devant la fin d’un
bouquin depuis… « Belle du Seigneur », c’est dire ! Cette autobiographie, qui met les mots sur une première passion homosexuelle, partage avec Albert Cohen un génial mélange de tendresse et de cynisme. > Emmanuelle Pol vit à Bruxelles
depuis vingt-cinq ans. On lui doit déjà « La Douceur du corset » et « L’Atelier de la chair », bouquins féminins portés par une prose
somptueuse. Son nouveau roman, « L’Homme sans bagage » (Finitude), se penche sur le libre arbitre.
MS
54 ELLE BELGIQUE AVRIL.13
Lotte Hansen, Philippe Matsas, Olivier Roller
PAUL AUSTER le dandy
de Brooklyn
Ses amis. Un who’s who du Swinging
London et du cinéma. Paul McCartney
chante des berceuses à ses enfants,
elle s’offre un coup d’un soir avec Robert
Mitchum, Jackie Onassis prétend qu’elle
est « une des trois personnes qu’elle aime
le plus au monde »… Rock’n’roll.
Ses amours. L’Irlande, d’abord, où tout
commence et tout finit pour cette fille de
nobles désargentés. Et puis, étudiante
dans un couvent, elle tombe amoureuse
d’une religieuse qui lui enseigne les maths.
Shocking ? Pas pour celle qui publia une trilogie mise à l’index qui relatait de façon trop
crue les mœurs sexuelles des « Filles de la
campagne ».
Ses emmerdes. Un mari jaloux, épousé
trop tôt, qui lui pourrit la vie jusqu’à ce qu’elle
se décide à divorcer… et même après. Une
vie pleine de péripéties pour une femme
libre, qui cherchera à imposer son style à la
fois littéraire et de vie.
Verdict. Un récit magistral, terriblement
sincère, à mettre entre les mains de toutes
les filles !