votez sport », ou le grand oral du cnosf
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votez sport », ou le grand oral du cnosf
PRÉSIDENTIELLE 2007 Les politiques dans l’arène sportive Si en 2002 le sport avait constitué un enjeu d’image pour les candidats à l’élection présidentielle, il est devenu en 2007 un vrai thème de campagne. Avec une confrontation des programmes orchestrée par le Comité national olympique et sportif français. le débat national ». Début janvier, ce fut enfin au tour de François Bayrou et de l’UDF de s’interroger sur le thème : « Quelles missions pour le sport ? » uel qu’en soit le résultat, la présidentielle de 2007 aura vu l’irruption du sport dans le débat électoral. L’UMP de Nicolas Sarkozy a lancé le débat dès mai 2006 avec sa convention « Oser le sport », qui dévoilait un programme détaillé et volontariste. Afin de ne pas lui laisser le champ libre, le Parti socialiste a répliqué en septembre, avant même de se choisir Ségolène Royal pour candidate, par un colloque sur «Les enjeux du sport dans Q CONSENSUS ET DIFFÉRENCES On peut voir dans cet intérêt manifeste le signe que les partis, conscients du poids que représentent les 15 millions de licenciés et les 30 millions de simples pratiquants, ne négligent plus le « vote sportif », comme l’observait l’universitaire Alain Loret (1) dans la lettre spécialisée infosport.org. Plus simplement, cette prise en compte électorale du fait sportif traduit aussi l’importance qu’il occupe dans notre société, que ce soit sur le plan éducatif, social ou économique. Certaines questions font d’ailleurs l’objet d’un large consensus entre la plupart des acteurs politiques : « Qui peut-être contre le sport pour tous ? le renforcement de la pratique sportive pour ses vertus sociales, éducatives, de santé C’est lors de la présentation de ses vœux CNOSF « VOTEZ SPORT », OU LE GRAND ORAL DU CNOSF la grande salle du CNOSF (1), ces inter- pour 2007 que le président du Comité ventions d’une trentaine de minutes sans national olympique et sportif français, débat contradictoire ont été diffusées le Henri Sérandour, a lancé son invitation soir même sur La Chaîne Parlementaire aux cinq candidats à l’élection présiden- (LCP), partenaire de l’événement. Au tielle issus de partis ayant une expé- lendemain de celui-ci, Henri Sérandour rience gouvernementale. Le jeudi 15 affichait sa « réelle satisfaction de voir février, Marie-George Buffet, Dominique le sport traité à sa juste mesure et placé Voynet, Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et François Bayrou au niveau des sujets d’intérêts généraux de la politique de étaient donc conviés à s’exprimer sur quatre thèmes mis en notre pays ». Il s’est bien gardé de prendre parti, réaffirmant avant par le livre blanc publié l’automne dernier par le CNOSF : que « le sport doit rester apolitique au sens d’indépendant à « Le mouvement sportif, un acteur majeur de la société fran- l’égard des pouvoirs politiques et économiques. » çaise » ; « La gouvernance du sport » ; « Le financement du sport » ; « La reconnaissance du sport comme vecteur éducatif ». Prononcées devant un parterre de grands sportifs dans 12 Avril 2007 en jeu une autre idée du sport n°406 (1) Outre le ban et l’arrière-ban du mouvement sportif (dont les représentants de l’Ufolep et de l’Usep), on reconnaissait entre autres : Béatrice Hess, Richard Dacoury, Stéphane Diagana, Thierry Rey, Marie-Claire Restoux, Christine Caron, Mahyar Monshipour, Raymond Domenech, Jean-Claude Skrela et Claude Bergeaud. Bruno Bade / Presse-Sports Le sport dans la campagne Ségolène Royal entourée de Ronald Pognon, Eunice Barber et Christine Arron lors de son forum sur le sport, le 14 février à Marcoussis (Essonne). publique ? l’accessibilité de tous à la pratique sportive ? Qui peut être contre la parité dans la pratique sportive et dans l’accès aux responsabilités sportives des hommes et des femmes ? Qui peut être contre une reconnaissance du bénévolat ? » soulignait Patrick Bayeux (2). En revanche, d’autres sujets font débat : les dispositifs de formation, le statut du sport professionnel et celui du sport de haut niveau public – concurrencé par des écuries privées type Lagardère –, les équipements sportifs, la place du mouvement sportif – faut-il renforcer le service public ou bien accepter une organisation marchande ? – ou encore les relations entre l’Etat et les fédérations sportives. En spectateur engagé, Alain Loret mettait en cause « un service public qui, en promouvant d’abord le sport de compétition, exclut une majorité de citoyens ». Ceci pour mieux esquisser le portrait robot du ou de la « candidat(e) capable de construire une vision de l’activité physique pour tous » et qui, en s’éloignant d’un discours « trop convenu », rallierait « cette majorité des pratiquants qui ne trouvent plus, dans l’offre du service public, matière à assouvir son envie de faire du sport. » On découvrit ultérieurement sur le blog thématique Désir de sport qu’il fallait reconnaître… Ségolène Royal. DE L’IMAGE AU DISCOURS Si le ralliement d’un universitaire comme Alain Loret est – presque – passé inaperçu, la campagne électorale n’a pas non plus bruissé du soutien apporté par tel ou tel sportif de renom au candidat de son cœur. Certes, il y eut quelques passes d’armes, par presse interposée, entre Nicolas Sarkozy et Lilian Thuram sur les questions de nationalité et d’immigration, et le dîner – privé – du défenseur de l’équipe de France avec la candidate socialiste. Une candidate socialiste qui, conseillée par le président de la Fédération française d’athlétisme Bernard Amsalem, réussit à installer une belle brochette d’athlètes français – Ronald Pognon, Christine Arron, Eunice Barber… – au premier rang du forum organisé le 14 mars à Marcoussis (Essonne) sur le thème : « Le sport moteur du lien social». De son côté, Nicolas Sarkozy peut s’enorgueillir de son côté du ralliement de Guy Roux, Basile Boli, Jean-Claude Bouttier, Richard Gasquet ou Richard Virenque. Mais rien de comparable, par exemple, à l’amitié très médiatisée de Jacques Chirac avec le judoka David Douillet. Une fois passé le Mondial en Allemagne, on n’a pas vu non plus les princiAvril 2007 paux candidats s’afficher à tout prix dans les tribunes des stades – souvenez-vous du match Chirac-Jospin, de 1998 à 2002 – ni mettre en scène leurs talents sportifs devant la première caméra venue. Non, vraiment, cette année le sport était moins un enjeu d’image qu’un thème de campagne à part entière. L’implication du Comité national olympique et sportif français y a largement contribué (lire encadré). Certains pourront objecter que l’invitation n’était adressée qu’aux seuls candidats représentant un parti possédant une expérience gouvernementale. Mais Arlette Laguiller, Olivier Besancenot, José Bové, Philippe de Villiers ou Jean-Marie Le Pen n’ont jamais été très portés sur la chose... En revanche aucun des cinq candidats sollicités ne s’est dérobé – Nicolas Sarkozy, en déplacement à la Réunion, était présent à travers un message enregistré. CHACUN SON STYLE Ancienne ministre de la Jeunesse et des Sports du gouvernement Jospin, Marie-George Buffet (Parti communiste) était en terrain connu. Elle ne se priva pas de faire la bise à Henri Sérandour et d’évoquer son plaisir de revoir «un certain nombre de visages» et à se souvenir «des combats communs». Très à son affaire, elle n’a pas manqué d’évoquer les questions de la place des en jeu une autre idée du sport n°406 13 femmes et du dopage. C’était d’ailleurs tout autant un discours de ministre en exercice que de candidate à la présidentielle… Sur un terrain qu’elle a avoué elle-même ne pas très bien connaître, Dominique Voyet (Les Verts) prononça pour sa part une intervention très appliquée, avec le livre blanc pour fil rouge. A l’inverse, Nicolas Sarkozy (UMP) prit ses distances avec le questionnement proposé par le CNOSF pour décliner de façon très percutante ses propres propositions. A l’instar du candidat UMP, et sur la lancée de son forum sur le sport de la veille, Ségolène Royal (PS) fit des promesses budgétaires chiffrées et clama sa volonté de faire de la France «une grande nation sportive». Dernier à s’exprimer, dès sa première phrase François Bayrou fit passer un frisson dans l’assistance: un lapsus lui avait fait parler de 15 millions de «salariés» sportifs quand il fallait entendre «licenciés»... Il se singularisa également en refusant de se laisser aller à la moindre promesse budgétaire. La plupart des candidats firent également réfé- rence à la manifestation d’une centaine de jeunes professeurs d’EPS du Snep (Syndicat national des professeurs d’éducation physique) contre les suppressions de postes, chacun les assurant plus ou moins vigoureusement de son soutien. Tout comme ils saluèrent avec un bel ensemble l’élection de Michel Platini à la présidence de l’UEFA. RUPTURE OU PAS ? Pensaient-ils à cet instant à une autre présidence, tout aussi convoitée ? Possible. Pour autant, et malgré la promotion du sport au rang de thème de campagne, il est peu probable que ce soit celui qui détermine l’issue du scrutin des 22 avril et 6 mai. Les différences de sensibilités et de programme n’en sont pas moins très nettes et si, pour le candidat de l’UMP, le sport enseigne « le sens de l’effort, le courage, la volonté, le dépassement de soi », aux yeux de sa concurrente PS il est avant tout le « premier espace de citoyenneté et de prévention». Toute la question est de savoir si, au delà de l’imagerie qu’elles convoquent, ces deux visions se traduiraient dans les faits par des politiques sportives réellement différentes. La vision résolument libérale de Nicolas Sarkozy promet néanmoins, en matière de politique sportive en tout cas, une vraie «rupture ». Pour l’heure, le suspense demeure. A la mimars, le jeu politique, qu’on croyait figé en début de campagne, semblait vouloir s’inspirer de la «glorieuse incertitude du sport» en faisant émerger un outsider inattendu à ce niveaulà. Mais prudence : en politique aussi les pronostics sont risqués. ● PHILIPPE BRENOT (1) Professeur à l’université de Rouen, Alain Loret est l’auteur de Concevoir le sport pour un nouveau siècle (PUS, 2004). (2) Maître de conférence en gestion et droit du sport à l’université de Toulouse, Patrick Bayeux a cosigné cet éditorial paru à la rentrée sur inforsport.org avec Jacques Vergnes, président de Sports et territoires. L’USEP PREND POSITION Au cours de la campagne électorale, l’Usep a eu – à leur Le document pose ensuite une douzaine de principes d’action demande ou à son initiative – plusieurs contacts avec les par- (« La famille », « sport et santé », « citoyenneté », « petite tis politiques « républicains », ceci sur la base d’un document enfance », « culture sportive »…) et s’achève par une liste intitulé «L’Usep prend position». Des échanges ont notamment de propositions, parmi lesquelles : eu lieu l’été dernier avec l’Association nationale des élus com- • une pratique de l’EPS réaffirmée et aidée au sein de l’Ecole munistes et républicains et, tout récemment, avec des repré- publique ; sentants du Parti socialiste (1). L’Usep a également été citée • la reconnaissance du sport scolaire par : la constitution d’une par l’UMP dans son programme « Oser le sport », tout comme association Usep auprès de chaque école ; la place de la ren- elle était représentée au forum « Votez sport » organisé le 15 contre sportive Usep dans les programmes de l’école pri- février par le Comité national olympique et sportif français. maire ; une mission donnée aux conseillers pédagogiques EPS Le document – mis en ligne sur les sites nationaux de la fédé- intégrant à la fois leur collaboration avec l’Usep et leur par- ration et de la Ligue de l’enseignement – rappelle tout ticipation à la mise en œuvre des rencontres sportives ; d’abord ce qu’est l’Usep : une fédération qui a « l’enfant » pour • la reconnaissance du sport scolaire éducatif par : l’intégra- sujet, « le sport » pour objet et « l’école publique » pour tion d’un programme éducatif dans le projet de chaque fédé- cadre, qui rassemble 830 000 licenciés et touche chaque ration sportive ; la mise en œuvre d’actions par chacune de année deux millions d’enfants. ces fédérations en liaison « incontournable » avec l’Usep ; Suivent ensuite plusieurs constats : la diminution de l’EPS • un poste (a minima) de délégué Usep à plein temps dans en importance dans les programmes et en temps dans la pra- chaque département ; tique de classe ; le fait qu’il y a davantage d’EPS quand • une formation initiale et continue en EPS des enseignants l’Usep est présente et que les rencontres sportives sont un en particulier et des acteurs institutionnels de l’Ecole, for- point d’appui pour les enseignements, ce qui n’empêche pas mations dans lesquelles l’Usep aura réellement sa juste place. le sport scolaire du premier degré d’être « insuffisamment (le document intégral est consultable sur www.usep.org rubrique considéré », d’où un travail quotidien « dans la confidentia- « dernières actus ») lité » et « des difficultés à faire reconnaître réellement par le mouvement sportif la place pour un sport éducatif ». 14 Avril 2007 en jeu une autre idée du sport n°406 (1) L’Usep a notamment été invitée par l’équipe de campagne de Ségolène Royal à s’exprimer mardi 14 février à la tribune du forum «Le sport moteur du lien social». Le sport dans la campagne ertus individuelles. «Vous avez devant vous un candidat à la présidence de la République qui aime profondément le sport, qui le pratique beaucoup, qui le pratique depuis longtemps. Pour en faire l’expérience quasi quotidiennement, je sais l’importance du sport pour la santé et je connais ses vertus individuelles. Le sport enseigne le sens de l’effort le courage, la volonté, le dépassement de soi. Il apprend que rien de précieux ne s’obtient sans effort. (…) Quelle que soit leur discipline, les sportifs, amateurs, de haut niveau, ou professionnels, ont un langage commun qui ne trompe pas: celui de la persévérance, de l’humilité, de l’authenticité.» Vertus collectives. « Je crois aussi dans les vertus collectives du sport. Le sport enseigne le respect des autres, le respect des règles, l’esprit d’équipe, l’engagement, la solidarité. Il apprend à aider et à être aidé. Il transmet un savoir-être aussi important que le savoir tout court. Dans une société traversée de tant d’inégalités et de discriminations, le sport est fondamentalement égalitaire parce qu’il ne repose que sur l’effort individuel, la volonté et le courage. Ma conviction profonde, c’est que notre pays a besoin de plus de sport. Les pays scandinaves montrent l’exemple de sociétés dans lesquelles près de 80 % de la population a une pratique sportive régulière, et ce dans toutes les catégories, qu’il s’agisse des jeunes, mais aussi des femmes, des seniors, des personnes handicapées… C’est le modèle dont je souhaite m’inspirer. » À l’école. « La première priorité est de transformer la place du sport à l’école. Le sport doit faire partie du socle des matières fondamentales. Le nombre d’heures consacrées au sport doit être doublé, tant au primaire que dans le secondaire. Le coefficient qui s’attache au sport dans les examens doit être augmenté. Je pense qu’il doit y avoir une épreuve de sport à l’entrée de toutes les grandes écoles et que le sport doit faire partie de chaque cursus universitaire. Cela supposera peut-être des recrutements supplémentaires, mais cela pourra aussi permettre de donner des heures de travail rémunérées aux animateurs des associations sportives des collectivités locales. (…) Nous ne devons pas avoir peur de la compétition, de la performance, même si le sport à l’école doit être également une école d’hygiène et de bien-être physique. (...) Je souhaite également que chaque enfant ait la possibilité, s’il le souhaite, de suivre un mi-temps sportif. » V Montage photo / Documents CNOSF Nicolas Sarkozy (UMP)* Bénévolat. «Je propose trois mesures simples : qu’une année de bénévolat dans un club ou une association donne droit à un stage de formation gratuit ; que 20 heures par mois de bénévolat effectuées régulièrement donne droit à 10% de points en plus pour les examens; que dix ans de bénévolat donnent droit à une année de cotisation pour la retraite.» Un autre ministère. « La place du sport dans l’organisation actuelle des structures ministérielles n’est pas satisfaisante. Le sport n’est pas réservé à la jeunesse. Il n’y a donc aucune raison de mettre ensemble le sport et la jeunesse. (…) Le sport doit constituer un ministère à part entière mais [être] rattaché à un pôle santé et qualité de la vie. (…) Nous devons faire d’immenses progrès pour développer la pratique sportive de tous nos concitoyens, notamment chez les femmes, les actifs, les seniors, dans une perspective de bien-être, de prévention et de santé. Il est donc cohérent de mettre le sport dans un pôle santé. Rattaché à un ministre de poids dans la structure gouvernementale, le sport aura de vraies chances de bénéficier d’arbitrages positifs et d’être doté des crédits nécessaires. Nous devons porter le budget du ministère des sports à au moins 3% du budget de l’Etat. J’ajoute qu’en plaçant le sport dans un pôle ministériel santé, nous confirmerons notre opposition résolue au dopage.» Organisation. « Je souhaite engager une réforme de l’organisation du sport. (…) Le modèle que je préconise est celui de l’autonomie, du professionnalisme et de la responsabilité des fédérations sportives. Les contrats d’objectifs qui lient l’Etat aux fédérations doivent être plus exigeants et plus précis (…) L’Etat doit fixer ses objectifs stratégiques, je pense par exemple au développement de la pratique sportive pour tous, mais les fédérations doivent être libres de leur mise en œuvre. En contrepartie, les fédérations doivent être mieux outillées, plus professionnelles. Je suis favorable à la rémunération des dirigeants, puisque ce sont de fait de vrais chefs d’entreprise, et je Avril 2007 pense que les fédérations doivent pouvoir recruter des cadres de haut niveau. Je propose à cette fin la création d’une grande école de management sportif.» L’argent. « Je suis favorable à l’entrée des clubs en bourse, car l’épargne publique n’a rien de malhonnête. Je pense que les clubs doivent pouvoir être propriétaires de leurs équipements. (…) Mais je souhaite également que nous engagions une démarche européenne pour que l’excès d’argent dans le sport ne pervertisse pas l’équité des compétitions sportives, leur suspense, et, audelà de tout, l’image et l’éthique du sport. L’harmonisation de la législation fiscale qui s’applique aux clubs professionnels, l’obligation pour les jeunes de signer leur premier contrat dans le club qui les a formés, la limitation de l’endettement, des déficits, le cas échéant de la masse salariale, sont des questions que nous devons porter au niveau européen. » ● *Extraits des interventions prononcées devant le CNOSF jeudi 15 février 2007, sélectionnés à partir du texte validé par les candidats (à l’exception des interventions de Dominique Voynet et Ségolène Royal, décryptées par nos soins). en jeu une autre idée du sport n°406 15 uel sport ? «Je crois en la nécessité de favoriser le développement d’un sport qui soit facteur d’équilibre, de santé, d’épanouissement de chacun et de chacune. Je crois en un sport qui soit un vecteur fondamental d’éducation, de culture et de vie sociale et qui pour cela est accessible à tous et toutes. Un sport accessible, c’est poursuivre une politique volontaire pour le développement de la pratique féminine dans tous les sports et de sa visibilité dans les médias. Un sport accessible, c’est poursuivre le développement des fédérations handisport et de sport adapté et l’aménagement des installations sportives afin d’en favoriser l’accès à tous les sportifs. Un sport accessible, c’est poursuivre le développement du sport en entreprise. Un sport accessible, c’est une pratique qui se conjugue avec une formation permettant l’insertion professionnelle après la carrière sportive. Un sport facteur de santé, c’est un sport exercé dans un club, c’est un sport qui résiste à la surcompétition liée à des enjeux financiers. Un sport facteur d’équilibre, c’est le combat contre le dopage.» Educatif. «S’il est naturel de reconnaître cette dimension éducative, il ne faut pas demander au sport de régler tous les problèmes; il ne faut pas l’appeler au secours de l’urgence sociale; il faut simplement lui donner les moyens de répondre à ses propres objectifs.» Ecole. «Aujourd’hui, plutôt que de donner à l’école les moyens dont elle a besoin, je constate que la pratique sportive est remise en cause dans Q les cursus éducatifs. Et plus grave encore, je constate que les associations sportives scolaires sont menacées. (…) Le projet de réforme du décret du 25 mai 1950 sur le service hebdomadaire des personnels enseignants du second degré, couplé avec les disparitions de postes d’enseignants, annonce un véritable déclin du sport scolaire.» Citoyenneté. «Le sport est déterminant pour faire grandir les valeurs de citoyenneté, au sein même de l’association, avec la prise de responsabilités et l’engagement bénévole. Il est un des éléments de la vie démocratique de notre pays. Et cette utilité sociale, ce sont évidemment les clubs, cellules de base de tout le sport français, les fédérations et le CNOSF qui en sont les premiers dépositaires.» Sport pro. «Je n’ai jamais tenu un discours ou pris des mesures allant dans le sens d’une coupure entre un sport professionnel qui n’aurait rien à attendre ni rien à devoir de la puissance publique, et un sport amateur qui lui devrait tout. (…) Je tiens évidemment à préserver, voire à amplifier les systèmes de péréquation et de redistribution vers les clubs des moyens prélevés sur les sommes importantes issues de contrats entre des fédérations, des ligues professionnelles et les médias. J’accorde une grande importance à ce que le sport professionnel demeure au sein des fédérations nationales et qu’il participe au financement de toutes les pratiques. (…) Je tiens à réaffirmer mon opposition ferme à la cotation en bourse CNOSF Marie-George Buffet (PCF) des clubs sportifs. C’est peut-être une réussite financière. Mais c’est un échec pour le sport et ses valeurs. » Budget. « Je propose d’augmenter le budget du ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative jusqu’à 1 % du PIB (…) ce qui serait déjà une augmentation de 4 à 5 fois l’existant. » Bénévolat. « C’est un capital humain formidable qui doit être respecté et conforté. Je pense qu’il faudra engager la mise en place d’un véritable statut du bénévole, ce qui vaut d’ailleurs pour l’ensemble du mouvement associatif.» ● Dominique Voynet (Les Verts) ivre blanc. «Je reconnais que [le sport] est un monde que je connais mal alors que j’ai pratiqué un sport et que je suis toujours licenciée d’une fédération sportive (…) Mais il vaut mieux admettre la réalité: j’ai beaucoup appris en lisant le Livre blanc et je crois que cette lecture, parfois un peu ardue et technique, a contribué à lever des préventions et à surmonter des préjugés.» Gouvernance. «On conteste [parfois] à l’Etat, qui est le garant de l’intérêt général, une intervention dans le monde du sport [alors qu’on] peine à contester à des puissances médiatiques et à des acteurs économiques un rôle qui est parfois tout aussi directif et tout aussi lourd.» L 16 Avril 2007 Europe. «Bien qu’européenne convaincue, je pense que le futur arrêt Oulmers (du nom d’un international marocain, joueur d’un club belge, qui s’était blessé en sélection, NDLR) n’aurait jamais dû exister. (…) Je rappelle à cette occasion mon attachement au principe de la suprématie des sélections nationales sur les clubs.» Licenciés. «Que veut dire le mot d’ordre d’atteindre un million de licenciés de plus d’ici 2012? Est-ce que ça correspond aux capacités actuelles des fédérations? Quels sont les moyens mobilisés pour y parvenir? Vous comprendrez que je sois plus attentive au programme de développement dont les fédérations devraient se doter.» en jeu une autre idée du sport n°406 Brevets fédéraux. «Vous avez pointé dans le Livre blanc qu’aucun des brevets fédéraux ne permettait d’enseigner contre rémunération et vous proposez (…) d’aller vers une reconnaissance de la valeur professionnelle de ces brevets. J’y suis pour ma part favorable et je ne vois pas de meilleur partenaire que les régions pour avancer dans cette direction.» Elus. «Il est primordial que les structures sportives, les fédérations, élisent leurs présidents ou leurs présidentes au suffrage direct avec une vraie campagne auprès des licenciés. (…) Je ne crois pas sur ce sujet précis au bien fondé de l’exception sportive et à la cooptation entre pairs.» Handicap. «La pratique sportive ne doit pas être un lieu d’exclusion supplémentaire. (…) Le nombre de personnes handicapées qui pratiquent un sport ou une activité physique de manière encadrée est très peu élevé puisque les trois fédérations du handicap: Handisport, Sport adapté, Fédération sportive des sourds de France, comptaient au total un peu plus de 50000 licenciés en 2004, soit seulement 1% des personnes handicapées, alors que ce taux s’élève à 17% pour les personnes valides.» Dopage. «La piste de réflexion avancée par certains de voir des fédérations ou des organisateurs d’événements demander réparation financière au regard du préjudice subit à des personnes convaincues de dopage est à suivre. Une réflexion devra aussi s’engager sur le rythme des compétitions.» Racisme. «Les efforts des pouvoirs publics et des clubs devront encore s’intensifier pour faire cesser toute manifestation de racisme, de xénophobie, d’homophobie, que ce soit sur le terrain ou dans les tribunes des petits et des grands événements.» Règle. «Dans un monde où on conçoit souvent la règle comme injuste, arbitraire ou comme l’expression de la loi du plus fort, le sport peut inspirer. Il n’est pas éducatif en soi mais il l’est par ses règles et parce que des éducateurs veillent à la bonne application de celles-ci.» Ecole. «L’importance de la pratique sportive à l’école est de placer les filles et les garçons en situation de mixité sportive dès la maternelle et le primaire. (…) C’est à l’école souvent que les filles et les garçons découvrent le sport.» ● CNOSF Le sport dans la campagne ouvernance. « C’est important d’avoir au sein du gouvernement une autorité qui soit chargée du sport [tout comme] il est indispensable que l’Etat rencontre en face de lui une société civile organisée (…) capable de promouvoir elle-même sa propre gouvernance. (…) Donc je soutiens l’idée d’une organisation d’une gouvernance autonome, forte, reconnue, respectée, du monde du sport face à l’Etat.» Lien social. «Le sport joue un rôle irremplaçable [de] lien social dans un monde où hélas! ce lien social est en train de céder, dans les quartiers, dans les cours d’école, aux endroits les plus fragiles de la société française. Précisément là où l’Etat est absent. Et plus particulièrement les associations sportives sont la main qui se tend et le moyen de retisser le lien spécialement à l’intention ou à l’endroit des jeunes. (…) On l’a encore vérifié au moment des émeutes de 2005.» Santé. «Le sport (…) permet des actions de prévention en matière de santé. (…) Je pense en particulier à l’obésité. (…) Il y a aussi la prévention des maladies cardio-vasculaires, enfin tout ce qui est du domaine de la santé d’une personne active.» Règles. «Tout ce qui touche à la reconnaissance des règles (…) donne au sport un rôleclé dans l’évolution de la société française. (…) Il est bon que l’Etat pense, sur un certain nombre des missions d’utilité sociale ou d’utilité civique qu’il croyait jusqu’à maintenant être le seul à remplir, à les déléguer (…) à des structures plus autonomes comme celles du monde associatif.» G Handicap. «Il y a dans l’engagement sportif des handicapés un moyen, probablement le plus efficace, probablement le plus heureux de faire que chacun, lorsqu’il est atteint par un handicap, puisse mesurer que sa place (…), sa légitimité, sa reconnaissance dans la société n’a pas changé, au contraire. Et donc l’idée que chaque fédération doit être incitée à s’ouvrir sur le handicap dans le sport pour tous (…) me paraît tout à fait essentielle.» Reconversion. «Je suis frappé par le problème de la reconversion [des sportifs de haut niveau]. C’est pourquoi je suis favorable à l’idée d’un plan d’épargne-reconversion. Que des conditions fiscales très avantageuses soient faites à ceux qui choisiront de préparer [ainsi] leur avenir.» Education nationale. «Le sport est, en France, un des manques les plus grands dans l’Education nationale. (…) Lorsque j’en étais ministre, j’ai poussé à un certain nombre d’expériences (…) de type anglo-saxon ou allemand qui consistaient à proposer qu’une partie de la journée scolaire, l’après-midi ou une partie de l’après-midi, soit réservée à des activités sportives ou artistiques. Et vous savez pourquoi ce type d’expériences ne s’est pas perpétué : c’est parce que cela coûte extrêmement cher. D’abord pour la première raison qu’il faut doubler la surface des classes et la surface des stades,(…) puis cela pose évidemment des problèmes d’organisation à l’intérieur des établissements. Cependant je n’ai jamais perdu de vue l’idée que le sport était éducatif. » Promesses budgétaires. «Je pense qu’il est juste de réfléchir à l’amélioration du financement du sport (…) mais je me refuse à prendre Avril 2007 CNOSF François Bayrou (UDF) des engagements dont je sais très bien qu’ils ne seront pas respectés.» Bénévolat. «Ce n’est pas uniquement dans le domaine du sport qu’il faut reconnaître le bénévolat. Il y a trois directions raisonnables. La première est d’améliorer les conditions matérielles d’exercice du bénévolat. (…) Je pense [au] remboursement des frais engagés. (…) Deuxième piste, (…) la validation des acquis, de l’expérience (…) acquise dans l’animation d’un groupe d’hommes et de jeunes doit être validée et présentable dans un curriculum vitae. (…) Dernier point: tout le monde sait que la réforme des retraites est devant nous comme une contrainte. (…) Et cette réforme des retraites devra permettre à chacun de se constituer un certain nombre de droits. Il me semble que, parmi ces droits, l’exercice d’un bénévolat dans une association devrait donner lieu à un certain nombre d’avantages-retraite lorsque le terme de sa vie professionnelle arrive.» ● en jeu une autre idée du sport n°406 17 PS à l’école. «Je voudrais prendre devant vous l’engagement que les moyens de l’Education nationale seront remis à niveau. (…) Je rétablirai les trois heures forfaitaires dans le service des enseignants d’EPS leur permettant d’assurer l’encadrement des associations sportives scolaires. (…) Je les vois ces jeunes en souffrance, dans les universités, dans les Staps, parce qu’on leur avait promis des débouchés, (…) je les ai reçus dans la région que je préside (…). Il y a quelque chose qui relève du mensonge d’Etat lorsqu’on incite les jeunes à rentrer dans les filières sportives et puis qu’en cours d’étude on supprime 70 % des débouchés, c’est à dire des postes au Capes (…). Il va falloir reconquérir ces 70 % de postes. » Régions et CNOSF. « Avec l’Association des régions de France, nous avons signé une convention avec le CNOSF pour nous substituer au désengagement de l’actuel gouvernement. Nous avons même repris des emplois-jeunes qui avaient été supprimés en créant des emploistremplins: dans la région que je préside c’est cent emplois-jeunes que j’ai mis à la disposition du Comité régional olympique et sportif français pour qu’il puisse assumer ses responsabilités. [En contrepartie] je demande au mouvement sportif une évaluation de ce qu’il fait, parce qu’on est dans une logique gagnant-gagnant, et en particulier sur (…) la démocratisation de l’accès au sport, les partenariats avec les organisations territoriales, le développement de l’intégration des personnes en situation de handicap et la féminisation des pratiques sportives.» Citoyenneté. « Le mouvement sportif est d’abord une école de citoyenneté. Un licencié sur deux a moins de vingt ans et c’est là, dans le sport, que l’on apprend la maîtrise de soi, le goût de l’effort, le sens de l’écoute, le respect de l’autre, l’apprentissage des règles. Le premier apprentissage de la loi commune pour un jeune ou pour un enfant, c’est la règle sportive, c’est l’interdiction de tricher, c’est le respect de l’adversaire, c’est l’effort collectif, c’est la reconnaissance des talents individuels, et c’est aussi la perception, très tôt, que le talent individuel n’est rien sans l’effort collectif. (…) J’en ai vu, des expériences réussies, pour des jeunes «décrocheurs» scolaires qui se sont raccrochés à la réussite scolaire grâce au sport et grâce à leurs enseignants en EPS parce qu’un autre regard est porté sur eux, une autre forme de réussite.» Rappels. «Oui, le sport est un vecteur essentiel de lutte contre toutes les formes de discri- E 18 Avril 2007 CNOSF Ségolène Royal (PS) mination et de violence et je veux faire du sport un espace privilégié d’intégration et de mixité (…). Je veux faire reconnaître le sport comme vecteur d’éducation avec, je le rappelle : le doublement du budget du sport, 70 % de postes en plus ouverts au Capes d’EPS, la troisième heure de sport dans les lycées, le rétablissement des moyens à l’UNSS, et enfin une partie des 500000 emplois-tremplins, qui font partie de mon pacte présidentiel et que les régions ont déjà mis en place, une partie de ces emplois-tremplins [devant aller] aux associations et aux fédérations sportives.» Bénévolat. «Je veux encourager l’engagement bénévole (…). Là aussi, dans la région que je préside, j’ai mis en place des formations professionnelles gratuites pour les bénévoles.» Santé. «Si le sport était davantage développé, (…) il y aurait sans doute beaucoup moins de dépenses de Sécurité sociale. (…) Je pense au développement du sport chez les seniors [et aux] associations du troisième âge et maisons de retraite qui ont intégré le sport aux activités des personnes âgées – et même très âgées: eh bien ces activités sont extrêmement bénéfiques, non seulement sur la santé mais aussi sur le moral. Donc voyez l’utilité du sport à tous les âges de la vie.» Budget. « Je souhaite doubler le budget du sport, parce que je crois qu’il faut être crédible en jeu une autre idée du sport n°406 dans les engagements que l’on prend. L’ensemble de la dépense publique, si l’on ajoute l’Etat, les régions, les départements, les communes, s’élève à peu près à 10 milliards d’euros quand le budget de l’Etat est modeste avec 771 millions d’euros. Si l’Etat fait cet effort de doublement pour passer à 1,5 milliard, on aura autant d’effet-levier sur les collectivités territoriales.» Filière économique. «Le sport est une vraie filière de développement économique. Regardez autour des grandes manifestations sportives, le développement de l’hôtellerie, de la restauration, des services. (…) Cela se voit aussi sur les territoires: à partir des activités sportives, à partir du développement du tourisme sportif, à partir de l’accompagnement des événements sportifs il y a une opportunité extraordinaire à saisir, des débouchés très importants pour les jeunes, qui constituent en plus des emplois non délocalisables.» Amour des sportifs. « Les sportifs de haut niveau sont les héros des temps modernes. (…) Je voudrais vous dire pour terminer mon attachement profond aux activités sportives. J’aime le sport, j’aime les bénévoles, les fédérations, les encadrants et les sportifs, et l’esprit sportif tout simplement, qui d’ailleurs manque parfois un peu en politique. » Le sport dans la campagne Ces sportifs qui nous gouvernent ilhouette athlétique, peau hâlée et foulée tout en souplesse: en cette fin d’été 2005, Dominique de Villepin apparaît sans conteste comme le premier ministre le plus sportif qu’ait jamais connu la France. L’université d’été de l’UMP vient d’ouvrir ses portes à la Baule et les caméras le filment en train de sortir de l’océan après un crawl impeccable, puis d’effectuer un jogging de très bonne tenue… Notre homme a même invité Nicolas Sarkozy à partager avec lui les joies de la course à pied au petit matin. Mais, après avoir d’abord accepté l’invitation, le patron de l’UMP se rétracte en prétextant un rhume. Ceci sur les conseils de ses proches, qui craignaient que la comparaison ne tourne à son désavantage. Il ne rejoindra donc son ennemi intime que pour un petit-déjeuner en tête-à-tête. Mais le mal est fait: dans la bataille des images, le premier ministre a remporté la manche… Une victoire très relative quand on connaît la suite de l’histoire: ni un jogging bien mis en scène ni une couverture de magazine sportif (Dominique de Villepin s’est vu offrir en octobre dernier celle de l’hebdo gratuit Sport) ne suffisent à faire un candidat à la présidentielle. Mais l’histoire révèle en filigrane combien le sport est devenu aujourd’hui un élément important dans la construction de l’image des hommes politiques. Il est loin le temps où un Winston Churchill goguenard révélait à la presse le secret de sa longévité : « Sport. Never sport. » Quel politique se risquerait aujourd’hui à se vanter qu’il ne fait jamais d’exercice physique et qu’il a le football en horreur ? « Dans une société fondée sur le culte de la performance, pour reprendre l’expression d’Alain Ehrenberg, le sport est présenté couramment comme une activité intrinsèquement bénéfique, analyse le sociologue Christian Hazard. Il est donc logique que les responsables politiques cherchent à s’afficher visiblement sur ce terrain-là.» S PLAISIRS SIMPLES Un terrain qui a l’avantage de jouer sur différents tableaux. Celui de la proximité avec les électeurs tout d’abord. Rappelez-vous quand, en 1981, Jacques Delors fut filmé arrivant au Martin / Presse-Sports Le sport étant un thème fédérateur, les politiques le pratiquent ostensiblement ou s’affichent dans les tribunes pour surfer sur les valeurs positives qui y sont attachées. Pas de jaloux ! Jacques Chirac et Lionel Jospin repartiront chacun avec le maillot de l’équipe de France de hand, championne du monde 2001. conseil des ministres avec le quotidien L’Equipe sous le bras... «L’image a frappé parce qu’elle allait à l’encontre d’une certaine représentation des hommes politiques : celle d’une élite planant dans les hautes sphères, loin du commun des mortels, explique Christian Hazard. Loin de le décrédibiliser, ce détail l’a rendu sympathique à un certain nombre de Français, qui ont estimé qu’il était à même de les comprendre et qu’à ce titre, on pouvait lui faire confiance.» Mais aujourd’hui les politiques ne se contentent plus de jouer les simples lecteurs ou spectateurs. Ils mouillent eux-mêmes le maillot et, surtout, n’ont de cesse de le faire savoir. Puisque le sport est père de toutes les vertus, il est fondamental de montrer qu’on en fait. La tendance nous vient tout droit d’Outre-atlantique où, depuis les années cinquante, tout le marketing des politiques consiste à renvoyer au grand public une impression de dynamisme et de volonté, sensée se transposer mutatis mutandis dans la conduite des affaires du pays. Bill Clinton a excellé dans cet exercice. Au delà de l’image qu’elle véhicule sur le plan personnel, la pratique du sport permet aussi à certains politiques de prôner la vertu de l’exemplarité. Ainsi George Bush Jr, qui court le marathon, a-t-il encouragé tous les Américains à l’imiter et à suivre son programme « Healthier US initiative » pour lutter contre l’obésité et l’excès de sédentarité. Avril 2007 En Allemagne, Joschka Fischer, ministre des Affaires étrangères issu des Verts, a pour sa part initié il y a quelques années une campagne électorale d’un genre nouveau, en invitant à chacune de ses étapes les volontaires à l’accompagner dans son jogging sur quelques kilomètres ! Comme les manifs à vélo de l’écologiste français René Dumont, il s’agissait de montrer que si on le veut, on peut se déplacer sans polluer. En suggérant au passage une synthèse entre individualisme (le jogging) et collectif (courir en groupe). En France aussi, les politiques se sont mis à faire de l’exercice. « Pour être honnête, il ne s’agit pas toujours d’un affichage dicté par l’opportunisme, mais plus simplement le reflet de notre société, tempère Christian Hazard. Les responsables politiques sont comme le reste des Français : ils ont pris l’habitude de pratiquer une activité sportive dans leur jeunesse et en vieillissant, ils surveillent attentivement leur santé. » Ce qui ne les empêche pas d’instrumentaliser dès qu’ils le peuvent ce pan de leur biographie. Même si le sport qu’ils pratiquent correspond au départ à une préférence personnelle, il n’est pas anodin que Lionel Jospin, soucieux de rompre une image trop « austère » ait affirmé avoir joué au basket ou que Nicolas Sarkozy revendique haut et fort son goût pour le vélo. ● SOPHIE GUILLOU en jeu une autre idée du sport n°406 19