Guy Birenbaum, journaliste et auteur de « Vous m`avez manqué »
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Guy Birenbaum, journaliste et auteur de « Vous m`avez manqué »
Guy Birenbaum, journaliste et auteur de « Vous m’avez manqué » Je n’avais pas allumé la TV depuis les événements de janvier et je suis tombée par hasard sur une émission avec Agnès Soral (elle parlait de son frère antisémite et l’émission m’a fait l’effet d’une douche froide). L’autre nuit, c’est un journaliste que je ne connaissais pas encore qui m’a « scotchée ». Il réussissait admirablement un exercice que je trouve périlleux mais très utile : parler de ses souffrances. Je ne connaissais pas son histoire, qu’il raconte dans « Vous m’avez manqué » et qui relate comment le « sniper » des réseaux sociaux est tombé dans la dépression et a dû se retirer de la vie médiatique alors qu’il vivait une descente aux enfers. Homme de caractère, il explique avec des mots simples quelque chose que nous ne comprenons pas toujours. Il est difficile de comprendre pourquoi (ou comment) du jour au lendemain, celui ou celle que l’on pensait si solide, si « dynamique », s’écroule tout à coup… L’histoire de Guy Birenbaum fait écho en moi pour plusieurs raisons (je connais une bonne clinique de repos monsieur… J’admire surtout celui qui utilise son don (parler dans un micro, informer et « balancer » de l’info en continue…) pour le mettre au service de tous. A travers lui, ce sont des milliers de français concernés par les sujets qu’il évoque (dépression, burn out, addiction aux écrans, no limit…) qui s’expriment. Une personnalité médiatique donne la parole aux anonymes qui souffrent dans le noir et le silence, c’est ainsi que j’ai compris sa démarche de témoignage. Son message permettra peut-être à certains d’entre eux de sortir de la culpabilité qui les ronge, il est important de rappeler que la dépression ou le burn out, cela n’arrive pas qu’aux autres… Sabrina : Pouvez-vous vous présenter succinctement et évoquer vos principaux traits de caractère pour les internautes qui ne vous connaissent pas ? G.B : Universitaire de formation. Devenu journaliste. Trop immergé sur le Web depuis dix ans. Sabrina : A quel moment de votre vie est survenu l’épisode dépressif (dans quel contexte) ? G.B : Je ne sais pas dater le démarrage… Je sais juste qu’il y a un an jour pour jour (du 21 mars au 12 mai) je me suis arrêté deux mois environ – un médecin m’a arrêté deux mois. J’allais mal depuis plusieurs mois (douleurs dos, ventre, palpitations, sueurs nocturnes…). Je me suis effondré peu après. Sabrina : Vous dites avoir eu de la chance quant à votre prise en charge… G.B : Oui. Je suis aimé. Entouré. Ma femme a joué un rôle central, trouvant la généraliste qui m’a arrêté et le psychiatre/psychanalyste qui m’accompagne depuis. Mes amis ne m’ont jamais lâché. Mon employeur de l’époque (Europe 1) s’est bien comporté. Et j’ai eu la chance énorme que Laurent Guimier, patron de France Info, me fasse confiance alors que j’étais au plus bas. Un dépressif seul n’a pas toutes ces chances et cet incroyable entourage. C’est pour lui ou elle que j’écris. Quelles ont été vos premières démarches ? Comment vous êtesvous fait accompagner vers le « mieux » ? G.B : Prendre rendez-vous rapidement avec le psychiatre et ne plus le quitter depuis. Accepter le diagnostic et la médecine (médicament). Sabrina : J’ai l’impression en vous écoutant que vous vous êtes « rEveillé » et que votre « colère » a disparue. Diriezvous que ce « trou d’air » (je reprends les termes du Dr André dans une de nos correspondances…) vous a permis de gagner en connaissance de vous ? G.B : Immanquablement oui… C’est terrible de se dire qu’il m’a fallu me fracasser contre le mur… Mais c’est vrai. Sabrina : Aujourd’hui vous êtes ok avec la personne que vous êtes ? Quelle place donnez-vous à vos valeurs ? Cette question n’est pas innocente je crois beaucoup au travail sur les valeurs. (Je vous invite à lire « Vous ne verrez plus jamais la colère comme avant » et je vous laisse en faire l’analyse G.B : Les miens, les autres, la nature… Je ne sais pas si ce sont des valeurs. Ce sont les miennes… Sabrina : On parle beaucoup du rôle qu’ont joué les réseaux (et autres médias) dans vos difficultés. Faire le procès d’Internet semble idiot et vous en reconnaissez la « puissance ». Une bonne utilisation revient-elle à revoir la notion « d’urgence » (l’instantanéité des messages, etc) ? G.B : Je n’ai pas critiqué le Web mais ses mauvais usages et les miens en particulier. On ne fait pas une dépression parce que l’on est trop connecté ! C’est inepte. En revanche, être trop connecté, perdu sur le Web, peut-être le symptôme d’un mal être. C’était le cas pour moi. Sabrina : Toucher votre fragilité vous a semble-t-il reconnecté aux autres. N’est-ce pas un comble pour un addict au web ? G.B : Ce qui est un comble c’est de parler à des inconnus via des écrans et ne pas parler aux siens. Sabrina : Je ne poserai pas la question d’une éventuelle rechute (à vous entendre j’y crois moyen aussi…). Que vous fait la critique aujourd’hui ? Ou que ne vous fait-elle plus d’ailleurs… ? G.B : Je ne reçois que de la gentillesse et des remerciements. Quant aux professionnels de la critique qu’ils continuent, c’est un joli métier. Plus le mien. Sabrina : La compassion pour vous c’est ? G.B : Regarder les autres en vrai. Pas de loin. Sabrina : On oublie les psys… après cette « expérience », quel(s) conseil(s) donnez-vous à ceux qui traversent des périodes sombres pour « garder le cap » ? G.B : Je ne suis pas psy, ni spécialiste de quoi que ce soit de ce genre. Je ne suis donc pas compétent. Simplement si on a la chance de ne pas être seul, ce sera plus simple. Sabrina : Votre maxime préférée ? G.B : Je n’en ai plus (ce n’est pas une maxime, c’est ma réponse). *** Je vous remercie beaucoup monsieur, une Présidente d’association qui interview un journaliste ce n’est pas courant, mais j’ai beaucoup appris depuis que je vous connais. Merci de votre témoignage (j’y suis favorable, on l’aura compris Et si nous arrêtions de souffrir ? Le docteur ne m’en voudra pas de le citer une nouvelle fois, je lui laisse le mot de la fin, je trouve l’extrait approprié. Sabrina Palumbo (non « sniper » mais un peu « kamikaze sur le web » parfois…) « Et j’ai vu beaucoup de souffrances, j’ai vu la fragilité des forts. Leurs souffrances sont les mêmes que celles des faibles et des anonymes : ne pas être aimés, ne pas être heureux, ne pas avoir l’esprit en paix, ne pas avoir l’âme sereine. Nous sommes tous faits du même bois, d’un bois magnifique, sensible et fragile. D’un bois qui chante et qui souffre. Mais je voudrais aujourd’hui que plus personne ne souffre. Je voudrais que chacune et chacun de nous s’efforce chaque jour de soulager un peu de la souffrance croisée sur son chemin. Je voudrais que nous soyons assez forts pour nous acharner à ce travail de moineau bienfaisant, toute notre vie durant. En étant heureux de le faire. Et en étant heureux de vivre ce que nous vivons. Quoi que ce soit ». (Christophe André)