hellp syndrome

Transcription

hellp syndrome
Prise en charge du HELLP syndrome
Valérie PIGOU, DAR Hôpital Antoine Béclère,
[email protected]
Sandrine MAGUEUR, DAR Hôpital Antoine Béclère,
[email protected]
Dominique Edouard, PH- Hôpital Antoine Béclère.
1. Comment définir le HELLP Syndrome ?
Le HELLP syndrome est l’acronyme Hémolysis Elevated Liver Low Platelet
(anémie hémolytique, cytolyse hépatique et thrombopénie). Ce syndrome est un
élément indiscutable d’une pré-éclampsie dont il est parfois révélateur. Il est
responsable d’une morbidité importante voir d’une mortalité tant maternelle que
périnatale.
Les critères diagnostiques biologiques retenus sont [1] [2] :
-
Une hémolyse soupçonnée sur une anémie récente avec la présence de
schizocytes avec une bilirubine totale supérieure à 12mg par litre ou de
lactates déshydrogénases (LDH) supérieurs à 600UI par litre, et une
réduction de l’haptoglobine plasmatique.
-
une cytolyse hépatique définit par des aspartates aminotransférases
(ASAT) supérieures à70UIpar litre,
-
une thrombopénie définie par un taux de plaquettes inférieur à 150 000 par
millimètre cube.
Une classification des degrés de gravité existe en fonction du nadir du taux de
plaquettes [3] :
-
classe 1 : inférieur ou égal à 50 000 par millimètre cube,
-
classe2 : 50 000 et 100 000 par millimètre cube,
-
classe3 : 100 000et 150 000 par millimètre cube.
La définition du HELLP syndrome doit être soumise à des critères diagnostiques
biologiques stricts.
Rappel :
La pré-éclampsie est définie, par la conférence d’experts de la SFAR comme
l’association [2] :
-
d’une PAS >140mmHg et /ou PAD> 90mmHg survenant après 20 SA
-
d’une protéinurie >à 300mg/24h ou plus 2 croix à la bandelette
En l’absence de protéinurie se méfier des symptômes accompagnant l’HTA :
-
Œdème d’apparition brutale ou rapidement aggravés,
-
Uricémie > à 350mmol /L
-
Augmentation des ASAT
-
Plaquettes< 150000 / mm3
-
Retard de croissance in utéro (RCIU)
Pré-éclampsie grave :
-
HTA sévère (PAS > 160mmhg et / ou PAD > 110mmhg )
Ou
-
HTA gravidique (PAS > 140mmhg et / ou PAD > 90 mm hg) avec les
signes suivants :
Douleurs
épigastriques,
nausées,
vomissements,
céphalées
persistantes, hyper réflexivité ostéo tendineuse, troubles visuels,
protéinurie>3 ,5 g/jour, créatinémie>à 100ymol/L, oligurie avec
diurèse<20ml/h,
hémolyse,
ASAT>3
fois
la
normale,
thrombopénie<100000/mm 3.
Physiopathologie du HELLP SYNDROME
L’étiologie complexe, et certainement multifactorielle, de ce syndrome amène la
communauté médicale à effectuer de nombreuses études sur le sujet. Deux
causes peuvent être mises en jeu :
En premier lieu, un défaut de placentation (type ischémie /hypoxie placentaire),
puis plus tardive une réaction endothéliale maternelle généralisée accompagnant
une réduction de la perfusion de tous les organes et le risque potentiel d’une
défaillance multi viscérale [4].
Le HELLP syndrome est la traduction biologique de la micro angiopathie
disséminée maternelle pouvant survenir lors de la pré éclampsie. L’ischémie
placentaire est généralement liée à un défaut de remodelage vasculaire utérin,
provoquant alors la libération dans la circulation maternelle de différentes
molécules vaso-actives et pro-inflammatoires, induisant une réaction
inflammatoire systémique inappropriée et un dysfonctionnement généralisé de
l’endothélium vasculaire. Ils sont à l’origine d’une augmentation des résistances
vasculaires périphériques et d’une activation de la coagulation.
Le HELLP syndrome est la traduction de cette micro angiopathie thrombotique
localisée au niveau des vaisseaux sinusoïdes hépatiques, principalement dans la
région péri portale, induisant une ischémie hépatocytaire, puis des lésions
nécrotiques et hémorragiques.
La cytolyse est le reflet de la nécrose
hépatocytaire [5].
Lorsque les lésions hémorragiques sont étendues, elles peuvent atteindre la
région sous-capsulaire du foie et constituer un hématome sous-capsulaire du
foie.
Cette association d’obstructions vasculaires et d’hémorragies peut provoquer une
dissection du tissu conjonctif péri portal et évoluer vers la rupture spontanée du
foie.
L’hémolyse est de type mécanique par déformation et destruction des globules
rouges au niveau des dépôts de fibrine formés dans les vaisseaux sinusoïdes.
La thrombopénie est la conséquence de l ‘agrégation et de la consommation des
plaquettes au contact des lésions endothéliales hépatiques, avec accélération du
turnover plaquettaire [6].
2. Comment diagnostiquer le HELLP Syndrome ?
Circonstances de survenue :
Le diagnostic est le plus souvent fait au cours d’une pré éclampsie. Il est fait dans
70% des cas avant l’accouchement et dans 80 % des cas avant 37 semaines
d’aménorrhées (SA) avec une moyenne d’apparition à 33 SA [7].
Un HELLP syndrome est présent dans 4 à 14% des pré-éclampsies sévères et
dans 30 à 50 % des éclampsies.
Attention : l’hypertension artérielle et la protéinurie peuvent initialement être
absentes soit environ 10 à 15% des cas et le diagnostic doit être évoqué devant
des signes digestifs inhabituels au troisième trimestre.
Le diagnostic peut être réalisé au moment d’une complication de la maladie
survenant avant, pendant ou après l’accouchement : crise d’éclampsie,
hématome rétro placentaire, hémopéritoine, accident vasculaire cérébral.
Après l’accouchement d’une femme pré éclamptique, il est impératif de continuer
la surveillance biologique car 20à 30 % des HELLP syndromes se déclarent dans
le post-partum immédiat. Le diagnostic est porté le plus souvent dans les 48
premières heures, mais peut se faire jusqu’à sept jours après l’accouchement [8]
[9].
Le diagnostic clinique :
Les signes cliniques du HELLP syndrome sont variables et non spécifiques. Un
tableau digestif est au premier plan dans 30 à 90 % des cas pouvant retarder le
diagnostic, surtout s’il n’existe pas de signes associés de pré éclampsie.
Important : toute symptomatologie digestive de la deuxième moitié de la
grossesse doit faire évoquer le diagnostic et réaliser un bilan hépatique et
numération formule sanguine. A l’inverse, des signes digestifs peuvent être
présents dans 15% des pré éclampsies sévères sans HELLP syndrome associé
[7].
Les signes les plus retrouvés sont :
-
Une douleur en barre de l’épigastre ou de l’hypochondre droit 40 à 86%
des cas (elle est la traduction de l‘obstruction vasculaire au niveau des
sinusoïdes hépatiques et de la nécrose hépatocytaire). Des douleurs
intenses doivent faire évoquer une hémorragie, voire une rupture
hépatique surtout si elles s’associent à un collapsus.
-
Des nausées, des vomissements sont présents dans 29 à 84% des cas.
-
Ictère rare soit 5% des cas.
-
Etat de malaise, syndrome pseudo grippal peuvent précéder de quelques
jours l’apparition du HELLP syndrome.
-
Des signes de pré éclampsie sont présents dans 85 % à 90 % : HTA
(82%), protéinurie (86% à 96%), céphalées (28% à 61%) et troubles
visuels (14 à 17%).
Le diagnostic biologique :
Le diagnostic est confirmé par la mise en évidence de la triade hémolyse,
cytolyse hépatique et thrombopénie. L’évolution et la progression de la biologie
sont très variables et souvent rapides, imposant une surveillance rapprochée
dans le temps. Ainsi l’un des critères peut être absent dans un premier temps et
être présent dans un deuxième temps.
L’hémolyse est déterminée par la présence de schizocytes (globules rouges
déformés, irréguliers) sur le frottis sanguin. On retrouve : une baisse de
l’hématocrite, rarement de l’hémoglobine, effondrement de l’haptoglobuline,
augmentation des LDH et de la bilirubine sous sa forme indirect [10] [11].
La cytolyse hépatique se traduit par une élévation modérée des transaminases
supérieures à trois fois la normale.
La thrombopénie à un taux de plaquettes inférieur à 50000 par millimètre cube
traduit une thrombopénie sévère.
Des formes incomplètes sont décrites et associent le plus souvent la cytolyse
hépatique à la thrombopénie.
Un bilan de coagulation standard (taux de prothrombine, temps de céphaline
activée, fibrinogène, produits de dégradation de la fibrine) est normal en
l’absence de coagulation intra vasculaire disséminée (CIVD), (elle survient dans 8
à 20% des cas et impose une surveillance rapprochée des paramètres de
l’hémostase) [7] [8].
L’évolution des paramètres biologiques est variable et rapide, la chute des
plaquettes pouvant être de 35 à 50 % par jour.
Après l’accouchement, le nadir de la thrombopénie apparait habituellement entre
24 et 48 heures.
Le diagnostic différentiel :
Il est d’autant plus difficile de différencier le HELLP syndrome des quatre
diagnostics différentiel en raison de non spécificité des signes cliniques et
biologiques en l’absence de signe de pré éclampsie [12].
La stéatose hépatique aigüe gravidique : Est une pathologie rare du 3ème
trimestre de la grossesse pouvant mettre en jeu le pronostic vital maternel et
fœtal. Il s’agit d’une stéatose micro vacuolaire intéressant les hépatocytes dans la
région centrolobulaire, entrainant une insuffisance hépatique aigüe mortelle en
l’absence de traitement.
Sur le plan clinique, il existe le plus souvent un tableau digestif marqué par des
nausées et vomissements un syndrome polyuropolydipsique, des douleurs
épigastriques ou de l’hypochondre droit, voire un ictère, des signes
d’encéphalopathie hépatique ou un syndrome hémorragique.
Sur le plan biologique on retrouve une élévation des transaminases, de la
bilirubine conjuguée et dans les formes évoluées une hypoglycémie, une chute
des taux de prothrombine, de facteurs V, de fibrinogène et d’antithrombine.
Une HTA et une thrombopénie peuvent être associées et faire retarder le
diagnostic.
Le purpura thrombocytopénique : Est une vraie micro angiopathie thrombotique
extrêmement rare. IL survient, au cours du second trimestre. Il correspond à
l’agrégation des plaquettes et à l’altération endothéliale au niveau de la micro
vascularisation, notamment rénale, entrainant une thrombopénie, une hémolyse
mécanique sévère et une insuffisance rénale aigue avec hématurie et protéinurie.
L’agrégation plaquettaire est liée à la formation en excès de multimères du
facteur Von Willebrand.
Sur le plan clinique on retrouve des troubles neurologiques, une fièvre et une
hématurie qui dominent souvent le tableau.
Le syndrome hémolytique et urémique : est une micro angiopathie avec atteinte
rénale prédominante, survenant le plus souvent durant le post-partum (dans les
deux jours à dix semaines). La triade associe une anémie hémolytique
microangiopathique, une thrombopénie et une insuffisance rénale aigüe. Parfois,
il existe une hypertension artérielle.
La poussée aigüe de lupus érythémateux disséminé : peut simuler la
sympathologie d’une pré éclampsie compliquée ou non. La connaissance initiale
de la maladie lupique, de son degré de stabilité avant la grossesse et des
différents organes atteints (rein, peau,, articulations et autres) est primordiale
dans le diagnostic.
La présence d’une maladie évolutive en début de grossesse, d’une néphropathie
ou d’anticorps anti phospholipidiques sont cependant des facteurs de risques de
pathologie vasculaire placentaire sévère et précoce. L’association de
manifestations extrarénales, d’une fièvre, d’une élévation des facteurs
antinucléaires et de la consommation des fractions du complément aidera à faire
la distinction entre une poussée lupique et la survenue d’une HELLP syndrome.
Les facteurs de risque sont :
•
Antécédents familiaux de HELLP syndrome
•
La nulliparité
•
Les maladies auto immunes préexistantes (lupus)
•
Les autres facteurs de risques sont plutôt des facteurs de pré éclampsie.
3. Quelles sont les complications à craindre ?
Complications maternelles :
Le risque de décès maternel est compris entre 1 et 1,5%, mais il augmente le
plus souvent dans les populations socio-défavorisées et dont la prise en charge
est tardive. Le taux de décès augmente lorsque le taux de plaquettes est inférieur
à 50000 par millimètre cube et l’on retrouve des facteurs associés avec accident
vasculaire cérébral hémorragique (45%), une défaillance hémodynamique (40%),
une CIVD (39%), une détresse respiratoire aigüe (28%), un sepsis (23%), une
hémorragie hépatique (20%) et une encéphalopathie hypoxique (16%) [7] [8].
La présence de l’un des facteurs implique une extraction fœtale urgente, puis une
prise en charge maternelle en soins intensifs.
La survenue d’un HELLP lors du post-partum majore les risques associés
d’insuffisance rénale aigue par nécrose tubulaire aigue et d’œdème pulmonaire.
Le recours à la dialyse, en cas d’insuffisance rénale oligo-anurique ou de troubles
hydro électrolytiques engagent le pronostic vital ce qui est parfois nécessaire de
façon transitoire chez moins de 10% des patientes avec une évolution favorable
en moins d’une semaine.
En cas de HELLP syndrome, la survenue d’un hématome rétro placentaire
augmente significativement les risques de CIVD, de recours à la transfusion
sanguine, d’œdème pulmonaire et d’insuffisance rénale aigue [7] [8]. De même la
présence d’un syndrome œdémateux majeur avec ascite entraine un risque
important de complications cardio-pulmonaires. Environ 10% des patientes
présentent une hématurie micro ou macroscopique, témoin de l’atteinte rénale
associée. Des complications oculaires peuvent survenir (1.4%) avec décollement
de la rétine, hémorragie vitréenne, cécité corticale).
Les formes incomplètes de HELLP syndrome (cytolyse hépatique isolées, taux de
plaquettes supérieur à 100000 par millimètre cube) ont un pronostic maternel plus
favorable que les formes complètes avec des risques de complications identiques
à ceux existant en cas de pré éclampsie sévère sans anomalie biologique.
Cas particulier pour l’hématome sous capsulaire du foie qui est une complication
relativement spécifique du HELLP syndrome. Il se traduit cliniquement par des
douleurs de l’hypochondre droit. L’échographie met en évidence des images
hétérogènes sous la capsule de Glisson. Une exploration par tomodensitométrie
ou par résonance magnétique peut être entreprise chez une patiente stabilisée
hémodynamiquement. La complication gravissime, mais exceptionnelle de
l’hématome sous- capsulaire du foie est la rupture hépatique entrainant un choc
hypovolémique et la nécessité d’une laparotomie en urgence. Différentes
attitudes thérapeutiques ont été proposées : packing chirurgical du foie, ligature
chirurgicale du pédicule hépatique, transplantation, voire embolisation sélective
des artères hépatiques. Lorsque le diagnostic d’hématome sous- capsulaire du
foie est posé, il est indispensable d’adopter un traitement conservateur avec
correction des troubles de la coagulation et de ne pas opérer cet hématome
circonscrit, dans la plupart des cas, par la capsule hépatique [13] [14] .
Complications périnatales :
Les risques de complications périnatales sont liés à la sévérité et à l’âge
gestationnel de survenue de la pré éclampsie. Le pronostic périnatal n’est pas
aggravé par le HELLP syndrome. Le retard de croissance intra-utérin est compris
entre 20 et 30%. La mortalité périnatale est comprise entre 7 et 20%. Les risques
de décès périnatal sont corrélés significativement à l’âge gestationnel. La
mortalité néonatale dépend également du terme de la naissance et du degré de
retard de croissance intra-utérin.
4. Quand doit –on interrompre la grossesse ?
L’évolution naturelle du HELLP syndrome se caractérise habituellement par une
dégradation progressive, parfois brutale, des paramètres maternels cliniques et
biologiques. Une naissance immédiate doit être envisagée en cas de diagnostic
réalisé au-delà de 34 semaines d’aménorrhées et à n’importe quel terme en cas
de complication grave associée (éclampsie, insuffisance rénale, HRP, CIVD,
hémorragie hépatique ou altération du rythme cardiaque fœtal) [10] [15].
Avant 34SA, voire 32SA, en l’absence de complication engageant le pronostic
vital maternel ou fœtal, la question fondamentale est de savoir si le diagnostic de
HELLP syndrome doit conduire à un traitement agressif, c'est-à-dire à un
accouchement immédiat dans une structure permettant une réanimation de
l’enfant, malgré les risques d’une prématurité sévère induite, ou si le traitement
conservateur peut être envisagé afin d’améliorer le pronostic néonatal sans
aggraver les risques maternels. Dans ce cas, sous couvert d’une corticothérapie
à visée à la fois maternelle et fœtale, une surveillance stricte doit être mise en
place dans une structure adaptée.
La prolongation de la grossesse parait légitime dans les formes incomplètes et
modérées du syndrome. Le bénéfice est souvent temporaire, le moment de
l’interruption de la grossesse par rapport à l’amélioration doit être discuté.
5. Quel est l’intérêt de la corticothérapie ?
La corticothérapie anténatale améliore la morbidité et la mortalité périnatales en
cas de pré éclampsie sévère avant 34 SA. La bétaméthasone est utilisée afin
d’accélérer la maturité pulmonaire fœtale. Cette molécule est appropriée pour sa
faible action minéralocorticoïde.
Les mécanismes d’action seraient les suivants : diminution des interactions entre
endothélium vasculaire et les cellules circulantes (érythrocytes et plaquettes),
inhibition de l’activation et de la consommation plaquettaire, de la production de
cytokines inflammatoires par les cellules et de la nécrose hépatocytaire induite
par le système CD95-L d’origine placentaire. Elle agirait donc en limitant la
réaction inflammatoire générant la micro angiopathie caractérisant le HELLP
syndrome.
.
La dexaméthasone améliorerait aussi significativement les paramètres
biologiques de la maladie, notamment par un ralentissement du processus de
destruction périphérique des plaquettes. Elle pourrait être proposée en post
partum [16].
La prednisone (cortancyl) est substituée à la bétaméthasone car elle ne franchit
pas la barrière placentaire, mais elle accentue la rétention hydro-sodée.
L’utilisation d’une corticothérapie à visée maternelle est actuellement l’objet de
controverse [17].
Cependant, même si l’amélioration du HELLP syndrome n’est que transitoire, elle
permet une réduction des besoins en dérivés sanguins labiles et l’utilisation d’une
anesthésie péri médullaire pour l’accouchement [18].
6. Quelle prise en charge médicale ?
Dès le diagnostic suspecté, la prise en charge doit être celle de toute pré
éclampsie sévère avec ou sans HELLP syndrome, décrite dans la conférence
d’experts de la Société Française d’Anesthésie Réanimation (SFAR) en 2000 et
réactualisée en 2008 [2] [19].
La structure hospitalière doit comprendre à la fois une réanimation maternelle et
une réanimation néonatale de niveau 3 pour optimiser la prise en charge
maternelle et de l’enfant.
Le traitement médical doit répondre à deux objectifs :
-
corriger progressivement les désordres tensionnels
-
prévenir les complications maternelles.
En cas d’HTA sévère, un traitement anti hypertenseur est nécessaire pour
atteindre des chiffres systoliques compris entre 140 et 155 mm hg et des chiffres
diastoliques compris entre 80 et 105 mm hg de manière à prévenir les risques
potentiels des à coups hypertensifs mais aussi de manière à ne pas provoquer
une chute du débit utéro –placentaire délétère pour le fœtus.
Les traitements utilisés sont : les inhibiteurs calciques type Nicardipine (Loxen) ou
alpha et beta bloquants type Labetalol (Trandate) .
La transfusion de plaquettes n’est indiquée qu’en cas de syndrome hémorragique
significatif et de thrombopénie sévère (<50 000mm3). Les concentrés
plaquettaires sont administrés au moment de l’accouchement de manière à
réduire le risque hémorragique opératoire.
Les troubles de la coagulation nécessitent une correction appropriée rapide
(fibrinogène, PFC ou antithrombine).
La transfusion érythrocytaire ne doit pas être retardée en cas de coagulopathie
ou d’hémolyse car elle contribue à la stabilisation du processus pathologique.
Dès le diagnostic évoqué
Evaluation de la gravité maternelle et fœtale
Transfert en maternité niveau 3 si terme <34 SA
Anti Hypertenseur si PAS >160mmHg et \ ou PAD >110mmHg
Corticoïdes (intérêts maternels et pour la maturité pulmonaire fœtale)
Si terme < 24 SA ou > 32 SA
Etat fœtal non rassurant
Eclampsie
HRP
Œdème pulmonaire – insuffisance rénale Aigue
CIVD
Suspicion d’hématome sous capsulaire
HTA non contrôlable par le traitement
OUI
NON
Accouchement sans attendre
Si possible expectative 24-48h
la corticothérapie
pour la corticothérapie
Betamethasone 12 mg à H0 puis à H12
Puis accouchement entre H24 et H48
Evaluation rapprochée maternelle et fœtale
Algorithme décisionnel en cas de HELLP syndrome
7. Quel mode d’accouchement ?
Le mode d’accouchement dépend du terme de la grossesse, des biens être fœtal
et maternel et des conditions cervicales.
Si le terme est > à 30 SA et le col favorable, on peut envisager une épreuve de
travail.
Par contre, s’il existe un ralentissement cardiaque intra-utérin associé, un
oligoamnios sévère ou un col défavorable, une césarienne doit être préférée.
L’existence d’une thrombopénie sévère n’est pas une contre indication absolue à
la voie basse.
8. Quel mode d’anesthésie ?
L’ALR est la technique de choix en cas de pré éclampsie si les plaquettes sont >
à 75000 mm3 et stabilisées et en l’absence d’autres anomalies de la coagulation.
La numération plaquettaire doit être faite moins de 4 heures avant la réalisation
de L’ALR.
Si les plaquettes sont < à 75 000 mm3, un risque d’hématome péri médullaire
contre-indique la réalisation de l’ALR. Dans ce cas si une césarienne est décidée,
le seul mode thérapeutique sera l’anesthésie générale.
Plusieurs études ont montré que l’utilisation des corticoïdes à fortes doses
améliorait le taux de plaquettes et permettait la réalisation d’une ALR.
9. En pratique : que faire en cas de HELLP syndrome ?
Avant la naissance :
Avant 34 semaines, le diagnostic évoqué, la patiente doit être hospitalisée
immédiatement dans une structure permettant une surveillance materno-fœtal
continue afin d’établir un pronostic immédiat en recherchant les signes de
gravités maternels et fœtaux [19].
.La surveillance maternelle sera étroite pour diagnostiquer et traiter le plus
rapidement possible toutes complications.
1- Complications pulmonaires
Pour prévenir l’œdème pulmonaire par surcharge de perfusions associées à un
traitement par corticothérapie, la conduite à tenir est de :
-
limiter les apports
-
faire un bilan des entrées
-
mesurer le diamètre abdominal avec un mètre
-
peser quotidiennement
-
surveiller les œdèmes et leur évolution
-
surveiller la saturation en oxygène
Si les signes apparaissent : râles crépitant, expectorations, pâleur, sueurs dyspnée,
agitation, le traitement symptomatique sera : traitement diurétique, oxygénothérapie,
voire ventilation artificielle.
2- Complications hémodynamiques
Une surveillance étroite du niveau de la Pression Artérielle est nécessaire pour
prévenir tout risque d’instabilité tensionnelle et donc préserver le débit utéro
placentaire et le débit sanguin cérébral maternel, la conduite à tenir est de :
- Prendre la tension artérielle toutes les quatre heures voire plus rapproché dans
les formes sévères.
- Mettre en place un traitement anti hypertenseur selon le protocole de la SFAR
- Mettre en place un cathéter artériel si nécessaire.
3- Complications neurologiques
Pour prévenir tout risque d’aggravation de l’état neurologique par l’apparition
d’œdèmes cérébrale ou hémorragie cérébro-méningée ou inter-cérébrale, la
conduite à tenir est de dépister les prodromes d’éclampsie :
-
Surveiller l’état de conscience, l’apparition de céphalées, l’agitation, la
somnolence, l’état des pupilles.
Si les signes apparaissent, il faut avoir vérifié le matériel de ventilation, d’aspiration,
le matériel d’intubation standard et la disponibilité du matériel d’intubation difficile
(Penthotal et célocurine à proximité).
4- Complications rénales
Pour prévenir tout risque d’insuffisance rénale, la conduite à tenir est de :
-
Surveiller la diurèse horaire, la protéinurie
-
Surveiller le bilan des entrées et des sorties.
5- Complications biologiques
Pour dépister toute dégradation, la conduite à tenir est de prélever :
-
une NFS
-
une haptoglobine
-
une créatinémie
-
des ASAT et ALAT
-
une bilirubine
-
une hémostase
Renouvelée toutes les 6 heures à 12 heures selon la gravité initiale et l’évolutivité.
6- Complications fœtales
Pour prévenir toute dégradation au niveau du fœtus liée à l’ischémie utéroplacentaire, la conduite à tenir est de :
-
Surveiller le rythme cardiaque fœtal
-
Pratiquer une échographie obstétricale pour évaluer la croissance fœtale
-
Faire des doppler fœtaux.
Après l’accouchement :
La surveillance clinique et biologique reste systématique surtout dans les 48
premières heures car le risque de complications persiste. Le syndrome HELLP
peut s’aggraver pendant cette période, voir apparaitre en post partum.
Les anomalies cliniques et biologiques se corrigent généralement dans la
semaine suivant l’accouchement sans laisser de séquelles.
La sortie de la patiente ne sera autorisée que lorsque la pression artérielle est
stabilisée par le traitement antihypertenseur et les désordres biologiques en voie
de normalisation.
Une HTA peut persister au-delà de la première semaine dans 50% des cas.
La récurrence d’un HELLP syndrome varie de 2 à 19% ou de survenue d’une pré
éclampsie (16 à 52%) lors d’une nouvelle grossesse. Ces risques dépendent de
la population étudiée (ethnie, âge maternel, de l’âge gestationnel de survenue du
HELLP syndrome, de la présence de facteurs de risques vasculaires.)
10. Conclusion :
Le gain de quelques jours dans une structure spécialisée avec une bonne prise
en charge pluri disciplinaire permet d’améliorer le pronostic des formes sévères et
très prématurées.
La mort maternelle est devenue très rare, elle est le plus souvent le fait d’erreur
diagnostic et/ou de prise en charge inadéquate.
Les anesthésistes réanimateurs ont les moyens de contribuer à l’amélioration de
la perfusion viscérale et au contrôle de la pression artérielle, ils participent à la
décision de l’accouchement qui représente le seul traitement définitif de la
maladie.
11. Références bibliographiques :
[1] Sibaï BM. The HELLP syndrome (Hémolysis,elevated live enzymes and low
platelets) : Much ado about nothing ? Am J Obsted Gynecol 1990; 162: 311-6.
[2] Réanimation des formes graves de pré éclampsie – Conférence d’experts –
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[3] Martin Jr Jn, Rinehart B, May Wl, Magann Ef, Terrone Da, Blake PG – The
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physiopathologie de la pré éclampsie et conséquences thérapeutiques potentiels.
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[5] Barton JR, Riely CA, Adame TA, Shanklin DR, Khoury AD, Sibaï BM . Hepatic
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