analyse thème l`amant duras sur les symboles
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analyse thème l`amant duras sur les symboles
Les symboles Trente-quatre ans après la sortie d' «Un barrage contre le Pacifique», Marguerite Duras publie «L’Amant», qui deviendra par la suite son ouvrage le plus célèbre. Dans ce roman, l'écrivaine dit vouloir dévoiler la réalité, les événements de sa jeunesse tels qu'elle les a perçus. Duras va donc en quelque sorte désosser son premier récit autobiographique, pour en garder uniquement la vérité. Cette volonté se retrouve en effet à travers le roman, car à l'inverse d' «Un barrage contre le Pacifique», les faits sont ici humblement transposés sans connaître de «sublimation» au travers de l'écriture. Nous pouvons par exemple constater que la narration est hachée et morcelée, ou que les phrases sont parfois disloquées. Comme pour montrer que chaque mot est issu d'un souvenir marquant et lointain. Ces réminiscences permettent également à l'auteur de mettre en avant un objet, un lieu ou une personne, créant ainsi toute une symbolique autour de celui-ci. Toutefois, qui sont-ils, que représentent-ils et pourquoi occupent-ils une place si prédominante dans le récit? Pour le savoir, nous allons analyser trois de ces symboles: le chapeau, la traversée du fleuve et l'eau, dans divers passages du livre, afin d'en dégager leur signification. Le chapeau en feutre souple de la protagoniste fait partie intégrante de son accoutrement. Pourtant, à l'instar des chaussures lamées or, quelque chose le démarque du lot. Effectivement, on peut tout d'abord noter que c'est un chapeau d'homme, et «qu'aucune femme, aucune jeune fille ne porte de feutre d'homme dans cette colonie à cette époque là» (p.19). La jeune fille est donc différente des autres, elle semble étrangère à soi-même, dans la mesure où son identité se construit à partir de vêtements qui ne lui sont pas appropriés (ceinture du frère, robe de la mère...). Cependant, cette étrange alchimie parait résulter de sa propre initiative, car comme on peut le voir, elle chérit sa nouvelle image: «C'est ma volonté...toile blanche.» (p.18), «Je prends le chapeau...le quitte plus.» (p.20). En fait, son attitude reflète sûrement ses interrogations de l'être à soi, qui sont d'ailleurs renforcées par le regard distancé que la narratrice adulte pose sur ce qu'elle fut. Comme beaucoup durant leur adolescence, elle se cherche et essaye de se définir via ses propres choix ou ceux de sa mère. En portant le feutre couleur bois de rose, elle se voit autrement, elle se sent plus mature: «Sous le chapeau...devenue autre chose.» (p.19). On peut donc dire que le couvre-chef est un élément primordial de son passage précipité à l'âge adulte, symbolisé par «l'experiment». Le chapeau est également un artefact fétichiste, suscitant le désir, la séduction, et mettant la jeune fille «à la disposition de tous les regards» (p.20). Du reste, l'attirance émise par le caractère ambiguë du feutre, à la fois innocent et provoquant, va rapidement entraîner une rencontre. En effet, sa relation avec le chinois de Cholen est en grande partie due à sa tenue. Il va d'ailleurs lui faire remarquer que «le chapeau lui va bien, très bien même» (p.42), ou encore, lorsqu'il l'aperçoit pour la première fois, il ne peut s'empêcher de relever le «feutre d'homme» et les «chaussures d'or» de la jeune fille. Il est important de noter que tout ceci est voulu et prémédité par la mère, et accepté par la fille. La misère dans laquelle vit la famille (les vêtements sont des soldes soldés) oblige la mère à lui acheter ce chapeau, la vêtir de chaussures lamées or et d'une «robe de soie presque transparente», et de ce fait prostituer sa fille. Cette dernière ne conteste pas son nouveau statut, car elle sait qu'il «faudra bien que l'argent arrive dans la maison, d'une façon ou d'une autre il le faudra.» (p.32). Cette nouvelle étape dans son existence marque également le début de son émancipation, de son réel détachement avec le reste de la famille. A partir de ce moment, c'est elle qui va subvenir aux besoins du foyer sans que personne n'ose se dresser à l'encontre de ses agissements. Cette inversion des rôles, aussi présente dans le chapeau qui est normalement censé être un objet masculin, est sans aucun doute une revendication de la spécificité féminine dans son ouvrage. Cette position subversive appelle au «droit à la différence», et s'inscrit dès les années 70 dans le mouvement «néo-féministe» auquel Duras adhérait. Ici, l'auteur contredit son personnage, ses contemporains et les mentalités, en nous proposant une approche différente de la femme. Le feutre couleur bois de rose est en définitive aussi bien synonyme de séduction que de détermination. Et, c'est en partie lui qui l'aidera à franchir une étape dans sa vie, autrement connue sous le nom de: «la traversée du fleuve». La traversée du fleuve est effectivement un événement crucial dans la vie de la future romancière, dans la mesure où le fleuve représente un passage entre deux états, entre deux stades de l’existence. Marguerite Duras nous livre une vision assez apocalyptique de ce fleuve mortifère. Le Mékong est décrit comme étant «sauvage» et déchaîné, rien ne semble retenir son perpétuel écoulement vers l'océan: «Le courant est...une ville.» (p.17). Cette image terrifiante va rapidement susciter un sentiment de peur chez la jeune fille, qui dit «avoir peur que les câbles cèdent» et d’être «emportée vers la mer» (p.17). Ce passage qui paraissait anodin au premier abord, va néanmoins annoncer le caractère passion destructrice qui va marquer les deux amants. Ceux-ci vont peu à peu se retrouver engloutis par cette force surhumaine, véritable réceptacle de mort, qui, comme le souligne l'emphase à la page 30, emporte tout sur son chemin: «Il emmène tout...force du fleuve.» (p.30). De plus, son allure lugubre est autrement plus renforcée lors de l'évocation du «passeur» autochtone, qui renvoie directement à Caron, figure mythologique qui permettrait aux morts de traverser le Styx pour rejoindre le Léthé. A chaque traversée quelque chose doit décéder, être sacrifié en guise de paiement. Ici, on assiste symboliquement à la mort de l'enfance de la petite Marguerite, et de son passage à l'âge adulte, représenté à travers son accoutrement. Tout est donc en place pour promettre un avenir infernal et tragique aux deux amants, parce qu'à l'inverse du Styx, le Mékong ne mène pas vers une vie meilleure, mais vers le néant. Il est voué à «disparaître dans les cavités des océans.» (p.17). C'est ainsi que ce monstre aquatique va engloutir le fils de l’administrateur de Sadec, qui, suite à son suicide sur le bateau va provoquer le retour en France de l'adolescente. Ce suicide d'un autre, est aussi bien le sien que celui de son amour. A présent, la terre se dérobe lentement sous Duras, laissant place à un vide qu'elle s'efforcera de combler au moyen de l'alcool. Il faut veiller à bien distinguer la symbolique du fleuve et de l'eau, même si comme nous allons le voir, l'eau englobe en grande partie l'allégorie du fleuve. L'eau joue un rôle binaire dans le texte. Effectivement, en premier lieu, on pourrait rapprocher la fonction de l'eau à celle d'un élément «générateur», qui est propice à la fécondation, la métamorphose et à l'émancipation. En d'autres termes, c'est bien au bord de l'eau que la scène-clé de la rencontre entre la jeune fille et son amant a eu lieu. Ce moment marque son initiation sexuelle, sa libération sociale et son passage à l'âge adulte. Toutefois, l'eau peut également revêtir un caractère plus destructeur et maléfique, car elle peut à tout moment engloutir tout ce qui se présente à elle, que ce soit à travers le Mékong ou la pluie: «La maison est bâtie...de la mousson.» (p.73-74). L'eau peut aussi être présentée sous un autre jour, que ce soit à travers les larmes des protagonistes, le style du nouveau roman et le lavage des amants et de la maison. Les larmes représentent l'impuissance, le désarroi et le malheur des personnages. Le chinois «gémit, pleure. Il est dans un amour abominable.» (p.48). Son acte démontre son incapacité à lutter face à son amour et face à son père. Il est tourmenté et le restera jusqu'à la fin de sa vie. Duras quant à elle, pleure «sur le désastre de sa vie, de son enfance déshonorée» (p.72). Le petit frère et la mère pleurent à cause des agissements de l'aîné. Les larmes peuvent donc être assimilées à une action consolatrice et désespérée, qui devraient en théorie pouvoir leur donner la force nécessaire pour aller à l'encontre de leur malfaiteur. Pourtant, personne n'essayera, et tous vont se retrouver noyés dans un torrent sans fin. Ce torrent ce retrouve également dans le style de l'auteur. L'écriture est tel «un cours d'eau», où les phrases sont fluides, le rythme est saccadé ou continu, le débit se confond et se rompt, et d'où jaillissent sans cesse les figures de style. On tient là les caractéristiques du nouveau roman, que Duras démocratisera dès le début des années 50. En outre, l'eau sert aussi à purifier certains lieux et personnages du livre. C'est notamment le cas lorsque l’adolescente se fait laver par son amant: « Il essuie le sang, il me lave. Je le regarde faire.» (p.49). Durant ce lavage rituel, on a l'impression d'assister à quelque chose de sacré, à la manière d'un baptême, dont le silence ne doit en aucun cas être interrompu. Cet acte semble emporter toutes les impuretés spirituelles de la jeune fille, comme pour la pardonner après leurs ébats, lui rendre sa pureté. Le lavage de la maison s'inscrit dans le même courant. Chaque fois après le départ du frère aîné, la maison est nettoyée, afin de «l'assainir, (la) rafraîchir.» (p.73). Cette eau permet de guérir les blessures laissées par le grand frère et se dérober éphémèrement de la misère assaillante. «Baigner tout entière comme un jardin la maison» (p.74), est aussi une façon de raviver les cendres de l'espoir d'une vie meilleure, car quand la maison est lavée, ce n'est pas l'eau mais bien la joie qui inonde celle-ci: «Elle chante...une plage.» (p.75). En bref, l'eau est donc un élément polymorphe, tantôt bienfaisant, tantôt maléfique. Il n'en demeure pas moins un composant capital, qui ponctue les événements les plus importants de la vie de Duras et qui forge son identité future, telle une goutte creusant la paroi d'une cavité (son visage). En conclusion, comme nous l'avons vu, à l'image de la plupart des romans, l’œuvre de Marguerite Duras regorge de multiples symboles. Cependant, dans «L'Amant», ils peuvent revêtir plusieurs formes et affecter les personnages du récit de diverses façons. Après avoir étudié à quoi se rapportent les trois symboles, on peut assurément distinguer qu'ils entrent en corrélation sur un fait. Ils constituent tour à tour une étape dans la transformation de la jeune fille. Ils sont donc à la fois complémentaires et formateurs dans son apprentissage de la vie, et dans la recherche de sa propre identité. Sources: -Duras: http://fr.wikipedia.org/wiki/Marguerite_Duras -l'amant: http://fr.wikipedia.org/wiki/L'Amant_(roman) -l'eau: http://www.aventurelitteraire.com/marguerite-duras-l-amant/ -le styx: http://fr.wikipedia.org/wiki/Styx -le fleuve: http://www.lechatsurmolenepaule.com/article-marguerite-duras-l-amant-commentaire-d-un-extrait-104281131.html -la place de la femme chez duras: http://opus.kobv.de/ubp/volltexte/2008/2170/pdf/Duras_Tagungsband_bericht03.pdf