Version française - CARIM

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Version française - CARIM
Séance de question orale à l’Assemblée nationale : LA SITUATION DES
MALIENS DE L’EXTERIEUR ANIME LES DEBATS
Quotidien National “L’Essor” N°16462 du 12/06/09 – Page 15
Le ministre Badara Aliou Macalou et le député Oumar
Mariko ont eu de vifs échanges sur des questions concernant nos compatriotes vivant à l’étranger
L’Assemblée nationale était en plénière hier avec un ordre du jour prévoyant 3 questions orales et l’examen de 5 projets
de lois. Mais finalement, une seule question orale était au rendez-vous. Les autres ayant été renvoyées à une prochaine
séance.
La question qui a passé était celle du Dr Oumar Mariko élu à Kolondiéba. Elle était relative à la situation des Maliens de
l’extérieur. Selon le président du groupe parlementaire PARENA-Sadi, on enregistre par mois 45 expulsions de Maliens
sur la compagnie Air France. Et cela sans compter les charters en provenance de l’Espagne et de Libye.
Il pense que les consulats ne font pas preuve de toute la fermeté pour s’opposer à ces expulsions. Le député croit
même savoir que ces services perçoivent 150 euros (environ 97 000 Fcfa) pour la délivrance du laissez-passer qui
facilite l’expulsion.
Oumar Mariko n’a pas manqué de soulever la délicate question des accords sur la gestion des flux migratoires que la
France a signés avec certains pays et que le gouvernement malien n’a pas accepté en l’état.
UNE QUESTION COMPLEXE. L’élu a évoqué plusieurs autres sujets : les relations avec l’Espagne, l’accueil à BamakoSénou des rapatriés, la question de la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières de l’Union européenne
(Frontex), le Centre d’information et de gestion (CIGEM) de Bamako et les actions du département des Maliens de
l’extérieur
en
faveur
des
migrants
de
retour.
Le ministre des Maliens de l’extérieur et de l’Intégration africaine a d’abord retenu la complexité de la question. Badara
Aliou Macalou a ainsi relevé que la question de la migration concerne tous les Maliens. C’est pour cette raison, expliquet-il que le président Amadou Toumani Touré a dédié un ministère spécifique aux Maliens de l’extérieur.
Le ministre a fait remarquer que le Malien, où qu’il se trouve garde le sens de la famille, l’attachement au pays d’origine
et la volonté de rentrer un jour au bercail. Où qu’ils soient, les Maliens attirent respect et considération sur eux.
Selon les estimations, ils sont aujourd’hui 4 millions de nos compatriotes à s’être installés en dehors du pays dont 3
millions en Afrique et 200 000 en Europe (avec un peu plus de 100 000 en France). Le ministre a annoncé que le
gouvernement
s’apprête
à
organiser
un
forum
international
sur
la
diaspora.
Répondant à une question de Oumar Mariko, le ministre a contesté le chiffre de 45 expulsions de la France par mois.
Rappelant les chiffres de 2008, il a retenu une moyenne de 21 expulsions par mois. Pour l’année en cours, il a donné
une moyenne de 10 expulsions par mois. Pour cerner le phénomène migratoire, il invite à prendre en compte la réalité
des
pays
de
transit
et
d’accueil.
La situation économique est loin d’être brillante pour tout le monde. Beaucoup de pays connaissent le chômage
grandissant. De plus, selon les normes internationales admises les immigrés doivent se stabiliser à 6 ou 7% de la
population du pays d’accueil pour être supportable. Avec les tendances actuelles, certains pays en sont à 1/5 de leur
population
constituée
d’immigrés.
Abordant le cas des Maliens expulsés de pays d’Afrique australe, il a rappelé que malheureusement, notre pays n’a
aucun accord avec ces pays et en plus, les Maliens qui y vivent sont dans les zones diamantifères, des zones interdites,
y
compris
pour
les
nationaux
de
ces
pays.
Quant aux Maliens vivant en Espagne, le Dr Macalou rappelle qu’ils ont bénéficié d’une régularisation massive il y a 4
ans,
mais
que
ce
pays
aussi
connaît
des
difficultés
économiques
aujourd’hui.
Pourquoi des expulsions ? La migration suppose le respect des règles du pays d’accueil par l’émigré. Tout contrevenant
s’expose
à
des
mesures
d’expulsion.
Il a démenti que les consulats perçoivent de la part de pays d’accueil, 150 euros par laissez-passer délivré, en précisant
que l’établissement de ce document engendre des frais de la part de celui qui en fait la demande. Ainsi l’émigré malien
sans papier doit débourser 20 euros pour obtenir le laissez-passer (7,5 euros pour les frais de timbre et 12,5 euros pour
les
frais
de
chancellerie).
Contrairement aux déclarations du Dr Mariko, Macalou indique que tout Malien rapatrié de retour est accueilli et
acheminé sur sa localité. Le département a ouvert à l’aéroport de Bamako-Sénou un bureau à cet effet. Tout comme, il
continue d’assister ceux de nos compatriotes rentrés au pays et qui veulent mener des activités.
Le Mali n’a pas signé d’accord sur la gestion des flux migratoires avec la France car le gouvernement estime que les
projets d’accord jusque là proposés étaient déséquilibrés. Mais les négociations continuent. Il ne voit aucun
inconvénient à ce qu’un pays veuille chercher un accord avec un autre sur une question qui les concerne. Le
gouvernement a une claire conscience de ce qu’il veut : tenir compte de l’attente des Maliens où qu’ils soient et
défendre à tout point de vue les intérêts de notre pays.
PROMOUVOIR L’EMIGRATION LEGALE. Au Mali, il y a une réalité : les transferts des migrants sont vitaux pour de
nombreuses familles. Rien que pour la Région de Kayes, les transferts se sont élevés à 120 milliards Fcfa en 2008. Les
migrants ont joué un rôle crucial pour la réalisation de certaines infrastructures de cette région.
Badara Aliou Macalou a rejeté toute complaisance dans le choix des 30 Maliens invités à effectuer un travail saisonnier
en
Espagne.
Pour ce qui est des biens des Maliens victimes d’expulsion, les ambassades font tout ce qui est en leur pouvoir pour les
aider
à
rentrer
en
possession
de
leurs
biens.
Répondant toujours aux questions, le ministre a expliqué que Mali n’a rien à voir avec le Frontex. Il a cité les zones où
des
migrants
de
retour
ont
obtenu
des
terres
pour
pratiquer
l’agriculture.
Sur le Centre international de gestion des migrations (GIGEM) les deux hommes n’ont pas la même lecture. Oumar
Mariko estime qu’il s’agit là d’un gaspillage et que les 10 millions d’euros (65 millions Fcfa) de frais de fonctionnement
seraient utiles ailleurs. De plus, il ne comprend pas que notre pays se mette à aider les autres dans leur lutte contre
l’émigration
clandestine.
Le ministre Macalou considère le GIGEM comme un moyen de promotion de la migration légale, une amélioration des
profils et un appui à la diaspora. En somme, c’est une chance pour le Mali, de l’abriter.
Appréciant les réponses du ministre, Oumar Mariko s’est dit peu convaincu. Il a invité tous les partis à soutenir le
gouvernement
dans
le
refus
des
accords
sur
la
réadmission.
Enfin, il a appelé à se référer à nos devanciers, notamment le président Modibo Keïta. Cette allusion n’a pas été du goût
du ministre Macalou, qui est aussi le secrétaire général de l’USRDA, le parti qui a porté Modibo Keïta au pouvoir en
1960. Il a pris cette allusion un peu comme une offense et a considéré l’initiative de Mariko comme de la “démagogie”.
Pour lui, Mariko soutient l’émigration clandestine malgré tous les dangers que cela engendre pour les candidats. Le
ministre pense qu’au contraire, il faut soutenir l’émigration légale et continuer à défende les intérêts des Maliens où
qu’ils
se
trouvent.
Le président de l’Assemblée nationale est alors intervenu pour inviter le ministre à garder son calme et à rester dans un
débat démocratique. On notera que le débat a largement débordé les 60 minutes prévues par le règlement intérieur de
l’Assemblée
nationale.
Après la question orale, les élus de la nation ont examiné et adopté le projet de loi portant ratification de l’accord de prêt
signé à Bamako le 30 mai dernier entre le Mali et l’Association internationale pour le développement (IDA) pour le
financement du troisième Crédit d’appui à la stratégie de réduction de la pauvreté (CASRP-3).
Nous reviendrons sur les travaux de la plénière dans notre prochaine livraison.