le monde musulman

Transcription

le monde musulman
LE
MONDE
MUSULMAN
Clément A. Marro
COMPLÉMENT AU MANUEL
D’HISTOIRE DU DEGRÉ 7
Nathan
Chapitre 3
Conseiller historique :
Mostafa Hassani Idrissi,
docteur de l’université de Rabat
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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CONTENU
1.
INTRODUCTION ............................................................................................... 4
1.1. But.........................................................................................................................4
1.2. Activités et documents .......................................................................................4
1.3. Mahomet, Moham(m)ed ou Muhammad ? .........................................................4
1.4. Diversité et unité des musulmans......................................................................5
2.
HISTOIRE DE L’ISLAM .................................................................................... 6
2.1. Remarques préliminaires....................................................................................6
2.2. L’Arabie au temps de Mohamed.........................................................................6
2.2.1.
La géographie ..........................................................................................6
2.2.2.
La société.................................................................................................6
2.2.3.
La religion ................................................................................................7
2.2.4.
L’économie...............................................................................................8
2.2.5.
Les communautés juives et chrétiennes..................................................9
2.3. L’expansion de l’Islam aux 7e et 8e siècles......................................................10
3.
2.3.1.
Première période ( 632 – 634 ) ..............................................................10
2.3.2.
Deuxième période ( dès 634 )................................................................12
2.3.3.
Vers l’Espagne ( 711 ) ...........................................................................13
2.3.4.
Et les juifs et les chrétiens des territoires conquis ? ..............................15
LES MUSULMANS DANS LE MONDE .......................................................... 17
3.1. Les pays arabes.................................................................................................17
3.2. Les autres pays..................................................................................................17
3.3. La Suisse ............................................................................................................18
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4.
LA RELIGION ................................................................................................. 21
4.1. Les Sources : Le Coran — La Sunna — L’ijmâ — Le Qi(y)âs ........................21
4.1.1.
Le Coran. ...............................................................................................21
4.1.2.
La Sunna - la Tradition du Prophète. .....................................................23
4.1.3.
L’Ijmâ .....................................................................................................28
4.1.4.
Le Qi(y)âs. .............................................................................................29
4.2. L’ijatihâd .............................................................................................................29
4.3. Le jihad ...............................................................................................................30
4.4. Loi coranique et droit coranique ......................................................................33
5.
CONTRIBUTIONS AU DEVELOPPEMENT DE L’EUROPE .......................... 37
6.
DOCUMENTS ET ACTIVITES ........................................................................ 40
6.1. La création selon le Coran................................................................................40
6.2. Le calendrier musulman et les fêtes................................................................42
6.2.1.
Le calendrier. .........................................................................................42
6.2.2.
Les fêtes. ...............................................................................................44
6.3. La prise de Jérusalem ( 638 ap. J.-C. ).............................................................45
6.4. L’Iraq au 9e Siècle : un nœud de voies commerciales ...................................46
6.5. ACTIVITES ..........................................................................................................48
7.
6.5.1.
ACTIVITE
...........................................................................................48
6.5.2.
ACTIVITE
...........................................................................................50
6.5.3.
ACTIVITE
...........................................................................................51
BREVE BIBLIOGRAPHIE............................................................................... 53
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1. INTRODUCTION
1.1. BUT
Le seul but des lignes qui suivent est de fournir aux enseignants
quelques informations complémentaires à celles du manuel et du livre du maître.
Elles ne visent nullement à se substituer à un ouvrage fouillé sur l’islam. Il a paru
utile aussi d’apporter quelques précisions sur des sujets d’une actualité parfois
brûlante et passionnée, tant les media parlent souvent de charia, de droit
musulman ou islamique, de jihad, voire de choc des civilisations.
1.2. ACTIVITÉS ET DOCUMENTS
Les quelques documents inclus dans ce dossier peuvent faire l’objet de
lectures, d’exercices ou bien sûr être laissés de côté.
1.3. MAHOMET, MOHAM(M)ED OU MUHAMMAD ?
Le manuel des Editions Nathan parle de Mahomet. En fait, le nom arabe
du fondateur de l’Islam peut être rendu en français de différentes manières et la
transcription proposée, quoique traditionnelle, n’est certainement pas la
meilleure. Muhammad serait préférable, ou Mohammed ou éventuellement
Mohamed, également mentionné dans le manuel (Chapitre 2. 1. B1) .On peut
aussi faire référence au « Prophète », titre que lui donnent fréquemment les
musulmans.
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1.4. DIVERSITÉ ET UNITÉ DES MUSULMANS
Il faut garder à l’esprit que l’approche proposée dans ce chapitre se
limite à mettre en évidence quelques éléments seulement de l’islam, les plus
fondamentaux et les plus communément acceptés. Une religion n’existe pas
indépendamment des personnes qui la pratiquent. Aussi serait-il erroné de croire
que les musulmans forment une communauté monolithique dont les croyances et
les pratiques se limitent à ces seuls éléments. L’islam est vécu de manières fort
diverses dans différents pays. Les positions théologiques, qui ne sont pas
abordées dans le cours, sont diverses aussi. Dès les débuts de l’islam plusieurs
courants de pensée se sont manifestés, entraînant parfois des divisions de la
communauté, telle que celle entre sunnites – majoritaires – et chiites, les deux
groupes les plus importants au sein de l’islam, mais qui se sont eux-mêmes aussi
divisés.
Il n’en reste pas moins que les musulmans retrouvent leur unité dans
des croyances et des pratiques qui les rassemblent, les plus manifestes étant le
hajj, le pèlerinage à La Mecque, et l’observance du jeûne du Ramadan.
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2. HISTOIRE DE L’ISLAM
2.1. REMARQUES PRÉLIMINAIRES
Il a paru judicieux ici de fournir dans un premier temps quelques
informations au sujet de la vie dans la péninsule arabique à l’époque de
Mohamed. Une telle démarche permet de mieux saisir le contexte général dans
lequel le Prophète a proclamé son message et ce qu’il avait alors de novateur,
voire de révolutionnaire.
Quant à la propagation de l’islam dès le milieu du 7e siècle, une
approche très largement acceptée le voit généralement imposé à la pointe de
l’épée. Or la réalité est quelque peu différente. C’est pourquoi, dans un second
temps, une démarche plus nuancée a été proposée pour tenter de mieux cerner
cette réalité, tout en devant se limiter aux aspects paraissant les plus importants.
2.2. L’ARABIE AU TEMPS DE MOHAMED
2.2.1. La géographie
L’immense péninsule arabe est divisée en trois parties
principales : le Hijâz constitue une barrière montagneuse le long de la
Mer Rouge. Au sud, en gros le Yémen actuel, la région est plus fertile
parce qu’arrosée par des pluies de mousson. Le Najd , désertique,
couvre le reste des terres.
2.2.2. La société
La population des bédouins 1 du Najd était répartie en tribus et
en clans. Les querelles éclataient fréquemment entre différents groupes
et conduisaient systématiquement à des représailles, en vertu de la loi
du talion. La razzia faisait partie intégrante des coutumes acceptées,
pour autant cependant qu’elle n’ait pas été motivée par des buts
strictement personnels. On y recourait plutôt en dernier ressort, quand il
n’y avait plus d’autre alternative pour maintenir le groupe en survie. En
fait, ces tribus ne connaissaient aucune structure sociale d’ensemble et
n’étaient régies par aucune autorité quelque peu centralisée. Prévalait
1 De bâdiya, la steppe. Voir : « L’Arabie avant le 7e siècle ». www.imarabe.org/perm/mondarabe/theme/docs1.html
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donc une situation de chaos dans laquelle l’emportait la raison du plus
fort.
Les femmes ne semblent avoir bénéficié que de peu de droits
et ne jouaient qu’un rôle secondaire dans cette société bédouine.
L’infanticide des filles à la naissance n’était pas exceptionnel. Le Coran
dénonce d’ailleurs cette pratique (17.33).
2.2.3. La religion
Les bédouins ne pratiquaient pas de religion bien définie. Ils
rendaient un culte à des pierres de formes et de couleurs diverses, les
bétyles. A proprement parler, un bétyle ne représente pas la divinité ellemême, mais plutôt sa résidence, sa « maison ». Un bétyle est donc la
« maison du dieu », la « maison d’Allah ». Le glissement d’une
signification à l’autre est cependant facile. Les plus célèbres de ces
bétyles constituaient la triade féminine de la Ka’ba, à la Mecque, seul
lieu sacré respecté par l’ensemble des tribus et auquel aucun acte
violent n’étais admis. La visite à cette triade représentait justement un
des deux ou trois éléments communs à toutes les tribus. Second
élément, les trois ou quatre « mois sacrés », durant lesquels aucune
guerre n’était entreprise. La loi du talion constituait un troisième élément
commun. Elle était appliquée pour une vengeance en cas de crime de
sang et était pratiquement sacralisée puisque le vengeur allait
suspendre à la Mecque l’arme de sa victime. Dans les oasis habitaient
des communautés juives, par exemple à Yathrib (la future Médine) et
chrétiennes avec lesquelles la population bédouine avait des contacts.
Les croyances et les pratiques religieuses de ces religions ne leur
étaient donc pas totalement inconnues 2 . La théologie et les pratiques
des chrétiens de la région n’étaient pas toujours en accord avec la ligne
« officielle » défendue par Byzance. Il est possible alors que Mohamed
ait eu connaissance d’éléments de la Torah juive et des Evangiles
chrétiens. Qu’il ait eu des contacts, parfois difficiles, avec des juifs et
des chrétiens ne fait par contre aucun doute. Un auteur musulman écrit
à ce sujet que « Muhammad devait avoir souvent des conversations à
2
Voir Wahib Atallah : Mahomet. Pp. 32s.
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bâtons rompus avec les artisans chrétiens ou juifs […] de La Mecque,
comme probablement, à un autre niveau, avec des rabbins, des prêtres
et des moines chrétiens…. » 3 Il dut en rencontrer aussi au gré de ses
déplacements commerciaux.
2.2.4. L’économie
Economiquement, la majorité de la population bédouine du
Najd était pauvre, dépendant avant tout de maigres troupeaux et se
déplaçait
fréquemment
selon
les
rares
pâtures
à
disposition,
particulièrement après les quelques pluies d’hiver alors que l’herbe était
à peine moins clairsemée.
Seules étaient sédentaires les populations vivant dans les
oasis. Elles parvenaient à résister aux tentatives de pillages des
bédouins grâce à un minimum d’organisation. Mais ces deux groupes
dépendaient dans une certaine mesure l’un de l’autre. Les bédouins
s’approvisionnaient dans les oasis en dates, vêtements et quelques
autres produits d’artisanat qui y étaient manufacturés. De leur côté, les
habitants des oasis avaient besoin du soutien de tribus ou clans
bédouins pour être protégés des raids d’autres nomades. Les oasis
servaient aussi de points d’eau, un élément très précieux dans une
contrée aussi aride.
Certaines oasis et des bourgades s’étaient développées en
nœuds commerciaux desquels partaient et par où transitaient des
caravanes de marchands. La Mecque, qui n’était par ailleurs pas une
oasis, jouait un rôle de tout premier plan dans le commerce local et
international. Par cette ville passait une partie des marchandises de
l’Inde à destination de la Méditerranée ainsi que des échanges entre le
Yémen et la Mésopotamie. Il ne fut pas trop difficile alors pour le jeune
Mohamed de trouver un emploi et pendant un temps il fut conducteur
des caravanes de Khadîja, une riche commerçante dont il devint plus
tard l’époux. Une importante partie de l’économie de La Mecque
dépendait du pèlerinage vers les trois divinités qui y faisaient l’objet d’un
3
Id., p. 36
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culte important. Il ne faut dès lors pas s’étonner si le message
monothéiste de Mohamed y suscita une violente hostilité.
2.2.5. Les communautés juives et chrétiennes
Dans des oasis et surtout sur la côte de la Mer Rouge ainsi
qu’au sud du Najran, vivaient aussi depuis plusieurs siècles des
communautés juives et chrétiennes. Les Juifs, installés depuis
longtemps dans la région, s’étaient parfaitement intégrés. Divisés en
plusieurs tribus, ils parlaient la langue locale et se livraient surtout au
commerce caravanier et à l’artisanat ( tissage d’étoffes, métallurgie).
Peut-être avaient-ils même introduit certaines formes d’agriculture dans
les oasis. Politiquement, ils semblent avoir bénéficié d’un certain soutien
des
souverains
perses 4 .
Les
chrétiens,
eux,
étaient
établis
principalement sur les côtes de la Mer Rouge. Ils entretenaient des
relations politiques surtout avec Byzance et l’Abyssinie 5 .En outre, les
souverains byzantins avaient établi un royaume « tampon » entre leur
empire et les tribus arabes, tout comme les Sassanides l’avaient fait
dans le sud de l’Arabie. Sur ces royaumes régnaient des dynasties
chrétiennes. Ainsi la région était-elle occasionnellement un des champs
de tensions directes ou indirectes entre les grandes puissances de
l’époque. La sourate 30 du Coran fait ainsi allusion à une guerre,
vraisemblablement contre les Perses, au cours de laquelle les Byzantins
furent vaincus. D’ailleurs cette sourate porte le titre « Rome » 6 ou « Les
Grecs » 7 . Quand le Coran parle des Rûm, il s’agit bien entendu des
Byzantins.
Du point de vue de la religion, dans les oasis habitaient des
communautés juives et chrétiennes. En Mésopotamie s’étaient aussi
développés des centres appartenant à ces religions, particulièrement au
christianisme. De nombreux écrits avaient été rédigés, que ce soient des
évangiles apocryphes ou d’autres traités combinant philosophie grecque
et théologie chrétienne. Une partie des chrétiens étaient en rupture avec
Byzance dont ils n’acceptaient pas la théologie et avaient rédigé leurs
4
Voir Abitbol, Michel : Le passé d’une discorde. Juifs et Arabes depuis le VIIè siècle. P.11. Perrin. Paris.2003
Voir p.cit.,p.12.
Traduction de Jacques Berque.
7
Traduction d’Edouard Montet
5
6
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propres ouvrages. Le Moyen Orient ne constituait en aucun cas un
désert religieux et culturel. Au cours de ses déplacements avec des
caravanes, Mohamed entra en contact avec ces milieux.
C’est
dans
un
tel
environnement,
cependant
instable,
qu’explose la proclamation strictement monothéiste de Mohamed. Un
auteur parle d’ « une immense révolution religieuse » 8 . Et qui plus est,
sur la base du message qu’il reçoit, le Prophète établit une communauté
de croyants transcendant les clivages tribaux et qui par leur manière de
vivre se démarquent profondément du reste de la population. Sur
l’arrière plan des coutumes tribales, le monothéisme prêché par
Mohamed n’en devient que plus frappant et l’opposition qu’il provoqua
plus compréhensible. Toujours est-il qu’il formula et modela pour ces
populations arabes une nouvelle identité religieuse, linguistique, sociale
et politique, qu’elles acceptèrent librement ou qui leur fut imposée.
2.3. L’EXPANSION DE L’ISLAM AUX 7E ET 8E SIÈCLES
2.3.1. Première période (632 – 634)
A la mort de son fondateur ( 632 ), la communauté musulmane
était composée essentiellement d’Arabes, de bédouins, habitant aux
environs des deux importants centres religieux et économique de La
Mecque et de Médine et en quelques oasis conquises par Mohamed et
ses guerriers.
Sous la direction des califes, les successeurs du Prophète, ou
de leurs lieutenants, les Arabes musulmans ne tardèrent pas à tourner
leurs armes vers les régions voisines. Avant tout, il s’agissait pour les
califes de maintenir la cohésion de la communauté naissante et d’éviter
que les nouveaux croyants ne retournent à leurs anciennes pratiques de
razzia entre tribus et clans. Ainsi, le premier calife Abou Bakr, père
d’Aïsha, épouse de Mohamed, dut intervenir par la force pour éviter
l’éclatement de la communauté quand des tribus se révoltèrent,
8
Abitbol, Michel : op.cit.,p.13.
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désireuses de retourner aux anciens usages. Ce n’était là que « la
première d’une série de révoltes à caractère politique et religieux qui
ponctuent l’histoire de l’islam jusqu’à l’avènement des ‘Abbasides au
VIIIe siècle. » 9
Pour les Arabes, les conditions de vie ne s’étaient pas
améliorées suite à leur conversion à l’islam. Comme auparavant, seuls
les habitants des oasis, maintenant aux mains des musulmans,
jouissaient d’une situation un peu moins précaire, de même que
quelques riches Arabes qui pouvaient vivre du commerce en
investissant dans des caravanes. Il était donc vital pour la jeune
communauté, encore peu cohérente, de trouver de nouveaux moyens
de subsistance tout en évitant de recourir comme autrefois au pillage
entre tribus appartenant maintenant à une même communauté de
croyants. Pour parer à ce danger et éviter le chaos, les califes usèrent
des anciennes pratiques de razzia en les redirigeant vers les contrées
voisines.
Un autre facteur peut avoir joué un rôle. La mort du Prophète
créa un problème de succession et partant une lutte pour le pouvoir.
Diriger les énergies vers une entreprise commune permettait d’éviter
des luttes fratricides non seulement entre tribus mais aussi entre
partisans de l’un ou l’autre candidat au califat.
Dans une première phase, il n’est pas question de guerres à
proprement parler. Il s’agit bien plutôt d’expéditions destinées à récolter
du butin, d’une nouvelle forme de la razzia traditionnelle, avec un peu
plus d’envergure et d’organisation. L’appât du gain constitue la
motivation première, si ce n’est unique, de ces Arabes musulmans. Un
enrichissement relativement facile, par la prise de butin et par le contrôle
de voies caravanières, allait rapidement entraîner une politique
d’expansion un peu mieux organisée. Il ne s’agissait cependant pas
d’une entreprise de propagation de la religion musulmane, mais en fait
plutôt d’une expansion arabe, bien sûr porteuse d’une nouvelle religion.
9
Abitbol, Michel : Le passé d’une discorde. Juifs et Arabes depuis le VIIe siècle. Perrin. Paris. 2003. P 21.
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2.3.2. Deuxième période (dès 634)
Avec Omar 10 , le deuxième calife (633 ou 634 à 644) débuta
une seconde phase d’expansion.. Forte des succès remportés et
recourant maintenant à des stratégies bien planifiées, la communauté
des musulmans se lança dans des expéditions de conquêtes mieux
organisées. De véritables campagnes militaires furent menées. Mais pas
plus qu’auparavant ces entreprises n’avaient pour but prioritaire la
propagation de l’islam, même si un passage du Coran est assez
péremptoire en la matière (9. 29 – 35) et dont le verset 33 déclare :
« C’est Lui [Allah] qui a envoyé Son Apôtre avec la direction et la religion
de la vérité pour la faire prévaloir sur toute (autre) religion, quelque
aversion qu’aient (pour elle) les incroyants ». Par contre, aujourd’hui de
nombreux groupes militants se réfèrent à ce passage pour justifier leur
action.
Toute la région était politiquement très instable. Cette situation
favorisait l’avance des troupes arabes. En Perse, l’empire sassanide qui
s’étendait jusqu’au nord de l’Inde était à bout de souffle. Son dernier
représentant fut battu en 651. L’empire perse passa alors sous la
domination arabe. Byzance, la puissance rivale des Sassanides,
constituait dès lors le seul obstacle, formidable, à l’expansion arabe.
Cependant au sein de l’empire romain d’Orient, l’harmonie était loin de
régner. En effet, une grande partie de la population chrétienne de Syrie
et d’Egypte n’acceptait pas les positions théologiques officielles de
Byzance. Damas et Alexandrie étaient devenues deux grands centres
de contestation théologique. L’empereur byzantin ne pouvait admettre
une telle situation, par crainte du morcellement de son empire déjà
affaibli par les luttes constantes avec les Perses. La répression
impériale fut terrible.
En outre, pendant des décennies la région s’était souvent
transformée en champ de batailles entre les Byzantins et les Sassanides
de Perse. Ainsi Damas, importante ville de l’empire byzantin, fut prise
10 On trouve aussi fréquemment la transcription ‘Umar
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par les Perses en 613 et sa population déportée. La ville tomba
finalement en mains arabes en 636. Les habitants de Damas se
trouvaient donc constamment en butte aux exactions militaires, d’une
part lors de la répression impériale et d’autre part lors des attaques
perses. Jérusalem aussi avait été prise et pillée par les troupes perses
de Chosroès II (614), puis récupérée par Héraclius de Byzance (628).
Dans un contexte politique aussi agité et dur pour les populations de ces
régions, il n’est pas étonnant alors qu’elles aient accueilli les Arabes
comme de véritables libérateurs. Certains exégètes juifs considéraient
même que Mohamed avait été envoyé par Dieu pour les libérer de la
domination byzantine 11 ! Des juifs et des chrétiens n’hésitèrent pas à se
joindre aux troupes arabes dans leurs campagnes militaires au MoyenOrient, en Afrique du Nord et même jusqu’en Espagne.
Quant à Byzance, dont de vastes territoires avaient été conquis
par les troupes musulmanes, elle demeurait une importante puissance
maritime. Les Arabes pensèrent pouvoir mettre fin à son hégémonie
mais ne rencontrèrent pas sur mer les mêmes succès que sur terre. Ils
lancèrent trois attaques navales contre Byzance. Trois fois ils furent
vaincus. L’empire byzantin parvint à résister et par là à arrêter l’avance
fulgurante des troupes arabes vers l’Europe.
2.3.3. Vers l’Espagne ( 711 )
Peu après la conquête du Maghreb, le gouverneur de cette
région, Mûsâ, envoie 7000 combattants berbères pour une expédition en
Espagne sous la conduite de Târiq Ibnou Ziyad (711). Il se méfiait des
Berbères et craignait qu’ils n’entrent en rébellion. Il était donc préférable
de les occuper, et de plus dans une région difficile d’accès. Târiq
franchit donc le détroit qui porterait désormais son nom ( Jabal Târiq : la
Montagne de Târiq). Le roi wisigoth Rodrigue fut vaincu. Ces troupes
remportèrent des succès sans doute bien au-delà des attentes de Mûsâ
qui décida de se rendre lui aussi en Espagne où il rejoignit Târiq devant
Tolède. Le prétendant au trône wisigoth avait fait appel à Mûsâ pour
pouvoir accéder au pouvoir. Mûsâ se rendit rapidement compte
11
Voir M.Abitbol, op.cit. pp. 36, 38.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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de la faiblesse du pouvoir wisigoth et décida alors d’entreprendre une
véritable conquête en s’appuyant sur des chefs locaux. Les successeurs
de Mûsâ et de Târiq poursuivirent cette entreprise et franchirent même
les Pyrénées. Ils furent finalement arrêtés par les Francs. Mais c’est
surtout la détérioration de la situation dans le Maghreb qui mit fin à leur
progression. Les Berbères s’étaient en effet finalement révoltés contre
les conquérants arabes (740) en s’appuyant sur kharidjisme. Les
kharidjites furent les premiers à s’écarter de la ligne principale de l’islam.
Les Berbères d’Espagne s’insurgèrent à leur tour et les Arabes se
trouvaient dans une situation difficile puisqu’ils étaient minoritaires. En
outre, ils étaient divisés entre eux, Bédouins contre sédentaires, surtout
originaires de la région yéménite. La situation fut finalement rétablie en
leur faveur grâce à l’arrivée de troupes syriennes évacuées de Ceuta,
alors assiégée.
Les Arabes nommèrent très tôt al-Andalus la partie de
l’Espagne qu’ils avaient conquise. L’étymologie de ce nom reste
douteuse. Certains y voient une référence aux Vandales qui avaient
quitté l’Espagne pour aller s’établir en Afrique du Nord. D’autres se
bornent à dire que l’étymologie demeure obscure. 12
En Andalousie, en s’acquittant bien sûr de l’impôt requis, les
chrétiens, c’est-à-dire la majorité de la population, ainsi que la minorité
juive, purent pratiquer leur religion sans difficulté pendant près de 800
ans, jusqu’à la chute de Grenade.
La situation paraît avoir été différente à l’est. Profitant de
l’effondrement de l’empire sassanide, les troupes arabes marchèrent en
direction
de
l’Afghanistan
et
du
sous-continent
indien
qu’elles
atteignirent en 711 ou 712 (pour rappel, les troupes berbères franchirent
le Détroit de Gibraltar en 711). Dans les régions du nord ouest de l’Inde
qu’elles conquirent, les troupes arabes semblent s’être montrées
terriblement cruelles, massacrant des populations entières.
12
Voir fr.wikipedia.org/wiki/Al-Andalus
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2.3.4. Et les juifs et les chrétiens des territoires conquis ?
D’une manière générale, les Arabes semblent s’être montrés
assez tolérants envers les nombreuses populations juives et chrétiennes
des territoires conquis et n’imposèrent pas l’islam. Par exemple, il est dit
d’Omar qu’après la prise de Jérusalem (738), il s’abstint d’aller prier
dans l’église du Saint Sépulcre par respect pour les chrétiens à qui il
accorda en outre une charte leur garantissant la sauvegarde de leur vie,
de leurs biens, de leurs églises et de leurs croix. Des chartes
semblables furent remises aux chrétiens de Damas et d’autres endroits.
Certes, les chrétiens et les juifs, c’est-à-dire les « gens du
Livre » (Ahl al-kitab) n’étaient pas exempts de devoirs envers les
conquérants arabes et devaient payer un impôt particulier, al jizya. En
contrepartie le libre exercice du culte était garanti et la protection des
nouveaux seigneurs était assurée contre toute attaque. En étaient
exemptés les pauvres, les femmes et les enfants, les handicapés et les
moines des monastère, à moins qu’ils aient été aisés. 13 Si la protection
ne pouvait être assurée, ce tribut n’était pas prélevé. Ainsi, il est
rapporté que l’impôt fut restitué aux Damascènes menacés d’une
attaque par les Byzantins et auxquels les Arabes occupant la ville se
savaient dans l’incapacité de résister. 14 Toujours est-il que cette taxe
apportait d’importants revenus, au point que les conversions à l’islam
furent même interdites ! Il n’en demeure pas moins que des dérapages
se produisirent dont furent responsables des chefs à différents niveaux.
Les « gens du Livre » furent généralement assez bien traités pour autant
qu’ils se soient fidèlement acquittés de leurs taxes et aient respecté les
règles fixées par les vainqueurs. Le statut réel n’a cependant pas
toujours correspondu au statut légal. Les dispositions favorables étaient
plus ou moins respectées suivant les périodes, les régions et surtout les
représentants locaux des califes. 15 Dans ce contexte, il n’est pas inutile
de rappeler que les musulmans, eux aussi, devaient s’acquitter d’un
impôt, al zakat.
13 Voir Salhab, Nasri : L’islam tel que je l’ai connu : religion de la clémence et de la paix. Organisation islamique pour
l’Education, les Sciences et la Culture. Rabat. 2003 www.isesco.org.ma/pub/FR/IslTQ/CH16.htm
14 Voir id.
15 Voir M.Abitbol, op.cit. pp. 36, 38.
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Parmi les populations soumises par les armes, des gens
adoptèrent bien sûr la religion des vainqueurs, peut-être pour échapper
à l’impôt et aux devoirs qui leur étaient imposés. Cependant leur statut
demeurait inférieur. Dans l’ensemble, l’islam ne fut imposé ni aux juifs ni
aux chrétiens. Les conversions furent même parfois interdites, un
musulman converti rapportant moins financièrement. Les califes
omeyades , eux, considéraient que l’islam était la religion des Arabes et
leur demeurait réservée. 16
Il a souvent été affirmé que l’islam se répandit à la pointe de
l’épée. La réalité est autre et l’approche doit être beaucoup plus
nuancée. Les guerres de conquête furent premièrement entreprises
pour d’autres raisons que religieuses. Les troupes arabes parvinrent à
conquérir d’immenses territoires en quelques années avant tout en
raison de l’absence d’opposition due à l’effondrement du pouvoir, que ce
soit dans l’ancien empire perse et dans une partie du Maghreb où
l’administration romaine avait cessé d’exister, alors qu’en Egypte et au
Proche Orient les empereurs byzantins s’étaient souvent aliénés une
bonne partie de la population.
Le triomphe des armées arabes et la rapide expansion de
l’islam pourraient faire penser qu’existait une cohésion sans failles au
sein de la communauté fondée par Mohamed. Mais à cette époque,
comme par la suite et jusqu’à maintenant, la communauté des croyants
ne formait en fait pas un tout monolithique. Une religion n’existe pas
indépendamment des personnes qui la pratiquent. Toute religion est le
fait des femmes et des hommes qui se réclament d’elle et qui la
modèlent selon les lieux et les circonstances, avec leur humanité, leurs
forces et leurs faiblesses, avec les caractéristiques culturelles et
sociologiques qui sont les leurs.
16
Après les quatre premiers successeurs de Mohamed, le cinquième calife, Mu’awiya, instaura un pouvoir héréditaire et fonda
ainsi la dynastie des Omeyades (661 – 750) qui établirent leur capitale à Damas. Ils furent renversés par Abû al-Abbas,
fondateur de la dynastie des Abbassides qui portent ce nom par référence à al-Abbâs, un oncle de Mohamed, dont ils se
disaient les descendants.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
16/53
3. LES MUSULMANS DANS LE MONDE
3.1. LES PAYS ARABES
Comme l’islam est né en Arabie et que c’est dans cette région qu’il a
connu ses premiers développements, il n’est pas surprenant que la majorité des
Arabes soient musulmans. Mais ils ne le sont pas tous, comme il est vrai aussi
que la majorité des musulmans ne sont pas arabes. En fait, au sein de la
communauté musulmane considérée dans son ensemble, la population des
vingt-trois pays membres de la Ligue arabe ne représente qu’une minorité
(environ 230 millions, soit 15-20%. Ce pourcentage diminue encore si l’on
soustrait
les
populations
non-arabophones
de
ces
pays,
Kurdes,
Berbères, etc.) 17
3.2. LES AUTRES PAYS
La population du monde atteint maintenant environ 6,5 milliards de
personnes. 18 Parmi elles, quelque 1'160'000'000 appartiennent à l’islam, ce qui
fait de cette religion la deuxième dans le monde, après le christianisme dont se
réclament environ 2 milliards de personnes. 19 Ce nombre résulte dans une
certaine mesure d’une estimation étant donné que des pays ne peuvent fournir
des données très fiables ou, comme aux Etats-Unis, la question de
l’appartenance religieuse n’est pas posée lors des recensements. Cette
évaluation est malgré tout généralement acceptée.
Dans le monde, c’est l’Indonésie, dont la population n’est bien sûr pas
arabe, qui compte le plus grand nombre de musulmans (plus de 175'000’000,
donc davantage que les pays de la Ligue arabe dans leur ensemble). Elle est
suivie par le sous-continent indien Pakistan, Inde, Bangladesh qui compte
environ 353'000'000 de musulmans. La situation de l’Inde avec ses quelque
112'000'000 de musulmans constitue en quelque sorte un paradoxe. En effet,
lors de son indépendance en 1947, le sous-continent fut divisé en deux pays,
17
Les nombres indiqués ici le sont sous toute réserve. La plupart des données sont tirées du site education.france5.fr/islam
Voir www.statistics.gov.uk
www.populationmondiale.com
19
www.pelerin.info
18
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
17/53
l’Inde et le Pakistan, lui-même divisé en Pakistan occidental et Pakistan oriental,
devenu plus tard le Bangladesh. Or cette division fut effectuée pour accéder aux
revendications d’une partie des musulmans qui voulaient leur propre pays.
Manifestement tous les musulmans n’émigrèrent pas vers le Pakistan.
Parmi les populations non-arabes, la Turquie compte quelque 68
millions de musulmans et l’Iran plus de 71 millions. Il vaudrait peut-être aussi la
peine d’analyser la situation dans les pays d’Asie centrale (Kazakhstan,
Kirghizistan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan). Nombre de musulmans
vivent aussi sur le continent américain.
En Europe occidentale, la plupart des musulmans sont soit des
immigrés soit des descendants d’immigrés. L’histoire coloniale a bien entendu
joué un rôle important dans cette immigration. Il n’est pas surprenant alors que 4
millions environ de musulmans résident en France. Quant à la Grande-Bretagne,
quelque 1'589'000 musulmans y vivent. 20
Le continent africain, surtout dans la région sub-saharienne, compte lui
aussi une importante population de quelque 145'000'000 musulmans, sans
compter celle des pays appartenant à la Ligue arabe.
3.3. LA SUISSE
Les
ennuyeuses.
indications
21
numériques
présentées
ici
pourront
paraître
Elles permettent pourtant de comprendre l’importance des
« communautés islamiques 22 » vivant dans notre pays et de percevoir
indirectement quelques unes des valeurs que cultivent leurs membres. Tous les
renseignements résultant de l’analyse des recensements depuis 1970 et
particulièrement de celui de 2000 ne sont pas présentés ici. Ils sont pourtant
intéressants et révélateurs de divers aspects socioculturels des « communautés
islamiques »vivant dans notre pays. Les données statistiques sur la population
résidant en Suisse montrent que depuis 1970 le nombre des musulmans dans ce
pays a considérablement évolué. Lors du recensement de 2000, ils étaient
20
www.populationmondiale.com
Les informations à ce sujet sont tirées de Bovay, Claude et Broquet, Raphaël : Recensement fédéral de la population en
Suisse. Le paysage religieux en Suisse. Office fédéral de la statistique. Neuchâtel. 2004. Aussi : www.bfs.admin.ch
22
Formulation utilisée dans l’ouvrage cité.
21
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
18/53
310'807, c’est-à-dire 4,26% de la population (16'353, soit 0,25% en 1970). Ce
nombre équivaut à environ dix fois celui de la population de la commune de
Neuchâtel. A titre de comparaison, on remarquera que les différentes Eglises et
communautés chrétiennes comptent quelque 5'776'559 membres sur une
population totale de 7'288'010 personnes, soit 79,3% de la population. La
composition des communautés islamiques s’est aussi beaucoup modifiée au
cours des dernières décennies, de même que l’origine de la majorité de leurs
membres. Plus de la moitié des musulmans, soit 56,4%, viennent de l’exYougoslavie, une population qui a triplé entre 1990 et 2000. Environ 20% ont la
nationalité turque, alors qu’en 1970 ils constituaient l’essentiel des communautés
islamiques, et 6% viennent de pays d’Afrique. Seuls 3,9% sont des Suisses de
naissance.
Comme le relèvent les auteurs de l’étude : « Les communautés
islamiques constituent le groupe religieux le plus jeune. » 23 En effet, 39,2% des
musulmans vivant en Suisse ont moins de 20 ans et près de 98% moins de
soixante ans. Au sein de ces communautés, le nombre des femmes a augmenté
de manière significative aussi, passant de 32,5% en 1970 à 45,4% en 2000, ce
groupe religieux demeurant cependant le plus masculin. 24 La plupart des
musulmans vivant en couple sont mariés (96,9%) et ont des enfants (2,44 par
femme ; moyenne suisse :1,43), quand bien même plus de 45% des musulmans
vivant en Suisse sont célibataires.
Une importante majorité des musulmans, plus de 61%, ont un niveau de
formation assez bas puisque se limitant au niveau secondaire I et travaillent
principalement dans les secteurs de la construction, de l’hôtellerie, de la santé et
des activités sociales. Parmi la population musulmane active, 21,2% sont des
travailleurs non qualifiés et 15% sont sans emploi.
A de nombreux égards, par leur mode de vie les membres des
communautés islamiques, issus avant tout de l’immigration, se distinguent des
tendances générales observables au sein de la population, par exemple par leur
attitude vis-à-vis du mariage, du nombre d’enfants, par leurs qualifications
professionnelles, etc. Quant à la formation, il est vraisemblable qu’elle
23
24
Op. cit., p.48.
Voir ibid.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
19/53
s’améliorera pour les enfants nés d’immigrés. Certes, les nombres fournissent
des informations utiles. Elles demeurent cependant générales. Au mieux
indiquent-ils des tendances. Une communauté se compose en fait d’individus
dont l’existence ne saurait être réduite à des chiffres. Les origines diverses des
musulmans déterminent des modes de vie eux aussi différents, même si
l’appartenance à une même communauté religieuse définit finalement une
identité commune.
Les auteurs de l’étude écrivent dans leur conclusion :
« Certains groupes minoritaires se démarquent pourtant par un profil
relativement bien typé. Tel est le cas notamment des groupes religieux dont une
proportion importante des membres cumulent des traits sociaux communs relatifs
à leur immigration récente et à un bas niveau de formation. […..] Il importe de
remarquer que la religion n’est pas l’unique trait qui différencie les membres de
ces groupes et que la dimension sociale est aussi à considérer du point de vue
de leur intégration, voire de l’affirmation de leur différence. » 25
25
Op. cit., p.51
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
20/53
4. LA RELIGION
4.1. LES SOURCES : LE CORAN — LA SUNNA — L’IJMÂ — LE QI(Y)ÂS
« L’islam repose sur le Coran, la Tradition (Sunna) et le consensus des
spécialistes de la Loi. » 26 En fait, on pourrait ajouter le qiyâs et l’ijtihâd. Mais quoi
qu’il en soit, seul le Coran est incontesté, même s’il est possible d’en faire de
nombreuses exégèses.
4.1.1. Le Coran.
Le nom Coran est une transcription de l’arabe qur’ân, « lecture,
récitation », dérivé du verbe qara’a « lire, réciter ». La première
révélation à Mohamed débute par l’impératif du verbe : iqrâ’ « lis ! »
( Coran 96. 1-5). Donc un coran est une récitation, ou une lecture.
Le Coran est considéré par les musulmans comme étant la
Parole d’Allah. Il s’agit bien pour eux d’une dictée divine. Or comme
Dieu est éternel, sa Parole aussi est éternelle. Mais le Coran n’est pas
toujours clair. Aussi les commentaires se sont-ils multipliés qui visent à
en expliquer certains passages ou la totalité. Une fois encore, les
compréhensions de leur religion par les musulmans sont fort diverses.
Les révélations d’Allah que Mohamed récitait, il les reçut sur
une période de quelque vingt-deux ans. Elles furent d’abord retenues
par cœur. Puis certains de ses compagnons en consignèrent une partie
par écrit relativement tôt déjà, sur des supports très divers : cuir, même
omoplates de chameau. Il semble cependant que dans un premier
temps elles ne furent par rassemblées de manière systématique.
Vers l’an 11 de l’Hégire, c’est-à-dire un an après la mort du
Prophète, le calife Abou Bakr demanda à Omar de rassembler d’une
part tout ce qui était déjà écrit et d’autres part toutes les révélations
transmises encore oralement seulement, mais dont ses compagnons se
souvenaient.
26
Atallah, Wahib : Mahomet. Un homme, un destin. Infolio Editions. CH-Gollion. 2005. P13
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
21/53
Jusqu’à la mort d’Omar, aucun texte ne fut rendu officiel.
D’ailleurs d’autres compilations que la sienne avaient été élaborées.
Toutes n’étaient pas en accord et cette confusion créait des problèmes.
Finalement Othman, le troisième calife (644 – 656), réunit une
commission qui officialisa le texte établi sous l’autorité d’Omar. C’est ce
texte qui est la seule version normative du Coran, mais il est le résultat
d’un processus de formation.
Le plus ancien manuscrit connu du Coran a été découvert en
Egypte il y a quelques années. Il contient une soixantaine de feuillets
écrits à l’encre sur parchemin. Une analyse au Carbone14 et une étude
paléographique ont permis d’établir qu’il avait été écrit entre 50 et
soixante après l’Hégire. Quelques uns des feuillets de ce manuscrit ont
été exposés à la Bibliothèque nationale française entre la fin de 2005 et
le début de 2006.
Les révélations faites à Mohamed sont rassemblées en 114
sourates, chacune composée d’un certain nombre d’ayât (une âya , des
ayât) ou « versets ». Chacune des sourates porte un titre, ajouté plus
tard, en référence à un mot ou à une expression se trouvant dans le
texte, mais pas à son thème. Ainsi la sourate 2 porte le titre «La
Génisse ». Il peut arriver qu’une même sourate ait plusieurs titres. Par
exemple la sourate 67 est généralement nommée « Le Royaume » ou
« L’Empire », mais elle est aussi appelée « Celle qui sauve » ou « Celle
qui Protège ». Cela, selon un commentateur musulman, « parce qu’elle
protège contre le mal dans cette vie et le châtiment de la tombe, de l’audelà. »
L’invocation, basmallah, placée en tête de chaque sourate, sauf
de la neuvième, a également été ajoutée par la suite. « Au nom d’Allah,
Le Très Miséricordieux, Le Compatissant. »
L’ordre des sourates peut paraître étonnant. Elles ont été
classées des plus longues aux plus courtes, le plus souvent sans tenir
compte de la chronologie des révélations. Elles portent cependant
souvent une indication de l’endroit où elles furent révélées, soit La
Mecque, soit Médine. Ces indications sont certes utiles au lecteur, mais
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
22/53
insuffisantes tout de même. En conséquence, les spécialistes ont
poussé plus loin leurs investigations. Ils ont analysé les caractéristiques
du langage, les rimes, etc. et ont ainsi pu montrer à quels moments de
l’époque mecquoise ou de l’époque médinoise remontent les sourates,
ou même des parties de sourates. Quelques sourates demeurent
néanmoins déconcertantes. En effet, même si elles sont attribuées à
une période précise, elles sont parfois composées de révélations ou de
fragments disparates de révélations qui n’ont pas grand chose en
commun (par exemple les sourates 14, 16, 31, 74, pour n’en citer que
quelques unes).
La lecture du Coran est une entreprise difficile surtout du fait de
l’absence de linéarité. Il ne faut en effet pas s’attendre à y trouver un
récit suivi ou un ensemble de récits. Le texte peut être disparate et une
même sourate peut traiter de différents sujets, parfois sans rapports les
uns avec les autres. Deux thèmes semblent l’emporter, celui de
l’affirmation de l’unicité de Dieu et celui de la mission prophétique de
Mohamed. Le Coran traite aussi de préceptes religieux, d’organisation
sociale, de droit, voire de politique.
4.1.2. La Sunna - la Tradition du Prophète.
On considère généralement que la Sunna comprend le Coran
et le corpus des hadîths du Prophète. Les hadîths forment ainsi la
seconde source de la Sunna.
Les hadîths sont des « dits », des « propos » du Prophète. Il
peut aussi s’agir de la relation d’un de ses actes.
Aux débuts de l’islam post-mohamedien, lors de difficultés et de
malentendus, on faisait appel aux compagnons du Prophète pour les
consulter au sujet des paroles et des actions de Mohamed, de sa
manière d’agir. C’est ce que signifie le nom « sunna » : « conduite,
manière d’agir, coutume », sous-entendu « du Prophète ».
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Dans de nombreux cas, un hadîth apporte une explication ou
une précision à un passage du Coran. Mais souvent les hadîth sont
indépendants de tout texte coranique.
Très rapidement des paroles et des faits ont été attribués au
Prophète qui étaient inventés dans le but de donner une plus grande
autorité à certaines activités ou prises de position, souvent pour des
raisons peu honorables. Il y eut ainsi plusieurs dizaines de milliers de
hadiths. Il était donc impératif d’opérer un tri et pour ce faire de trouver
des critères permettant d’effectuer un choix et de ne conserver que ceux
considérés comme authentiques. Ne furent finalement retenus que ceux
dont la transmission s’était faite par des personnes connues pour leur
honnêteté et remontant à des témoins directs des paroles et des actes
attribués à Mohamed.
Dans la plupart des cas, un hadîth comporte en effet un texte et
un isnâd, c’est-à-dire l’indication de la chaîne des transmetteurs du
texte. C’est cette chaîne de transmission qui a permis d’attester
l’authenticité des hadîths.
Un des plus célèbres investigateurs en la matière, c’est
Mouhammad Ben Ismaïl Al-Jou’fi, né en 194 (année de l’hégire, c’est-àdire 810 ap. J.-C.) à Boukhara, d’où le surnom sous lequel il est devenu
fameux, Al-Boukhari. Très jeune, il étudia à La Mecque auprès de
savants de l’islam. Il voyagea ensuite en quête de spécialistes des
hadîths du Prophète. La tradition – la légende ? – dit qu’après seize ans
de recherches, il avait réuni quelque 600'000 hadîths. Il les aurait tous
minutieusement vérifiés pour n’en retenir finalement que 7'300 qu’il
considérait comme authentiques. Même si le premier nombre cité relève
peut-être de la fantaisie, il n’en demeure pas moins indicatif de la
prolifération des hadîths. Durant ses recherches, Al-Boukhari aurait
rencontré un millier de rapporteurs pour les écouter, mais aussi pour
tenter de vérifier l’authenticité des hadîths en les entendant de la bouche
de plusieurs informateurs.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
24/53
Un auteur musulman explique la manière de procéder d’ AlBoukhari dans sa vérification de l’authenticité des hadiths. Il écrit qu’AlBoukhari « a entrepris de passer au crible la grande masse des hadiths
selon les deux critères suivants : en premier lieu, la continuité dans la
chaîne des rapporteurs de hadiths. En second lieu, la crédibilité de ces
transmetteurs. Donnons, pour mieux comprendre la méthode, le schéma
classique d’un hadith :
« Untel, de la part d’Untel, de la part d’Untel, etc.
a raconté avoir entendu Abû Bakr dire que le Prophète,
dans telle circonstance, a agi comme suit… »
Boukhâri a vérifié d’abord qu’il n’y avait pas de rupture dans le
temps entre le dernier transmetteur et Abû Bakr, le compagnon du
Prophète qui a raconté ce hadith. Sur deux siècles, à travers une
transmission exclusivement orale, la vérification n’est pas chose aisée,
mais les anciens en avaient l’habitude et, la science de la critique et de
la rectification (ta’dil wa tajrîh) aidant, il n’était pas impossible d’arriver à
une assez bonne certitude 27 . »
Ainsi, on aura :
« Mahmoud Ben Ar-Rabi’ Al-Ansari a rapporté que
Itban Ben Malek, un des compagnons de l’Envoyé de Dieu –
Que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa Paix – qui a participé à la
bataille de Badr, vint trouver l’Envoyé de Dieu… » 28
Telle était donc la première étape de l’investigation à travers le
foisonnement des hadiths existant à son époque. Dans une seconde
étape, il chercha à déterminer si chacun des transmetteurs était
crédible. « Et c’est là que les choses se compliquent, puisqu’on entre
dans le domaine du subjectif. A ce moment, Boukhâri a eu recours,
27
François Déroche : Coran et Sunna. Aux sources de la pensée en islam. In Le Point Hors-série 5. Novembre – décembre
2005. P.17
28 Hadîth 270, in Zein Ed-Dine Ahmad ibn Abdul-latif A- Zoubaidi : Sahih Al-Bukhari. Le sommaire du Sahih Al-Bukhari. 2 vol.
Dar Al-Kotob Al-Ilmiyah. Beyrouth. 2002 (2)
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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dans la grande majorité des cas, à une sorte de consensus général qui
gommait pour ainsi dire les doutes et les différences personnelles
d’appréciation : le hadith en question passait l’épreuve définitive, et il
était alors déclaré authentique. » 29
D’autres spécialistes ont établis des collections de hadiths qu’ils
considéraient comme authentiques. Celle de Boukhâri demeure
néanmoins la plus importante et celle qui occupe la première place
parmi les spécialistes.
QUELQUES EXEMPLES DE HADITHS :
Sur la prière :
1.
« On demanda à Anas – Que Dieu l’agrée - : « Le Prophète – Que Dieu lui
accorde Sa Grâce et sa Paix – faisait-il la prière en portant ses sandales ? ». Il
répondit : « Oui ».
2.
( 254 )
« Al-Bara’ – Que Dieu l’agrée – a rapporté : « L’Envoyé de Dieu – Que Dieu lui
accorde Sa Grâce et Sa Paix – avait fait les prières en se tournant sa face vers
Jérusalem, durant une période de seize ou dix-sept mois. »
3.
( 260 )
« Ibn Omar – Que Dieu l’agrée – faisait la prière sur son chameau, en
disant : « J’ai vu le Prophète – Que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa Paix – faire
la même chose ».
( 273 )
Vie familiale du Prophète :
4.
« On demanda à Aicha – Que Dieu l’agrée - : « A quoi s’occupait le
Prophète – Que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa Paix – quand il se trouvait
chez lui ? » Elle répondit : « Il lui arrivait d’être au service de sa famille –
c’est-à-dire lui rendre des services domestiques – mais dès qu’on l’appelait
à la prière, il s’y rendait ».
( 404 )
29 Hadîth 270, in Zein Ed-Dine Ahmad ibn Abdul-latif A- Zoubaidi : Sahih Al-Bukhari. Le sommaire du Sahih Al-Bukhari. 2 vol.
Dar Al-Kotob Al-Ilmiyah. Beyrouth. 2002 (2)
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Prescriptions :
5.
« Asma Bent Abi Bakr – Que Dieu l’agrée – a rapporté : « Le Prophète – Que
Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa Paix – nous a ordonné d’affranchir les esclaves
quand le soleil s’éclipse. »
6.
( 566 )
« Al-Bara – Que Dieu l’agrée – a rapporté : « Le Prophète – Que Dieu lui accorde
Sa Grâce et sa Paix – nous a ordonné de faire sept actes et de s’abstenir de sept
autres. Il nous a ordonné : de suivre le convoi funèbre, de visiter le malade, de
répondre aux invitations, de secourir l’opprimé, de respecter les serments, de
rendre le salut, et de dire : « Dieu te fait miséricorde » à celui qui éternue ( et
loue Dieu ). Il nous a interdit : de se servir de vases en argent, de porter des
bagues en or, de porter des vêtements en soie, en brocart, en “quasii ” et
“istabraq” (qui sont des variétés en soie). »
( 635 )
Zakat ( f) + unicité de Dieu et prières
7.
« Ibn Abbas – Que Dieu l’agrée – a rapporté que le Prophète – Que Dieu lui
accorde Sa Grâce et Sa paix – envoya Moua’z à Yaman en lui disant : « Inviteles à témoigner qu’il n’y a d’autre divinité que Dieu, s’ils consentent fais-leur
savoir que Dieu leur a prescrit cinq prières à accomplir le jour et la nuit, s’ils
consentent encore, informe-les que Dieu leur a prescrit une aumône qui sera
prélevée sur les biens de leurs hommes aisés pour être donnée à leurs
pauvres. »
8.
( 702 )
« Abou Horaira – Que Dieu l’agrée – a rapporté qu’un bédouin vint trouver le
Prophète – Que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa Paix – et lui dit : « Indique-moi
une œuvre que, si je la faisais, j’entrerais au Paradis ». Il lui répondit : « Tu
adores Dieu sans rien Lui associer, tu accomplis les prières canoniques, tu
t’acquittes de la zakat prescrite et tu jeûnes (le mois de ) Ramadan. » Le bédouin
répliqua : « Par Celui dont mon âme est en Sa main, je n’ajouterai rien à cela. »
Quand le bédouin partit, le Prophète – Que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa Paix
– dit (aux fidèles) : « Que celui qui veut avoir la joie de rencontrer un des élus du
Paradis, regarde cet homme. »
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( 704 )
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Hajj et Kaaba
9.
« Ibn Omar – Que Dieu l’agrée – a rapporté : « J’ai vu l’Envoyé de Dieu, quand il
vint à La Mecque, toucher la pierre noire, puis il fit trois tournées professionnelles
à pas accélérés sur les sept (en ralentissant les autres pas) ».
( 812 )
Certains des hadîths sont quelque peu déconcertants. Ainsi :
10.
« Abou Houmaid As-Sa’idi – Que Dieu l’agrée – a rapporté que l’Envoyé de Dieu
– Que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa paix -, après avoir fait la prière du soir, se
leva, témoigna de l’unicité de Dieu, loua Dieu par des mots dignes de Lui, et
dit : « Ensuite ».
( 516 )
Comme relevé plus tôt, ce ne sont pas seulement les dits du Prophète qui sont pris en
compte, mais aussi certains de ses actes :
11.
« Ibn Omar – Que Dieu l’agrée – faisait la prière sur son chameau, en
disant : « J’ai vu le Prophète – que Dieu lui accorde Sa Grâce et Sa Paix – faire
la même chose ».
En résumé, tout comme le Coran, mais dans une mesure moindre, la sunna est elle
aussi normative. D’ailleurs un verset du Coran spécifie que quiconque obéit à Dieu doit
également obéissance au Prophète.
4.1.3. L’Ijmâ
L’ijmâ, représente avant tout le consensus de spécialistes sur
un point de droit. Ijmâ, (n. masc.) signifie d’ailleurs « consensus
communautaire ». Dans le sens maintenant le plus souvent accepté, il
ne s’agit pas du consensus de l’ensemble de la communauté. Il est
cependant possible que tel ait été le cas aux débuts de la communauté
musulmane.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Les deux premières sources, c’est-à-dire le Coran et la Sunna,
ont dès les débuts de l’islam été considérées comme normatives. Quant
à l’ijmâ et au qiyâs, ils sont inférieurs, puisque créations humaines. Ils
sont ainsi relatifs et parfois laissés de côté.
4.1.4. Le Qi(y)âs.
Le qiâs, ou plus communément qiyâs, indique une « analogie »,
une « référence ». Les fuqaha (« légistes ») ont recours au qiyâs
lorsqu’ils sont confrontés à des problèmes de droit (fiqh) que ni le Coran
ni la Sunna n’envisagent. Très tôt déjà ils eurent recours au qiyâs pour
trouver des solutions à ces problèmes. Le processus consiste à
rechercher la cause, le motif d’une décision connue. La connaissance
de ce motif permet alors de prendre une décision. On applique donc à
un cas dérivé la même règle que celle appliquée au cas d’origine. Dans
les deux se retrouve le même motif. Si un juge ne trouve de réponse ni
dans le Coran, ni dans la Sunna, ni sur un consensus antérieur, il peut
découvrir un cas analogue sur lequel le législateur a émis un jugement.
« L’analogie entre les deux situations réside dans le fait que l’argument
qui justifie ce jugement se retrouve également dans la situation pour
laquelle il recherche une solution, il réunit donc les deux cas et les
assimile l’un à l’autre dans la règle juridique, à cause de la similitude de
l’argumentation. » 30
4.2. L’IJATIHÂD
L’ijtihâd (n. masc), c’est l’ « effort », l’effort de réflexion personnelle du
spécialiste et qui permet d’aboutir à une interprétation de la Loi. C’est par un tel
effort que des spécialistes sont parvenus à des interprétations du Coran et de la
Sunna qui ont constitué les bases des quatre principales écoles juridiques de
l’islam et qui déterminent actuellement encore la vie des croyants. L’ijtihâd s’est
relâché au cours des siècles, jusqu’à s’éteindre presque complètement.
Néanmoins, depuis quelques années, des musulmans demandent qu’un tel effort
30
Mohamed-Mokhtar Sellami : Le Qiyas et ses applications contemporaines. www.irtipms.org/OpenSpace.asp ?pub=116.pdf
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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soit à nouveau fourni afin qu’une réflexion fondamentale soit entreprise pour
répondre aux questions et aux attentes d’un grand nombre de croyants
d’aujourd’hui, et peut-être surtout de ceux vivant hors de leur milieu d’origine.
4.3. LE JIHAD
Déclarations fracassantes de la part de certains musulmans, articles de
presse, nouvelles des journaux télévisés, il ne se passe presque de jour sans
qu’il ne soit question de jihad, (aussi transcrit djihad, en raison de sa
prononciation) 31 terme souvent traduit par « guerre sainte ». Mais en fait on ne
se préoccupe pas trop de définir son vrai sens. En conséquence, on ne sait
finalement pas trop de quoi il s’agit. Les musulmans eux-mêmes ne sont pas
d’accord sur le sens à donner à jihad. Dès la moitié environ du 20e s., l’appel au
jihad par des mouvements recourant à la violence a ajouté encore à la confusion.
Un observateur dit que « pendant au moins un millénaire les musulmans n’ont
pas été en accord sur la signification de jihad. » 32 Il ne faut dès lors pas s’étonner
si les non-musulmans ne s’y retrouvent pas.
Dans son sens premier jihad signifie « effort », dans quelque domaine
que ce soit. Ce peut être un effort fourni pour un travail, comme ce peut être un
effort de nature spirituelle. Il s’agit donc d’une lutte, voire d’un combat. 33 Mais
comme le relève un commentateur, il ne peut en aucun cas s’agir de « guerre
sainte ». En arabe, « guerre sainte » se traduirait tout autrement. 34 Un autre
auteur propose tout de même « guerre sainte » comme traduction possible, tout
en soulignant qu’il s’agit d’un sens tardif. 35 La lutte dont il est parfois question
peut certes être une lutte armée. Le fait est indéniable, même si certains auteurs
musulmans tendent à minimiser cet aspect du jihad. Mais s’agit-il pour autant
d’une « guerre sainte » ?
31 Voir par exemple Chebel, Malek : Dictionnaire des symboles musulmans.
32 Douglas E. Streusand : What does Jihad mean ? in Middle East Quarterly, September 1997. www.ict.org.il/articles/jihad
33 Voir Chebel, Malek : ibid.
34
M. Amir Ali : Jihad explained. The Institute of Islamic Information and Education. www.iie.net/Brochures/Brochure-18
35
Voir Chebel, Malek : ibid.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
30/53
Le terme jihad ou d’autres mots de la même famille se retrouvent à
plusieurs reprises dans le Coran et dans les hadiths, toujours avec cette
connotation d’effort, de lutte, mentionnée plus tôt. Tous ces termes dérivés d’une
racine jhd expriment l’idée d’effort.
Un propos du Prophète rapporté dans un hadith permettra peut-être de
comprendre un peu mieux ce que signifie le jihad. Il distingue entre jihad majeur
(al-jihad al-akbar) et jihad mineur (al-jihad al-asghar), le jihad mineur faisant
référence à une bataille juste achevée et le majeur à l’effort à faire sur soi-même
afin de plaire à Dieu en luttant contre son égoïsme, l’envie, la jalousie, le
mensonge et des formes d’adoration en opposition à la volonté divine. 36
Le jihad mineur représente une forme de guerre, que certains qualifient
de « sainte ». Mais plusieurs commentateurs musulmans rejettent cette
qualification, argumentant qu’il ne saurait y avoir de guerre sainte en islam. En
fait il s’agit d’une forme de légitime défense, d’une guerre défensive justifiée
lorsque l’islam est en danger. Dire alors que les guerres qui ont suivi la mort du
Prophète et qui ont permis à l’islam d’atteindre l’Espagne et l’Inde relevaient du
jihad paraît donc erroné.
Un commentateur relève qu’une guerre sainte viserait en effet à imposer
l’islam à des non-musulmans. Or le Coran est clair à ce sujet quand il dit : « Pas
de contrainte en religion » ( 2.257). 37
M. Amir Ali relève les efforts que doit faire un musulman, comme
reconnaître la première place de Dieu, demeurer sur Sa voie malgré les
difficultés, lutter pour la justice, avoir le courage de manifester l’islam. 38 Quant à
la lutte armée, elle est licite lorsque l’islam et les musulmans sont attaqués
(Coran 22.39-40). Des attaques pré-emptives sont aussi permises dans certains
cas. Il faut aussi lutter, parfois par la force, pour que l’islam puisse être librement
prêché et pratiqué. Une guerre peut aussi être entreprise pour que le peuple soit
libéré de la tyrannie (Coran 4.75), de tout régime politique injuste.
36
Ce hadith n’est pas inclus dans les collections les plus importantes.
USC-MSA Compendium of Muslim Texts www.usc.edu/dept/MSA/reference/glossary/term.JIHAD
38
Op.cit.
37
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
31/53
Dans un tel contexte, la lutte doit être dirigée exclusivement contre les
détenteurs de ce pouvoir et en aucun cas contre la population. C’est justement
ce devoir que voulait mettre en pratique le Groupe Jihad et qui a conduit à
l’assassinat du président égyptien Anouar el-Sadate ( 6 octobre 1981 ). Le jihad
ne vise pas à l’établissement d’un pouvoir, mais à celui d’un régime de justice.
Mais un tel régime peut-il être mis en place sans un contrôle du pouvoir ?
L’auteur conclut ainsi : « … jihad dans l’islam signifie lutter sur la voie
d’Allah par la plume, la voix, les mains, les médias et, si c’est inévitable, par les
armes. Cependant, le jihad dans l’islam ne comprend pas la lutte pour un pouvoir
personnel ou national, pour la domination, la gloire, la richesse, le prestige ou
l’orgueil. » 39
Les légistes des temps anciens n’ont rien dit d’autre. Au cours des
siècles, l’accent a constamment porté sur les efforts spirituels personnels. Les
maîtres soufis ont souvent repris les propos attribués à Mohamed au sujet du
jihad majeur et du jihad mineur et ont particulièrement insisté sur l’effort sur soimême nécessaire au développement de la spiritualité. Seul un constant et dur
effort rend possible l’approche mystique du divin. Cependant les maîtres soufis
ont souvent considéré que le terme jihad était trop lourd d’un sens guerrier et
l’ont alors remplacé par mujahada, un terme apparenté et qui désigne le jihad
majeur.
Quand l’islam est en danger et qu’un jihad devrait être entrepris pour le
protéger, l’ensemble de la communauté devrait se mobiliser. En fait de tels
appels semblent avoir été rares. Il en est cependant un qui peut être mentionné.
Lorsque l’Empire ottoman décida de se ranger aux côtés des forces allemandes
et austro-hongroises lors de la Première guerre mondiale, ses autorités lancèrent
un appel au jihad. Cette tentative de mobilisation demeura sans le moindre
écho !
Comme déjà mentionné ci-dessus, divers mouvements ont remis en
évidence la possibilité d’un aspect violent du jihad et appellent les musulmans à
s’engager dans cette voie. L’Egyptien Hassan Al-Banna a rédigé un court
document dans lequel il appelle ses coreligionnaires à la lutte contre toutes les
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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puissances d’oppression et à être prêts à sacrifier leur vie pour ce faire. 40 Avec le
développement de ce qu’il est convenu d’appeler l’islamisme, les appels au jihad
se sont multipliés, conduisant parfois à des actes considérés comme terroristes.
Ces développements, peu ou pas du tout en accord avec l’essence de l’islam,
ont évidemment souvent conduit dans le monde occidental à une mauvaise
compréhension de cette religion. De telles positions se trouvent bien aux
antipodes de celles des soufis pour qui le jihad , l’effort sur soi-même, est une
condition fondamentale de l’accès au divin.
Certains groupes de musulmans considèrent que le jihad constitue le
sixième pilier de l’islam. Les actuels propagateurs du jihad qui le considèrent
comme un pilier ne font en fait que reprendre les idées des kharijites , un des
premiers groupes à se séparer du courant principal de l’islam (dès 657) et dont
certaines formes régionales d’islam se réclament encore.
Quoi qu’il en soit, la position qui voit dans le jihad un pilier de l’islam
n’est généralement pas acceptée.
4.4. LOI CORANIQUE ET DROIT CORANIQUE
LA SHARÎ’A ET LE FIQH
A l’extérieur comme parfois aussi à l’intérieur de la communauté
musulmane semble régner un flou certain au sujet de la nature de la sharî’a. Il
en est souvent fait mention, surtout dans la presse, sans que son sens soit bien
clair. Or Loi coranique et droit coranique ou droit musulman ne sont de loin pas
identiques.
Le nom sharî’a se trouve une seule fois dans le Coran dans un passage
qui dit :
39
Op.cit.
40 En bref : Hassan al-Banna (1906-1949) fonde le Mouvement des Frères musulmans en 1929. Il appelle ses coreligionnaires
à une vie plus conforme à l’islam et s’oppose à la laïcité et surtout à l’occidentalisation des mœurs en Egypte. Le Mouvement
prend rapidement des positions politiques nationalistes en opposition à la Grande-Bretagne et exige après la Seconde Guerre
mondiale une révision des accords anglo-égyptiens. La dissolution du Mouvement est ordonnée à la fin de 1948 pour menées
subversives contre la sécurité de l’Etat. Al-Banna tente alors de s’entendre avec le gouvernement et réprouve toute violence. Il
est assassiné le 12 février 1949.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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« De plus, nous t’avons mis sur une voie pertinente. Suis-la. Ne suis
pas les passions de ceux qui ne savent point. » 45.18 (Traduction de Jacques
Berque)
La sharî’a, c’est la « voie », plus spécifiquement la voie révélée par Dieu
et qui doit être suivie. Les actions des humains seront jugées en référence à
cette voie. A ce niveau, il ne s’agit donc pas d’une création humaine. Elle est
hétéronome, parce que les deux seuls Législateurs sont Dieu et Mohamed, son
messager dont l’autorité dérive de la mission à laquelle il a été appelé par Dieu. Il
s’agit donc bien de la Loi fondamentale révélée et non pas du droit coranique
(fiqh) qui, lui, résulte d’une démarche humaine basée sur cette Loi coranique.
Très souvent quand il est question de sharî’a, c’est en fait de fiqh que l’on veut
parler. D’où bon nombre d’incompréhensions.
Pour un musulman, le Coran représente la source de la vérité, donc
aussi du droit et de la justice. Cependant s’il montre la voie et contient quelque
228 dispositions d’ordre juridique, il n’en demeure pas moins que le droit
musulman n’est pas divin. En effet, bon nombre de ces dispositions manquent de
clarté et doivent être interprétées pour devenir applicables. L’être humain
contribue ainsi à l’élaboration du droit musulman, élaboration qui ne saurait être
définitive, donc fixée une fois pour toutes. Les conditions de vie ne cessent de se
modifier et requièrent de nouveaux efforts d’interprétation (ijtihâd). La sharî’a
reste donc inapplicable sans une interprétation qui devrait être sans cesse
renouvelée. D’ailleurs les grands légistes de l’islam se sont toujours défendus de
faire œuvre définitive, insistant sur le caractère relatif, voire discutable de leurs
conclusions.
Par fiqh, on entend généralement le droit musulman ou le droit
coranique, différent, une fois encore de la Loi coranique (sharî’a). Ce terme
signifie littéralement « réflexion, compréhension, intelligence, sagesse ». Comme
le relève un auteur, il s’agit donc de la « science de la Loi ».Pour le dire
brièvement, peut-être trop, il s’agit d’interprétations de la Loi coranique. En effet,
le musulman ne saurait se conformer à la sharî’a sans savoir ce qu’elle signifie.
Or son sens n’est pas évident. D’une part, le texte coranique n’est pas toujours
explicite. La richesse de sa langue rend parfois possible plusieurs interprétations.
D’autre part, la communauté musulmane s’est très rapidement étendue et avec
cette extension des problèmes nouveaux ont surgi auxquels il était impossible de
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
34/53
trouver des solutions en se référant directement au Coran ou aux hadiths. Aussi,
très tôt déjà, un effort de compréhension de la sharî’a (ijtihâd) s’est avéré
nécessaire et a été entrepris par des spécialistes, des légistes qualifiés.
« Le fiqh, que nous appelons communément « droit musulman »,
désigne donc la compréhension humaine, médiatisée par l’ijtihâd, de la loi
révélée. Il est, par nature, pluriel puisque l’ijtihâd de tel légiste peut le mener à
des conclusions différentes, voire contraires, à celles de celui d’un autre
légiste… » 41
Si du temps de Mohamed, les problèmes « juridiques » pouvaient être
réglés directement, soit par le Prophète lui-même soit par l’un de ses proches
compagnons, si immédiatement après la mort de Mohamed, les nouveaux
problèmes étaient relativement peu nombreux et des solutions pouvaient leur
être trouvées assez facilement sur la base du Coran et de la Sunna, la situation
évolua cependant rapidement. Avec l’extension de l’islam, nombreux furent les
problèmes nouveaux qui surgirent. Il s’avéra alors nécessaire de trouver des
solutions à des questions de droit qui, par leur complexité, ne pouvaient être
résolues directement par référence au Coran. Dans de nombreux cas, le Coran
ne fournissait pas de données permettant de trouver des solutions. Il fallut donc
s’en référer aussi à la Sunna. Certains hadiths permettaient parfois de clarifier
des passages du Coran. D’autres traitaient de questions au sujet desquelles le
Coran était silencieux. Un effort de compréhension et d’interprétation de ces
deux sources s’avérait donc indispensable. Les premiers spécialistes connus
œuvrèrent au 1er s. de l’hégire. Les grandes écoles juridiques, elles, se
développèrent surtout au 2e s. et au 3e s., c’est-à-dire en gros jusque vers 850
ap. J-C. Cela ne signifie pas que la réflexion juridique cessa à cette époque,
mais elle marqua un déclin qui se poursuivit jusque vers la fin du 4e s. de l’hégire,
moment auquel elle se bloqua. Les juristes se limitèrent alors à imiter et à
commenter les travaux des grands légistes, s’opposant ainsi à la volonté de ces
mêmes légistes qui avaient insisté sur le caractère relatif de leurs conclusions.
Des efforts d’interprétation de la sharî’a entrepris par différents légistes
sont issues quatre écoles (madhâhib, pl. de madhab) principales d’interprétation
juridique qui, comme relevé plus haut, sont parfois en désaccord ou en
opposition sur certains points. Il est dès lors évident que le droit musulman ne
constitue pas un ensemble homogène et immuable.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Malgré tout, dans leur tentative de systématisation, les légistes
parvinrent à définir quatre sources du droit, deux étant scripturaires, les deux
autres humaines : d’une part le Coran et la Sunna, d’autre part le qiyâs ou
raisonnement analogique et l’ijmâ. Mais ce consensus créait de nouveaux
problèmes.
En effet, au niveau scripturaire déjà, les juristes n’étaient pas en accord
puisque certains ne reconnaissaient que les hadiths dont l’authenticité était
incontestable, alors que d’autres adoptaient une attitude plus souple à ce sujet.
En outre, il fallait encore définir ce qu’était le consensus de la
communauté. Après de laborieuses recherches, on finit par accepter comme
justification de l’ijmâ le verset coranique suivant :
« … qui adopte un chemin autre que celui des croyants, de lui Nous
Nous détournons autant qu’il se détourne, et le faisons brûler dans la Géhenne. - Exécrable destination. »
4.115 b. Traduction de Jacques Berque.
Au vu de ces quelques considérations sur la sharî’a et sur le fiqh, il
semble bien que quand il est dit qu’un état est placé sous le régime de la sharî’a,
cela ne signifie finalement pas grand chose. En effet c’est bien son interprétation
qui importe. Et là se pose alors un autre problème, celui de savoir qui est légitimé
pour procéder à cette interprétation. Les légistes vont-ils se limiter à une simple
répétition des exégèses de leurs prédécesseurs ou dans un contexte en rapide
transformation vont-ils entreprendre une relecture des textes fondateurs ?
41
Eric Chaumont : Peut-on qualifier le droit musulman de « coranique » ? ww.oumma.com
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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5. CONTRIBUTIONS AU DEVELOPPEMENT DE L’EUROPE
Dès le 8e s., les territoires sous la domination de califes musulmans
s’étendaient de l’Inde à l’Espagne, en passant par l’Arabie et le Maghreb. De ce
fait les Arabo-musulmans ont été d’importants intermédiaires culturels. D’une
part, en les traduisant, ils ont préservé nombre d’écrits de philosophes grecs.
D’autre part, par l’Espagne, ils ont apporté à l’Europe, entre autres, de nouvelles
technologies de navigation qui ont facilité, voire rendu possible, les grandes
expéditions maritimes dès la fin du 15e siècle. Ils ont aussi facilité la vie
quotidienne des Européens en leur transmettant la numération décimale qu’ils
avaient eux-mêmes découverte dans le Nord de l’Inde. Il est possible que ce soit
le fameux savant al-Biruni (973 – 1048 ou 1050) qui ait servi d’intermédiaire, lui
qui avait passé plusieurs années en Inde. Il avait écrit un traité sur cette contrée
en mentionnant, entre autres, le système de numération qu’il y avait observé.
Parmi d’autres écrits, sur l’astrolabe, l’optique, la géographie, etc., il en consacra
un au système décimal. C’est Gerbert d’Aurillac (vers 930 – 1003) qui, peut-être
déjà avant de devenir le pape Sylvestre II (999), introduisit ce système dans le
monde chrétien d’Occident. Ce moine féru de mathématiques avait étudié en
Catalogne où il avait découvert l’utilisation du système décimal. Sa démarche
rencontra cependant une grande opposition.
Il fallut cependant attendre les Croisades pour que l’Europe prenne
conscience de certaines valeurs de la culture arabo-musulmane. C’est finalement
Léonard de Pise (1170 – 1250), connu aussi sous le nom de Fibonacci, qui joua
un rôle crucial pour l’adoption de la numération décimale. Il publia un ouvrage
dans lequel il présenta l’essentiel des connaissances mathématiques indoarabes.
On remarquera que dans le monde arabe les chiffres n’ont pas toujours
eu la même forme. Ils présentaient quelques différences entre l’Orient et
l’Occident. En Europe, leur forme se fixa après le développement de l’imprimerie.
Les
Arabo-musulmans
contribuèrent
aussi
indirectement
à
la
Renaissance en Europe. Ils avaient en effet traduit nombre de texte
philosophiques grecs en arabe et qui furent ensuite souvent retraduits en latin.
Le théâtre grec et la poésie hellénistique ne suscitèrent aucun intérêt. Par contre,
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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qu’il se soit agi de sciences, de médecine, d’éthique, de philosophie ou encore
d’astrologie, les traductions arabes permirent à l’Europe occidentale de découvrir
bon nombre d’ouvrages grecs. Ces textes avaient en effet été menacés de
disparition par une décision de l’empereur Justinien, au 6es. Afin de défendre
l’hégémonie du christianisme, il avait fait fermer les écoles philosophiques
d’Athènes. Les centres d’études se déplacèrent alors vers Bagdad fondée en
762 par Al-Mansûr, le second calife abbasside. Un calife de cette dynastie est
particulièrement célèbre, Harûn Ar-Rachid (786-809), le souverain des « Mille et
une Nuits ». Quant au travail de traduction, c’est surtout Al-Ma’mûn (813 – 833)
qui lui donna son élan. Ses successeurs et de nombreux mécènes financèrent
des traductions dont la qualité ne cessa de s’améliorer. Ces travaux avaient déjà
commencé à Damas sous la dynastie des Omeyades 42 , mais c’est à Bagdad
qu’ils prirent leur véritable essor. Les premières traductions permirent aux
sciences de se développer créant ainsi le besoin pour de nouveaux textes. Les
nécessités administratives de l’empire abbasside requéraient aussi des
fonctionnaires expérimentés qui améliorèrent leurs connaissances et leurs
compétences en partie grâce à des traductions de textes grecs. Après environ
deux cents ans, le rythme de ces travaux se ralentit pour faire place à des
œuvres originales. Il s’interrompit finalement vers l’an mil.
Le calife Al-Ma’mûn avait créé à Bagdad la « Maison de la sagesse »
(Beït Al-Hikma ), un centre de traduction, de recherche et de réflexion qui exista
jusqu’en 1258, lorsque les Mongols pillèrent la capitale. Il semble cependant qu’il
ne faille pas exagérer l’importance de cette institution quant à l’esprit
encyclopédique qui se développa à Bagdad. Mais il n’en demeure pas moins que
c’est dans cette ville que se rencontrèrent l’Orient et l’Occident, la culture
hellénique et la culture indienne. Les activités principales relevaient certes des
sciences religieuses, mais les savants ne se limitèrent cependant que rarement à
de tels travaux et poussèrent plus loin l’étude des traductions qui leur étaient
fournies, les utilisant souvent comme base pour poursuivre leurs propres
recherches. Un exemple : le mathématicien Al-Khwarizmi rédigea en 830 environ
son fameux traité sur l’algèbre Al-jabr wa’l muqabalah qu’il dédia d’ailleurs à Al-
42
La dynasite des Omeyades ( aussi Umayyades, arabe Umawi) détint le pouvoir de 661 à 750. Lorsqu’elle fut écartée
supprimée par Abû al-Abbas, le fondateur de la dynastie des Abassides, un des membres de la famille parvint à s’enfuir et partit
s’établir en Espagne. Sous le nom d’Abd Al-Rahman I, il s’empara de Cordoue en 756. La dynastie des Omeyades d’Espagne
garda le pouvoir jusqu’en 1031, moment auquel des chefs locaux s’emparèrent du pouvoir.
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Ma’mûn. C’est au 12e s. seulement que ce traité parvint en Europe occidentale,
en traduction latine réalisée à Tolède (1145). 43
Lorsque les Almohades, une dynastie marocaine, étendit sa domination
sur l’Espagne (1148), ils voulurent contraindre les non-musulmans à adopter
l’islam ou alors à s’exiler, voire à mourir. Un grand nombre de juifs quittèrent
alors l’Espagne et, installés en Catalogne et dans la région du LanguedocRoussillon, ils traduisirent nombre de textes arabes, dont des textes grecs
traduits par les musulmans. 44 Ainsi des connaissances anciennes, mais en
grande partie disparues, ou des connaissances nouvelles atteignirent l’Europe
occidentale principalement par « la voie musulmane » d’Espagne, puis par
l’intermédiaire de juifs exilés. Cette mise ou remise en valeur de textes anciens
ou de traités arabes connut alors une période faste car elles correspondaient à
des besoins nouveaux qui s’étaient développés dans le monde occidental.
Ces considérations, forcément beaucoup trop brèves, ne rendent pas
pleine justice à l’apport musulman. Si dans un premier temps, ils furent avant tout
des traducteurs et des transmetteurs, ils posèrent ainsi des bases scientifiques et
philosophiques qui leur permirent ensuite de devenir des créateurs, des
découvreurs et des innovateurs remarquables.
Ainsi, pour ne mentionner que quelques exemples, en mathématiques,
ils contribuèrent au développement de l’algèbre et de la trigonométrie auxquelles
ils donnèrent des applications pratiques en astronomie et en techniques de
construction. En médecine, c’est à Avicenne (980 – 1037)que l’on doit une
remarquable « Encyclopédie médicale », alors qu’un Ibn Nafis (1210 – 1288)
s’attachait, lui, à l’étude de la circulation sanguine pulmonaire. 45
43
Voir Thill, Olivier : L’algèbre dans les années 830 (al-Khwarizmi) à 1637 (Descartes).
C’est à dessein que « musulman » est utilisé ici plutôt que « arabe ». Tous les traducteurs et savants qui
travaillèrent à Bagdad, en Espagne ou ailleurs dans l’empire abbasside n’étaient pas arabes. Certains étaient perses, berbères,
etc., mais tous se retrouvaient au sein de cet empire, qu’ils soient par ailleurs de fervents musulmans ou pas.
45
Consulter fr.wikipedia,org/wiki/Sciences_et_techniques_islamique.
44
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6. DOCUMENTS ET ACTIVITES
6.1. LA CRÉATION SELON LE CORAN
Le Coran parle souvent d’Allâh comme étant le créateur (24.44 ;
31.24-28 ; 39.7-8 ; 55.2-5 ;… )
Le texte suivant présente l’acte de création dans son ensemble.
Sourate 2 La génisse
On remarquera que le Coran passe fréquemment du Je au Nous quand
sont rapportées des paroles d’Allah.
Dans le texte ci-dessous le traducteur a utilisé des majuscules quand il
parle d’Allâh ( Il )ou que c’est Allâh qui s’exprime (Je, Nous).
Les mots entre parenthèses ont été ajoutés par le traducteur par souci
de clarté.
Les termes en caractères gras sont expliqués après le texte.
27.
« C’est Lui 46 qui a créé pour vous tout ce qui est sur la terre ; ensuite, Il se dirigea vers
les cieux et les partagea en sept cieux 47 . Il est savant en toutes choses.
28.
Et lorsque ton Seigneur dit aux anges : « Je vais établir un vicaire 48 sur terre ». ils
dirent : « Y établiras-tu quelqu’un qui fera le mal et qui répandra le sang, pendant que
nous célébrons Tes louanges en Te glorifiant et que nous proclamons Ta sainteté ? »
(Le Seigneur dit) : « Je sais ce que vous ne savez pas ».
29.
Il apprit à Adam le nom de tous les êtres : puis Il les présenta aux anges et
dit : « Appelez-les Moi par leurs noms, si vous êtes véridiques ».
30.
Ils dirent : « Gloire à Toi ! Il n’y a pas en nous de savoir si ce n’est ce que Tu nous as
appris. En vérité ! Tu es Le Savant, Le Sage ».
46
Lui : Allâh.
L’idée d’un partage indique l’harmonie de la création. Le texte arabe le montre clairement.
Le nombre sept est en rapport avec les sept sphères dont parle l’astronome et géographe grec Ptolémée ( 2e s. ap. J-C.)
48
Un vicaire : Adam
47
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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31.
(Allâh) dit : « O Adam ! Fais-leur connaître leurs noms 49 . » Et lorsqu’il leur eut fait
connaître leurs noms, Il dit : « Ne vous ai-Je pas dit que Je connais les secrets des
cieux et de la terre, et que je connais ce que vous montrez et ce que vous cachez ? »
32.
Et lorsque nous avons dit aux anges : « Prosternez-vous devant Adam », ils se
prosternèrent à l’exception d’Iblîs qui refusa et s’enorgueillit ; et il est devenu (l’un) des
incroyants.
33.
Et nous dîmes : « O Adam ! Habite, toi et ta femme, le Paradis 50 ; et mangez en toute
liberté de ce qu’il produit, partout où vous voudrez. Mais ne vous approchez pas de cet
arbre, de peur que vous ne deveniez des coupables ».
34.
(Mais) Satan les fit trébucher de là 51 , et les chassa du lieu où ils étaient et Nous
dîmes : « Descendez 52 ! et (devenez) ennemis les uns des autres. Il y a pour vous sur
la terre un lieu de séjour fixe et d’approvisionnement pour un temps ».
35.
Et Adam reçut de son Seigneur certaines paroles 53 , et Il revint à lui. Car Il est celui qui
revient, Le Compatissant ».
Exercices possibles d’après ce texte :
Compréhension du texte
Comparaison. Ce récit de la création peut être comparé avec celui de la Genèse
(manuel d’histoire de 6e année)
49
Leurs noms : les noms de tous les êtres. Connaître un nom indique un certain pouvoir sur l’être nommé.
Le Paradis : en arabe : le jardin. Dans le Coran le jardin désigne toujours le Paradis.
Là : le Paradis.
52
Descendez : le Paradis terrestre dont il est question ici est considéré comme un lieu élevé.
53
Allah parle à Adam qui se repent de son erreur de sorte qu’Il reste avec lui.
50
51
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6.2. LE CALENDRIER MUSULMAN ET LES FÊTES
6.2.1. Le calendrier.
Les musulmans comptent les années à partir de l’hégire, hijra
en arabe (« exil, émigration, fuite »), c’est-à-dire le départ de Mohamed
pour Médine où, avec quelques compagnons, il arriva le 27 septembre
622. En fait, l’ère musulmane ne correspond pas exactement avec cette
date. Son début a été fixé au premier jour de l’année lunaire au cours de
laquelle le Prophète émigra. Il y a eu consensus à ce sujet pour le faire
coïncider avec le 16 juillet 622 54
« En vérité, le nombre des mois, auprès d’Allah, est de douze
mois dans le Livre d’Allah, au jour où Il créa les cieux et la terre. De ces
(mois), quatre sont sacrés ; c’est la croyance constante. Pendant ces
(mois), ne commettez pas vous-mêmes l’iniquité… »
Le Coran 9.36 : Le Repentir
Notes sur 9.36 :
1. Le Livre de Dieu : le Coran
2. Les quatre mois sacrés : Moharram (1er) : pendant ce mois,
la guerre était interdite, aussi bien avant qu’après Muhammad ;
Sawal (10e), Dzou’hada (11e) ; chez les anciens Arabes, la guerre était
interdite pendant ces mois-là ; Dzou’lhidja (12e) : mois du pèlerinage.
Ce calendrier est un calendrier lunaire. Il est en fait repris de
calendriers antérieurs, mais les noms des mois ont été modifiés.
L’année comprend donc douze mois de 30 ou 29 jours, en
alternance à partir de Moharram, le premier mois. Chaque mois
commence avec l’apparition de la nouvelle lune. Le calendrier compte
donc 354 jours, alors que l’année lunaire en compte en fait 354,36. Il se
produit ainsi un décalage. Pour compenser l’écart, 11 jours sont ajoutés,
à certaines années, sur un cycle de 30 ans.
54
Voir Wahib Atallah : Mahomet. P.67
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Onze années de 355 jours sont alors dites « abondantes » et
les 19 autres, de 354 jours, sont dites « communes ». Le cycle actuel de
trente ans a débuté le 24 juillet 1990.
Suggestion :
Pour montrer aux élèves à quelle date du calendrier musulman
correspond celle du jour de la leçon, il est possible de se référer aux deux sites
suivants sur la toile :
1er site : www.orientalement.com
puis cliquer « religion », ensuite « calendrier musulman »
on y trouve un convertisseur de dates.
A noter que ce même site propose une transcription
phonétique du Coran.
2e site : www.bahai-biblio.org
puis cliquer « bibliothèque », ensuite « divers »
on y trouve un convertisseur de dates des calendriers
grégorien, juif, musulman, baha’i et zoroastrien.
Ce site permet de comparer les dates passées, présentes et
futures du calendrier grégorien et du calendrier musulman.
Au sujet du calendrier et des fêtes, on peut aussi consulter :
www.lavigerie.org/fr/contenu/calendis.html
www.media4.obspm.fr/
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6.2.2. Les fêtes.
Al-Hijra (1er Moharam)
Premier jour de l’an hégirien. Il célèbre le départ de Mohamed de La
Mecque pour Médine.
Achoura (10 Moharam)
Pour les Sunnites, il s’agit de manifester sa générosité et de jeûner.
Pour les Chiites, Achoura est une fête très importante commémorant
le martyre de Hussein, fils d’Alî et petit-fils du Prophète.
Mawli al-Nabî (12 Rabi I)
Lors de cette fête, on célèbre la naissance et la vie de Muhammad.
Lila-al-Bar’h
Il s’agit de la nuit précédant le début du Ramadan et au cours de
laquelle les musulmans se pardonnent mutuellement leurs griefs.
Lila-al-Qadr
La nuit du Destin. On célèbre la révélation du Coran à Muhammad.
Aïd-al-Fitr
(« petite fête ») Célébration dans la joie de la fin du jeûne de
Ramadan. Dans certains pays, on se rend à cette occasion sur la tombe des
proches parents.
Aïd-el-Kebir ou Aïd-al-Adha (10 Dzou’lhidja)
(« grande fête » « fête du sacrifice ») Cette fête dure quatre jours.
Elle commémore le sacrifice que Dieu demanda à Abraham pour éprouver sa
foi. Abraham sacrifia un bélier et épargna ainsi son fils. Aïd-el-Kebir est la plus
grande fête religieuse de l’année car elle symbolise par excellence la foi en
Allah ainsi que l’obéissance et la soumission qui lui sont dues. Cette fête a
aussi une relation au pèlerinage à La Mecque dont elle marque la conclusion
et se célèbre 70 jours après la fin du Ramadan.
Parmi ces fêtes, seules les deux dernières sont canoniques. Par
ailleurs, d’autres fêtes plus régionales peuvent être célébrées.
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6.3. LA PRISE DE JÉRUSALEM (638 AP. J.-C.)
La capitulation de Jérusalem [Aelia Capitolina] fut signée par Umar 55 Ibn
al-Khattâb pour les musulmans et par Sophronius, le patriarche jacobite de
Jérusalem, pour les chrétiens.
« Au nom d’Allâh, le bienfaiteur miséricordieux. Ceci est la sauvegarde
accordée aux habitants d’Aelia par le serviteur de Dieu, Umar, commandeur des
croyants. Il leur octroie la sauvegarde pour leurs personnes, leurs biens, leurs
églises, leurs croix - que celles-ci soient en bon ou en mauvais état - et leur culte
en général. Leurs églises ne seront ni affectées à l’habitation, ni détruites ; elles
et leurs dépendances ne subiront aucun dommage et il en sera de même de
leurs croix et de leurs biens. Aucune contrainte ne sera exercée contre eux en
matière de religion et l’on ne nuira à personne d’entre eux. Aucun juif ne sera
autorisé à habiter Aelia avec eux. Les habitants d’Aelia devront acquitter la
djizya 56 de la même manière que les habitants des autres villes. Il leur appartient
d’expulser de la cité les Rums 57 et les larrons. Ceux d’entre ces derniers qui
sortiront auront un sauf-conduit. Ceux qui voudront rester y seront autorisés, à
condition de payer la même djizya que les habitant d’Aelia. Ceux d’entre les
habitants d’Aelia qui voudront partir avec les Rums, emporter leurs biens,
délaisser leurs églises et leurs croix, auront également une sauvegarde pour eux,
leurs églises et leurs croix. Les campagnards qui se trouvaient dans la même
ville avant le meurtre d’un tel pourront rester et payer la djizya au même titre que
les habitants d’Aelia ou, s’ils le préfèrent, partir avec les Rums ou retourner dans
leurs familles. Il ne sera rien perçu d’eux jusqu’à ce qu’ils aient récolté leur
moisson.
Cet écrit est placé sous la garantie d’Allâh et la dhimma du Prophète,
des califes et des croyants, à condition que les habitants d’Aelia s’acquittent de
la djizya qui leur incombe. Témoins Khâlid ibn al-Walid, Amr ibn al-Asî, Abd alRahmân ibn Awf. Mu’âwiya ibn Abî Sufyân, lequel a écrit ces présentes sur place
en l’an 15 ».
55
Ou Omar, le 2e calife.
La taxe perçue des « gens du Livre » : juifs, chrétiens, zoroastriens. Plus tard d’autres encore, par assimilation.
57
Romains, c’est-à-dire les Byzantins
56
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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La capitulation de Jérusalem rapportée par al-Tabarî, extrait de A.
Fattal : Le statut légal des non-musulmans en pays d’Islam, Beyrouth, 1995,
p. 45-46.
Al-Tabarî (env. 839 – 923) a été le grand historien des débuts de l’islam.
Il a voyagé dans tout le Moyen Orient avant de s’établir à Bagdad où il enseigna
et écrivit son « Histoire des rois et des peuples » ainsi que plusieurs
commentaires sur le Coran.
Texte mis en ligne par Laurent Albaret
http://www.clionautes.org
6.4. L’IRAQ AU 9E SIÈCLE : UN NŒUD DE VOIES COMMERCIALES
« On importe de l’Inde : des tigres, des panthères, des éléphants, des
peaux de panthère, des rubis, du santal blanc, de l’ébène, et des noix de coco.
On importe de la Chine : des soieries, de la soie, de la vaisselle, du papier, de
l’encre, des paons, des chevaux bons coureurs, des selles, des feutres, de la
cannelle, de la rhubarbe grecque sans mélange. On en importe des ustensiles
d’or et d’argent [...], des drogues, des étoffes brochées [...] des esclaves de sexe
féminin, des bibelots à images humaines, des serrures inviolables [...], des
ingénieurs hydrauliques, des experts agronomes, des marbriers et des eunuques
[...]. De la Berbérie et des confins du Maghreb : des panthères, des feuilles de
salam (pour la tannerie), des feutres et des faucons noirs. Du Yémen : du collyre,
des peaux tannées, des girafes, des cuirassés, des gemmes de couleur, de
l’encens, des feuilles de Khitr (pour la teinturerie) et du curcuma. D’Egypte : des
ânes trotteurs, des vêtements d’étoffe fine, du papyrus, du baume et, de ses
mines, des topazes d’une qualité supérieure. De chez les Khazars : des esclaves
de deux sexes, des cottes de maille, des casques [...]. De Samarkand : du
papier. De Balk et de sa région : des raisins doux, et des truffes ghauchana
[...].D’Ispahan : du miel en rayons et du miel vierge, des coings, des poires « de
Chine », des pommes, du sel, du safran, de la soude, du blanc de céruse, du
sulfure d’antimoine, des lits à plusieurs étages, des vêtements d’excellente
qualité, et des sirops de fruits [...]. »
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Les importations de l’Irak, selon al-Djahiz
Source et édition : Al-Djahiz, L’examen du commerce, trad. J. Sauvaget,
Historiens arabes, 1946, p. 10-11.
Abu ‘Othman ‘Amr ibn Bahr al-Djahiz (Bassora 776 – 868) fut un écrivain
prolifique, auteur d’épîtres, d’un « Livre des animaux, du « Livre des mérites
respectifs des jouvencelles et des jouvenceaux », ainsi que de « Ephèbes et
courtisanes ». Il était mutazilite et soutint vigoureusement par ses écrits la
politique religieuse du calife Al-Ma’mûn. (Voir www. bibliomonde.net)
Mis en ligne par Laurent Albaret
www.clionautes.org
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6.5. ACTIVITES
6.5.1. ACTIVITE
ELEVE
DES MOTS 1
Les musulmans n’ont pas seulement répandu des valeurs religieuses, mais aussi des éléments
culturels et technologiques.
Ainsi, le plus souvent sans nous en rendre compte, nous utilisons en français des mots d’origine
arabe. De nombreux mots français (environ 270) sont en effet dérivés de l’arabe classique ou
dialectal, directement ou par l’intermédiaire du latin médiéval ou scientifique, de l’italien ou de
l’espagnol. Voici quelques uns de ces mots arabes. A toi de jouer, essaie de trouver les mots
français qui en sont dérivés :
1. El kuhl ...........................................................................................................................................
2. El djabr ..........................................................................................................................................
3. Amir el bahr ...................................................................................................................................
4. Qualib ............................................................................................................................................
5. Kahwa ...........................................................................................................................................
6. Isbinakh .........................................................................................................................................
7. Qatran ...........................................................................................................................................
8. Azzahr ...........................................................................................................................................
9. Jubba ............................................................................................................................................
10. Makhazine .....................................................................................................................................
11. Moumia .........................................................................................................................................
12. Narandj ..........................................................................................................................................
13. Rahat .............................................................................................................................................
14. Charab ..........................................................................................................................................
15. Suffa ..............................................................................................................................................
16. Chourba ........................................................................................................................................
17. Asucare .........................................................................................................................................
18. Tassa ............................................................................................................................................
19. Sifr 1)..........................................................
2. ( par l’italien ).....................................................
20. Nuqua ...........................................................................................................................................
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ACTIVITE
- REPONSES
MAÎTRE
1.
El kuhl : Alcool .............................................................................................................................
2.
El djabr : Algèbre .........................................................................................................................
3.
Amir el bahr : Amiral , littéralement « prince de la mer » ............................................................
4.
Qualib : Calibre ...........................................................................................................................
5.
Kahwa : Café ...............................................................................................................................
6.
Isbinakh : Epinard .......................................................................................................................
7.
Qatran : Goudron , de l’arabe égyptien ......................................................................................
8.
Azzahr : Hasard, littéralement « jeu de dés » ............................................................................
9.
Jubba : Jupe
10. Makhazine : Magasin ( lieu de dépôt) .........................................................................................
11. Moumia : Momie ..........................................................................................................................
12. Narandj : Orange, ce mot est en fait d’origine persane mais nous est parvenu par l’arabe
13. Rahat : Raquette, littéralement « paume de la main » ................................................................
14. Charab : Sirop .............................................................................................................................
15. Suffa : sofa ..................................................................................................................................
16. Chourba : Sorbet .........................................................................................................................
17. Asucare : Sucre ...........................................................................................................................
18. Tassa : Tasse ..............................................................................................................................
19. Sifr 1) Chiffre ................................................
2. ( par l’italien) zéro ........................................
20. Nuqua : Nuque, littéralement « moelle épinière ». .......................................................................
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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6.5.2. ACTIVITE
ELEVE
ENCORE DES MOTS
Il arrive aussi que des mots arabes soient utilisés sans être modifiés, ou presque.
Connais–tu ces mots ? Que signifient-ils ?
1. Bakchich
: .....................................................................................................................
2. Chouia
: .....................................................................................................................
3. Kaïd
: .....................................................................................................................
4. Fissâa
: .....................................................................................................................
5. Hammam
: .....................................................................................................................
6. Kif-kif
: .....................................................................................................................
7. Méchoui
: .....................................................................................................................
8. Merguez
: .....................................................................................................................
9. Souk
: .....................................................................................................................
10. Tabib
: .....................................................................................................................
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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6.5.3. ACTIVITE
ELEVE
OBJETS ET MOTS
Les Arabes ont transmis aux Occidentaux bon nombre d’objets. Avec l’objet, son nom a lui
aussi été adopté. Sigrid Hunke a composé un texte incluant plusieurs de ces objets.
« Permettez-moi de vous inviter à prendre quelque chose dans ce café, chère madame !
Enlevez donc votre jaquette et prenez place sur le sofa au matelas garni d'une étoffe carmin. Le
cafetier s'empressera de vous servir une tasse de café avec deux petits morceaux de sucre, à
moins que vous ne préfériez une carafe de limonade bien glacée, ou encore un peu d'alcool ! Non
? Mais vous accepterez certainement une tarte aux abricots et aux bananes !
Mais bien sûr, cher ami, vous êtes aujourd'hui mon invité ! Puis-je vous offrir, pour
commencer, un sorbet à l'orange ? Je crois que des artichauts feraient une entrée fort agréable. Et
que penseriez-vous d'un chapon accompagné de riz et de barquettes aux épinards ? Pour le
dessert je ne saurais trop vous recommander ce gâteau à la sauce d'arak. Et pour clore le repas,
un moka… Mais, je vous en prie, installez-vous sur le divan.
Pourquoi, certes, ne vous sentiriez-vous pas parfaitement à l'aise, alors que tout ce qui
vous entoure comme tout ce que je vous offre se trouve sur la liste des articles depuis longtemps
inventoriés qui font partie de notre existence, et cela bien que nous les ayons empruntés à un
monde étranger à savoir le monde arabe ? Le café qui vous sert quotidiennement de stimulant, la
tasse dans laquelle vous versez ce noir breuvage, le sucre sans lequel vous ne sauriez aujourd'hui
imaginer un menu, la limonade et la carafe, la jaquette et le matelas, c'est aux Arabes que nous
devons de les connaître. Et ce n'est pas tout ! Dans la presque totalité du monde civilisé, ces
articles portent encore leur nom arabe ! De même pour candi, bergamote, orange, quetsche, etc.
Rien d'étonnant, me direz-vous sans doute, à ce que certains fruits originaires des pays
chauds (tout comme certains aliments ou boissons) nous viennent de l'Orient ; et pourquoi dans ce
cas, ne conserveraient-ils pas leur appellation d'origine ?
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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Et lorsque vous avouez que, maté par la fatigue, vous vous étendez sur le sofa, le divan,
l'ottomane ou dans l'alcôve, vous m'assurez que n'importe quel enfant saurait reconnaître l'origine
étrangère de termes aussi extravagants. Mais savez-vous que, sans le vouloir, vous avez employé
un autre mot arabe, un terme issu du jeu d'échecs (jeu que les Arabes nous ont appris, l'émissaire
d'Haroun al-Rachid l'ayant, dit-on, introduit à la cour de Charlemagne), qu'échec vient de shah (le
roi) et que le mot maté que vous avez employé vient de mat qui signifie tout simplement : " Il est
mort " ? Alors, vous voyez : échec et mat !
Saviez-vous en outre que les sacs de maroquin que vous voyez dans ce magasin portent
encore l'estampille des Arabes ? Quant aux étoffes exposées dans cette vitrine, en dehors des
cotonnades, des mousselines, du mohair souple et duveteux, vous pouvez faire votre choix entre
le satin élégant, le taffetas distingué, la moire chatoyante et le damas somptueux (de la ville de
Damas), qui étalent à vos yeux toute une gamme de nuances depuis le jaune safran jusqu'au lilas
en passant par l'orange et le cramoisi. Autant de délicates invites à nous souvenir de ceux
auxquels nous devons des étoffes aussi utiles que précieuses sous leurs coloris éclatants, c'est-àdire aux Arabes.
Savez-vous que lorsque vous entrez dans une pharmacie ou une droguerie, vous y
trouvez quantité d' « inventions » arabes. Un simple coup d'œil aux caisses et aux flacons du
droguiste suffira à vous en convaincre : vous y verrez de la muscade, du cumin, de l'estragon, du
safran, du camphre, de la benzine, de l'alcali, de la soude, du borax, de la saccharine, de l'ambre
et bien d'autres drogues arabes dont vous usez quotidiennement. Savez-vous que nous désignons
encore sous son nom arabe de laque, le vernis dont nous couvrons nos ongles, que l'aniline, la
gaze, le talc et la ouate sont autant de noms arabes ?
Vous ne sauriez donc nier plus longtemps que le grand nombre de noms arabes qui
émaillent notre langue désignent des articles d'usage courant dont les arabes nous ont révélé
l'existence. Ni que ces articles aient apporté à notre vie quotidienne, jadis insipide, voire un peu
sordide, maints agréments délicats qui l'ont littéralement assaisonnée, embellie par la couleur et le
parfum, ni que celle-ci leur doive d'être plus saine et plus hygiénique en même temps que plus
riche de confort et d'élégance… »
Sigrid Hunke, Le soleil d'Allah brille sur l'occident, Notre héritage arabe, Albin Michel, 1963
Complément au manuel d’Histoire du degré 7, Nathan Chapitre 3, LE MONDE MUSULMAN, Clément A. Marro
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7. BREVE BIBLIOGRAPHIE
Parmi une quantité impressionnante d’ouvrages traitant de l’islam dans son ensemble, de
personnes ou d’aspects spécifiques, mention sera faite ici de quelques études seulement qui
pourront se révéler utiles à celle ou à celui qui désire pousser un peu plus loin son étude.
Quelques sites Internet sont aussi mentionnés, parmi des centaines, de qualité inégale.
TRADUCTIONS DU CORAN : Il existe bien sûr de nombreuses traductions du Coran. En voici deux :
Jacques Berque, Le Coran. Essai de traduction, Albin Michel, Paris. 2002
Edouard Montet, Le Coran (avec une préface de Malek Chebel), 2 vol., Payot. Paris. 1998
OUVRAGES :
Mohammed Arkoun et Louis Gardet, L’Islam, Hier, Demain, Buchet Chastel. Paris. 1978
Régis Blachère, Le Coran, Que sais-je ? PUF. Paris. 1966
Dalil Boubakeur, Les défis de l’Islam, Flammarion. Paris. 2002
Wahib Atallah, Mahomet. Un homme, un destin, Infolio. CH-Gollion, 2005
Malek Chebel, Dictionnaire des symboles musulmans. Rites, mystique et civilisation. Albin Michel.
Paris, 1995
Jean Chevalier, Le soufisme. Que sais-je ? PUF. Paris.1996
Marc Ferro, Le Choc de l’Islam. XVIIIe - XXIe siècle. Odile Jacob.Paris, 2003.
Henri Laoust, Les Schismes dans l’islam. Payot. Paris. 1977
Ali Mérad, La tradition musulmane. Que sais-je ? PUF. Paris.2001
Ali Mérad, L’islam contemporain. Que sais-je ? PUF. Paris.2002
Alfred-Louis de Prémar, Aux origines du Coran, questions d’hier, approches d’aujourd’hui, Téraèdre.
Paris. 2004
Maxime Rodinson, Mahomet. Seuil. Paris, 1994
Wilfred Cantwell Smith, L’Islam dans le monde. Payot. Paris, 1962
Dominique Sourdel, L’Islam. Que sais-je ? PUF. Paris. 1949 (1), 2002 (21)
Yves Thoraval, / Gari Ulubeyan, Le monde musulman : une religion, des sociétés multiples.
Larousse. Paris. 2003
Dominique et Marie-Thérèse Urvoy, Les mots de l’islam, Presses universitaires du Mirail. Toulouse,
2004
SITES INTERNET :
www.fleurislam.net Ce site fournit de nombreuses informations, aussi bien théologiques, cultuelles,
culturelles que pratiques (par exemple calcul de la zakat). Il contient aussi un glossaire.
www.oumma.com Site permettant l’accès à divers articles d’opinion et d’information. Calendrier, etc.
www.persocite.com/orient Site fournissant une quantité d’informations sur différentes religions, dont
l’islam.
www.wikipedia.org/wiki/Sciences-et-techniques
islamiques.
Site
très
riches
en
informations
détaillées sur les contributions musulmanes dans de nombreux domaines scientifiques et
technologiques.
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