Chevêche d`Athéna – résultat de l`enquête 2014-2015

Résumé de l’enquête 2014-2015
sur la Chevêche d’Athéna, Athene noctua,
dans le Nord – Pas-de-Calais
Densité et estimation de la population nicheuse
© Pierre Bonnel
Groupe Chevêche du GON
Introduction
La Chevêche d’Athéna est un sujet d’intérêt pour les naturalistes du Nord – Pas-de-Calais
depuis plus de 35 ans avec, en 1980, les résultats d’un premier recensement réalisé dans la
région d’Hazebrouck (Bienaimé & Chaïb, 1980) suivi par la suite, par les enquêtes spécifiques
à l’initiative des bénévoles associatifs et des collectivités (PNR et ENLM).
Dans un contexte de baisse des effectifs de la chevêche en France et en Europe, le « Groupe
Chevêche » du GON s’est fixé comme tâche de recenser les mâles chanteurs en utilisant une
méthode de recensement standardisée (Petzold et Raus 1973 ; Exo et Hennes 1978), et donc
reconductible, pouvant être appliquée à l’ensemble du territoire afin d’estimer la densité de
mâles chanteurs dans les habitats du Nord – Pas-de-Calais favorables à l’espèce.
Cette méthode a été utilisée en 2014 et 2015 grâce à la participation de 40 observateurs de
6 structures qui ont permis de couvrir un échantillon de 89 mailles de 2 km X 2 km.
Une analyse statistique (méthode Bootstrap) appliquée aux résultats bruts a permis de
proposer, par extrapolation, une estimation de la densité de mâles cantonnés par km² du
Nord - Pas-de-Calais.
Ces résultats ont permis d’établir un état zéro à partir de 2014 de l’estimation des mâles
chanteurs dans les habitats favorables et de préciser ceux qu’ils privilégient. Il est envisagé
de reconduire les prospections tous les 5 ans, elles permettront d’évaluer la dynamique de
l’espèce et la capacité des collectivités publiques de maintenir un paysage suffisamment
varié pour rester favorable à l’espèce comme à bien d’autres liées à ces types d’habitats.
Densité et estimation de la population nicheuse
264 cantons (carte 1) de Chevêche ont pu être répertoriés lors de l’enquête dans les 89
mailles inventoriées. La densité observée dans les habitats potentiellement favorables est
0,74 canton par km². Pour l’ensemble du Nord – Pas-de-Calais, en extrapolant par la
méthode du Bootstrap, le nombre moyen de cantons est estimé à 4 630 soit une densité
moyenne estimée de 0,36 canton au km².
Carte 1.- Distribution des mailles 10 km x 10 km (bleu) et 2 km x 2 km (rouge) inventoriées.
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Habitats préférentiels
La densité des chevêches est liée à plusieurs variables, en particulier la qualité de l’habitat.
Selon Van Nieuwenhuyse & Bekaert (2001), la distribution des différents types d’habitats
dans l’espace induit une densité plus ou moins élevée de cantons de chevêches.
Une analyse complémentaire des résultats de l’étude 2014-2015 a pris en compte les
habitats réputés favorables à l’espèce et regroupés en 5 grandes entités paysagères : milieux
aquatiques, milieux forestiers, grandes cultures, milieux anthropiques et milieux prairiaux.
Elle montre que l’habitat prairial de type bocager est préférentiel. Il correspond aux prairies
améliorées, mésophiles à fourrages et aux pâtures mésophiles, aux vergers et pelouses
calcicoles.
Discussion
Densité
La densité moyenne extrapolée de 0,36 canton par km² paraît comparable aux densités
trouvées dans les régions et pays limitrophes : 0,2 à 0,4 canton par km² en Wallonnie (Van
Nieuwenhuyse & Bultot, 2010). ; entre 0,08 et 0,96 canton par km² en fonction des secteurs
en Normandie (Lecocq, 2009).
Il n’est pas envisageable de comparer les chiffres de cette étude (densité moyenne
extrapolée de 0,36 canton par km² ou les 4 630 cantons estimés) avec ceux des études
réalisées à des échelles géographiques plus petites ou estimés lors de l’atlas 1985-1995 (1
800-2 400 cantons), car les estimations n’ont pas été calculées avec un protocole et une
méthode de calcul identiques. Le renouvellement de cette enquête dans 5 ans suivant les
mêmes modalités de recueil de données et d’analyse sera donc indispensable pour mesurer
l’évolution de la population de chevêches dans le Nord - Pas-de-Calais. Cela permettra de
vérifier plus précisément si le déclin de l’espèce constaté en France (Trouvilliez & Wintergeist,
2012), et dans les études réalisées à différentes échelles inférieures au Nord - Pas-de-Calais
(Ancelet, à paraître ; Brom et Pynson, 2011 ; Wrobel, 2011 ; Leuzierre, 2012, PNR Caps et
marais d’Opale, 2015) vaut pour les deux départements et avec quelle intensité.
Habitats
La Chevêche d’Athéna est une espèce fortement dépendante de la qualité de son habitat avec une
préférence pour les prairies humides à saules têtards, les vergers, les zones de polycultures
parsemées de haies et de prairies avec des cavités pour nicher et des proies accessibles toute au long
de l’année (Trouvilliez & Wintergeist, 2012).
Ainsi, dans les résultats de l’enquête 1985-1995, on trouve les densités les plus fortes (≈ 5 cantons
par km²) dans les pâtures humides de Villeneuve-d’Ascq (Tombal, 1996), ou dans une maille d’habitat
bocager (carte 2) avec 10 cantons lors de l’enquête 2014-2015, à comparer aux 0,07 canton au km²
dans les grandes cultures du Cambrésis.
Carte 2.- Représentant la répartition des Chevêches dans une maille (E071N704 n°10) très favorable à sa présence.
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Certains auteurs attribuent le déclin de cette espèce à l’intensification des pratiques agricoles
(Juillard, 1980) : réduction des surfaces agricoles en gestion extensive, mise en culture ou destruction
des prairies, déclin du pâturage bovin et ovin, bâtiments agricoles modernes moins propices à la
nidification, destruction de la ressource trophique par un usage non maîtrisé des insecticides… On
peut y ajouter les destructions par les collisions avec les véhicules automobiles, surtout lorsque le
réseau routier est très dense comme c’est le cas dans le Nord – Pas-de-Calais avec 12 300 km de
voiries et une densité de circulation supérieure à 2 000 véhicules par jour (INSEE, 2013).
Conclusion
La Chouette aux yeux d’or, de la taille du Merle noir, visible le jour pour qui sait la distinguer de
l’écorce du saule où elle prend le soleil, est emblématique du bocage. Proche de l’Homme, elle
bénéfice généralement d’un grand capital de sympathie qui devra se concrétiser par des mesures
efficaces de conservation de ses habitats pour être authentique.
La concertation et la sensibilisation des acteurs de terrain devraient porter sur différentes actions :
plantation de haie, taille des saules, convention avec les propriétaires pour préserver les prairies,
pose de nichoirs, entretien régulier, et maintien et renouvellement des arbres isolés et des linéaires
de haies. Non seulement cela bénéfique à la chouette mais aussi au cortège d’espèces inféodées aux
milieux ouverts et bocagers qui est tout aussi en déclin (Jiguet, 2011 ; Luczak, à paraître).
En cela, la Chevêche d’Athéna peut être alors une espèce parapluie pour la conservation et la
protection des habitats prairiaux et du cortège d’espèces associées et un bon indicateur d’évaluation
de la mise en place des actions du SRCE dans les zones bocagères.
Un grand merci à tous les observateurs
Ancelet Christophe, Beaudoin Cédric, Bernard Thierry, Boscher Pia, Boucly Nelly, Bouton Rémi,
Brunner Michaël, Burrow Coralie, Burrow Magali, Chauvet Matthieu, Cohez Vincent, Dauphin Arsène,
De Beyter Philippe, Defieu Anthoni, Delacourt Elodie, Dérolez Bruno, Dhellemmes Théalie, Dupont
Philippe, Dutilleuil Simon, Fontaine Olivier, Gajocha Richard, Giraud Gest Marine, Gournay Bernard,
Héquet Patrice, Héroguel Clément, Jourdain Vincent, Kreus Robin, Lefevres Olivier, Legroux Nathan,
Lejeune Pascale et Jean-Philippe, Lelièvre Quentin, Misztal Stéphane, Ottevaere Sébastien, Pagot
Céline, Pischiutta Rudy, Rondel Stéphanie, Rogeaux Laure, Ryckelynck Thierry, Verne Sébastien.
Et aux structures participantes en plus du GON :
Association des naturalistes de la Gohelle ; CPIE Chaîne des Terrils ; CPIE Flandre Maritime ;
CPIE Ville d’Artois ; CPIE Val d’Authie.
Bilbiographie
ANCELET, C. (à paraitre). Evolution des effectifs de Chevêche d’Athéna Athene noctua sur la bordure nord de la
plaine de la Scarpe (59, SE) entre 1992 et 2014.
BIENAIME, E. & CHAIB. F., 1980. La Chouette chevêche Athene noctua dans la région de Hazebrouck –Nord – Le Héron 4 :
75-79.
BROM, R & PYNSON, C. 2011. Dénombrement des Chevêches d’Athéna dans les Weppes. Le Tadorne n° 22 : 138142
EXO, K.M. & HENNES, R., 1978. Empfehlungen zum Methodik von Siedlungsdichte- Untersuchungen am
Steinkauz Athene noctua. Vogelwelt, 99 : 137 -141.
JIGUET, F., 2011. 100 oiseaux communs nicheurs de France. Delachaux et Niestlé, Paris. 224 p.
JUILLARD, M., 1980. Répartition, biotopes et sites de nidification de la Chouette chevêche Athene noctua en
Suisse. Nos oiseaux 35 : 309-337.
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INSEE, 2013. Réseau routier en 2013 : comparaison régionale. SOeS ; Service d'études techniques des routes et
autoroutes (SETRA) ; Direction Générale des Collectivités locales.
LEUZIERRE, S., 2012. Recensement de la Chouette chevêche Athene noctua et mise en relation avec l’occupation
des sols. Parc naturel régional Scarpe-Escaut. 17 p.
PETZOLD, H. & RAUS, T. (1973) : Steinkauz Athene noctua Bestandsaufnahmen in Mîttelwestfalen. Anthus, 10 : 25 38
TOMBAL, J.C, la Chevêche d’Athéna in TOMBAL, J.C. [coord.] (1996). Les oiseaux de la région Nord – Pas-deCalais – Effectifs et distribution des espèces nicheuses : période 1985-1995. Le Héron 29 : 90.
TROUVILLIEZ, J. & WINTERGEIST, J., 2012. Chevêche d’Athéna Athene noctua. Cahier d’habitats Natura 2000 Connaissance et gestion des habitats et des espèces d’intérêt communautaire. Tome 8 Oiseaux - volume 1 :
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VAN NIEUWENHUYSE, D. & BULTOT, J., 2010. Chevêche d’Athéna, Athene noctua. P. 244-245 in JACOB. J.P., DEHEM,
C., BURNEL, C., DAMBIERMONT, J.L., FASOL, M., KINET, T., VAN DER ELST, D. & PAQUET, J.Y., 2010 : Atlas des oiseaux
nicheurs de Wallonie 2001-2007. Série « Faune-Flore-Habitats » n°5. Aves et région wallone, Gembloux. 524 p.
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de la Chevêche d’Athéna Athene noctua à HERZELE, Flandre Orientale (Nord-Est de la Belgique). Actes du
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WROBEL, S., 2011. Suivi de la Chevêche d’Athéna Athene noctua dans le parc de la Deûle (59, LY – E05,06/07) :
période 2006-2012. Le Héron, 44 (2) : 67-89.
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