50e anniversaire de la Délégation générale du Québec à Paris
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50e anniversaire de la Délégation générale du Québec à Paris
50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE 343 50e anniversaire de la Délégation générale du Québec à Paris Une « relation audacieuse » ! C’est le slogan choisi par le Québec pour fêter ses cinquante ans de présence officielle en France. En 1961, l’une des premières décisions de « l’équipe du tonnerre » de Jean Lesage fut d’ouvrir une « Maison du Québec » à Paris. Elle s’est vite appelée Délégation générale et obtint un statut diplomatique. Une exception accordée par le général de Gaulle qui pressent la détermination montante de ceux qu’il appelle encore les « Français du Canada ». Jusqu’à lancer en 1967 le fameux « Vive le Québec libre ! ». Au nom du « prolongement international des compétences provinciales », dite doctrine Gérin-Lajoie, le Québec fait de la France un tremplin pour s’affirmer sur la scène internationale. Cela engendrera quelques bras de fer et plusieurs guerres de drapeaux avec le Canada qui finira par admettre la participation des Québécois à la table de la Francophonie et maintenant à l’Unesco. Fondée sur une histoire et une langue partagée ainsi que des valeurs communes, la relation franco-québécoise n’a cessé de s’élargir et de s’approfondir depuis 50 ans. La coopération entre les deux pays et les deux sociétés touchent désormais tous les domaines. Par centaines de milliers, Français et Québécois traversent l’Atlantique chaque année. La formule diplomatique française, « non-ingérence, non-indifférence » envers le Québec, est devenue comme la prose de Monsieur Jourdain. Une fois pour toutes, la France a décidé d’accompagner le Québec dans sa marche en avant et dans son action internationale. SOMMAIRE La fondation de la DGQP, une nouvelle étape par Jacques PORTES . . . . . . . . . . . . . . Histoire en dates : 50 ans de relations franco-québécoises Entrevue avec l’actuel Délégué général du Québec à Paris Michel ROBITAILLE . . Les principaux opérateurs de la relation franco-québécoise L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 Dossier établi par Georges POIRIER Journaliste, directeur de France-Québec mag, administrateur de l’AFI Ancien président de l’Association France-Québec. 344 DOSSIER La fondation de la DGQ à Paris : une nouvelle étape Jacques PORTES Professeur d’histoire de l’Amérique du Nord à l’Université de Paris 8 Vincennes Saint-Denis* L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 Lors de la commémoration du quarantième anniversaire de la fondation de la Délégation générale du Québec à Paris, en 2001, l’accent avait été mis dans les commentaires sur la profonde rupture apportée par l’intervention du général de Gaulle, qui avait dû bousculer la mauvaise volonté du Quai d’Orsay. Toutefois, ce bouleversement avait eu quelques signes avant-coureurs discrets. Mais, après l’inauguration de la Délégation en 1961, les relations se sont intensifiées jusqu’au voyage de juillet 1967. Les archives du Quai d’Orsay, récemment ouvertes, permettent d’en mesurer l’importance. Un climat favorable à une intensification Le premier voyage du général de Gaulle au Canada, en avril 1960, au retour de son parcours aux Etats-Unis, produit un effet « étrange et décevant ». L’accueil a été triomphal dans les grandes villes américaines, mais les « déconcertante simplicité et apparente froideur de l’accueil canadien » surprennent et désappointent l’ambassadeur de France à Ottawa, Francis Lacoste. Cette réserve est mise sur le compte du climat et de l’austérité du paysage, mais surtout sur la coexistence des Canadiens-français et des Canadiens-anglais. Certes il y a eu un peu plus de monde pour voir passer De Gaulle que pour un autre, mais cela ne rassure guère. A la suite des élections provinciales, l’ambassadeur note le renouveau apporté par Jean Lesage : dès avril 1960, trois des ministres – Tremblay, Gérin-Lajoie, Lapalme – se réunissent pour étudier les conditions de création d’une Maison du Québec à Paris : « Nous aurions manifestement tout intérêt à les encourager dans ces voies ». Sans doute, Francis Lacoste conseille-t-il la plus grande prudence en raison des susceptibilités des Canadiens-français, mais il existe une marge d’action : « Or, il faut le reconnaître, jusqu’à présent, nous avons relativement très peu entrepris, et très peu tenté ici. » L’ambassade est très attentive au mouvement nationaliste qui se développe au Québec; il ne s’agit pourtant pas pour ces diplomates de prendre parti pour ne pas choquer, même si le RIN crie « Vive la France », mais d’être toujours prêts tout en restant prudent : « Nous ne pouvons plus ignorer que son histoire intérieure depuis 1763 n’est plus la nôtre, qu’elle n’a pas connu nos révolutions et que ses croyances, sa philosophie, son éthique sont à bien des égards différentes des nôtres. » De plus, l’accueil des immigrants venus de France n’est pas facile dans une province du Québec encore totalement canadienne. La Délégation du Québec à Paris La question de cette maison du Québec à Paris redevient d’actualité en janvier 1961. Québec souhaite « une véritable représentation générale de la province ». Le 17, l’ambassadeur de France discute avec le représentant nommé du Québec à Paris Charles Lussier du statut de cet établissement, car il faut tenir compte des « aspects fédéraux du sujet »; deux jours plus tard, le Quai d’Orsay suggère de ne rien faire sans l’accord du gouvernement fédéral afin de ne pas placer Ottawa devant le « fait accompli ». Francis Lacoste rassure les fédéraux, qui sont perplexes car le statut des « maisons » dans les pays du Commonwealth ne peut s’appliquer à la France. Quant au ministre français des Affaires étrangères, Maurice Couve de Murville, il est « soucieux de maintenir intactes les prérogatives fédérales, mais aussi soucieux de ménager l’ombrageux amourpropre de la province ». (2 février) A la suite de ces discussions, l’ambassadeur évoque la « gaucherie et la rusticité » des Canadiens-français, tout en vantant leur dynamisme, leur courage et leur enthousiasme parfois agressif. La France aurait tort d’en prendre ombrage. En attendant des précisions sur son statut, Charles Lussier devra résider à l’hôtel Scribe avant l’achat d’un « hôtel particulier ». Le 26 avril 1961, l’ambassadeur canadien Pierre Dupuy demande à Couve De Murville de reconnaître le Délégué, qui ne peut figurer pour autant dans les cadres diplomatiques du Canada… Il annonce la nomination de Charles Lussier. Ce dernier ne dispose alors d’aucune immunité. Ces incertitudes ne sont pas liées à une frilosité quelconque du Quai d’Orsay, mais à l’originalité de la Délégation du Québec. A l’époque, surtout en France, seuls les Etats reconnus pouvaient prétendre à un statut diplomatique; il est compréhensible qu’il ait fallu plus de dix ans pour qu’une solution informelle soit imaginée. Quelques mois plus tard, JeanMarc Léger parle de l’équivoque de la Délégation : « qui tient au caractère ambigu du Québec, demi-Etat dans une confédération incohérente et qui sans être strictement privée n’est pas vraiment officielle. » L’approche de l’inauguration relance les échanges entre l’ambassadeur et le Quai : le *Ses recherches portent sur la culture de masse et la démocratie américaines au XXe siècle ainsi que sur les relations politiques et culturelles entre la France et le Québec. 18 mai, le premier indique que le Premier ministre québécois Jean Lesage veut une cérémonie à grand spectacle, puisqu’il compte acheminer à Paris 140 personnes, des milieux politique et culturel, soit un Boeing 707 d’Air France au complet, dont les dépenses seront prises en charge en totalité par le gouvernement français. Une fois encore, Francis Lacoste souligne les « naïveté, timidité et en même temps hardiesse » de ces demandes québécoises, mais conseille de les accueillir très favorablement. Finalement le voyage de Jean Lesage, qu’il a commencé à Londres, se déroule parfaitement avec réception fastueuse à l’Elysée. L’entente est complète entre la délégation et l’ambassade du Canada : chacune offre une réception, Malraux est présent, Couve Ancienne DGQP rue Barbet de Jouy de Murville a accueilli Lesage, qui a été reçu en audience par de Gaulle. Quelques semaines plus tard, le nouvel ambassadeur, arrivé en mai 1962, évoque, dans une correspondance avec le Quai la situation au CaPremier bilan Les lendemains de cet événement fondateur nada. Il s’intéresse tout particulièrement à ce qui sont marqués par une réelle intensification des se passe au Québec, en raison des perspectives relations entre la France et le Québec. Le 6 sep- intéressantes : « Désir de coopération accrue avec tembre 1962, le message de Raymond de Boyer l’Europe et surtout avec la France …possibilités … de Sainte-Suzanne, consul général de Montréal, de renforcer notre influence au Canada français, qui quitte ce poste est très clair, il note la né- notamment avec des investissements économiques vrose d’abandon des Canadiens français : « Une et des échanges universitaires et culturels ». grande tâche nous attend ici. Je ne crois pas beauRaymond Bousquet mentionne que le voyage coup à l’élaboration de plans à longue échéance. Je de 1960 du président a éveillé le « fait français » crois à l’état de disponibilité qui nous fera trouver en Amérique qui a été relayé par la déterminaau fur et à mesure ce qu’il faut faire. La sympathie et tion du gouvernement Lesage. La France a nécesl’amitié sont exigeantes. Montréal comme Québec sairement un grand rôle à jouer : « La première n’est pas un consulat comme les autres. » remarque doit être, non d’action, mais de précauLe départ de Francis Lacoste et son rempla- tion : avant tout éviter d’éveiller l’ombrageuse susceptibilité des Canadiens français, il ne faut rien cement par Raymond Bousquet à l’ambassade d’Ottawa permettent aux deux hommes de don- entreprendre qui n’ait été demandé; l’art est de se ner leur opinion sur leur pays de résidence. Le faire demander, sans trop donner l’impression que premier transmet au ministre des Affaires étran- l’on a pris l’initiative de proposer. Les Canadiens gères son rapport de fin de mission : novembre français sont vivement conscients de leur besoin de 1955-avril 1962. Ce document insiste sur la la France, mais ils préfèrent en parler les premiers… richesse du pays, son immensité, le reconnaît ils le font. Il suffit de les attendre, en leur faisant sentir qu’on est prêt à les écouter, et à les aider. » comme le leader des puissances moyennes, avec parfois de l’agressivité : « Pétri de contrastes, de Le Quai se montre un peu moins enthousiaste; contradictions, de conflits intérieurs », accusé par il considère que le fait français est un élément de les Américains et les Anglais d’être incertain de la plus haute valeur, mais « sur le plan politique lui-même et n’être pas parvenu à se définir par proprement dit il serait cependant imprudent de rapport à ses alliés. Pourtant le Canada aurait trop y compter. Le Canadien français ne raisontrouvé sa voie : exploiter tout son territoire et nera guère différemment du Canadien anglais en ce ses ressources. Vœux communs partagés même qui concerne les grands problèmes de la politique mondiale. » par les Canadiens-français du Québec : « Le «nationalisme» actuel de ces derniers, si facilement explicable par des considérations de race, de Des perspectives nouvelles : 1963-1968 langue, de religion et d’histoire, ne prend toute L’ère nouvelle des relations entre la France et le sa signification que par rapport à l’exclusivisme Québec est soulignée par la réception de Jean intransigeant renforcé chez les Canadiens par leur Lesage presque comme un chef d’Etat (28 juin sentiment d’infériorité par rapport à leur voisin ». 1962). Elle est relancée dès l’automne 1963, lors 345 L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 346 DOSSIER de la venue d’André Malraux au Québec et au Canada. Ce voyage, auquel le président accorde une grande importance, a lieu alors que se déroule l’exposition économique française à Montréal. Le ministre partage son temps entre Ottawa, Montréal et Québec (deux jours dans chacune des villes); les ministres québécois Lesage et Lapalme sont reçus à l’ambassade. L’ambassadeur souligne la signification politique du voyage de Malraux, car « la France aurait d’ailleurs actuellement les coudées plus franches au Canada parce qu’elle est moins étroitement liée qu’autrefois à la Grande-Bretagne ». Pris par l’enthousiasme, face à la foule de Montréal, André Malraux développe sa vision : « Il n’y a pas un lieu au monde où l’énergie française se montre comme elle se montre ici…la prochaine civilisation, nous la ferons ensemble. » Il ne s’agit pas ici de s’étendre sur le « Vive le Québec libre ! » du 24 juillet 1967, mais de fournir quelques éléments complémentaires et méconnus sur sa genèse et sur ses suites immédiates. L’invitation est lancée par le Premier ministre québécois Daniel Johnson le 13 septembre 1966, le voyage s’effectuera dans le cadre de l’Expo. Dans les mois qui suivent, jusqu’au printemps de 1967, la préparation du voyage se fait par de multiples notes très bien informées sur le Québec, sa population, son évolution : elles ne contiennent plus rien d’archaïque. Tout était prévu dans le détail avec notices sur chaque ville et sur tous les personnages rencontrés du premier au dernier jour prévu. Les vins et champagnes qui seront servis lors des réceptions françaises sont acheminés par la valise diplomatique. Les discours sont tous rédigés, sauf celui du « Vive le Québec libre », dont ceux qui étaient prévus à Ottawa, ceux-là insistant sur la guerre et l’amitié entre les deux peuples alors que les précédents se basaient sur l’histoire : rameau commun, retrouvailles, modernisme du Québec. Un intérêt particulier est signalé pour la francophonie, « M. Trudeau a essayé de noyer ce problème ». Il faut aller de l’avant, en adoptant une attitude souple et pragmatique, par exemple une association privée à laquelle se joindraient plus tard les gouvernements. Déjà en 1967, les diplomates se félicitent de la coopération culturelle qui est efficace alors que les relations économiques se traînent. Une entente avec le Québec sera signée pour que des œuvres françaises soient exposées dans les centres culturels au Québec et les réalisations techniques du Québec le seront à Paris. Le 22 juillet 1967, l’ambassadeur indique que Londres s’inquiète de la visite prévue, et des intentions de la France, qui favoriserait les indépendantistes ou même chercherait à séparer le Canada des Etats-Unis (Times de Londres). Les coupures de la presse canadienne sont très alarmistes : la France aiderait le séparatisme. Ce voyage de 1967 est centré sur le Québec, le général répond à l’invitation de Daniel Johnson. Le passage à Ottawa n’était prévu que pour être symbolique, de Gaulle n’est pas l’un des chefs d’Etat qui visitent l’Expo : il a un programme type pour lui « en fonction de son caractère propre ». La mise au point du trajet se fait peu à peu, et Ottawa accepte qu’il commence par Québec. Le maire Jean Drapeau se félicite du projet d’arrivée à Montréal en voiture. Les Français pensent le plus grand bien de Claude Morin, capable et intelligent, comme de Marcel Masse, tous deux décidés à aller de l’avant et à la « francophilie… profonde et sincère ». Une fois le « Vive le Québec libre » prononcé, tout le programme est bousculé et le général rentre à Paris, devoir accompli. Dès son retour en France, un premier bilan de la coopération est effectué, avec énumération des actions diverses et crédits affectés : professeurs, coopérants, bourses, matériel culturel, investissement au collège Marie-de-France. Un rappel rapide des investissements apparaît : métro de Montréal, Renault et Peugeot même si un déficit d’exploitation subsiste. L’idée est lancée d’un «emprunt Québec» sur le marché français. Québec participerait aux travaux du VI° plan. Un travail est entrepris sur les équivalences de diplômes, sur des livres scolaires communs; un institut de la culture et de la technique du Québec à Paris est mis en projet. « Il est à souligner que le Québec étant pratiquement le seul pays entièrement francophone hors de France à n’être pas sous-développé, on peut effectivement dans la plupart des cas parler non d’assistance mais de coopération technique sur un pied d’égalité. Par exemple, l’EDF a apporté à Hydro-Québec des connaissances sur la production d’électricité par l’énergie atomique, mais HydroQuébec peut nous apporter sur les problèmes des hautes tensions des connaissances techniques qui sont les meilleures au monde. » Pour confirmer tous ces accords, proposition est faite du rachat du pavillon français de l’expo pour le conserver comme vitrine de la France. Et, dès septembre 1967, l’exemple de l’Office francoallemand pour la jeunesse est envisagé comme modèle pour le Québec. Le Quai d’Orsay veille à avertir le gouvernement fédéral des visites de Français qui ne s’arrêtent pas toujours à Ottawa, mais se sert de certains avis canadiens sur la liberté des Québécois dans les domaines de coopération prévus par les accords officiels. Il fait mener des études sur les fédéralismes, pour voir comment la France peut accentuer ses relations avec le Québec sans rompre avec le Canada. Un projet d’instructions est transmis à Pierre de Menthon pour autonomiser le consulat général de France à Québec par rapport à l’ambassade en distinguant les deux niveaux de compétence. Au conseil des ministres du 27 novembre 1967, le général de Gaulle indique qu’il n’avait aucune envie d’aller à Ottawa, que la chaleur des Québécois l’a impressionné, que ces « Français du Canada » devaient être reliés à la France qui les avait totalement abandonnés. « Après tout, c’est 50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE la France qui a peuplé le Canada, qui en a forgé l’âme et l’esprit. Ou bien, la France n’est rien, ou bien elle est quelque chose, elle ne pouvait pas se désintéresser du Canada français. La France tire les conséquences de tout cela. Les choses ne sont pas réglées. Elles commencent seulement. » D’ailleurs en janvier 1968, le projet d’une visite du général au Québec dans l’année est étudié, mais il n’aboutit pas. Les relations avec Ottawa se tendent rapidement : le ministre des Affaires extérieures du Canada, Jean Marchand, s’en est pris au voyage de Johnson à Paris, créant un véritable incident en lançant une diatribe contre les prétentions internationales du Québec. L’ambassadeur de France envoie des notes sur la vie politique québécoise : Pierre-Elliot Trudeau est un déterminé centralisateur, mais ouvert aux autres francophones du pays, Jean-Jacques Bertrand est timoré, c’est un ami de Trudeau, élu par des anglais, heureusement qu’il y a des opposants plus vaillants comme Marcel Masse et Jean-Guy Cardinal. Il estime que les Québécois se rendront compte que rien n’est à attendre du fédéral : « L’opinion finira par s’en convaincre et l’opposition, qu’il s’agisse de celle que représente le groupe de M. Cardinal, du parti libéral ou du parti Québécois de M. René Levesque, finira par l’emporter et replacer le Québec dans le courant qui l’entraîne irréversiblement vers un nouveau destin, dans une étroite entente avec notre pays. » 347 Le 28 mars 1969, Bernard Tricot, secrétaire général de la présidence, répond à Michel Debré, Ministre des affaires étrangères, qui s’étonnait que Gérard Pelletier, venu inaugurer une exposition d’art Inuit, n’ait pas été reçu par le général : « Vous savez combien le général de Gaulle est réservé à l’égard du gouvernement fédéral canadien et en particulier envers ceux de ses membres qui sont d’origine française et dont il pense qu’ils ne sont pas sincèrement fidèles à leurs origines ». En septembre 1968, éclate l’affaire Rossillon : Trudeau accuse un réseau Rossillon, formés de coopérants et de diplomates, qui serait lié à des agents soviétiques. Le consulat de Québec explique que Philippe Rossillon n’a parlé que de langue française au Manitoba, qu’il était accompagné par un agent du gouvernement fédéral. Et, de son côté, Jurgensen indique que la France n’a aucune intention de créer un centre culturel français à Winnipeg. pour les Français, il s’agit d’une affaire montée de toutes pièces par Ottawa : « En cette affaire, comme en tout ce qui touche les relations entre le Canada et notre pays, on constate encore une fois, l’inconciliable différence d’opinion entre Canadiens français et anglophones. » La France a bien choisi son camp et elle va s’y tenir pour une longue période. HISTOIRE EN DATES 1961 Inauguration (le 5 octobre) de la Maison du Québec à Paris qui deviendra, trois ans plus tard, la Délégation générale du Québec à Paris, avec statut diplomatique. Rencontre entre le général de Gaulle et le Premier ministre du Québec Jean Lesage. 1962 1964 tional des compétences provinciales. Création de la Commission permanente de coopération franco-québécoise. 1966 Prix Médicis à Marie-Claire Blais pour « Une saison dans la vie d’Emmanuel ». Premier jumelage de villes, créé entre Bordeaux et Québec. Première entente de coopération technique entre le ministère de la Jeunesse du Québec et l’Association pour l’organisation des stages en France. 1965 Signature entre les ministres de l’Education de France et du Québec, Christian Fouchet et Paul Gérin-Lajoie, d’un programme d‘échanges et de coopération, première entente internationale du Québec au nom de la doctrine Gérin-Lajoie du prolongement interna- (photo Jules Rochon, Archives nationales du Québec) 1967 Visite en France du Premier ministre québécois Daniel Johnson et voyage au Québec du général de Gaulle, à l’occasion d’Expo 67. « Vive le Québec libre ! » lancera-t-il. L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 50 ans de relations franco-québécoises 348 DOSSIER Triomphe de Félix Leclerc à Bobino et spectacle « Vive le Québec ! » à l’Olympia avec Gilles Vigneault, Pauline Julien, etc. Signature des accords Peyrefitte-Johnson étendant la coopération culturelle et éducative. 1968 Création de l’Association France-Québec et de l’Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ). Le Québec est invité, grâce à la France, à la Conférence des ministres de l’Education francophones au Gabon, au grand dam d’Ottawa. 1970 Le Québec obtient, avec l’appui de la France, le statut de gouvernement participant à l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT) qui deviendra plus tard l’Organisation internationale de la Francophonie, l’actuelle OIF. (photo Jules Rochon, Archives nationales du Québec) 1980 Inauguration à Paris de la place du Québec par le Premier ministre René Lévesque et le maire Jacques Chirac. Création du Centre de promotion des coopérations technologiques et industrielles (la section française fermera en 1987 et la section québécoise en 1989). Création du programme d’échanges de jeunes « inter municipalités ». 1973 1981 1982 1974 1984 Création du Centre de coopération interuniversitaire franco-québécois La pièce Les Belles sœurs de Michel Tremblay considérée meilleure production étrangère de la saison théâtrale à Paris. Création du groupe franco-québécois de coopération économique lors de la visite à Paris du Premier ministre Robert Bourassa à Paris qui signe avec Jacques Chirac une nouvelle charte de la coopération franco-québécoise. Le Premier ministre Pierre Mauroy au Québec : « Il n’y aura pas de second abandon ». Anne Hébert prix Fémina pour « Les Fous de Bassan ». (CCIFQ). (photo fonds DGQP) L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 1986 Premier Sommet de la Francophonie (François Mitterrand en refusait la tenue tant que le Canada n’acceptait pas la participation du Québec). Le film Le Déclin de l’empire américain de Denys Arcand dépasse le million d’entrées en France. 1987 Visite du président Mitterrand qui commence son séjour à Gaspé, là où débarqua Jacques Cartier en 1534 : « Je prononce le mot Québec avec amour, respect et espoir ». Création des Entretiens Jacques-Cartier à Lyon. (photo fonds DGQP) 1977 1990 1979 1993 René Lévesque et Raymond Barre décident d’instaurer des rencontres alternées entre les deux Premiers ministres. A Cannes, prix d’interprétation féminine à Monique Mercure dans J.A. Martin, photographe. Début du succès de l’opéra-rock francophone Starmania créé par le Français Michel Berger et le Québécois Luc Plamondon. Laurent Fabius premier président de l’Assemblée nationale en visite officielle au Québec pour les dix ans de la coopération parlementaire. Sous le titre « Des Québécois parlent aux Français », le quotidien montréalais Le Devoir publie le manifeste de 101 personnalités québécoises sur l’avenir de la langue française… en France. 50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE 1994 Signature du premier plan d’action entre le Québec et une région française, Rhône-Alpes. Création du Comité d’action politique France-Québec (CAPFQ) par les jeunes des partis politiques des deux pays. 1995 Le Premier ministre Jacques Parizeau, en visite en janvier à Paris, reçoit des assurances de tous milieux en cas de référendum positif sur la souveraineté. Ouverture de la Librairie du Québec à Paris. 1996 Alain Juppé au Québec (il n’y avait pas eu de visite de Premier ministre français depuis neuf ans). Création d’un Réseau franco-québécois pour le développement des PME. Création de la Commission franco-québécoise des lieux de mémoires communs. Convention entre les instances universitaires pour des thèses en co-tutelle. 349 2004 Première mission commerciale conjointe des Premiers ministres Raffarin et Charest dans un pays tiers, en l’occurrence le Mexique. 2005 Création du Fonds franco-québécois de coopération décentralisée. Création des Trophées culinaires France-Québec. 2006 La SNCF choisit Bombardier pour lui fournir 372 trains de banlieue (contrat de 2,7 milliards d’euros). 2007 Lancement de la collection de livres « Ces villes et villages de France, berceau de l’Amérique française ». 1997 Lancement du premier festival Cinéma du Québec à Paris, toujours organisé chaque année. 1998 1999 Organisation du « Printemps du Québec en France » dans une soixantaine de villes, la plus grande manifestation culturelle québécoise jamais organisée à l’étranger. Fusion Alcan-Pechiney. 2000 Lionel Jospin et Lucien Bouchard signent deux « déclarations communes » sur les enjeux technologiques et la diversité culturelle. Lancement du Club économique France-Québec. Le groupe d’amitié France-Québec de l’Assemblée nationale française « réaffirme son attachement au droit à l’autodétermination du Québec » après la loi C20 au Canada. 2001 Premiers ateliers franco-québécois de la coopération décentralisée entre collectivités territoriales. Lancement des premières Rencontres Champlain-Montaigne, biennales entre Québec et Bordeaux. 2002 2003 (photo Assemblée nationale du Québec) 2008 Nombreuses célébrations en France autour du 400e anniversaire de la fondation de Québec par Champlain. A Québec, François Fillon déclare : « Il y a en chaque Français un rêve québécois ». Création du Conseil franco-québécois de coopération universitaire (CFQCU qui succède au CCIFQ). Visite du président Sarkozy qui signe à Québec avec le Premier ministre Jean Charest une entente-cadre sur la reconnaissance des qualifications professionnelles (depuis, professions et métiers concluent des ARM : arrangements de reconnaissance mutuelle). 2009 Création du Club des dirigeants d’entreprises franco-québécois. Colloque à Québec pour les 150 ans du Consulat général de France. Mise en place d’un Groupe de travail franco-québécois sur les flux migratoires et l’intégration des migrants. Prix Médicis à Dany Laferrière pour « L’Enigme du retour ». Wajdi Mouawad, Grand Prix du théâtre de l’Académie française. Marc-André Grondin César du meilleur espoir masculin. Création de l’Observatoire franco-québécois de la santé et de la solidarité. 2010 Jean-Pierre Raffarin et Jean Charest scellent « une nouvelle alliance francoquébécoise ». A Cannes, prix d’interprétation féminine pour Marie-Josée Croze dans Les Invasions barbares de Denys Arcand qui obtient le prix du scénario. 2011 Vingt-six accords signés au Symposium franco-québécois des pôles de compétitivité et des créneaux d’excellence québécois à Paris. Numéro (spécial) 150 de France-Québec mag. Denis Marleau premier metteur en scène québécois invité par la Comédie Française pour créer Agamemnon dans la salle Richelieu. Lancement du Fonds franco-québécois de coopération décentralisée pour la reconstruction d’Haïti. L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 Dans le cadre de leur « partenariat stratégique », Lucien Bouchard et Lionel Jospin créent un groupe franco-québécois sur la diversité culturelle. La Commission permanente de coopération franco-québécoise devient biennale. Création du prix littéraire de l’Association France-Québec. 350 DOSSIER MICHEL ROBITAILLE : « Tous les jours en France, il y a des activités québécoises » L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 — Vous étiez très jeune lorsque la DGQP fut créée en 1961. Quels sentiments éprouvez-vous aujourd’hui dans ce poste ? Un sentiment de fierté, c’est certain. Ayant fait toute ma carrière dans les relations internationales, c’est une reconnaissance qui me touche. La relation franco-québécoise est une référence incontournable, un signe d’excellence. L’inauguration, en 1961, de la « Maison du Québec » à Paris est le réel point de départ de la personnalité internationale du Québec. Cela coïncide avec la Révolution tranquille. Jean Lesage en parlait dans sa campagne, et cette présence officielle en France vient concrétiser cette notion-là. Ensuite, ce fut en 1965 la première entente internationale, en matière d’éducation, une autre façon d’affirmer cette volonté d’être actif à l’extérieur des frontières du Québec. La nécessité pour le Québec d’œuvrer sur la scène internationale n’a jamais été démentie depuis. Cette présence rend service à toute la société québécoise, des gens d’affaires aux milieux culturels. Cette pertinence n’a jamais été remise en question par aucun parti politique. outil important pour le partage d’expertise et le mentorat : cette solidarité-là est très intéressante. Le volet économique, désormais bien ancré, s’intègre à merveille à l’ensemble de la coopération. De plus, les liens universités/entreprises via la coopération décentralisée sont stimulants et très productifs. La relation franco-québécoise a bien progressé et a su s’adapter à l’évolution des deux sociétés. Ce n’est pas une coopération nostalgique mais une coopération vivante orientée vers le futur. Le volume d’actions est phénoménal. Tous les jours en France, il y a des activités québécoises dont plusieurs touchent naturellement la culture, un volet toujours important de cette relation. — Longtemps, la Délégation a dû batailler pour défendre les compétences internationales du Québec, notamment face à l’Ambassade du Canada. Qu’en est-il aujourd’hui ? Je n’ai pas eu, en un an, à gérer ce genre de situation. La relation franco-québécoise a atteint une maturité. C’est devenu une évidence. J’ai d’excellentes relations avec l’ambassadeur du Canada, Marc Lortie, et ses adjoints. Il y a même une saine complicité pour la réalisation de certains projets qui dépassent la relation bilatérale. Celle-ci est reconnue et fait maintenant partie de la normalité des choses. Délégué général du Québec à Paris — Qu’est-ce qui vous a surpris en depuis octobre 2010, Michel Robitaille arrivant en 2010 ? est un vrai francophone. Québécois, J’avais déjà touché à la relation il a rencontré son épouse d’origine franco-québécoise, notamment belge, Marie-Dominique Decnicnk, en en dirigeant l’Association Québec- Louisiane où ils étaient tous deux cooFrance à la fin des années 80. pérants pédagogiques. Ils ont eu deux Puis, affecté aux Etats-Unis, je enfants dont une fille, qui a épousé cet été un jeune Français. n’avais pas suivi de près son — Par centaines de milliers, évolution. A mon arrivée à Paris en octobre 2010, Français et Québécois traversent chaque année l’Atlantique. La relation n’est-elle pas j’ai d’abord remarqué l’importance prise par la banalisée ? coopération décentralisée qui nous permet une action plus marquée dans les régions de France. Je ne crois pas. Je suis conscient qu’avec la monNous y étions déjà bien présents grâce à l’Asso- dialisation nous ne sommes plus à l’époque des ciation France-Québec. Par les ententes avec six années 60-70 quand le voyage en France, pour un Conseils Régionaux, la présence québécoise s’est Québécois, était la première destination. Maintenant, un jeune ira peut-être en Indonésie ou enrichie et diversifiée. Dès le premier mois à cette nouvelle fonction, j’ai collaboré au nou- en Amérique du Sud avant de venir en France. veau plan d’action avec l’Alsace dans le cadre L’offre est plus grande mais l’attrait de la France demeure. Aux gouvernements et aux milieux asdu 10e anniversaire de notre entente; nous allons renouveler prochainement ceux avec l’Ile-de- sociatifs de s’assurer que l’image projetée soit moderne et fasse toujours rêver. Il faut mettre France et Rhône-Alpes. J’ai aussi noté que la coopération économique en place les outils nécessaires. Exemple : l’OFQJ avait évolué, avec quelque 150 entreprises qué- propose de vivre des expériences professionbécoises en France et la création du Cercle des nelles pour bonifier les cv. Comme l’expérience internationale peut être un plus qui va faire la dirigeants d’entreprises franco-québécois, un 50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE dans des contextes différents. Il faut voir comment profiter des approches de chacun pour remédier à ces problèmes. — Le Délégué général du Québec à Paris est aussi le sherpa du Premier ministre québécois pour la Francophonie. Vous la connaissez bien. Quels sont vos axes de travail ? Je suis très heureux d’occuper cette fonction et je remercie le Premier ministre de sa confiance. La Francophonie a toujours été près de mes préoccupations. Très tôt, au début des années 70, comme professeur de français en Louisiane avec de nombreux autres Québécois, j’ai eu le bonheur de travailler à la promotion de la langue française auprès des Cadiens et Créoles aux côtés de coopérants français, belges, suisses et acadiens. Au Centre — Y a-t-il des domaines que la coopération franco-québécoise de la Francophonie des Amén’a pas encore explorés ? riques, que j’ai dirigé avant de Certainement. Par exemple, la DGQP rue Pergoläse venir à Paris, j’ai ressenti une coopération dans le domaine grande dynamique pour affirmer la présence du français sur cet immense de la recherche existe depuis longtemps mais on ne la fait plus de la même façon. De même, territoire. En plus des nombreuses communaula prospérité économique dans un contexte de tés francophones au Manitoba, en Acadie, en développement durable prend de plus en plus Ontario, en Nouvelle-Angleterre, en Louisiane, de place dans la relation franco-québécoise. en Haïti, aux Antilles..., ils sont quelque millions Le Plan Nord, dévoilé récemment par le Pre- qui ont appris le français comme langue seconde mier ministre Charest, en est un exemple. Un et qui sont parfois plus militants que certains plan ambitieux qui s’échelonnera sur 25 ans, francophones. en collaboration avec les Premières nations Les Sommets de la Francophonie, depuis 2008, ont donné une importance accrue à la et les Inuits. J’ai eu une agréable surprise lors langue française. Les pactes de la mission en France du ministre du Développement linguistiques, initiés par le Seéconomique du Québec, Clécrétaire général de l’OIF, c’est ment Gignac: son homologue extraordinaire. A Montreux, français, Eric Besson, nous a Abdou Diouf est allé plus loin annoncé qu’il était chargé du en proposant la tenue d’un premier Forum mondial de la dossier Plan Nord par le Premier ministre Fillon; un mandat langue française qui va sortir Logo 50 ans DGQP spécifique qui, à ma connaisdes sentiers battus. Début juilsance, n’existe nulle part ailleurs. Le CNRS a let 2012 à Québec, la parole sera donnée à celles six chercheurs à l’Université Laval au sein de et ceux qui n’ont pas la chance de s’exprimer lors la Chaire sur les études nordiques. Le Plan Nord des Sommets. Des jeunes de la société civile, prend une importance majeure. provenant de partout sur la planète, vont parler de la place de la langue française dans leur milieu et nous dire comment ils voient l’avenir de — Quels combats prioritaires à mener ensemble, cette langue commune. Ce sera l’occasion de se aujourd’hui, par le Québec et par la France ? Ils sont nombreux car nous faisons face à plu- pencher sur l’utilisation des nouvelles technolosieurs défis communs. Pour en parler et initier gies pour le rayonnement de la langue française. des partenariats, nous avons mis sur pied des C’est aussi remarquable de voir l’OIF interveséries de regards croisés, avec des experts qué- nir, de plus en plus, pour accompagner les pays bécois et français, sur des sujets aussi variés en situation de crise et se préoccuper du respect que le décrochage scolaire, l’insertion sociale, de la démocratie chez tous ses membres. l’obésité, la maladie d’Alzheimer, la sécurité, la Tout cela me rend très optimiste pour la Francophonie et son évolution. criminalité financière, la dépendance chez les personnes âgées, les nouvelles énergies… Nos deux sociétés vivent des situations similaires Entretien conduit par Georges Poirier L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 différence, pourquoi ne pas la vivre en France ou au Québec où nous sommes entre amis et en terrain familier ? Les gouvernements ont aussi modifié certaines règles pour faciliter la mobilité. Le dossier phare de ces deux dernières années, les ARM (arrangements de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles), permet cette plus grande mobilité. C’est la première fois qu’existe une telle initiative intercontinentale. Cela démontre, là encore, la maturité de la relation franco-québécoise. Il y a aussi le programme vacancestravail. Et, quand des milliers de jeunes Français vont étudier au Québec chaque année, c’est une preuve additionnelle de réussite. On a fait énormément de chemin en 50 ans. 351 352 DOSSIER Les principaux opérateurs de la relation franco-québécoise AFQ/AQF : les associations France-Québec (créée en 1968) et Québec-France (créée en 1971) forment un « réseau unique » qui s’appuie sur plus de 80 groupes en régions et plus de 6.000 membres actuellement. En juin 2011, le 17e congrès commun a réuni plus de 500 participants à Bergerac autour du thème « Les citoyens, acteurs de la coopération franco-québécoise ». Le réseau organise des échanges (notamment France et les dirigeants d’entreprises françaises qui évoluent sur les marchés québécois. Son mode de fonctionnement est basé sur l’entraide et la mise en commun de réseaux, avec l’appui privilégié de la Délégation générale du Québec à Paris. La contribution de ses membres s’établit autour d’un principe fondamental: « Apporter pour recevoir ». www.cdefq.org GFQCE : les questions économiques et commerciales sont évoquées lors des réunions annuelles du Groupe franco-québécois de coopération économique, constitué en 1974. Cette coopération a pour principaux instruments les rencontres industrielles « Ubifrance-Québec » et, depuis 2008, des rencontres entre pôles de compétitivité. Le deuxième symposium des pôles de compétitivité français et des créneaux d’excellence québécois s’est tenu en France en novembre 2010 (thèmes : aéronautique, environnement, textiles techniques et « nutraceutique »). Les deux co-présidents de la 63e session de la Commission permanente de coopération franco-québécoise, en mars 2011 à Québec, Elisabeth Beton-Delègue, directrice des Amériques au quai d’Orsay, et Marc Croteau sous-ministre du ministère des Relations internationales du Québec. (photo François Nadeau) L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 « inter municipalités »), un prix littéraire avec vote des lecteurs, des dictées francophones (plus de 13 000 participants en 2011 en France), des tournées culturelles et sur les enjeux de société, etc. France-Québec publie aussi la revue trimestrielle France-Québec mag, la seule à rendre compte des relations franco-québécoises. www.francequebec.fr et www.quebecfrance.qc.ca CAPFQ : en 1994, les sections jeunesse des formations politiques françaises et québécoises, représentées dans les deux Assemblées nationales, ont fondé le Comité d’action politique franco-québécois pour participer à l’affermissement des relations privilégiées entre la France et le Québec. Un programme de stages au sein des cabinets ministériels et des institutions politiques permet à de nombreux jeunes militants de réaliser une expérience enrichissante tant au plan personnel, académique que professionnel. www.cap-fq.org CDEFQ : lancé en 2009, le Club récemment devenu Cercle des dirigeants d’entreprises francoquébécois se veut un lieu privilégié de rencontres pour les dirigeants d’entreprises québécoises en CFQCU : créé en 2008 pour succéder au CCIFQ, le Conseil franco-québécois de coopération universitaire (CFQCU) est une structure souple de coordination, développée en concertation étroite avec les universités françaises et québécoises, afin de les soutenir dans leurs partenariats. Le CFQCU dispose de deux programmes pour soutenir la mobilité professorale et l’élaboration de partenariats stratégiques en matière d’enseignement supérieur et de recherche, en lien avec les réseaux nord-américains et européens. La présidence est assurée conjointement par un représentant de la CREPUQ (Conférence des Recteurs et des Principaux des Universités du Québec) et un représentant de la CPU (Conférence des Présidents d’Universités en France). www.cfqcu.org. CFQLMC : fondée en 1996, la Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs vise à mettre en valeur les lieux de mémoire qui témoignent d’une histoire commune et d’une culture partagée. Son action se fonde sur deux pôles complémentaires: l’inventaire et la connaissance de ces lieux de mémoire d’une part, et leur mise en valeur et leur partage par le plus large public d’autre part. La Commission publie un bulletin électronique, Mémoires vives. www.cfqlmc.org CPCFQ : la Commission permanente de coopération franco-québécoise a vu le jour en 1965 50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE 353 densifie. Elle s’appuie sur la réflexion des Assises franco-québécoises de la coopération décentralisée qui réunissent élus territoriaux, techniciens et partenaires (2001 à Québec, 2003 à Bordeaux, 2008 à Québec, 2011 à Lyon, 2013 dans le Bas-Saint-Laurent). www.4assisesfrancoquebecoises.com GTFQDDE : mis en place en 2009 par les ministères concernés, le Groupe Signature d’une convention de partenariat, en décembre 2010, entre de travail franco-québécois sur le dével’Association France-Québec présidée par Marie-Agnès Castillon et l’Office loppement durable et l’environnement franco-québécois pour la jeunesse représenté par son secrétaire général explore de nouveaux thèmes de coopéFrance Frédéric Lefret, en présence du Délégué général du Québec Michel ration potentiels et s’intéresse aux enRobitaille. (photo Jean-Philippe Tremblay) jeux communs à promouvoir sur la scène internationale, notamment les projets pour assurer le suivi de l’entente sur l’éducation. liés à l’énergie, aux transports intelligents et Depuis, composée de hauts-fonctionnaires des aux véhicules décarbonés. deux pays, elle est le principal instrument de coordination des activités de coopération entre les deux gouvernements et leurs partenaires. Elle lancé en 1968 par les deux gous’appuie sur le « relevé de décisions » signé par vernements, au service des 18-35 ans, l’Office les Premiers ministres lors de leurs rencontres franco-québécois pour la jeunesse participe au alternées. Au début, la Commission tenait deux rapprochement des jeunesses française et quésessions par an, une en France, l’autre au Québec. bécoise par des programmes de mobilité axés Elle est passée ensuite à un rythme annuel puis, sur le développement et le perfectionnement depuis 1998, à des sessions biennales. La 63e professionnels, dans les secteurs économique, session s’est tenue en mars 2011 à Québec. Une culturel et social, tout en favorisant les découcentaine de projets sont généralement retenus vertes interculturelles et le maillage des réseaux. et co-soutenus financièrement. Avec deux équipes, à Paris et à Montréal, l’OFQJ conseille et soutient chaque année près de 10 000 jeunes dans leur projet de mobilité professionnelle outre-Atlantique (stage, emploi temporaire, participation à un événement, mission commerciale, délégation thématique, etc.). www.ofqj.org OFQSS : créé en 2002, l’Observatoire franco-québécois de la santé et de la solidarité a pour mission de diffuser et valoriser la réflexion française et québécoise menée sur des thèmes d’actualité partagés dans le domaine sanitaire et Les quatrièmes Assises de la coopération décentralisée franco-québécoise social. Son rôle est aussi d’optimiser les se sont tenues à Lyon en janvier 2011. (Photo Georges Poirier) moyens engagés dans la coopération en vue de constituer un pôle francophone le Fonds franco-québécois pour auquel d’autres pays pourraient se joindre ultérieurement. Les coordonnateurs sont, en la coopération décentralisée, créé en 2005 et France, l’Institut de recherche et documentaabondé par les deux gouvernements, finance tion en économie de la santé (IRDES) et, au tous les deux ans une trentaine de projets présentés conjointement des collectivités ter- Québec, le ministère de la Santé et des Services ritoriales et des organismes des deux pays. Le sociaux. Deux fois par an, la revue Santé, Société partage d’expériences et l’échange d’innova- et Solidarité propose des numéros thématiques. www.irdes.fr/ofqss tions sont au cœur de cette coopération qui se FFQCD : L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2 OFQJ :