50e anniversaire de la Délégation générale du Québec à Paris

Transcription

50e anniversaire de la Délégation générale du Québec à Paris
50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE
343
50e anniversaire de la Délégation
générale du Québec à Paris
Une « relation audacieuse » ! C’est le slogan choisi par le Québec pour fêter ses cinquante ans de présence officielle en France. En 1961, l’une des premières décisions
de « l’équipe du tonnerre » de Jean Lesage fut d’ouvrir une « Maison du Québec » à
Paris. Elle s’est vite appelée Délégation générale et obtint un statut diplomatique.
Une exception accordée par le général de Gaulle qui pressent la détermination
montante de ceux qu’il appelle encore les « Français du Canada ». Jusqu’à lancer en
1967 le fameux « Vive le Québec libre ! ».
Au nom du « prolongement international des compétences provinciales », dite doctrine
Gérin-Lajoie, le Québec fait de la France un tremplin pour s’affirmer sur la scène
internationale. Cela engendrera quelques bras de fer et plusieurs guerres de drapeaux avec le Canada qui finira par admettre la participation des Québécois à la
table de la Francophonie et maintenant à l’Unesco.
Fondée sur une histoire et une langue partagée ainsi que des valeurs communes, la
relation franco-québécoise n’a cessé de s’élargir et de s’approfondir depuis 50 ans.
La coopération entre les deux pays et les deux sociétés touchent désormais tous les
domaines. Par centaines de milliers, Français et Québécois traversent l’Atlantique
chaque année. La formule diplomatique française, « non-ingérence, non-indifférence »
envers le Québec, est devenue comme la prose de Monsieur Jourdain. Une fois pour
toutes, la France a décidé d’accompagner le Québec dans sa marche en avant et
dans son action internationale.
SOMMAIRE
La fondation de la DGQP, une nouvelle étape par Jacques PORTES . . . . . . . . . . . . . .
Histoire en dates : 50 ans de relations franco-québécoises
Entrevue avec l’actuel Délégué général du Québec à Paris Michel ROBITAILLE . .
Les principaux opérateurs de la relation franco-québécoise
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
Dossier établi par Georges POIRIER
Journaliste, directeur de France-Québec mag, administrateur de l’AFI
Ancien président de l’Association France-Québec.
344
DOSSIER
La fondation de la DGQ à Paris :
une nouvelle étape
Jacques PORTES
Professeur d’histoire de l’Amérique du Nord à l’Université de Paris 8 Vincennes Saint-Denis*
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
Lors de la commémoration du quarantième anniversaire de la fondation de la Délégation générale
du Québec à Paris, en 2001, l’accent avait été mis dans les commentaires sur la profonde rupture
apportée par l’intervention du général de Gaulle, qui avait dû bousculer la mauvaise volonté du Quai
d’Orsay. Toutefois, ce bouleversement avait eu quelques signes avant-coureurs discrets. Mais, après
l’inauguration de la Délégation en 1961, les relations se sont intensifiées jusqu’au voyage de juillet 1967. Les archives du Quai d’Orsay, récemment ouvertes, permettent d’en mesurer l’importance.
Un climat favorable à une intensification
Le premier voyage du général de Gaulle au Canada, en avril 1960, au retour de son parcours aux
Etats-Unis, produit un effet « étrange et décevant ».
L’accueil a été triomphal dans les grandes villes
américaines, mais les « déconcertante simplicité et
apparente froideur de l’accueil canadien » surprennent
et désappointent l’ambassadeur de France à Ottawa,
Francis Lacoste. Cette réserve est mise sur le compte
du climat et de l’austérité du paysage, mais surtout
sur la coexistence des Canadiens-français et des
Canadiens-anglais. Certes il y a eu un peu plus de
monde pour voir passer De Gaulle que pour un autre,
mais cela ne rassure guère.
A la suite des élections provinciales, l’ambassadeur note le renouveau apporté par Jean Lesage :
dès avril 1960, trois des ministres – Tremblay,
Gérin-Lajoie, Lapalme – se réunissent pour étudier
les conditions de création d’une Maison du Québec
à Paris : « Nous aurions manifestement tout intérêt à
les encourager dans ces voies ». Sans doute, Francis
Lacoste conseille-t-il la plus grande prudence en
raison des susceptibilités des Canadiens-français,
mais il existe une marge d’action : « Or, il faut le
reconnaître, jusqu’à présent, nous avons relativement
très peu entrepris, et très peu tenté ici. »
L’ambassade est très attentive au mouvement
nationaliste qui se développe au Québec; il ne s’agit
pourtant pas pour ces diplomates de prendre parti
pour ne pas choquer, même si le RIN crie « Vive la
France », mais d’être toujours prêts tout en restant
prudent : « Nous ne pouvons plus ignorer que son histoire intérieure depuis 1763 n’est plus la nôtre, qu’elle
n’a pas connu nos révolutions et que ses croyances, sa
philosophie, son éthique sont à bien des égards différentes des nôtres. » De plus, l’accueil des immigrants
venus de France n’est pas facile dans une province
du Québec encore totalement canadienne.
La Délégation du Québec à Paris
La question de cette maison du Québec à Paris
redevient d’actualité en janvier 1961. Québec
souhaite « une véritable représentation générale
de la province ». Le 17, l’ambassadeur de France
discute avec le représentant nommé du Québec
à Paris Charles Lussier du statut de cet établissement, car il faut tenir compte des « aspects
fédéraux du sujet »; deux jours plus tard, le Quai
d’Orsay suggère de ne rien faire sans l’accord
du gouvernement fédéral afin de ne pas placer
Ottawa devant le « fait accompli ». Francis Lacoste
rassure les fédéraux, qui sont perplexes car le
statut des « maisons » dans les pays du Commonwealth ne peut s’appliquer à la France. Quant
au ministre français des Affaires étrangères,
Maurice Couve de Murville, il est « soucieux de
maintenir intactes les prérogatives fédérales, mais
aussi soucieux de ménager l’ombrageux amourpropre de la province ». (2 février)
A la suite de ces discussions, l’ambassadeur
évoque la « gaucherie et la rusticité » des Canadiens-français, tout en vantant leur dynamisme,
leur courage et leur enthousiasme parfois agressif. La France aurait tort d’en prendre ombrage.
En attendant des précisions sur son statut,
Charles Lussier devra résider à l’hôtel Scribe
avant l’achat d’un « hôtel particulier ». Le 26 avril
1961, l’ambassadeur canadien Pierre Dupuy
demande à Couve De Murville de reconnaître
le Délégué, qui ne peut figurer pour autant dans
les cadres diplomatiques du Canada… Il annonce
la nomination de Charles Lussier. Ce dernier ne
dispose alors d’aucune immunité.
Ces incertitudes ne sont pas liées à une frilosité
quelconque du Quai d’Orsay, mais à l’originalité de
la Délégation du Québec. A l’époque, surtout en
France, seuls les Etats reconnus pouvaient prétendre
à un statut diplomatique; il est compréhensible qu’il
ait fallu plus de dix ans pour qu’une solution informelle soit imaginée. Quelques mois plus tard, JeanMarc Léger parle de l’équivoque de la Délégation :
« qui tient au caractère ambigu du Québec, demi-Etat
dans une confédération incohérente et qui sans être
strictement privée n’est pas vraiment officielle. »
L’approche de l’inauguration relance les
échanges entre l’ambassadeur et le Quai : le
*Ses recherches portent sur la culture de masse et la démocratie américaines au XXe siècle ainsi que sur les
relations politiques et culturelles entre la France et le Québec.
18 mai, le premier indique que
le Premier ministre québécois
Jean Lesage veut une cérémonie à
grand spectacle, puisqu’il compte
acheminer à Paris 140 personnes,
des milieux politique et culturel,
soit un Boeing 707 d’Air France au
complet, dont les dépenses seront
prises en charge en totalité par le
gouvernement français. Une fois
encore, Francis Lacoste souligne
les « naïveté, timidité et en même
temps hardiesse » de ces demandes
québécoises, mais conseille de les
accueillir très favorablement.
Finalement le voyage de Jean
Lesage, qu’il a commencé à Londres,
se déroule parfaitement avec
réception fastueuse à l’Elysée.
L’entente est complète entre la
délégation et l’ambassade du
Canada : chacune offre une réception, Malraux est présent, Couve Ancienne DGQP rue Barbet de Jouy
de Murville a accueilli Lesage, qui
a été reçu en audience par de Gaulle.
Quelques semaines plus tard, le nouvel ambassadeur, arrivé en mai 1962, évoque, dans une
correspondance avec le Quai la situation au CaPremier bilan
Les lendemains de cet événement fondateur nada. Il s’intéresse tout particulièrement à ce qui
sont marqués par une réelle intensification des
se passe au Québec, en raison des perspectives
relations entre la France et le Québec. Le 6 sep- intéressantes : « Désir de coopération accrue avec
tembre 1962, le message de Raymond de Boyer l’Europe et surtout avec la France …possibilités …
de Sainte-Suzanne, consul général de Montréal, de renforcer notre influence au Canada français,
qui quitte ce poste est très clair, il note la né- notamment avec des investissements économiques
vrose d’abandon des Canadiens français : « Une
et des échanges universitaires et culturels ».
grande tâche nous attend ici. Je ne crois pas beauRaymond Bousquet mentionne que le voyage
coup à l’élaboration de plans à longue échéance. Je
de 1960 du président a éveillé le « fait français »
crois à l’état de disponibilité qui nous fera trouver en Amérique qui a été relayé par la déterminaau fur et à mesure ce qu’il faut faire. La sympathie et
tion du gouvernement Lesage. La France a nécesl’amitié sont exigeantes. Montréal comme Québec sairement un grand rôle à jouer : « La première
n’est pas un consulat comme les autres. »
remarque doit être, non d’action, mais de précauLe départ de Francis Lacoste et son rempla- tion : avant tout éviter d’éveiller l’ombrageuse susceptibilité des Canadiens français, il ne faut rien
cement par Raymond Bousquet à l’ambassade
d’Ottawa permettent aux deux hommes de don- entreprendre qui n’ait été demandé; l’art est de se
ner leur opinion sur leur pays de résidence. Le
faire demander, sans trop donner l’impression que
premier transmet au ministre des Affaires étran- l’on a pris l’initiative de proposer. Les Canadiens
gères son rapport de fin de mission : novembre
français sont vivement conscients de leur besoin de
1955-avril 1962. Ce document insiste sur la
la France, mais ils préfèrent en parler les premiers…
richesse du pays, son immensité, le reconnaît
ils le font. Il suffit de les attendre, en leur faisant
sentir qu’on est prêt à les écouter, et à les aider. »
comme le leader des puissances moyennes, avec
parfois de l’agressivité : « Pétri de contrastes, de
Le Quai se montre un peu moins enthousiaste;
contradictions, de conflits intérieurs », accusé par il considère que le fait français est un élément de
les Américains et les Anglais d’être incertain de
la plus haute valeur, mais « sur le plan politique
lui-même et n’être pas parvenu à se définir par proprement dit il serait cependant imprudent de
rapport à ses alliés. Pourtant le Canada aurait
trop y compter. Le Canadien français ne raisontrouvé sa voie : exploiter tout son territoire et
nera guère différemment du Canadien anglais en ce
ses ressources. Vœux communs partagés même
qui concerne les grands problèmes de la politique
mondiale. »
par les Canadiens-français du Québec : « Le
«nationalisme» actuel de ces derniers, si facilement explicable par des considérations de race, de
Des perspectives nouvelles : 1963-1968
langue, de religion et d’histoire, ne prend toute
L’ère nouvelle des relations entre la France et le
sa signification que par rapport à l’exclusivisme
Québec est soulignée par la réception de Jean
intransigeant renforcé chez les Canadiens par leur Lesage presque comme un chef d’Etat (28 juin
sentiment d’infériorité par rapport à leur voisin ». 1962). Elle est relancée dès l’automne 1963, lors
345
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
346
DOSSIER
de la venue d’André Malraux au Québec et au Canada. Ce voyage, auquel le président accorde une
grande importance, a lieu alors que se déroule
l’exposition économique française à Montréal.
Le ministre partage son temps entre Ottawa,
Montréal et Québec (deux jours dans chacune
des villes); les ministres québécois Lesage et
Lapalme sont reçus à l’ambassade. L’ambassadeur souligne la signification politique du voyage
de Malraux, car « la France aurait d’ailleurs actuellement les coudées plus franches au Canada parce
qu’elle est moins étroitement liée qu’autrefois à la
Grande-Bretagne ». Pris par l’enthousiasme, face
à la foule de Montréal, André Malraux développe
sa vision : « Il n’y a pas un lieu au monde où l’énergie française se montre comme elle se montre ici…la
prochaine civilisation, nous la ferons ensemble. »
Il ne s’agit pas ici de s’étendre sur le « Vive le
Québec libre ! » du 24 juillet 1967, mais de fournir
quelques éléments complémentaires et méconnus sur sa genèse et sur ses suites immédiates.
L’invitation est lancée par le Premier ministre
québécois Daniel Johnson le 13 septembre 1966,
le voyage s’effectuera dans le cadre de l’Expo.
Dans les mois qui suivent, jusqu’au printemps
de 1967, la préparation du voyage se fait par
de multiples notes très bien informées sur le
Québec, sa population, son évolution : elles ne
contiennent plus rien d’archaïque. Tout était
prévu dans le détail avec notices sur chaque
ville et sur tous les personnages rencontrés du
premier au dernier jour prévu. Les vins et champagnes qui seront servis lors des réceptions
françaises sont acheminés par la valise diplomatique. Les discours sont tous rédigés, sauf
celui du « Vive le Québec libre », dont ceux qui
étaient prévus à Ottawa, ceux-là insistant sur la
guerre et l’amitié entre les deux peuples alors
que les précédents se basaient sur l’histoire :
rameau commun, retrouvailles, modernisme du
Québec. Un intérêt particulier est signalé pour la
francophonie, « M. Trudeau a essayé de noyer ce
problème ». Il faut aller de l’avant, en adoptant
une attitude souple et pragmatique, par exemple
une association privée à laquelle se joindraient
plus tard les gouvernements.
Déjà en 1967, les diplomates se félicitent de
la coopération culturelle qui est efficace alors
que les relations économiques se traînent. Une
entente avec le Québec sera signée pour que
des œuvres françaises soient exposées dans les
centres culturels au Québec et les réalisations
techniques du Québec le seront à Paris.
Le 22 juillet 1967, l’ambassadeur indique
que Londres s’inquiète de la visite prévue, et
des intentions de la France, qui favoriserait les
indépendantistes ou même chercherait à séparer le Canada des Etats-Unis (Times de Londres).
Les coupures de la presse canadienne sont très
alarmistes : la France aiderait le séparatisme.
Ce voyage de 1967 est centré sur le Québec, le
général répond à l’invitation de Daniel Johnson.
Le passage à Ottawa n’était prévu que pour être
symbolique, de Gaulle n’est pas l’un des chefs
d’Etat qui visitent l’Expo : il a un programme type
pour lui « en fonction de son caractère propre ».
La mise au point du trajet se fait peu à peu, et
Ottawa accepte qu’il commence par Québec. Le
maire Jean Drapeau se félicite du projet d’arrivée à Montréal en voiture. Les Français pensent
le plus grand bien de Claude Morin, capable et
intelligent, comme de Marcel Masse, tous deux
décidés à aller de l’avant et à la « francophilie…
profonde et sincère ».
Une fois le « Vive le Québec libre » prononcé,
tout le programme est bousculé et le général
rentre à Paris, devoir accompli.
Dès son retour en France, un premier bilan de
la coopération est effectué, avec énumération
des actions diverses et crédits affectés : professeurs, coopérants, bourses, matériel culturel,
investissement au collège Marie-de-France. Un
rappel rapide des investissements apparaît : métro de Montréal, Renault et Peugeot même si un
déficit d’exploitation subsiste. L’idée est lancée
d’un «emprunt Québec» sur le marché français.
Québec participerait aux travaux du VI° plan.
Un travail est entrepris sur les équivalences
de diplômes, sur des livres scolaires communs;
un institut de la culture et de la technique du
Québec à Paris est mis en projet.
« Il est à souligner que le Québec étant pratiquement le seul pays entièrement francophone hors
de France à n’être pas sous-développé, on peut
effectivement dans la plupart des cas parler non
d’assistance mais de coopération technique sur
un pied d’égalité. Par exemple, l’EDF a apporté à
Hydro-Québec des connaissances sur la production
d’électricité par l’énergie atomique, mais HydroQuébec peut nous apporter sur les problèmes des
hautes tensions des connaissances techniques qui
sont les meilleures au monde. »
Pour confirmer tous ces accords, proposition
est faite du rachat du pavillon français de l’expo
pour le conserver comme vitrine de la France. Et,
dès septembre 1967, l’exemple de l’Office francoallemand pour la jeunesse est envisagé comme
modèle pour le Québec. Le Quai d’Orsay veille
à avertir le gouvernement fédéral des visites de
Français qui ne s’arrêtent pas toujours à Ottawa,
mais se sert de certains avis canadiens sur la
liberté des Québécois dans les domaines de coopération prévus par les accords officiels. Il fait
mener des études sur les fédéralismes, pour voir
comment la France peut accentuer ses relations
avec le Québec sans rompre avec le Canada. Un
projet d’instructions est transmis à Pierre de
Menthon pour autonomiser le consulat général
de France à Québec par rapport à l’ambassade en
distinguant les deux niveaux de compétence.
Au conseil des ministres du 27 novembre 1967,
le général de Gaulle indique qu’il n’avait aucune
envie d’aller à Ottawa, que la chaleur des Québécois l’a impressionné, que ces « Français du
Canada » devaient être reliés à la France qui les
avait totalement abandonnés. « Après tout, c’est
50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE
la France qui a peuplé le Canada, qui en a forgé
l’âme et l’esprit. Ou bien, la France n’est rien, ou
bien elle est quelque chose, elle ne pouvait pas se
désintéresser du Canada français. La France tire
les conséquences de tout cela. Les choses ne sont
pas réglées. Elles commencent seulement. » D’ailleurs en janvier 1968, le projet d’une visite du
général au Québec dans l’année est étudié, mais
il n’aboutit pas.
Les relations avec Ottawa se tendent rapidement : le ministre des Affaires extérieures du
Canada, Jean Marchand, s’en est pris au voyage
de Johnson à Paris, créant un véritable incident
en lançant une diatribe contre les prétentions
internationales du Québec. L’ambassadeur de
France envoie des notes sur la vie politique
québécoise : Pierre-Elliot Trudeau est un déterminé centralisateur, mais ouvert aux autres
francophones du pays, Jean-Jacques Bertrand
est timoré, c’est un ami de Trudeau, élu par des
anglais, heureusement qu’il y a des opposants
plus vaillants comme Marcel Masse et Jean-Guy
Cardinal. Il estime que les Québécois se rendront
compte que rien n’est à attendre du fédéral :
« L’opinion finira par s’en convaincre et l’opposition,
qu’il s’agisse de celle que représente le groupe de
M. Cardinal, du parti libéral ou du parti Québécois de M. René Levesque, finira par l’emporter et
replacer le Québec dans le courant qui l’entraîne
irréversiblement vers un nouveau destin, dans une
étroite entente avec notre pays. »
347
Le 28 mars 1969, Bernard Tricot, secrétaire
général de la présidence, répond à Michel
Debré, Ministre des affaires étrangères, qui
s’étonnait que Gérard Pelletier, venu inaugurer
une exposition d’art Inuit, n’ait pas été reçu
par le général : « Vous savez combien le général
de Gaulle est réservé à l’égard du gouvernement
fédéral canadien et en particulier envers ceux de
ses membres qui sont d’origine française et dont
il pense qu’ils ne sont pas sincèrement fidèles à
leurs origines ».
En septembre 1968, éclate l’affaire Rossillon :
Trudeau accuse un réseau Rossillon, formés de
coopérants et de diplomates, qui serait lié à
des agents soviétiques. Le consulat de Québec explique que Philippe Rossillon n’a parlé
que de langue française au Manitoba, qu’il était
accompagné par un agent du gouvernement fédéral. Et, de son côté, Jurgensen indique que la
France n’a aucune intention de créer un centre
culturel français à Winnipeg. pour les Français,
il s’agit d’une affaire montée de toutes pièces
par Ottawa : « En cette affaire, comme en tout ce
qui touche les relations entre le Canada et notre
pays, on constate encore une fois, l’inconciliable
différence d’opinion entre Canadiens français et
anglophones. »
La France a bien choisi son camp et elle va s’y
tenir pour une longue période.
HISTOIRE EN DATES 1961
Inauguration (le 5 octobre) de la Maison
du Québec à Paris qui deviendra, trois
ans plus tard, la Délégation générale du Québec à
Paris, avec statut diplomatique. Rencontre entre
le général de Gaulle et le Premier ministre du
Québec Jean Lesage.
1962
1964
tional des compétences provinciales. Création
de la Commission permanente de coopération
franco-québécoise.
1966
Prix Médicis à Marie-Claire Blais pour
« Une saison dans la vie d’Emmanuel ».
Premier jumelage de villes, créé entre
Bordeaux et Québec.
Première entente de coopération technique entre le ministère de la Jeunesse
du Québec et l’Association pour l’organisation
des stages en France.
1965
Signature entre les ministres de
l’Education de France et du Québec,
Christian Fouchet et Paul Gérin-Lajoie, d’un programme d‘échanges et de coopération, première
entente internationale du Québec au nom de la
doctrine Gérin-Lajoie du prolongement interna-
(photo Jules Rochon, Archives nationales du Québec)
1967
Visite en France du Premier ministre
québécois Daniel Johnson et voyage
au Québec du général de Gaulle, à l’occasion
d’Expo 67. « Vive le Québec libre ! » lancera-t-il.
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
50 ans de relations franco-québécoises
348
DOSSIER
Triomphe de Félix Leclerc à Bobino et spectacle
« Vive le Québec ! » à l’Olympia avec Gilles
Vigneault, Pauline Julien, etc. Signature des
accords Peyrefitte-Johnson étendant la coopération culturelle et éducative.
1968
Création de l’Association France-Québec
et de l’Office franco-québécois pour la
jeunesse (OFQJ). Le Québec est invité, grâce
à la France, à la Conférence des ministres de
l’Education francophones au Gabon, au grand
dam d’Ottawa.
1970
Le Québec obtient, avec l’appui de la
France, le statut de gouvernement participant à l’Agence de coopération culturelle et
technique (ACCT) qui deviendra plus tard l’Organisation internationale de la Francophonie,
l’actuelle OIF.
(photo Jules Rochon, Archives nationales du Québec)
1980
Inauguration à Paris de la place du Québec
par le Premier ministre René Lévesque
et le maire Jacques Chirac. Création du Centre
de promotion des coopérations technologiques
et industrielles (la section française fermera en
1987 et la section québécoise en 1989).
Création du programme d’échanges de
jeunes « inter municipalités ».
1973
1981
1982
1974
1984
Création du Centre de coopération
interuniversitaire franco-québécois
La pièce Les Belles sœurs de Michel Tremblay considérée meilleure production
étrangère de la saison théâtrale à Paris.
Création du groupe franco-québécois de
coopération économique lors de la visite
à Paris du Premier ministre Robert Bourassa à
Paris qui signe avec Jacques Chirac une nouvelle
charte de la coopération franco-québécoise.
Le Premier ministre Pierre Mauroy au
Québec : « Il n’y aura pas de second abandon ». Anne Hébert prix Fémina pour « Les Fous
de Bassan ».
(CCIFQ).
(photo fonds DGQP)
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
1986
Premier Sommet de la Francophonie
(François Mitterrand en refusait la
tenue tant que le Canada n’acceptait pas la
participation du Québec). Le film Le Déclin de
l’empire américain de Denys Arcand dépasse le
million d’entrées en France.
1987
Visite du président Mitterrand qui commence son séjour à Gaspé, là où débarqua Jacques Cartier en 1534 : « Je prononce le mot
Québec avec amour, respect et espoir ». Création
des Entretiens Jacques-Cartier à Lyon.
(photo fonds DGQP)
1977
1990
1979
1993
René Lévesque et Raymond Barre décident
d’instaurer des rencontres alternées
entre les deux Premiers ministres. A Cannes, prix
d’interprétation féminine à Monique Mercure
dans J.A. Martin, photographe.
Début du succès de l’opéra-rock francophone Starmania créé par le Français
Michel Berger et le Québécois Luc Plamondon.
Laurent Fabius premier président de
l’Assemblée nationale en visite officielle au Québec pour les dix ans de la coopération parlementaire.
Sous le titre « Des Québécois parlent aux
Français », le quotidien montréalais Le
Devoir publie le manifeste de 101 personnalités
québécoises sur l’avenir de la langue française…
en France.
50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE
1994
Signature du premier plan d’action
entre le Québec et une région française,
Rhône-Alpes. Création du Comité d’action politique France-Québec (CAPFQ) par les jeunes des
partis politiques des deux pays.
1995
Le Premier ministre Jacques Parizeau,
en visite en janvier à Paris, reçoit des
assurances de tous milieux en cas de référendum positif sur la souveraineté. Ouverture de
la Librairie du Québec à Paris.
1996
Alain Juppé au Québec (il n’y avait pas
eu de visite de Premier ministre français
depuis neuf ans). Création d’un Réseau franco-québécois pour le développement des PME. Création
de la Commission franco-québécoise des lieux de
mémoires communs. Convention entre les instances
universitaires pour des thèses en co-tutelle.
349
2004
Première mission commerciale conjointe
des Premiers ministres Raffarin et Charest
dans un pays tiers, en l’occurrence le Mexique.
2005
Création du Fonds franco-québécois
de coopération décentralisée. Création
des Trophées culinaires France-Québec.
2006
La SNCF choisit Bombardier pour lui
fournir 372 trains de banlieue (contrat
de 2,7 milliards d’euros).
2007
Lancement de la collection de livres
« Ces villes et villages de France, berceau
de l’Amérique française ».
1997
Lancement du premier festival Cinéma
du Québec à Paris, toujours organisé
chaque année.
1998
1999
Organisation du « Printemps du Québec
en France » dans une soixantaine de
villes, la plus grande manifestation culturelle
québécoise jamais organisée à l’étranger. Fusion
Alcan-Pechiney.
2000
Lionel Jospin et Lucien Bouchard
signent deux « déclarations communes »
sur les enjeux technologiques et la diversité
culturelle. Lancement du Club économique
France-Québec. Le groupe d’amitié France-Québec de l’Assemblée nationale française « réaffirme son attachement au droit à l’autodétermination
du Québec » après la loi C20 au Canada.
2001
Premiers ateliers franco-québécois de
la coopération décentralisée entre collectivités territoriales. Lancement des premières
Rencontres Champlain-Montaigne, biennales
entre Québec et Bordeaux.
2002
2003
(photo Assemblée nationale du Québec)
2008
Nombreuses célébrations en France
autour du 400e anniversaire de la fondation de Québec par Champlain. A Québec, François Fillon déclare : « Il y a en chaque Français un
rêve québécois ». Création du Conseil franco-québécois de coopération universitaire (CFQCU qui
succède au CCIFQ). Visite du président Sarkozy
qui signe à Québec avec le Premier ministre Jean
Charest une entente-cadre sur la reconnaissance
des qualifications professionnelles (depuis, professions et métiers concluent des ARM : arrangements de reconnaissance mutuelle).
2009
Création du Club des dirigeants d’entreprises franco-québécois. Colloque
à Québec pour les 150 ans du Consulat général
de France. Mise en place d’un Groupe de travail
franco-québécois sur les flux migratoires et
l’intégration des migrants. Prix Médicis à Dany
Laferrière pour « L’Enigme du retour ». Wajdi
Mouawad, Grand Prix du théâtre de l’Académie
française. Marc-André Grondin César du meilleur
espoir masculin.
Création de l’Observatoire franco-québécois de la santé et de la solidarité.
2010
Jean-Pierre Raffarin et Jean Charest
scellent « une nouvelle alliance francoquébécoise ». A Cannes, prix d’interprétation
féminine pour Marie-Josée Croze dans Les Invasions barbares de Denys Arcand qui obtient le
prix du scénario.
2011
Vingt-six accords signés au Symposium
franco-québécois des pôles de compétitivité et des créneaux d’excellence québécois à
Paris. Numéro (spécial) 150 de France-Québec mag.
Denis Marleau premier metteur en scène
québécois invité par la Comédie Française
pour créer Agamemnon dans la salle Richelieu.
Lancement du Fonds franco-québécois de coopération décentralisée pour la reconstruction d’Haïti.
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
Dans le cadre de leur « partenariat stratégique », Lucien Bouchard et Lionel
Jospin créent un groupe franco-québécois sur la
diversité culturelle. La Commission permanente
de coopération franco-québécoise devient biennale. Création du prix littéraire de l’Association
France-Québec.
350
DOSSIER
MICHEL ROBITAILLE :
« Tous les jours en France, il y a des
activités québécoises »
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
— Vous étiez très jeune lorsque la DGQP fut
créée en 1961. Quels sentiments éprouvez-vous
aujourd’hui dans ce poste ?
Un sentiment de fierté, c’est certain. Ayant fait
toute ma carrière dans les relations internationales, c’est une reconnaissance qui me touche.
La relation franco-québécoise est une référence
incontournable, un signe d’excellence. L’inauguration, en 1961, de la « Maison du Québec » à
Paris est le réel point de départ de la personnalité
internationale du Québec. Cela coïncide avec
la Révolution tranquille. Jean Lesage en parlait
dans sa campagne, et cette présence officielle en
France vient concrétiser cette notion-là. Ensuite,
ce fut en 1965 la première entente internationale, en matière
d’éducation, une autre façon
d’affirmer cette volonté d’être
actif à l’extérieur des frontières
du Québec. La nécessité pour le
Québec d’œuvrer sur la scène
internationale n’a jamais été
démentie depuis. Cette présence rend service à toute la
société québécoise, des gens
d’affaires aux milieux culturels.
Cette pertinence n’a jamais été
remise en question par aucun
parti politique.
outil important pour le partage d’expertise et
le mentorat : cette solidarité-là est très intéressante. Le volet économique, désormais bien
ancré, s’intègre à merveille à l’ensemble de la
coopération. De plus, les liens universités/entreprises via la coopération décentralisée sont
stimulants et très productifs.
La relation franco-québécoise a bien progressé et a su s’adapter à l’évolution des deux sociétés. Ce n’est pas une coopération nostalgique
mais une coopération vivante orientée vers le
futur. Le volume d’actions est phénoménal. Tous
les jours en France, il y a des activités québécoises dont plusieurs touchent naturellement la
culture, un volet toujours important de cette relation.
— Longtemps, la Délégation a
dû batailler pour défendre les
compétences internationales
du Québec, notamment face à
l’Ambassade du Canada. Qu’en
est-il aujourd’hui ?
Je n’ai pas eu, en un an, à gérer
ce genre de situation. La relation franco-québécoise a atteint
une maturité. C’est devenu une
évidence. J’ai d’excellentes
relations avec l’ambassadeur
du Canada, Marc Lortie, et ses
adjoints. Il y a même une saine
complicité pour la réalisation de
certains projets qui dépassent la
relation bilatérale. Celle-ci est
reconnue et fait maintenant partie de la normalité des choses.
Délégué général du Québec à Paris
— Qu’est-ce qui vous a surpris en
depuis octobre 2010, Michel Robitaille
arrivant en 2010 ?
est un vrai francophone. Québécois,
J’avais déjà touché à la relation il a rencontré son épouse d’origine
franco-québécoise, notamment belge, Marie-Dominique Decnicnk, en
en dirigeant l’Association Québec- Louisiane où ils étaient tous deux cooFrance à la fin des années 80. pérants pédagogiques. Ils ont eu deux
Puis, affecté aux Etats-Unis, je enfants dont une fille, qui a épousé cet
été un jeune Français.
n’avais pas suivi de près son
— Par centaines de milliers,
évolution. A mon arrivée à Paris en octobre 2010, Français et Québécois traversent chaque
année l’Atlantique. La relation n’est-elle pas
j’ai d’abord remarqué l’importance prise par la
banalisée ?
coopération décentralisée qui nous permet une
action plus marquée dans les régions de France. Je ne crois pas. Je suis conscient qu’avec la monNous y étions déjà bien présents grâce à l’Asso- dialisation nous ne sommes plus à l’époque des
ciation France-Québec. Par les ententes avec six
années 60-70 quand le voyage en France, pour un
Conseils Régionaux, la présence québécoise s’est
Québécois, était la première destination. Maintenant, un jeune ira peut-être en Indonésie ou
enrichie et diversifiée. Dès le premier mois à
cette nouvelle fonction, j’ai collaboré au nou- en Amérique du Sud avant de venir en France.
veau plan d’action avec l’Alsace dans le cadre
L’offre est plus grande mais l’attrait de la France
demeure. Aux gouvernements et aux milieux asdu 10e anniversaire de notre entente; nous allons
renouveler prochainement ceux avec l’Ile-de- sociatifs de s’assurer que l’image projetée soit
moderne et fasse toujours rêver. Il faut mettre
France et Rhône-Alpes.
J’ai aussi noté que la coopération économique
en place les outils nécessaires. Exemple : l’OFQJ
avait évolué, avec quelque 150 entreprises qué- propose de vivre des expériences professionbécoises en France et la création du Cercle des
nelles pour bonifier les cv. Comme l’expérience
internationale peut être un plus qui va faire la
dirigeants d’entreprises franco-québécois, un
50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE
dans des contextes différents. Il faut voir comment profiter des approches de chacun pour
remédier à ces problèmes.
— Le Délégué général du Québec à Paris est
aussi le sherpa du Premier ministre québécois
pour la Francophonie. Vous la connaissez bien.
Quels sont vos axes de travail ?
Je suis très heureux d’occuper
cette fonction et je remercie le Premier ministre de sa
confiance. La Francophonie
a toujours été près de mes
préoccupations. Très tôt, au
début des années 70, comme
professeur de français en Louisiane avec de nombreux autres
Québécois, j’ai eu le bonheur
de travailler à la promotion de
la langue française auprès des
Cadiens et Créoles aux côtés
de coopérants français, belges,
suisses et acadiens. Au Centre
— Y a-t-il des domaines que la
coopération franco-québécoise
de la Francophonie des Amén’a pas encore explorés ?
riques, que j’ai dirigé avant de
Certainement. Par exemple, la DGQP rue Pergoläse
venir à Paris, j’ai ressenti une
coopération dans le domaine
grande dynamique pour affirmer la présence du français sur cet immense
de la recherche existe depuis longtemps mais
on ne la fait plus de la même façon. De même, territoire. En plus des nombreuses communaula prospérité économique dans un contexte de
tés francophones au Manitoba, en Acadie, en
développement durable prend de plus en plus
Ontario, en Nouvelle-Angleterre, en Louisiane,
de place dans la relation franco-québécoise. en Haïti, aux Antilles..., ils sont quelque millions
Le Plan Nord, dévoilé récemment par le Pre- qui ont appris le français comme langue seconde
mier ministre Charest, en est un exemple. Un
et qui sont parfois plus militants que certains
plan ambitieux qui s’échelonnera sur 25 ans, francophones.
en collaboration avec les Premières nations
Les Sommets de la Francophonie, depuis
2008, ont donné une importance accrue à la
et les Inuits. J’ai eu une agréable surprise lors
langue française. Les pactes
de la mission en France du
ministre du Développement
linguistiques, initiés par le Seéconomique du Québec, Clécrétaire général de l’OIF, c’est
ment Gignac: son homologue
extraordinaire. A Montreux,
français, Eric Besson, nous a
Abdou Diouf est allé plus loin
annoncé qu’il était chargé du
en proposant la tenue d’un
premier Forum mondial de la
dossier Plan Nord par le Premier ministre Fillon; un mandat
langue française qui va sortir
Logo 50 ans DGQP
spécifique qui, à ma connaisdes sentiers battus. Début juilsance, n’existe nulle part ailleurs. Le CNRS a
let 2012 à Québec, la parole sera donnée à celles
six chercheurs à l’Université Laval au sein de
et ceux qui n’ont pas la chance de s’exprimer lors
la Chaire sur les études nordiques. Le Plan Nord
des Sommets. Des jeunes de la société civile,
prend une importance majeure.
provenant de partout sur la planète, vont parler de la place de la langue française dans leur
milieu et nous dire comment ils voient l’avenir de
— Quels combats prioritaires à mener ensemble,
cette langue commune. Ce sera l’occasion de se
aujourd’hui, par le Québec et par la France ?
Ils sont nombreux car nous faisons face à plu- pencher sur l’utilisation des nouvelles technolosieurs défis communs. Pour en parler et initier gies pour le rayonnement de la langue française.
des partenariats, nous avons mis sur pied des
C’est aussi remarquable de voir l’OIF interveséries de regards croisés, avec des experts qué- nir, de plus en plus, pour accompagner les pays
bécois et français, sur des sujets aussi variés
en situation de crise et se préoccuper du respect
que le décrochage scolaire, l’insertion sociale, de la démocratie chez tous ses membres.
l’obésité, la maladie d’Alzheimer, la sécurité, la Tout cela me rend très optimiste pour la Francophonie et son évolution.
criminalité financière, la dépendance chez les
personnes âgées, les nouvelles énergies… Nos
deux sociétés vivent des situations similaires
Entretien conduit par Georges Poirier
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
différence, pourquoi ne pas la vivre en France
ou au Québec où nous sommes entre amis et en
terrain familier ?
Les gouvernements ont aussi modifié certaines règles pour faciliter la mobilité. Le dossier
phare de ces deux dernières années, les ARM (arrangements de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles),
permet cette plus grande
mobilité. C’est la première fois
qu’existe une telle initiative intercontinentale. Cela démontre,
là encore, la maturité de la relation franco-québécoise. Il y a
aussi le programme vacancestravail. Et, quand des milliers
de jeunes Français vont étudier
au Québec chaque année, c’est
une preuve additionnelle de
réussite. On a fait énormément
de chemin en 50 ans.
351
352
DOSSIER
Les principaux opérateurs de la relation
franco-québécoise
AFQ/AQF :
les associations France-Québec (créée en 1968) et Québec-France (créée en
1971) forment un « réseau unique » qui s’appuie
sur plus de 80 groupes en régions et plus de
6.000 membres actuellement. En juin 2011, le
17e congrès commun a réuni plus de 500 participants à Bergerac autour du thème « Les citoyens,
acteurs de la coopération franco-québécoise ».
Le réseau organise des échanges (notamment
France et les dirigeants d’entreprises françaises
qui évoluent sur les marchés québécois. Son
mode de fonctionnement est basé sur l’entraide
et la mise en commun de réseaux, avec l’appui
privilégié de la Délégation générale du Québec
à Paris. La contribution de ses membres s’établit
autour d’un principe fondamental: « Apporter pour
recevoir ». www.cdefq.org
GFQCE :
les questions économiques et
commerciales sont évoquées lors des réunions
annuelles du Groupe franco-québécois de coopération économique, constitué en 1974. Cette
coopération a pour principaux instruments les
rencontres industrielles « Ubifrance-Québec »
et, depuis 2008, des rencontres entre pôles
de compétitivité. Le deuxième symposium des
pôles de compétitivité français et des créneaux
d’excellence québécois s’est tenu en France en
novembre 2010 (thèmes : aéronautique, environnement, textiles techniques et « nutraceutique »).
Les deux co-présidents de la 63e session de la Commission
permanente de coopération franco-québécoise, en mars 2011
à Québec, Elisabeth Beton-Delègue, directrice des Amériques
au quai d’Orsay, et Marc Croteau sous-ministre du ministère
des Relations internationales du Québec.
(photo François Nadeau)
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
« inter municipalités »), un prix littéraire avec vote
des lecteurs, des dictées francophones (plus de
13 000 participants en 2011 en France), des tournées culturelles et sur les enjeux de société, etc.
France-Québec publie aussi la revue trimestrielle
France-Québec mag, la seule à rendre compte des
relations franco-québécoises. www.francequebec.fr
et www.quebecfrance.qc.ca
CAPFQ :
en 1994, les sections jeunesse des
formations politiques françaises et québécoises,
représentées dans les deux Assemblées nationales, ont fondé le Comité d’action politique
franco-québécois pour participer à l’affermissement des relations privilégiées entre la France
et le Québec. Un programme de stages au sein
des cabinets ministériels et des institutions politiques permet à de nombreux jeunes militants
de réaliser une expérience enrichissante tant au
plan personnel, académique que professionnel.
www.cap-fq.org
CDEFQ :
lancé en 2009, le Club récemment
devenu Cercle des dirigeants d’entreprises francoquébécois se veut un lieu privilégié de rencontres
pour les dirigeants d’entreprises québécoises en
CFQCU :
créé en 2008 pour succéder au
CCIFQ, le Conseil franco-québécois de coopération universitaire (CFQCU) est une structure
souple de coordination, développée en concertation étroite avec les universités françaises
et québécoises, afin de les soutenir dans leurs
partenariats. Le CFQCU dispose de deux programmes pour soutenir la mobilité professorale
et l’élaboration de partenariats stratégiques
en matière d’enseignement supérieur et de
recherche, en lien avec les réseaux nord-américains et européens. La présidence est assurée
conjointement par un représentant de la CREPUQ
(Conférence des Recteurs et des Principaux des
Universités du Québec) et un représentant de la
CPU (Conférence des Présidents d’Universités
en France). www.cfqcu.org.
CFQLMC :
fondée en 1996, la Commission
franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs vise à mettre en valeur les lieux de mémoire
qui témoignent d’une histoire commune et d’une
culture partagée. Son action se fonde sur deux
pôles complémentaires: l’inventaire et la connaissance de ces lieux de mémoire d’une part, et leur
mise en valeur et leur partage par le plus large
public d’autre part. La Commission publie un bulletin électronique, Mémoires vives. www.cfqlmc.org
CPCFQ :
la Commission permanente de coopération franco-québécoise a vu le jour en 1965
50 ANS DE QUEBEC EN FR ANCE
353
densifie. Elle s’appuie sur la réflexion
des Assises franco-québécoises de
la coopération décentralisée qui réunissent élus territoriaux, techniciens
et partenaires (2001 à Québec, 2003
à Bordeaux, 2008 à Québec, 2011 à
Lyon, 2013 dans le Bas-Saint-Laurent).
www.4assisesfrancoquebecoises.com
GTFQDDE :
mis en place en 2009
par les ministères concernés, le Groupe
Signature d’une convention de partenariat, en décembre 2010, entre
de travail franco-québécois sur le dével’Association France-Québec présidée par Marie-Agnès Castillon et l’Office
loppement durable et l’environnement
franco-québécois pour la jeunesse représenté par son secrétaire général
explore de nouveaux thèmes de coopéFrance Frédéric Lefret, en présence du Délégué général du Québec Michel
ration
potentiels et s’intéresse aux enRobitaille. (photo Jean-Philippe Tremblay)
jeux communs à promouvoir sur la scène
internationale, notamment les projets
pour assurer le suivi de l’entente sur l’éducation. liés à l’énergie, aux transports intelligents et
Depuis, composée de hauts-fonctionnaires des
aux véhicules décarbonés.
deux pays, elle est le principal instrument de
coordination des activités de coopération entre
les deux gouvernements et leurs partenaires. Elle
lancé en 1968 par les deux gous’appuie sur le « relevé de décisions » signé par vernements, au service des 18-35 ans, l’Office
les Premiers ministres lors de leurs rencontres
franco-québécois pour la jeunesse participe au
alternées. Au début, la Commission tenait deux
rapprochement des jeunesses française et quésessions par an, une en France, l’autre au Québec. bécoise par des programmes de mobilité axés
Elle est passée ensuite à un rythme annuel puis, sur le développement et le perfectionnement
depuis 1998, à des sessions biennales. La 63e
professionnels, dans les secteurs économique,
session s’est tenue en mars 2011 à Québec. Une
culturel et social, tout en favorisant les découcentaine de projets sont généralement retenus
vertes interculturelles et le maillage des réseaux.
et co-soutenus financièrement.
Avec deux équipes, à Paris et à Montréal, l’OFQJ
conseille et soutient chaque année près
de 10 000 jeunes dans leur projet de
mobilité professionnelle outre-Atlantique
(stage, emploi temporaire, participation à
un événement, mission commerciale, délégation thématique, etc.). www.ofqj.org
OFQSS :
créé en 2002, l’Observatoire franco-québécois de la santé et de
la solidarité a pour mission de diffuser et
valoriser la réflexion française et québécoise menée sur des thèmes d’actualité
partagés dans le domaine sanitaire et
Les quatrièmes Assises de la coopération décentralisée franco-québécoise
social. Son rôle est aussi d’optimiser les
se sont tenues à Lyon en janvier 2011. (Photo Georges Poirier)
moyens engagés dans la coopération en
vue de constituer un pôle francophone
le Fonds franco-québécois pour auquel d’autres pays pourraient se joindre
ultérieurement. Les coordonnateurs sont, en
la coopération décentralisée, créé en 2005 et
France, l’Institut de recherche et documentaabondé par les deux gouvernements, finance
tion en économie de la santé (IRDES) et, au
tous les deux ans une trentaine de projets
présentés conjointement des collectivités ter- Québec, le ministère de la Santé et des Services
ritoriales et des organismes des deux pays. Le
sociaux. Deux fois par an, la revue Santé, Société
partage d’expériences et l’échange d’innova- et Solidarité propose des numéros thématiques.
www.irdes.fr/ofqss
tions sont au cœur de cette coopération qui se
FFQCD :
L’A N N É E F R A N C O P H O N E I N T E R N A T I O N A L E · 2 0 1 1-2 0 1 2
OFQJ :