revue des etudes tardo-antiques

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revue des etudes tardo-antiques
RE VU E
D
DE
ESS
E TU D E S TA R D O - A N TIQ U E S
Histoire, textes, traductions, analyses, sources et prolongements de l’Antiquité Tardive
(RET)
publiée par l’Association « Textes pour l’Histoire de l’Antiquité Tardive » (THAT)
ANNEE ET TOME II
2012-2013
REVUE DES ETUDES TARDO-ANTIQUES
REVUE DES ETUDES TARDO-ANTIQUES
(RET)
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ISSN 2115-8266
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
Abstract: The first readers of Achilles Tatius in Western Europe were the
Renaissance scholars who read this novelist in manuscripts. Before the Greek text
was printed (1601), Leucippe and Clitophon appeared in Latin, and in other modern
languages (Italian, English, and French). In 1544 Achilles Tatius was published
anonymously and without books I-IV in a Latin version by Annibale Della Croce:
this version was made from a manuscript containing the only last four books, that
seems to have been the same as MS 1197 of St Catherine on Sinai (which was
written by the Cretan scholar Zacharias Calliergis and belonged to the learned
man Giovan Battista Rasario). Then the first complete version was printed in
1551 by Francesco Angelo Coccio, Achilles Tatius’ first translator into a modern
language. By mid-century other scholars attempted to publish Achilles Tatius’
novel but without success (Fulvio Orsini, Henri Estienne). Furthermore, before
the Greek text was printed, a few selected passages drawn from Achilles Tatius
were printed in Longus’ editio princeps (1598) by Raffaele Colombani.
Keywords: Achilles Tatius, manuscript tradition, MS Sinait. 1197, Renaissance
reception, Latin and Italian versions, Giovan Battista Rasario, Francesco Angelo
Coccio, Raffaele Colombani.
Les aventures de Leucippé et Clitophon d’Achille Tatius ont été imprimées au
début du XVIIe siècle : l’editio princeps de ce roman grec publiée ex officina Commeliniana remonte en effet en 16011. Entreprise par Hieronymus Commelin (15501597), célèbre imprimeur d’Heidelberg, et poursuivie à Bâle après sa mort par Juda et Nikolaus Bonnenvict (Bonnvitius)2, frères de sa femme, cette édition a été
* Je tiens à exprimer ma reconnaissance au Professeur Eugenio Amato d’avoir accueilli ce travail pour publication ainsi qu’aux rédacteurs anonymes d’avoir amélioré mon français.
1
2
ACHILLES TATIUS 1601.
Cf. PORT 1938, pp. 41, 79 nr. 202.
«RET» 2, 2012-2013, pp. 37-65
38
NUNZIO BIANCHI
modelée principalement sur un manuscrit actuellement conservé dans la Bibliothèque du Vatican sous la signature Vat. Pal. gr. 523.
Avant la publication de l’editio princeps, Achille Tatius avait circulé bien sûr sous
la forme de beaucoup de copies manuscrites, mais en particulier déjà dans des
traductions en latin et en langues modernes publiées plus de cinquante ans avant
la princeps : la traduction latine partielle d’Annibale della Croce (Cruceius) des
livres IV-VIII (Bâle 1544)4 suivie d’une version intégrale (Bâle 1554)5 ; la traduction italienne partielle de Ludovico Dolce (livres IV-VIII, Venise 1546)6 et l’intégrale de Francesco Angelo Coccio (Venise 1551)7 ; celle, anglaise, de William
Burton (Londres 1597)8 ; celles, françaises, de François de Belleforest (Paris
1568)9 et de Jacques de Rochemore (Lyon 1572)10.
Le roman d’Achille Tatius, et en général le roman grec, avait commencé à circuler en Europe sous forme imprimé dans la première moitié du XVIe siècle
entre les mains des lecteurs qui, en 1535, pouvaient déjà lire en grec les Éthiopiques d’Héliodore (les aventures de Théagène et Chariclée), le premier roman
grec de l’antiquité imprimé11.
Mais l’histoire des premières traductions imprimées est tout de même liée à
des manuscrits produits au XVIe siècle. Pourtant, malgré le grand nombre de traductions, partielles ou non, en latin ou en langue moderne, le texte grec du
roman ne paraîtra qu’au début du siècle suivant.
La traduction latine partielle d’Achille Tatius (Bâle 1544), les quatre derniers
livres du roman, est l’œuvre de Luigi Annibale Della Croce (1509-1577)12, secrétaire du Sénat de Milan, poète latin et possesseur d’une « esatta cognitione delle
lingue greca, et latina »13. Cette traduction, dédiée à Diego Hurtado de Mendo-
3
VILBORG 1955, pp. LXXVIII-LXXIX.
ACHILLES TATIUS 1544; sur cette traduction v. ci-dessous.
5
ACHILLES TATIUS 1554.
6
ACHILLES TATIUS 1546.
7
ACHILLES TATIUS 1551; sur cette traduction v. ci-dessous.
8
ACHILLES TATIUS 1597.
9
ACHILLES TATIUS 1568.
10
ACHILLES TATIUS 1572.
11
Pour un résumé sur le ‘retour’ des romans grecs v. REEVE 2008, pp. 288-290 (Print runs, readers and the last manuscripts).
12
Della Croce figure comme interlocuteur dans les Forcianae Quaestiones (1535) de Ortensio
Lando, où il est compté avec Giulio Della Rovere [Giulio de Milan] parmi les « urbis Nostrae [scil.
Milano] cives clarissimos et alta quadam mente preditos » ; encore dans les Cataloghi de Lando il est
dit «milanese poeta et thosco et latino, et huomo di finissimo giuditio». Cf. ROZZO 1976, pp. 9596.
13
PICINELLI 1670, p. 38.
4
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
39
za14, ambassadeur d’Espagne à Venise, ne comprend pas le nom du romancier : le
traducteur avait à sa disposition un seul manuscrit, sans les quatre premiers livres
et donc sans inscriptio et peut-être même sans subscriptio (également absente dans la
plus grande partie de la tradition du roman, à l’exception du Vat. gr. 1349, où
dans la subscriptio l’on ne peut lire que les noms des protagonistes). Pour cette raison, la première version imprimée du roman d’Annibale Della Croce parut sous
la forme d’un grand fragment anonyme, comme l’indique le même titre de cet
ouvrage: Narrationis amatoriae fragmentum 15. Plus tard, renseigné par Philip
Archinto (1495-1558)16, évêque de Saluzzo et nonce apostolique à Venice (15531556), de l’existence à Rome d’un manuscrit contenant le roman dans son intégralité – comme l’avait aussi signalé Gesner dans sa Bibliotheca universalis (1545)17,
imprimée l’année suivante au Narrationis amatoriae fragmentum –, notre traducteur
était en mesure d’achever et de publier la traduction complète du roman qui
parut exactement dix ans après (Bâle 1554) la précédente version partielle (revue
et corrigée pour l’occasion)18.
Le même sort a été partagé par la version italienne du roman publiée par
Lodovico Dolce (1508-1568) à Venise en 154619. Dans l’épître dédicatoire de
cette version, réalisée sur la latine de Della Croce20, le traducteur, qui choisit le
titre Dal fragmento d’uno antico scrittore greco, reconnaît que « il presente volumetto è
pervenuto alle nostre mani senza il suo principio et senza il suo fine ».
Della Croce dépendait donc d’un manuscrit mutilé, reçu par le savant Ottavio
Ferrario, professeur de grec et latin à Padoue21, et n’était pas en mesure de préciser le nom du romancier de ce libellum qu’il avait entre les mains et dont
non solum partem maiorem, verum etiam auctoris nomen desideramus: quamquam, si coniectu-
14
Selon le Memorial de los libros griegos de mano de la librería del Sr don Diego Hurtado de
Mendoza (c’est un extrait du catalogue de la bibliothèque de Hurtado de Mendoza conservé dans le
manuscrit Egerton 602 de la British Library : il est publié par GRAUX-DE ANDRÉS 1982, pp. 364379), Hurtado de Mendoza possédait deux manuscrits des romanciers, Achille Tatius et Héliodore
(GRAUX-DE ANDRÉS 1982, p. 374 nr. 253 et p. 376 nr. 305) : sa bibliothèque passa par suite à
l’Escorial et, avant de l’incendie (1671), ces manuscrits portaient la signature respectivement
VII.Z.4 et I.Γ.6 (cf. RONCALI 2001, p. 361).
15
ACHILLES TATIUS 1544. Cf. JACOBS 1821, pp. XXIII-XXIV.
16
ACHILLES TATIUS 1554, p. ai.
17
Achilles Statius scripsit libros octo Graece de Leucippes et Clitophontis amore. Extant Romae in Vaticana
bibliotheca (GESNER 1545, c. 2v).
18
ACHILLES TATIUS 1554. Cf. JACOBS 1821, pp. XXVI-XXXII.
19
ACHILLES TATIUS 1546. Cf. JACOBS 1821, pp. XXIV-XXVI.
20
JACOBS 1821, p. XXV.
21
Cf. RONCALI 2001, p. 362 n. 4.
40
NUNZIO BIANCHI
ras sequi volumus, libelli auctor videri possit Clitophon is, sub cuius persona res tota in hisce
postremis libris (sive fabula ea sit, sive historia) explicatur22.
En 1955 Vilborg écrivait: « it is not known from which codex he [scil. Della
Croce] translated the text; none of our MSS contains only the four last books »23.
Mais, récemment, cette lacune a été comblée : un manuscrit longtemps négligé a
été redécouvert et réévalué. L’examen philologique a établi avec assez de certitude que le texte du roman utilisé dans la traduction de Della Croce correspond au
texte du manuscrit actuellement conservé dans le monastère de Sainte-Catherine
sur le mont Sinaï avec la signature 1197 – ou du moins, si l’on veut être prudent,
au texte d’un manuscrit identique jusqu’à présent perdu24.
Tout simplement le Sinaiticus 1197, parce que anépigraphe et mutilé, et peutêtre aussi conservé dans un lieu excentrique, n’a été mis contribution dans la
constitutio textus d’Achille Tatius que récemment, bien qu’il fût déjà connu pour
son contenu au moins à compter de l’an 1886, quand Viktor Gardthausen – sur
l’indication de Hermann Justus Lipsius, le célèbre auteur de Das Attische Recht und
Rechtsverfahren – avait signalé dans le Catalogus codicum Sinaiticorum que l’ouvrage
klhtofw'nto" [sic] tou' rJhvtoro" (comme le rapporte l’annotation, dans la feuille
de garde du manuscrit, qui rappelle les mots de Della Croce mentionnés ci-dessus) n’était rien d’autre que les livres V-VIII du roman d’Achille Tatius25. Ce manuscrit avait néanmoins échappé à l’auteur de la première édition critique moderne du roman, Ebbe Vilborg en 1955, et l’identification exacte du texte grec dans
le Sinaiticus était encore négligée par ceux qui s’étaient occupés de manuscrits du
Sinaï26. Presque un siècle après l’identification dans le catalogue de Gardthausen,
ce témoin manuscrit a été redécouvert dans un essai de D. Hagedorn et L. Koenen (1970) qui présente un vaste examen du texte du Sinaiticus qui a permis de reconnecter fermement ce manuscrit à un moment particulier de la tradition du roman au XVIe siècle : à savoir la première traduction partielle en latin de Della
Croce (1544)27. Le manuscrit sera utilisé pour la première fois dans la constitutio
textus du roman par J.-Ph. Garnaud en 1993.
22
ACHILLES TATIUS 1554, p. 4.
VILBORG 1955, p. LXXV.
24
J’ai pu avoir une reproduction sur microfiches de ce manuscrit grâce à la courtoisie de
Jacques-Hubert Sautel (IRHT, Paris) auquel va toute ma gratitude.
25
GARDTHAUSEN 1886, pp. 245-246 (« Hunc librum re vera Achillis Tatii esse monuit J. H.
Lipsius»).
26
Que ce soit le roman d’Achille Tatius n’est pas indiqué, par exemple, par la Checklist dans
CLARK 1953, p. 11 (« Clitophon Rhetor »), et pas même dans KAMIL 1970, p. 136 nr. 2097
(« Klitophon the Orator »).
27
HAGEDORN-KOENEN 1970.
23
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
41
Quant à l’étude de Hagedorn et Koenen, nous pouvons ajouter ici un autre
élément qui peut aider à insérer dans son contexte le manuscrit du Sinaï et à
mieux le situer dans l’histoire du texte d’Achille Tatius au XVIe siècle. En effet, le
scribe du Sinaiticus, non identifié dans l’étude de Hagedorn et Koenen, ainsi que
dans l’édition de Garnaud, a un nom précis, signalé pour la première fois par
Michael Reeve dans une note au bas de la page dans son édition du roman de
Longus (1982)28. Cette identification de M. Reeve est restée malheureusement
négligée et oubliée par les répertoires modernes et les études sur les romanciers
grecs en général et sur la tradition d’Achille Tatius en particulier : le scribe du
Sinaiticus est le savant crétois Zacharias Calliergi (ca. 1470/3 - après 1524). Son
écriture est facilement reconnaissable avec ses traits particuliers, même au premier regard (écriture claire et disciplinée, peu d’abréviations)29. Le Sinaiticus 1197
doit donc faire partie des manuscrits écrits, entièrement ou partiellement, par
Calliergi30: cette attribution contribue peut-être peu à la figure du Crétois, mais
elle est très importante pour l’histoire et la fortune du texte d’Achille Tatius, et
des romans grecs, au XVIe siècle.
Parmi les nombreux manuscrits écrits par Calliergi, en effet, le Sinaiticus n’est
pas le seul à contenir un roman grec, car il y a un manuscrit de la Bibliothèque
Vaticane (qui malheureusement a échappé à l’attention des rédacteurs du
Repertorium der griechischen Kopisten), un témoin très important dans la tradition
manuscrite du roman de Longus, le Vat. gr. 1348, partiellement écrit par ce
savant : cette proposition d’identification avancée par Aristide Colonna31, il y a
plus de soixante ans, a été confirmée par Paul Canart, qui « riconosce interventi
del Calliergi anche nella parte riguardante Longo e conclude che le due parti
dell’attuale manoscritto composito furono copiate sotto la direzione del celebre
scriba e tipografo cretese »32 (dans le Vat. gr. 1348 la main de Calliergi s’arrête au
f. 169v). Il y a donc deux manuscrits – au moins à l’état actuel de nos connaissances – de romanciers attribuables, entièrement ou en partie, à la main de
Calliergi.
Pour revenir au Sinaiticus, il n’est pas possible de dire en quelle année et où
28
REEVE 1994, p. VIII n. 7.
Sur Zacharias Calliergi v. GEANAKOPLOS 1967, pp. 239-265 et la mise à jour d’AGATI
2009 (avec bibliographie) ; sur son écriture v. B ERNARDINELLO 1979, p. 63 nr. 56, et
ELEUTERI–CANART 1991, pp. 104-106 nr. XXXVII.
30
Voir les manuscrits recensées dans les volumes du Repertorium der griechischen Kopisten, écrits,
entièrement ou en partie, par Zacharias Callierges: RGK 1, nr. 119; RGK 2, nr. 156; RGK 3, nr.
197.
31
COLONNA 1940, p. 64 n. 1.
32
GUIDA 1981, p. 4 n. 16.
29
42
NUNZIO BIANCHI
Calliergi l’avait copié, mais il n’est pas improbable que ce témoin d’Achille Tatius
a été écrit en Vénétie. En effet, une première circulation de ce manuscrit doit
avoir eu lieu juste dans la région de la Vénétie, pour autant que nous pouvons le
déduire d’un possesseur qui y a laissé sa trace. Sur la première feuille du roman
dans le Sinaiticus (f. 1r selon une numérotation plus récente), dans la marge de
droite, on lit très distinctement, écrit d’une façon calligraphique et en grands
caractères, le nom RasariusJ (voir fig. 1). L’indication, négligée par ceux qui ont
examiné le Sinaiticus, fournit un élément supplémentaire à l’histoire de ce témoin.
Il est possible d’identifier avec une bonne certitude ce Rasarius avec le médecin et
philosophe Giovanni Battista (Giovanbattista, Giambattista, Ioannes Baptista)
Rasario33.
Né à Valduggia (dans le Piémont) en 1517 et mort à Pavie en 1578, Rasario a
étudié à Pavie, et après son sejour à Milan, où il avait poursuivi ses études et
obtenu la chaire de langue grecque, « fu indi chiamato a Venezia, ove per 22 anni
fu Professore di Lettere Greche e Latine con gran concorso di uditori, e con
fama di non ordinaria eloquenza »34. Il avait par la suite quitté Venise pour aller
enseigner l’éloquence à Pavie de 1574 jusqu’à sa mort. Il a également joué un rôle
important dans les premières acquisitions de la bibliothèque de l’Escurial35. On
peut supposer que le Sinaiticus a abouti dans ses mains pendant son séjour à
Venise qui a duré plus de vingt ans.
Justement, dans les collections de l’Escorial nous pouvons trouver quelques
manuscrits appartenant à Rasario. C’est le cas du Scorial. R.I.16 (XVIe siècle,
Argonautiques d’Apollonios de Rhodes) ou du Scorial. S.III.21 (XVIe siècle,
Grammaire de Théodore Gaza) qui dans la marge supérieure du f. 1r portent le
nom Rasarius36. Sur la base de ces données, nous pouvons retenir qu’il avait l’habitude d’écrire son nom sur la première feuille des manuscrits en sa possession.
33
Pour Rasario, il nous manque un profil bio-bibliographique fiable : les informations peuvent
être obtenues à partir de GHILINI 1647, p. 142 ; COTTA 1701, p. 164 (avec liste des ouvrages) ;
TIRABOSCHI 1784, pp. 72, 442 ; AUDISIO 1919 ; KRISTELLER 1960, pp. 106-107 ; COSENZA 1962,
pp. 3004-3005 ; PIETROBELLI 2009, pp. 98-106 ; SAVINO 2009, pp. 189-194.
34
TIRABOSCHI 1784, p. 442.
35
GRAUX-DE ANDRÉS 1982, p. 349.
36
Pour ces deux manuscrits v. REVILLA 1936, p. 64 nr. 16 et p. 392 nr. 120; GRAUX-DE
ANDRÉS 1982, pp. 135, 146 n. 39, 542 nr. 20. Cette enquête devrait être étendue à d’autres bibliothèques. Je viens seulement de constater qu’en outre Rasario s’avait servi de la Bibliothèque
Marciana en 1555, quand il avait obtenu en prêt à son nom quelque manuscrit ayant appartenu au
cardinal Bessarion (CASTELLANI 1896-1897, p. 358 ; cf. ROSE 1973, p. 94 n. 214), comme le Marc.
gr. 263 (moitié du XVe siècle ; cf. MIONI 1981, pp. 378-380), le Marc. gr. 307 (XIIe siècle ; cf.
MIONI 1985, pp. 14-15) et le Marc. gr. 518 (moitié du XVe siècle ; cf. MIONI 1985, pp. 386-387).
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
43
Cette donnée nous autorise donc à déduire que le Sinaiticus d’Achille Tatius était
déjà mutilé quand il est arrivé dans la bibliothèque de Rasario, à savoir dans les
mêmes conditions où ce manuscrit est aujourd’hui : sans la partie initiale et donc
peu facilement identifiable par son contenu.
On peut rapporter encore à la région vénitienne la première traduction en
langue moderne (italien) et complète d’Achille Tatius : elle a été imprimée à
Venise en 155137 (voir fig. 2), c’est à dire l’année avant l’arrivée de Rasario dans
cette ville. L’auteur de cette version38 est le savant Francesco Angelo Coccio, originaire de l’Ombrie, auquel on attribue non seulement le mérite d’avoir publié la
première traduction complète du roman, mais aussi d’avoir attribué l’ouvrage à
son auteur, Achille Tatius, et par surcroît sous la forme correcte Tatio, au lieu de
Stazio jusque-là utilisée : les histoires d’amour de Leucippé et de Clitophon, en
effet, n’avaient été imprimées que sous forme partielle et anonyme.
Ce traducteur n’est pas parmi les plus connus dans la res publica literarum du
XVIe siècle, mais il n’est pas si obscur : bien que nous n’ayons pas beaucoup d’informations sur sa vie et ses activités, nous pouvons tout de même affirmer que
Francesco Angelo Coccio devait être bien sûr un savant d’une certaine importance dans le contexte de ce ‘cercle’ qui tournait autour de l’humaniste Pierre
Arétin39.
Et pour donner une idée du rôle important de Coccio dans le milieu culturel
vénitien on peut citer ici les références faites à sa personne par ceux qui font partie du même milieu. Coccio est défini par Lodovico Doni, son collègue à
l’Académie des Pellegrini, « ingegno nobile »40 ; par Niccolò Franco (secrétaire de
l’Arétin à Venise) « dotto in greco e in latino »41 ; par l’Arétin même il est dit
« filosofo »42, « erudito »43, bon connaisseur de « lo idioma dei Greci, dei Latini e
dei Toscani »44. Précepteur à Padoue et Venise, auteur de quelques poèmes45, il
37
ACHILLES TATIUS 1551. Parfois, cette traduction est citée avec la date de 1550 : à la fin du
volume (c. 114v) nous lisons : « Il fine de gli otto libri d’Achille Tatio Alessandrino, tradotti per
Francesc’Angelo Coccio da Iano, et nuovamente stampati da Piero et fratelli de Nicolini da Sabio
in Venetia MDL », mais dans le frontispice, après la marque typographique, figure l’année MDLI.
38
Ce sont les dates de rééditions de cette version à partir du XVIe jusqu’au XIXe siècle :
Venise 1560, 1563, 1568, 1578, 1608, 1833; Florence 1598, 1617; Trévise 1600, 1601; Crisopoli
1803, 1814.
39
Pour Francesco Angelo Coccio v. PROCACCIOLI 1989, et BENEDETTI 2001.
40
A.F. DONI, I cicalamenti della Zucca, Tavola, 10, 11 (dans DONI 2003, p. 29).
41
N. FRANCO, Il Petrarchista, sonnet 99, 8 (dans FRANCO 1979).
42
P. ARETINO, ep. 211 (dans ARETINO 1999, p. 204).
43
P. ARETINO, Ternali 2.222 (dans ARETINO 1992, p. 281).
44
P. ARETINO, Ragionamento de le corti, partie II (dans ARETINO 1995, p. 107).
45
Ces poèmes sont recueillis par PROCACCIOLI 1989, pp. 403-409.
44
NUNZIO BIANCHI
est mieux connu pour ses traductions : outre Achille Tatius, la version italienne
de Cebete Thebano 46 (1538) et de l’Institutio principis christiani d’Erasme de
Rotterdam47 (1539) – par contre, il est plutôt douteux qu’il soit l’auteur de la version italienne, imprimée en 1544 et traduite du français, du dialogue De nobilitate
de Henri Corneille Agrippa48.
La traduction d’Achille Tatius de Coccio est précédée par une épître dédicatoire à Silvestro Gigli, « dignissimo decano di Lucca », sur laquelle nous avons
besoin de nous arrêter49. Certains passages de cette épître en effet méritent d’être
cités ici dans leur intégralité, car ils offrent des informations intéressantes non
seulement sur la traduction, elle-même, mais aussi sur l’évaluation littéraire
d’Achille Tatius à l’époque, ainsi que sur la réception du roman au XVIe siècle.
Et volendo mandare ad essecutione questo mio desiderio50, mi diedi a pensare, et
dipoi a cercar se fra i greci auttori, di quei dico che nelle stampe non siano publicati, alcuno se ne ritrovasse che nella latina, o nella nostra lingua non fosse stato
insino a quest’hora tradotto. In ultimo per opra di M. Giorgio Comicorinthio
Monembasiense, huomo non meno di nobilissima famiglia, che di alto ingegno, et
di acuto giudicio, et che di molti scrittori, i quali non sono cosi noti a ciascuno, ha
molta notitia, et con diligenza gli ha letti, et istudiati, mi venne alle mani un vago
et gentile scrittore di amorosi accidenti, del quale appresso di Suida con parole di
questo tenore n’è fatta mentione. «Achille Tatio Alessandrino scrisse dell’amore di
Leucippe et di Clitophonte, et d’altri amorosi avenimenti in otto libri. fu egli christiano ultimamente et Vescovo. scrisse ancho della sphera, et della etymologia, et
di varia historia, nella quale fa mentione di molti, et grandi, et mirabili huomini. il
suo stile in tutte le opere è simile a quello, col quale ha trattato le cose amorose»51.
46
CEBETE 1538. Sur cette édition v. CASALI 1861, pp. 72-78, et BENEDETTI 2001.
ERASMO 1539. Sur cette édition v. CASALI 1861, pp. 105-108; PROCACCIOLI 1989, pp. 389390, 410-411.
48
AGRIPPA 1544. Sur l’attribution à Coccio (faite par HAYM 1728, p. 143 nr. 3, qui se fonde
sur des témoignages inconnus) de la traduction du De nobilitate restent fortes réserves : « l’unico
debole legame del Coccio con l’opera dell’Agrippa è costituito dalla sua frequentazione di
Lodovico Domenichi, che tre anni dopo, nel 1547, tradusse dal latino una tra le celebri opere del
filosofo tedesco [scil. Cornelio Agrippa], il De incertitudine et vanitate scientiarum » (GROHOVAZ 2001,
p. 87) ; sur cette attribution voir aussi les considérations de PROCACCIOLI 1989, p. 392.
49
ACHILLES TATIUS 1551, cc. *iir-*viiiv (l’épître dédicatoire est reproduite intégralement dans
PROCACCIOLI 1989, pp. 411-414); dans la présente transcription est reproduit tel qu’il est le texte
imprimé (compris la ponctuation et l’orthographe), avec soin de distinguer seulement le signe de v
de u.
50
C’est à dire d’honorer de façon appropriée le dédicataire de l’ouvrage.
51
C’est l’article sur Achille Tatius de la Souda : ΔAcilleu;" Stavtio", ΔAlexandreuv", oJ
gravya" ta; kata; Leukivpphn kai; Kleitofw'nta, kai; a[lla ejrwtika; ejn biblivoi" hV.
47
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
45
Similmente Photio52 ne i commentari, et numeratione che fa de libri, i quali egli
haveva letti53, oltra le altre ne dice queste parole. «Achille Tatio pare che nella
locutione et componimento sia ornato. percioche ella è chiara et significante, et
quando usa li traslati, gli usa molto acconciamente. i giri delle sue sentenze per lo
piu sono concisi, aperti, et soavi, et col lor suono porgono dilettatione a gli orecchi. et serba gran similitudine nell’apparecchio et forma delle narrationi con quelle
di Heliodoro»54.
En laissant de côté pour l’instant la référence au personnage appelé Giorgio
Comicorinthio Monembasiense, dont nous dirons quelques mots plus loin, il faut
avant tout remarquer que dans le passage cité nous trouvons la première traduction italienne imprimée, à ma connaissance, de l’article dédié au romancier dans le
lexique byzantin de la Souda, alors mise sous le nom de Suidas (Xe siècle) et disponible dans l’editio princeps procuré par Demetrios Chalcondyle (Milan 1499) ou
dans l’édition Aldine (Venise 1514). Il faut en outre souligner à ce sujet que, dans
la traduction de « Suidas », Coccio passe sous silence le fait que le romancier est
cité dans le lexique sous la forme Stavtio" (que reflète pleinement la tradition de
gevgonen e[scaton cristiano;" kai; ejpivskopo". e[graye de; Peri; sfaivra" kai; ejtumologiva", kai; ÔIstorivan suvmmikton, pollw'n kai; megavlwn kai; qaumasivwn ajndrw'n
mnhmoneuvousan. oJ de; lovgo" aujtou' kata; pavnta o{moio" toi'" ejrwtikoi'" (a 4695, vol. I,
p. 439, 22-27 Adler).
52
On peut ajouter ici que le nom de Photio est écorché en Plotio dans la réimpression vénitienne
de la traduction en 1563 (ACHILLES TATIUS 1563, p. Avr) et donc en Plotino dans la transcription
fourni par PAITONI 1766, p. 3, s.v. Achille Tazio.
53
« Commentari, et numeratione che fa de libri, i quali egli haveva letti » est une façon de désigner la Bibliothèque qui semble reproduire la inscriptio des manuscrits de Photios (ajpografhv kai;
sunarivqmhsi" tw'n ajnegnwsmevnwn hJmi'n biblivwn), traduit par Gesner avec Descriptio et enumeratio authorum, quotquot ipse legerat (GESNER 1545, c. 562r); pour le titre de la Bibliothèque v. DILLER
1962, p. 395 ; CANFORA 2001, pp. 159-162 ; et sur les traductions du titre pendant les siècles XVIe
et XVIIe v. LOSACCO 2003, pp. 143-144 et n. 120, et CARLUCCI 2012, pp. 125-127.
54
ACHILLES TATIUS 1551, cc. *iiiiv-*vv. Ci-après le texte du chapitre 87 sur Achille Tatius (éd.
Henry) : ΔAnegnwvsqh ΔAlexandrevw" ΔAcillevw" Tativou tw'n peri; Leukivpphn kai;
Kleitofw'nta lovgoi h. “Esti de; dramatikovn, e[rwtav" tina" ajtovpou" ejpeisavgon.
Kai; levxei me;n kai; sunqhvkh/ dokei' diaprevpein: eujshvmw/ te ga;r kai; ejpi; troph;n
oijkeivw" tetrammevnh/, o{te kai; tauvth/ crw'/to: ajforistikaiv te kai; safei'" kai; to;
hJdu; fevrousai aiJ plei'stai perivodoi, kai; th;n ajkoh;n tw'/ h[cw/ leaivnousai. ΔAlla; tov
ge livan uJpevraiscron kai; ajkavqarton tw'n ejnnoiw'n kai; th;n tou' gegrafovto" faulivzei kai; gnwvmhn ejn pa'si kai; spoudhvn, kai; toi'" ajnaginwvskein ejqevlousi katavpituston th;n ajnavgnwsin poiei'tai kai; feukthvn. Pollh;n de; oJmoiovthta ejn th'/
diaskeuh'/ kai; plavsei tw'n dihghmavtwn, plh;n scedovn ti tw'n proswvpwn th'" ojnomasiva" kai; th'" musara'" aijscrovthto", pro;" ta; tou' ÔHliodwvrou dravmata fulavttei.
46
NUNZIO BIANCHI
la Souda et la vulgate de l’époque)55 et non la forme Tavtio" utilisée par le traducteur (Achille Tatio).
Cela ne suffit pas. Dans ce passage Coccio semble vouloir nous offrir un
recueil des témoignages plus que complet sur le romancier. Au témoignage de
« Suidas » il fait suivre celui du patriarche Photios, dont Coccio nous offre, cette
fois aussi, la première traduction italienne imprimée, à ma connaissance, du chapitre 87 de la Bibliothèque : un ouvrage qui sera imprimé par David Hoeschel en
1601 (la même année que l’editio princeps d’Achille Tatius). Cette traduction du
chapitre 87 de la Bibliothèque de Photios sur Achille Tatius est d’une certaine
importance non seulement pour l’histoire de la réception du roman antique au
XVIe siècle, mais aussi pour celle de la Bibliothèque même : en effet elle est négligée dans les études modernes, aussi bien dans celles sur Photios que sur le
roman56.
À propos de cette traduction du chapitre 87, nous pouvons remarquer ici que
Coccio, tout en restant fidèle au texte de Photios, a choisi d’omettre de traduire
quelques lignes (sans le passer sous silence : oltra le altre ne dice queste parole…), c’est
à dire les lignes initiales et finales du chapitre et, en particulier, celles, centrales,
qui contenaient les réserves morales de Photios sur le roman. Coccio laisse tomber la périphrase centrale, dans laquelle Photios met en garde le lecteur contre
« l’indécence extrême (tov ge livan uJpevraiscron) et l’obscénité (ajkavqarton)
des pensées qui ruinent par ailleurs l’esprit et la précision de l’écrivain [scil. Achille
Tatius] et rendent la lecture exécrable et la font fuir (katavptuston th;n ajnavgnwsin poiei'tai kai; feukthvn) à ceux qui veulent l’approcher ». Et dans la
partie finale du chapitre, où Photios met en comparaison Achille Tatius avec
Héliodore, Coccio omet également de traduire la phrase finale sur les seules différences significatives entre les deux romans : « les noms des personnages et la
détestable obscénité (musara'" aijscrovthto")».
Les silences et les omissions de Coccio (sur lesquels peut-être pesait le fait
que, à ce moment-là, se déroulait le Concile de Trente) confirment son choix
d’omettre entièrement, en traduisant le roman d’Achille Tatius, la fin des discours
de Ménélas et Clitophon, qui, en conclusion du deuxième livre, s’attachent respectivement à défendre l’amour homosexuel et l’amour hétérosexuel. Dans la
Dans les deux éditions de « Suidas » citées on lit ΔAcilleu;" Stavtio", comme d’ailleurs
dans la tradition manuscrite ; la forme Statius est en outre celle utilisée dans les répertoires bibliographiques, comme on voit dans la Bibliotheca Universalis de Gesner (v. ci-dessus n. 17), e figure
dans les manuscrits Vat. gr. 1347, gr. 1348, gr. 1349, gr. 1350, gr. 2367. Voir à ce sujet BIANCHI
2011, pp. 100-101.
56
En ce qui concerne le roman, nous pouvons trouver une exception importante chez
DOODY 1996, p. 247, qui cite des passages.
55
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
47
dernière partie de cette diatribe, Ménélas se livre à une apologie du baiser entre
les garçons (II, 37, 10-38), qui est entièrement omise en traduction par Coccio de
cette façon :
Habbiamo in questo luogo lasciato di stampare una piccola particella, forse di
venticinque versi, havendo pensato ch’ella poteva bruttamente macchiar
quest’amorosa narratione, la quale nel rimanente è honestissima57.
En revenant à l’épître dédicatoire, Coccio s’est occupé de mettre au clair les
raisons qui l’ont poussé à traduire ce texte :
Io adunque, accioche quel poco d’ingegno, che Iddio m’ha conceduto per sua gratia, per mio difetto lasciandolo abbandonato et quasi per terra, non venga del
tutto a perdersi, questo fra gli altri scrittori eleggendo, mi posi a tradurlo nella nostra lingua, tirato et dalla piacevolezza della materia, et dalla dolce maniera del
dire. Et ritrovandomi alla fine haverlo tradotto, mi venne in pensiero, et meco
stesso proposi, per dimonstrar la mia grata intention verso di lei, così rozzamente
trascritto inviarlo a V.S. … […]. Ne perche l’opra sia di soggetto amoroso, debbe
V.S. vergognarsi che le sia dedicata. conciosia cosa che se ella vorrà ben riguardare, vedrà apertamente, che oltra il divino Platone, quei savi philosophi, che la sua
dottrina hanno seguitato, et che con l’ali del lor sublime intelletto s’innalzarono
sopra tutti alla contemplatione delle cose divine, non si riputarono a vergogna et
di parlare et di scriver d’Amore. il quale in ogni tempo se non a tutti, almeno alla
maggior parte ha dato copiosa, vaga, et alta materia di scrivere et di ragionare.
[…]. Siche V.S. prenda quest’opera con lieto animo, che quando dalle gravi cure
de gli studij suoi ella si toglie, potrà per ricrearsi, et passar via la noia dell’animo
affaticato, volgersi tal volta a legger questa piacevole narratione. Et in vero, se ’l
mio giudicio non erra, parmi che questo scrittore si proponesse di usare in tutto
quella figura, la quale è dai Greci chiamata Leptologia: onde si minutamente descrive le cose, ch’egli non pur le dipinge, ma quasi vivamente le pone altrui dinanzi
agli occhi. la qual cosa suole apportar incredibil piacere a quei che leggono. et oltra
che l’auttore sparge per tutta l’opera molte vaghe et giovevoli sentenze, possiamo
anche, volendo noi porvi diligente consideratione, pigliarne utili consigli, et ottimi
ammaestramenti della vita, che si stanno ascosi sotto il velame del fabuloso ragionamento. Ma perche lungo sarebbe a volergli in questo luogo dimostrare, et lo
scoprirne piccola parte saria forse come niente riputato, perciò tengo sia ottimamente fatto trapassargli: massimamente havendo io per cosa chiara, che per l’acutezza del suo intelletto molto meglio di me, et piu internamente potranno esser
ritrovati et discoperti da V.S. …58.
57
58
ACHILLES TATIUS 1551, c. 32v. Cf. JACOBS 1821, p. XXXIV.
ACHILLES TATIUS 1551, cc. *vv-*vir, *viir, *viiv-*viiiv.
48
NUNZIO BIANCHI
Nous ne pouvons pas nous empêcher de remarquer que Coccio a écrit ici une
page exemplaire de critique littéraire sur notre romancier59 où on peut saisir les
aspects les plus importants de cet ouvrage di soggetto amoroso, qui a la même dignité
que les autres textes anciens, comme il le montre dans une apologie néo-platonicienne d’Amore, origine et fin de toute action humaine60. Coccio a également souligné que le roman d’Achille Tatius présente l’avantage d’être une piacevole narratione, pas seulement pour les événements racontés, mais aussi pour le style ; il a aussi
mis en évidence l’utilisation de la leptologia61, des gnomai et des sentences, des
leçons de vie cachées sotto il velame del fabuloso ragionamento.
En revenant au début du passage cité de cette épître dédicatoire, nous devons
aussi nous interroger sur le manuscrit qu’il avait utilisé et comment ce texte
d’Achille Tatius, vago et gentile scrittore di amorosi accidenti, avait abouti entre ses
mains.
Coccio a sûrement dû travailler sur un seul manuscrit du roman, comme il
l’admet lui-même, dans l’avertissement Alli begnini lettori annexé à la conclusion de
la traduction du roman, à propos des erreurs et des coquilles dans lesquelles peut
tomber un traducteur62 :
Io veramente posso affermare, che con tutta quella diligente cura che vi ho posta,
non ho potuto assicurarmi, si che in quest’opera non siano corsi quegli errori, i
quali in parte sono proprij della negligenza di coloro, che sostengono un cotal
carico; et in parte de varij accidenti, che sopravengono continuamente nello stampare. Non voglio dir di quei, che traducendo posso haver commessi o per mio
poco sapere, o perche ancho tradussi con l’aiuto solamente d’un’essemplare, il quale per
aventura non era si ben corretto, che del tutto io me ne sia potuto star sicuro63.
Il s’agit donc d’un exemplaire manuscrit unique et d’ailleurs incorrect. Quel
était le manuscrit dont disposait Coccio pour sa traduction ? On ne peut pas dire
avec certitude : selon Jacobs et Vilborg64 un bon candidat est le manuscrit Marc.
59
Cf. MATTIOLI 1978, pp. 52-53.
Cf. DOODY 1996, p. 247.
61
Cf. Cassiodore, Expos. in Psalt. 2, 51, 8 : Et respice quemadmodum multas res his tribus versibus breviter intimavit. Quae figura dicitur leptologia, id est subtilis locutio, quando res singulae minutatim ac subtiliter
indicantur. A ce sujet cf. ERNESTI 1797, pp. 112-113 ; LAUSBERG 1990, § 813.
62
Coccio développe des réflexions similaires sur les défaillances produites par les imprimeurs
dans le dialogue Ragionamento della stampa compris dans les Marmi d’Anton Francesco Doni (dans
DONI 1928, p. 173).
63
ACHILLES TATIUS 1551, cc. 115rv (cette notice aussi a été réimprimée dans PROCACCIOLI
1989, p. 415) : le passage cité se lit à c. 115v (l’italique c’est le mien).
64
« Unde suspicari possumus, librum Comicorinthii aut ipsum fuisse Codicem Venetum (qui
60
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
49
gr. 409, comme semblent l’indiquer quelques cas significatifs65. En effet, la présence dans le Marcianus des « many errors owing to itacism »66 et les omissions de
cola ou des parties de phrases67 correspondent bien à la facies du manuscrit de
Coccio qui non era sì ben corretto ; en outre le Marcianus conserve dans l’inscriptio la
forme correcte Tativou en place de Stativou très répandu à cette époque dans
les manuscrits et dans les articles bibliographiques avant que Coccio ne restaure
la forme correcte Achille Tatio. Cependant, il y aurait un obstacle à cette
possibilité : dans le manuscrit Marc. gr. 409 le texte d’Achille Tatius s’arrête à la
fin du f. 262v avec les mots …e[rriyan oJmoivw" (VIII.16.3), après lesquelles
quelqu’un a ajouté leivpei fuvlla tinav, tandis que la traduction de Coccio
continue jusqu’à la fin du roman. Mais nous savons par l’inventaire des manuscrits de Bessarion, auquel appartenait le Marcianus, que ce manuscrit est resté pendant longtemps en fascicules séparés68 : rien ne nous empêche donc de supposer
qu’à la moitié du XVIe siècle le Marcianus contenait encore des folio à présent
manquants et que la perte de ces folios s’est produite après 1550 (s’il y a du vrai
dans cette hypothèse, nous devrions penser que l’apographe du Marcianus, le Vat.
Pal. gr. 52, où même le texte du roman prend fin à VIII.16.3, est postérieur à
1550, donc à la publication de la traduction de Coccio).
Le traducteur reconnaît avoir obtenu le texte grec per opra di M. Giorgio
Comicorinthio Monembasiense. Il s’agit de Georges, comte de Corinthe, originaire de
Monembasia (Grèce), professeur de grec à Candie (1535-1539), neveu de Michel
Apostolios et donc cousin ainsi qu’élève d’Aristobule-Arsène : il se réfugia à
Venise après la prise de Monembasia par les Turcs (1540), et y resta jusqu’en
1550. A Venise il a occupé une place importante dans la colonie grecque et il était
en contact avec beaucoup de savants de son temps (Paul Manuce, Fulvio Orsini,
François Portus, Nicolas Sophianos, Georges Balsamon). Et outre la grande estime de Coccio, Georges de Corinthe bénéficiait aussi de celle de l’Arétin, dans
nunc est in Bibl. S. Marci nr. CCCCIX), aut certe librum ex illo Codice descriptum » (JACOBS
1821, p. XXXIV) ; cette traduction « shows that he followed a MS belonging to the group of Marc.
409, M; probably he had exactly this MS at his disposal » (VILBORG 1955, p. LXXVI).
66
1) En I.6.4 Coccio a traduit le tacevw" du Marc. gr. 409 (où tous les autres manuscrits ont
tovte ta; tevw" ou ta; tevw" tovte ou ta; tevw" ou encore ta; tovte) avec subitamente; 2) en I.15.8
Coccio a traduit avec cantando il letto di Io le texte du Marcianus (et du Vat. gr. 914, même si non
signalé dans l’apparat critique des éditions de Vilborg et Garnaud) ΔIou'" a[/donte" eujnhvn (ΔEou'"
a[/donte" eujnhvn cett.); 3) en II.11.4 il traduit in rotondo ed occulto luogo le ejgkuvklw/ du Marcianus (ejn
koivlw/ ou ejn kuvklw/ cett.).
66
VILBORG 1955, p. XXIX.
67
VILBORG 1955, pp. LIV-LV.
68
Dans l’inventaire des manuscrits de Bessarion du 1468 le manuscrit est ainsi décrit: Heliodori
ethiopica, in papyro, non ligata (LABOWSKY 1979, p. 170 nr. 331) ; cf. OMONT 1894, p. 162 nr. 331.
50
NUNZIO BIANCHI
l’entourage de qui, comme on a déjà remarqué, figurait Coccio69. Il mourut à une
date antérieure à 1560.
Georges possédait une riche bibliothèque et entra aussi en possession de celle
du savant crétois Marco Mamuna (XVe siècle)70 ; en outre, il avait un accès privilégié à la bibliothèque du cardinal Bessarion71 : il n’est donc pas impossible que
Coccio ait utilisé pour Achille Tatius le manuscrit de Bessarion (le Marc. gr. 409),
comme il n’est pas impossible non plus que, pour le chapitre 87 de la Bibliothèque
de Photios, il ait eu accès à l’un des deux précieux témoins manuscrits qui avaient
appartenus au cardinal Bessarion, les Marc. gr. 450 et 45172. À ce sujet nous pouvons rappeler ici que, dans l’édition du 1535 des œuvres ascétiques de saint Basile
publiées par l’imprimeur Stéphane Nicolini de Sabbio, le même qui publiera en
1551 la traduction d’Achille Tatius de Coccio, ont été utilisés trois manuscrits de
Bessarion73.
La traduction de Coccio n’est pas un cas isolé à ce moment-là. Dans les
années ’40 et ’50 du XVIe siècle on peut enregistrer un grand intérêt partout pour
le roman d’Achille Tatius. Annibal Caro (1507-1566) l’utilisera pour sa comédie
Straccioni dans les années ’40 (il pouvait probablement le lire dans la version de
Della Croce ou de Dolce, comme l’indique le fait que les reprises et les correspondances avec le texte grec sont limitées aux trois derniers livres du roman)74. À
Henri Estienne (1528-1598) appartenait le manuscrit Royal 16 D XVIII de la
British Library, contenant les romans d’Achille Tatius (ff. 60r-127v) et d’Eustathe
Macrembolite (ff. 1r-59v)75, dont il était peut-être entré en possession au cours de
69
Les données disponibles sur George de Corinthe ont été recueillies dans CATALDI PALAU
1991, pp. 567-570. Dans une lettre adressée à George de Corinthe et datée octobre 1545 (ép. III,
352), l’Arétin décrit George comme « greco nobile e sapiente » et « de la celeste greca dottrina sentimento e splendore » (ARETINO 1999, p. 307).
70
V. PINGREE 1977, CATALDI PALAU 1991.
71
George de Corinthe avait copié pour Fulvio Orsini une lettre de George de Trébizonde à
l’empereur Jean Paléologue d’après un document de Bessarion : cf. NOLHAC 1887, p. 162 et n. 1 ;
CATALDI PALAU 1991, p. 570.
72
Cf. ELEUTERI 2000, pp. 139-140, nr. 111 et nr. 112.
73
Les manuscrits ont été identifiés par GRIBOMONT 1953, pp. 326-329 ; voir aussi FOLLIERI
1977, pp. 505-506.
74
Les ressemblances des Straccioni avec le roman d’Achille Tatius ont été reconstruites par
STERZI 1913, pp. 211-218, qui développe une recherche de STIEFEL 1904, pp. 249-250; cf. aussi
FERRONI 1967, pp. 353-355.
75
Ce manuscrit est du au milieu vénitienne : les ff. 7 (marginalia) et 57 sont attribués à Arnold
Arlenius (GAMILLSCHEG-HARLFINGER 1978, p. 299; RGK 1.A, p. 42 nr. 28) ; les ff. 126v-127v à
Bartolomeo Zanetti (RGK 1.A, p. 44 nr. 31, CATALDI PALAU 1986, p. 231). Pour le texte
d’Eustathe Macrembolite le Royal 16 D XVIII semble être apographe du manuscrit Ambr. B 155
sup. (daté 1545) : CATALDI PALAU 1980, p. 94.
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
51
ses voyages en Italie (1547-1555)76 : à Florence il était en mesure de lire dans le
célèbre manuscrit Laur. Conv. soppr. 627 les romans de Longos, imité dans ses
églogues latines, de Chariton et Xénophon d’Ephèse, en prévision d’une édition
imprimée77, et enfin d’Achille Tatius, dont il avait transcrit quelques leçons de sa
propre main dans les marges du manuscrit Royal 16 D XVIII78. En 1553 Fulvio
Orsini (1529-1600) avait copié dans le Vat. gr. 1347 le texte du roman de Longus
et, vraisemblablement dans le même temps, le texte d’Achille Tatius79.
Avant l’editio princeps, il y avait eu des tentatives de publier le roman d’Achille
Tatius. Plus d’une fois, en effet, on avait tenté de l’imprimer par l’entremise de
Fulvio Orsini, mais sans succès. En juillet 1568, Plantin, l’imprimeur d’Anvers,
avait demandé à Orsini de lui envoyer des copies d’Achille Tatius et de Longus
pour les publier ensemble (« le livre d’Achille Statio, avec l’autre inscrit ta; poimenikav »)80. Mais cette demande a dû être renouvelée l’année suivante (mars
1569): « Achillem Statium de Amoribus Leucipes [sic] et Clitophontis, si descriptus est, velim cum tua præfatione, nostris sumptibus, ferendum cures »81 – on
demande encore une copie écrite du roman, une transcription (si descriptus est…),
on fait référence à une praefatio d’Orsini pour l’impression de ces deux romans.
Mais ce projet n’a pas été réalisé. Et de nouveau l’année suivante (1570), l’imprimeur revient au même sujet (« …j’attendray il Longo Græco con l’Achille Statio
dell’amore de Leucippo [sic] et Clitophonte »)82. Mais, même cette fois, la publication d’Achille Tatius et de Longus ne fut pas menée à bien, puisqu’en 1593 encore Friedrich Sylburg83, collaborateur de Commelin, demande à Orsini d’obtenir
76
Cf. RENOUARD 1843, pp. 373-375; CLÉMENT 1898, pp. 468-469.
GUIDA 1999, p. 278.
78
VILBORG 1955, pp. XIX-XX, LVI.
79
Cf. BIANCHI 2011, p. 94 n. 22.
80
« Vostre Signeurie que, quand, à sa commodité et bon loisir, il luy plaira m’envoyer le livre
d’Achile [sic] Statio, avec l’autre inscrit ta; poimenika;, que je les conjoindray ensemble et ce d’autant plus volontiers qu’elle a le désir de les dédier à Monsigneur le Cardinal de Granvelle… »
(épître du 24 Juillet 1568, dans ROOSES 1883, I, nr. 149, p. 313).
81
ROOSES 1885, II, nr. 170, pp. 45-46.
82
« Je tiens aussi que V.S. aura, passé jà quelques deux semaines, receu le Bréviaire qu’icelle
m’avoit demandé par ses lectres, suivant lesquelles j’attendray il Longo Græco con l’Achille Statio
dell’amore de Leucippo [sic] et Clitophonte con la tradutione di esso Longo del Sr Gambara, dedicata al patron de tutte le scientie e de tutti huomini virtuosi, mon Signeur le très illustre Cardinal
de Granvelle, mon Signeur et maistre » (épître du 2 mars 1570, dans ROOSES 1885, II, nr. 220, p.
127). Sur la version de Longus (une metaphrase en hexamètre latin, qui sera imprimée à Naples en
1574 avec le titre Expositi), faite par le poète Lorenzo Gambara de Brescia, Ursini familiaris et courtisan de Alessandro Farnese, cf. les observations dans BIANCHI 2011, pp. 102-103.
83
Sylburg (1536-1596), très savant en grec, était le collaborateur scientifique le plus important
de Commelin : cf. PREISENDANZ 1937.
77
52
NUNZIO BIANCHI
des copies de trois romans grecs pour l’impression : Longus, Achille Tatius et
Eustathe Macrembolite84.
Nous ne savons pas pourquoi Orsini n’a pas fait cette édition des romanciers,
ou s’il y a renoncé de lui-même. Sûrement, à la fin du XVIe siècle, Fulvio Orsini
s’était fait le promoteur de la publication du roman d’Achille Tatius, ou du moins
en avait fait la suggestion. Au début de juin 1598, en effet, dans une lettre à Baccio Valori (savant florentin et personnage important, ainsi que patron de l’editio
princeps de Longus), écrite par son correspondant à Rome, Marco Antonio Dovizi
dit que selon Fulvio Orsini le roman de Leucippé et Clitophon mérite de trouver
publication85. Un peu plus d’un mois plus tard, Dovizi retourna à ce sujet avec
quelques détails : un scribe de la Bibliothèque du Vatican s’offre de préparer une
copie « di Achille Statio per stampare, et anco di Eumathio » pour la soumettre à
l’approbation de l’Académie Florentine86. Malheureusement nous n’avons pas les
lettres de Baccio Valori, et nous n’avons pas d’autres données à ce sujet dans les
mêmes lettres sur la réponse des académiciens florentins. Cependant, d’une lettre
du 28 Août de la même année nous apprenons que Valori « aspettava risposta da
altri circa le copie d’Eumathio et di Statio se si havevano da fare, poiché della traduttione volgare del Caro et d’altri di simili materie lascive si vede farsi scrupolo a
stampare, come cose contra bonos mores »87.
Nous ne connaissons pas l’opinion des académiciens florentins sur les romans
d’Achille Tatius et d’Eustathe Macrembolite (déjà disponibles en traduction)88,
mais nous ne sommes pas très loin de la vérité en supposant qu’ils avaient les
mêmes scrupules qui retardèrent la publication de la version d’Annibal Caro de
Longus, jugé « contra bonos mores » (cette version sera publiée à titre posthume
en 1786)89. Ces scrupules sont les mêmes qui, près d’un demi-siècle plus tôt,
avaient suggéré à Coccio d’omettre en traduction la partie finale du deuxième
livre du roman d’Achille Tatius.
84
« De Longo, Achille Statio et Eumathio, facies quod res et tempus ferent: nos vicissim operam dabimus ut te huius operae ne pigeat » (NOLHAC 1887, p. 444).
85
« Tiene bene che detto autore [scil. Longus] sia più antico di Achille Statio, il quale lauderebbe [scil. Orsini] che anco esso si stampasse » (BIANCHI 2011b, ép. XVI, p. 111).
86
« Quello che copia i libri Greci qui della Biblioteca Vaticana, il quale si offerisce di mandare
copia a V.S. se vorrà di Achille Statio per stampare, et anco di Eumathio, che è un’altro autor bellissimo e piacevolissimo di simili materie pastorali, et V.S. potrà poi farli dar dall’Academia una
mercede conveniente, di che ci rimetteremo al detto S.r Fulvio » (BIANCHI 2011b, ép. XX, p. 115).
87
BIANCHI 2011b, ép. XXIV, p. 119.
88
Pour Achille Tatius v. ci-dessus ; l’editio princeps d’Eustathe sera procurée en 1617 à Paris par
G. Gaulmin, mais la traduction italienne de Lelio Carani était déjà disponible (Florence 1550).
89
CARO 2002, pp. 23, 25 ; sur l’editio princeps de la traduction de Longus de Caro v. GARAVELLI
2001.
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
53
Il y a un autre élément qu’il faut rappeler ici dans le cadre de la transmission et
réception d’Achille Tatius au XVIe siècle, quand ce roman était encore inédit.
Bien qu’il n’y ait aucune mention dans les éditions modernes du roman, nous
devons relever que quelques années avant l’editio princeps (1601), des courts extraits d’Achille Tatius encore inédits sont apparus en version imprimée dans le commentaire d’un autre romancier. Dans les brèves Notae au texte de Longus dans
l’editio princeps (Florence 1598)90, en effet, Raffaele Colombani, le responsable de
cette édition, a ajouté quelques passages grecs pris dans les aventures de Leucippé
et Clitophon, œuvre – comme il prend soin de le souligner – de l’elegantissimus
scriptor Achilles Statius encore ajnevkdoto", inédit. Il s’agit donc d’une donnée de
certaine importance, bien qu’il semble que ces extraits d’Achille Tatius n’aient pas
attiré l’attention des savants91. Il vaut donc la peine de transcrire toutes les références et les extraits du roman d’Achille Tatius qui sont dans les Notae92 :
1. à p. 83 (à propos de Longus I.24.4 [ed. pr. p. 11] : kai; ajrxamevnh" ejmpnei'n etc.), nous trouvons la première référence explicite, sans texte grec, à
Achille Tatius : on fait clairement allusion à II.7.3-7, où le protagoniste Clitophon,
avec la même amatoria calliditas qu’utilise Daphnis dans les Pastoralia, parvient à obtenir les baisers de Leucippé simulant une piqûre d’abeille sur les lèvres :
Similis amatoria calliditas est illa Clitophontis apud Achil. Statium, in ore vulnus
accepisse a quadam ape simulantis, ut eius labris sua Leucippe admoveret, indeque
suavia ipse furari posset.
2. À p. 86 (à propos de Longus II.7.2 [ed. pr. p. 20] : duvnatai de; tosou'ton
o{son oujde; oJ Zeuv"), au sujet du passage où Longus se réfère à la puissance d’Éros qui dépasse même celle de Zeus, Colombani introduit une courte citation
d’Achille Tatius I.2.1 :
Sic Achil. Stat. de Amoris vi et ipse loquens, a[rcei brevfo" oujranou' kai; gh'"
kai; qalavssh".
3. À p. 88 (à propos de Longus II.23.1 [ed. pr. p. 28] : hJmivgumnoi kai; ajnupovdetoi: ta;" kovma" lelumevnai), Colombani a annoté le passage I.1.7 :
90
LONGUS 1598.
Ces extraits n’avaient pas échappé à Villoison : « interdum in suis notis nonnulla Achillis
Tatii qui nondum lucem viderat, loca contulit [scil. Colombani] » (VILLOISON 1778, p. LIII n. *).
92
Dans la transcription suivante des Notae de Colombani toutes les abréviations ont été résolues et l’orthographe normalisée.
91
54
NUNZIO BIANCHI
Similis apud Achil. Stat. lib. I. est descriptio earum virginum, quae Europae
comites erant, eius autem verba haec sunt. kovmai kata; tw'n w[mwn lelumevnai: to; skevlo" pa'n gegumnwmevnon: to; me;n a[nw, tou' citw'no": to; de;
kavtw, tou' pedivlou: to; ga;r zw'sma, mevcri govnato" ajnei'lke to;n
citw'na.
4. À p. 93 (à propos de Longus IV.2.4 [ed. pr. p. 58] : kai; tau'ta mevntoi lepth'"
aiJmasia'" perievqei perivbolo"), Colombani cite Achille Tatius I.1.5 :
Sic Achil. Stat. lib. I. pulcherrimum et ipse pratum describens, o{lon, inquit, ejteivcize to;n leimw'na peribolhv.
5. À p. 93, dans la nota suivante (à propos de Longus IV.2.5 [ed. pr. p. 58] : ejn
metewvrw/ de; oiJ klavdoi sunevpipton ajllhvloi" kai; ejphvllatton ta;"
kovma"), Colombani a cité Achille Tatius I.1.3 :
Achil. Stat. in simili fere descriptione. devndrwn aujtoi'" ajnemevmikto favlagx,
kai; futw'n. sunech' ta; devndra: sunhrefh' ta; pevtala: sunh'pton oiJ
ptovrqoi ta; fuvlla, kai; ejgevneto toi'" a[nqesin o[rofo" hJ tw'n fuvllwn
sumplokhv.
6. Une ligne plus loin, encore à p. 93 (à propos de Longus IV.2.6 [ed. pr. p.
58] : h\san kai; ajnqw'n prasiaiv), Colombani a annoté le passage I.1.5 :
Ach. Sta. aiJ de; prasiai; tw'n ajnqevwn, uJpo; ta; pevtala tw'n futw'n stoichdo;n ejpefuvkesan.
7. À p. 95 (à propos de Longus IV.17.6 [ed. pr. p. 66] : qeou;" ejmimhsavmhn),
dans une des notes les plus longues, Colombani cite Achille Tatius I.5.6-7 (voir
fig. 3) :
Quibus adiungam locum e libro primo elegantissimi scriptoris Achil. Stat. utpote
ajnekdovtou. ubi, cum puer quidam, Apollinis ac Daphnes fabulam ad citharam
accinisset, Clitophontisque amori ea cantilena ardentiores faces subiecisset,
uJpevkkauma ga;r, inquit ille, ejpiqumiva", lovgo" ejrwtikov". ka]n eij" swfrosuvnhn ti" eJauto;n nouqeth'/, tw'/ paradeivgmati pro;" th;n mivmhsin ejreqivzetai. mavlisqΔ o{tan ejk tou' kreivttono" h\/ to; paravdeigma. hJ ga;r
w|n ajmartavnei ti" aijdw;", tw'/ tou' beltivono" ajxiwvmati parrhsiva givnetai. kai; tau'ta pro;" ejmauto;n e[legon: ijdou; kai; ΔApovllwn ejra'/, kajkei'no" parqevnou, kai; ejrw'n oujk aijscuvnetai, ajlla; diwvkei th;n parqevnon: su; de; ojknei'" kai; aijdh'/ kai; ajkaivrw" swfronei'"… mh; kreivttwn ei\
tou' qeou'…
Bien que le texte contenu dans les Notae soit au total de faible longueur, on
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
55
peut néanmoins faire quelques observations sur le type textuel du manuscrit
d’Achille Tatius que Colombani avait utilisé93. On peut exclure le manuscrit F94,
qui fait partie d’une branche distincte par rapport à les familles a (MWD) et b
(VGE) :
3. tou' citw'no" Colombani MW VG : tou' leimw'no" [transp. post kavtw E] D
E to;n citw'na F
5. sumplokhv Col. MWD VGE : suevceia F
7. ajlla; diwvkei Col. MWD VGE: diwvkein F
Nous sommes en mesure d’exclure aussi les manuscrits de la famille
a (MWD) :
3. pa'n Col. VE D: a{pan MW G F
5. oiJ ptovrqoi Col. VGE F: ptovrqoi MW ptovrqo" D
6. stoichdo;n Col. VE : stichdo;n MWD G F
En particulier, nous pouvons exclure assurément le manuscrit D :
3. ga;r Col. codd. : om. D
5. ta; pevtala MW VGE F : ta; pevtala tw'n futw'n D
-. sunh'pton MW VGE F : sunh'ptwn G sunh'pteto D
-. oiJ ptovrqoi Col. VGE F : ptovrqoi MW ptovrqo" D
6. ajnqevwn Col. VGE : ajnqw'n MW F a[llwn futw'n D
7. nouqeth'/ Col. MW VGE F : nomoqeth'/ D
En ce qui concerne la famille b (VGE), dont le texte des Notae semble être
très proche, il faut noter que dans Achille Tatius I.1.3 (5) Colombani imprime
ejgevneto à la place de ejgivneto du reste de tradition, à l’exclusion de G, mais ce
choix semble une simple coïncidence ou plutôt une modification intentionnelle
de l’éditeur. Le manuscrit dont Colombani a pris ces extraits semble donc être
93
Les manuscrits d’Achille Tatius sont indiqués selon les abréviations utilisées dans l’édition de
VILBORG 1955 : A = Royal 16.D.XVIII, B = Monac. gr. 96, C = Vat. Pal. gr. 52, D = Vat. gr. 914, E
= Ambros. G 48 sup., F = Laur. Conv. soppr. 627, G = Marc. gr. 607, H = Vat. gr. 1350, L = Vind.
Phil. gr. 329, M = Marc. gr. 409, N = Par. Suppl. gr. 249, O = Reg. gr. 101, P = Par. gr. 2913, Q =
Vat. Pal. gr. 418, R = Vat. gr. 1348, S = Vat. gr. 2367, T = Tubing. Mb 16, U = Vat. gr. 1347, V =
Vat. gr. 114, W = Vat. gr. 1349, X = Par. gr. 2895, Z = Par. gr. 2903.
94
Ceci est également confirmé par le fait que pour l’editio princeps de Longus il n’a pas été utilisé
le Laur. Conv. soppr. 627 (F), le célèbre manuscrit des romanciers, qui était conservé dans la Badia
de Florence : cf. BIANCHI 2011b, p. 125 n. 51.
56
NUNZIO BIANCHI
proche de la famille b de la tradition d’Achille Tatius (tandis que l’editio princeps du
roman suivra la famille a).
Nous devons en outre souligner que la leçon gegumnwmevnon (3), à la place de
gegumnwmevnai des manuscrits, ne se retrouve pas dans la tradition du roman et
anticipe une conjecture que Vilborg attribue à Jackson, et qui devrait donc être
enregistrée dans l’apparat critique d’une édition future d’Achille Tatius.
Il faut noter en outre que, pour le nom du romancier (presque toujours abrégé, sauf dans le cas 1), Colombani utilise la forme Statius qui est conforme à la
vulgate du temps et qui se trouvait peut-être dans le manuscrit à sa disposition.
En ce qui concerne la famille b (à laquelle semble appartenir le manuscrit deperditus de Colombani), on peut relever que la forme Stavtio" apparaît seulement
dans la sous-classe x de cette famille, les manuscrits UTXZ et H95 (tous du XVIe
siècle)96. A ce sujet, il faut noter que dans les Notae de Colombani les citations
d’Achille Tatius sont toutes issues du premier livre (I.1.3, 1.5, 1.7, I.2.1, I.5.6-7 ;
mise à part la première référence à II.7.3-7, qui est sans texte grec) : les citations
(il s’agit principalement de passages sentencieux qui dans les manuscrits sont souvent marqués en marge) sont donc prises par Colombani en séquence, comme s’il
avait suivi l’ordre de lecture du roman, et ne vont pas au-delà du premier livre du
roman. Nous pourrions donc, tout en gardant quelque prudence, supposer
quelques autres détails sur les caractéristiques de ce manuscrit perdu utilisé par
Colombani qui pourrait en effet refléter la même structure textuelle que les
manuscrits UTXZ (la sous-classe x), où est transcrit Longus avec Achille Tatius
I.1-1097.
Le manuscrit dont Colombani a tiré le texte de Longus pour l’impression de
l’editio princeps des Pastoralia a abouti ex Bibliotheca Aloisii Alamannii (à savoir Luigi
Alamanni, 1558-1603)98, qui, « sans doute confié directement à l’imprimeur, disparut sans laisser de trace »99, du point de vue textuel, est très proche aux manus-
Le manuscrit R présente Tativou ante correctionem ; certains manuscrits sont sans inscriptio (E,
L) ; dans G une autre main à écrit ΔAgaqivou scolastikou'. Il faut noter que V et ses exemplaires OQ présentent la forme incorrecte Tativ w / (après les génitifs ΔAcilev w " [sic]
ΔAlexandrevw") et en particulier que dans le manuscrit O, au-dessus de l’inscriptio, une main peutêtre du XVIe siècle à écrit Achilles Statius etc.
96
Le plus ancien, le Paris. gr. 2895 (X), ne peut pas être postérieur à 1539 ; le Vat. gr. 1347 (U)
et le Tubing. Mb 16 (T) sont étroitement liés à Fulvio Orsini (le premier est écrit de sa propre main
et le second sous propre initiative par Giovanni Onorio).
97
Très intéressant, à ce sujet, le cas textuel suivant : mavlisqΔ Col. WD F UTZ H: mavlisqa X
kai; mavlisqΔ M ABC K kai; mavlista VEG O Q (7).
98
Expert en théologie et philosophie, mathématique et astronomie, français et hébreu, Luigi
Alamanni était un excellent traducteur, il connaissait bien le grec, qu’il avait appris auprès de Piero
Vettori. Cf. VIEILLEFOND 1987, p. XL.
99
VIEILLEFOND 1987, p. LXI.
95
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
57
crits UTXZ. Il faut mettre en compte, à ce point, la possibilité que Colombani
avait trouvé le texte d’Achille Tatius dans le même manuscrit que Longus : en ce
cas, nous aurions, donc là, un indice supplémentaire pour reconstruire la physionomie du manuscrit perdu d’Alamanni : outre le roman de Longus, il est possible
que ce manuscrit contenait également le texte d’Achille Tatius, à la deuxième
place et fragmentaire ainsi que dans les manuscrits UTXZ.
En 1601, après une longue période de gestation, donc, précédée, comme on
l’a déjà dit, par plusieurs tentatives infructueuses, et par des traductions imprimées, partielles ou intégrales, et quelques excerpta imprimés, le roman d’Achille
Tatius a été finalement mis sous presse.
Università degli Studi di Bari
NUNZIO BIANCHI
[email protected]
ABRÉVIATIONS
ACHILLES Tatius 1544 = Narrationis amatoriae fragmentum e graeco in latinum conversum
L. Annibale CRUCEIO interprete, Lugduni 1544.
ACHILLES Tatius 1546 = Amorosi ragionamenti. Dialogo, nel quale si racconta un compassionevole
amore di due amanti, tradotto per M. Lodovico DOLCE dai fragmenti d’uno antico scrittor greco, Vinegia 1546.
A CHILLES T ATIUS 1551 = Achille Tatio Alessandrino, Dell’amore di Leucippe et di
Clitophonte, nuouamente tradotto dalla lingua greca, Venetia 1551 [c. 114v : « Il fine de
gli otto libri d’Achille Tatio Alessandrino, tradotti per Francesc’Angelo Coccio da
Iano, et nuovamente stampati da Piero et fratelli de Nicolini da Sabio in Venetia
MDL»].
ACHILLES TATIUS 1554 = Achillis Statii Alexandrini de Clitophontis et Leucippes amoribus
libri VIII e graecis latini facti a L.A. CRUCEIO, Basileae 1554.
A CHILLES T ATIUS 1563 = Achille Tatio Alessandrino, Dell’amore di Leucippe, et di
Clitophonte, nuouamente tradotto dalla lingua Greca, Venetia 1563.
ACHILLES TATIUS 1568 = Les amours de Clitophon et de Leucippe, escrits jadis en Grec, par
Achilles Statius Alexandrin, et depuis mis en Latin, par L. Annibal [DELLA CROCE]
Italien, et nouvellement traduits en vers françois [par François DE BELLEFOREST],
Paris 1568.
ACHILLES TATIUS 1572 = Propos amoureux contenans le discours des amours et mariage du seigneur Clitophant [sic] et damoiselle Leusippe d’Achilles Tatius, traduitz de grec en langue latine et tusquane, et depuis nouvellement remitz en langue franc̜oyse [par Jacques DE
ROCHEMAURE], Lyon 1572.
ACHILLES TATIUS 1597 = The most delectable and plesant historye of Clitophon and Leucippe […]
nowe newlie translated into English by W.B. [William BURTON], London 1597.
ACHILLES TATIUS 1601 = Achillis Tatii De Clitophonts et Leucippes amoribus lib. VIII, Longi
58
NUNZIO BIANCHI
Sophistae De Daphnidis et Chloes amoribus lib. IV, Parthenii Nicaeensis De amatoriis affectibus lib. I iterum edita graece et latine [par Juda et Nikolaus B ONNENVICT ],
[Heidelberg] 1601.
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Colleghi, Dottori e Dottorandi di ricerca della Facoltà di Lettere e Filosofia, a cura di C.
BRAIDOTTI, E. DETTORI, E. LANZILLOTTA, I, Roma 2009, pp. 13-33.
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ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
59
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ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
Fig. 1. Manuscrit d’Achille Tatius, Sinait. 1197 (Zacharias Calliergi), f. 1r
63
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NUNZIO BIANCHI
Fig. 2. Traduction d’Achille Tatius par F. A. Coccio (Venice 1551, cc. *viiiv-1r)
ACHILLE TATIUS ÉDITÉ ET INÉDIT AU XVIE SIÈCLE
Fig. 3. Achille Tatius dans l’editio princeps de Longus (Florence 1598, p. 95)
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