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30 novembre 2005
Institut du Renseignement
Centre d’Etudes du Terrorisme
Le dirigeant du Hezbollah Hassan Nasrallah a prononcé un
discours belliqueux lors de la cérémonie organisée à l’occasion
de la remise des corps des terroristes du groupe. Nasrallah a de
nouveau présenté son organisation comme le défenseur du
Liban, tout en soulignant son intention de poursuivre la
confrontation avec Israël et en insistant sur son “droit” de
kidnapper des soldats de Tsahal pour les échanger contre des
prisonniers libanais (cf. des terroristes purgeant leurs peines en
Israël)
(Mise à jour no. 3 de l’article du 22 novembre)
Le Hezbollah récupère les corps des trois terroristes tués à Naqoura (droite); les funérailles
de l’un des terroristes (gauche) (Télévision Al-Manar, 25 novembre).
2
Remise par Israël des corps des terroristes du Hezbollah
Le 25 novembre 2005 à Naqoura, Israël a remis au Hezbollah les corps de trois
terroristes de l’organisation, tués dans une attaque au cours de laquelle ils prévoyaient
d’enlever des soldats de Tsahal (21 novembre). Les corps ont été remis à
l’Organisation de Santé Islamique du Hezbollah par la Croix Rouge, sans intervention
du gouvernement libanais.
Les cérémonies organisées à l’occasion de la remise des corps ainsi que
les funérailles ont toutes été reprises dans les médias du Hezbollah,
accompagnées de clips vidéo belliqueux et d’images de la position de Tsahal
(Tulip) dans le secteur de Ghajar en feu (il s’agit de la poursuite des tentatives
du Hezbollah pour transformer l’échec de ses opérations en un succès de
propagande). A la fin de la cérémonie à Naqoura, une foule massive a
entonné le slogan traditionnel : “mort à l’Amérique et à Israël” (Télévision AlManar, Radio Nur, 25 novembre).
La principale cérémonie de remise des trois corps a eu lieu au sud de Beyrouth
(quartier chiite), en présence du dirigeant du Hezbollah Hassan Nasrallah et d’autres
responsables du mouvement. Des responsables du Hezbollah occupant des postes
officiels au sein du gouvernement libanais ont également assisté à la cérémonie : le
Ministre libanais de l’Energie et de l’Eau, Muhammad Fneish, et le Président de la
faction du Hezbollah au parlement, Muhammad Raad. Etaient également présents à la
cérémonie,
le
commandant
de
l’ambassadeur iranien au Liban.
l’armée
libanaise
Michel
Suleiman
et
3
La cérémonie s’est focalisée autour d’un discours belliqueux du dirigeant du
Hezbollah Hassan Nasrallah, dans lequel il a tenté de minimiser l’étendue des
dommages imputés à son organisation et a répliqué aux accusations portées
contre lui par ses opposants sur la scène interne libanaise. Ci-dessous les
principaux points des événements du 21 novembre, auxquels s’est reporté
Hassan Nasrallah dans son discours (Télévision Al-Manar, 25 novembre):
Le dirigeant du Hezbollah Hassan Nasrallah prononçant un discours durant la cérémonie
(droite); la foule attentive (gauche) (Al-Jazeera, 20 novembre)
Présentation de l’attaque du Hezbollah du 21 novembre comme
une riposte aux incursions israéliennes. Dans son discours,
Nasrallah a réaffirmé que le Hezbollah défendait le Liban contre les
incursions israéliennes en territoire libanais. Il a réitéré la fausse
allégation selon laquelle l‘attaque du 21 novembre a été perpétrée suite
aux “agressions” israéliennes. Selon Nasrallah, les incursions
israéliennes se sont récemment multipliées car Israël estime que le
Hezbollah s’est affaibli suite au retrait des forces syriennes du Liban et
à la résolution 1559 du Conseil de Sécurité. Nasrallah a affirmé que le
Hezbollah a décidé de ne pas riposter durant une longue période afin
de voir les réactions du monde, mais ni la communauté internationale
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ni le Conseil de Sécurité n’ont répondu. Israël, selon Nasrallah, a mal
interprété l’absence de riposte du Hezbollah et le conflit entre les deux
entités est donc devenu inévitable. Nasrallah a également affirmé une
nouvelle fois que les événements du 21 novembre étaient une
“victoire” du Hezbollah.
Menace de poursuivre les tentatives d’enlever des soldats,
affirmant que c’est le droit du Hezbollah d’agir ainsi. Nasrallah a
déclaré que son organisation avait le “droit naturel” d’enlever des
soldats israéliens, afin d’obtenir des informations et de faire libérer
les prisonniers libanais (cf. les terroristes ayant commis des
attaques depuis le Liban et purgeant leurs peines en Israël). Selon
Nasrallah, puisque les négociations (avec Israël) ne donnent aucun
résultat, et puisque le Hezbollah veut faire libérer les prisonniers et
obtenir des informations sur les disparus, des soldats israéliens
doivent être enlevés (“c’est notre droit naturel de capturer des
soldats israéliens ”). Il faut rappeler que le 28 novembre, la chaîne
de télévision du Hezbollah Al-Manar a diffusé un documentaire sur
les craintes israéliennes face aux enlèvements de soldats suite au
discours de Nasrallah.
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Israël craint l’enlèvement de soldats suite au discours de
Nasrallah : extrait d’un clip vidéo diffusé sur la chaîne de
télévision du Hezbollah. (Télévision Al-Manar, 28
novembre)
Présentation du Hezbollah comme l’organisation chargée de la
confrontation avec Israël, en insistant sur sa collaboration avec les
Palestiniens.
1
Nasrallah a appelé les Libanais à confier la question
israélienne au Hezbollah (accordant ainsi une légitimité à l’existence du
Hezbollah comme milice armée au Liban). Selon Nasrallah, c’est le
Hezbollah qui empêche Israël de porter atteinte à la souveraineté libanaise,
lequel détient des prisonniers libanais, humilie le Liban et en fait un Etat
“israélien” (plutôt qu’arabe). Il a affirmé qu’Israël ne réalisait pas
d’incursions terrestres ni maritimes au Liban grâce à la dissuasion de son
organisation. Il a toutefois admis que son groupe ne pouvait pas fournir
une riposte adéquate aux incursions aériennes d’Israël. A la fin de son
discours, Nasrallah a souligné que même après le dernier incident,
plusieurs membres de l’organisation “attendaient leur tour” (de mourir en
martyrs), et qu’il n’y aurait pas “une seule motte de terre libanaise sous
occupation ou un seul prisonnier abandonné dans les prisons israéliennes”
(Al-Intiqad, 25 novembre).
Rejet de l’affirmation selon laquelle le Hezbollah sert les intérêts
iraniens et syriens. Nasrallah a démenti que l’attaque du 21 novembre
avait eu pour but de servir les intérêts de la Syrie et de l’Iran. Il a tenté,
comme de coutume, de minimiser la signification du lien entre son
1
Dans un autre discours, Hassan Nasrallah a appelé tous les Musulmans et les Chrétiens à agir en vue de la
libération de Jérusalem et à ne pas oublier la cause du peuple palestinien, “fer de lance” de la lutte contre Israël,
seul sur le champ de bataille (Télévision Al-Manar, 29 novembre ).
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organisation, la Syrie et l’Iran, affirmant que le Hezbollah ne reçoit ses
ordres ni de Damas ni de Téhéran, mais “de tous les Libanais opposés à
l’agression”. Dans son discours, Nasrallah a toutefois insisté sur
l’importance pour son organisation de se tenir aux côtés de la Syrie,
face aux développements liés au meurtre de Rafik Hariri.2 Il faut préciser
que, s’exprimant durant les funérailles d’un des terroristes tués à Ghajar,
Hashem Safi al-Din, le responsable du Conseil exécutif du Hezbollah, a
insisté sur “la légitimé de l’alliance entre la Syrie, l’Iran et le
Hezbollah, ceux-ci ayant joué un rôle important dans la région en général
et au Liban en particulier …” (Agence de Presse Libanaise, 27 novembre).
Syrie
Hezbollah
Le Hezbollah ballotté entre l’ONU et la Syrie : caricature décrivant les
pressions et contraintes auxquelles l’organisation fait face (Al-Sharq al-Awsat,
25 novembre)
2
A ce sujet, voir l’article (en anglais), “Thirty years of Syrian involvement in the Lebanese crisis: Lebanon 's
transformation from a strategic asset in the days of Hafez Assad to a burden and a source of weakness in the days
of his son, Bashar Assad” (24 octobre 2005).
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L’alliance entre la Syrie, l’Iran et le Hezbollah est légitime et
importante : Hashem Safi al-Din aux funérailles de l’un des
terroristes tués (Télévision Al-Manar, 27 novembre)
En conclusion, le discours montre clairement que le Hezbollah, ainsi que son
dirigeant Hassan Nasrallah, font l’objet de critiques internes libanaises (voir plus bas).
Certaines des déclarations de Nasrallah visaient à détourner ces critiques. Dans son
discours, Nasrallah a insisté sur le caractère belliqueux et jihadiste du Hezbollah,
ainsi que sur son intention de continuer à commettre de nouvelles attaques, en
insistant sur l’enlèvement d’Israéliens, sous le prétexte de “défendre le Liban” et
ses intérêts. Il faut noter que cette fois-ci, de même que lors de la précédente remise
de corps de terroristes du Hezbollah par Israël, les dépouilles ont été directement
transférées au Hezbollah et non au gouvernement libanais. Celui-ci, de son côté, ne
fait rien pour contrôler l’organisation et imposer son autorité le long de la
frontière israélienne, comme le stipule la Résolution 1559 du Conseil de Sécurité
de l’ONU.
Critique libanaise contre le Hezbollah suite à l’attaque
du 21 novembre
Suite à l’attaque perpétrée par le Hezbollah le 21 novembre, Jubran Tuweini,
député libanais et rédacteur du quotidien populaire Al-Nahar, a vivement critiqué
l‘organisation. Il a précisé que la principale question que soulevait le discours de
Nasrallah était de savoir s’il existe un gouvernement centralisé au Liban, et si la
décision de faire la guerre ou la paix est entre les mains du gouvernement
libanais “ou dans les mains de partis, milices ou de la résistance” (cf. dans les
mains du Hezbollah). Selon Tuweini, il existe un consensus au Liban selon lequel la
question du désarmement du Hezbollah doit être discutée dans le cadre intralibanais des discussions du gouvernement libanais (Al-Jazeera, 25 novembre).
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Mahmoud Qumati, membre du Conseil Politique du Hezbollah, a qualifié les
propos de Tuweini de “message délivré par un collaborateur ou un agent étranger”. Il
a déclaré que son organisation rejetait les affirmations selon lesquelles les armes du
Hezbollah posent un problème au Liban et interfèrent avec le processus de
reconstruction du pays et de ses institutions. Selon Qumati, c’est le contraire qui est
vrai : les armes du Hezbollah ont permis de libérer le Liban et de lui apporter “tout le
respect et la gloire”. Qumati a une fois de plus affirmé que les armes du Hezbollah
avaient pour but de défendre le Liban, et a qualifié la Résolution 1559 du Conseil de
Sécurité de l’ONU de “résolution israélienne”. Qumati a insisté sur le fait que la
“résistance” (cf. le Hezbollah) était libanaise, que ses décisions étaient des décisions
libanaises indépendantes et qu’elle “poursuivra la confrontation avec Israël” (AlJazeera, 25 novembre).
Le rédacteur en chef du quotidien libanais Al-Safir, Sati' Nur al-Din, a
également critiqué le Hezbollah. Il a accusé l’organisation d’avoir “envenimé”
unilatéralement la question de son désarmement en affirmant posséder plus de 14 000
roquettes, avouant de fait être une force militaire conventionnelle et “non une unité
commando indépendante”. Il a précisé que le fait d’étendre l’intensité du conflit entre
le Hezbollah et Israël pourrait conduire les pays européens à adopter les positions
israéliennes concernant la liste des priorités de la Résolution 1559 du Conseil de
Sécurité de l’ONU (cf. les pressions exercées pour appliquer la décision de
démanteler les milices libanaises).Nur al-Din a également déclaré qu’une action du
Hezbollah (comme celle commise le 21 novembre) pourrait aggraver les pressions
dont font l’objet la Syrie et l’Iran au lieu de les alléger (Al-Safir, 24 novembre).
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Campagne du Hezbollah contre l’application de la
Résolution 1559 du Conseil de Sécurité de l’ONU
Campagne du Hezbollah pour empêcher l’application de la
Résolution 1559 du Conseil de Sécurité de l’ONU : silhouette en
carton de quatre mètres du Président américain George W. Bush,
placée par des membres du Hezbollah près de la Porte de Fatma
(à proximité de la ville israélienne de Metulla). Le Président y est
représenté avec un missile dans sa poche (avec les mots “danger
mortel” inscrits dessus), se rendant au siège de l’ONU à New
York. Sur le siège de l’ONU se trouve un missile avec le nombre
“1559”, que le Président Bush tente de tirer sur le Liban. Des
affiches du Hezbollah peuvent être aperçues en fond (Agence de
Presse Libanaise, 2 décembre 2005; photo : Al-Intiqad, magazine
du Hezbollah, 2 décembre 2005).