"Le « contract manager » doit pouvoir façonner la matière brute

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"Le « contract manager » doit pouvoir façonner la matière brute
14/9/2015
[Direction juridique] L'actualité Profession : "Le « contract manager » doit pouvoir façonner la matière brute", analyse R. Rougeron
"Le « contract manager » doit pouvoir façonner la
matière brute", analyse R. Rougeron
10/09/2015
Pour Rémy Rougeron, directeur juridique
de Thales et président de l’AFCM
(Association française du contract
management), le "contract manager" se
révèle efficace s’il est associé aux
réflexions contractuelles dès leurs
balbutiements.
Doter l’entreprise d’un « expert du contrat »,
capable de prévenir ­ au lieu de guérir ­ les
problématiques commerciales, financières et
juridiques de l’engagement souscrit, c’est la
vision du métier de contract manager défendue
par l’AFCM. L’association tente de
professionnaliser ce nouveau parcours professionnel, qu’elle estime nécessaire à l’entreprise pour
jouer du contrat dans la concurrence internationale. Explication par son président, Rémy Rougeron.
Pourquoi le contract management est­il indispensable à l’entreprise ?
Aujourd’hui, il existe deux principaux enjeux pour l’entreprise : la compliance et la conformité aux
engagements contractuels souscrits. Le contract manager intervient sur ce deuxième volet.
De plus en plus, le contrat se révèle être un terrain où
s'exprime un rapport de force entre les parties. Ils sont
négociés âprement. Les clients et les fournisseurs sont aguerris
à la matière contractuelle. Le terrain du contrat devient donc un
enjeu très important dans la vie des affaires. Le non­respect
des engagements découlant du contrat peut entraîner une
problématique de réputation commerciale. De plus, les
entreprises bénéficiaient auparavant de niveaux de marges qui
leur permettaient de gérer les principaux aléas rencontrés dans
le cadre de l’exécution du contrat. Aujourd’hui ce n’est plus le cas ! Sur des contrats au cycle long, les
risques de dérapages sont significatifs. Ils peuvent se conclure par une perte à terminaison qui peut
coûter très cher à l’entreprise. Il devient ainsi primordial de mettre en place une organisation
permettant de s’assurer que l’engagement souscrit sera tenu.
De plus en plus, le
contrat se révèle
être un terrain où
s'exprime un
rapport de force
entre les parties. La manière de négocier un contrat a donc évolué ?
Avant « on laissait les juristes faire ». Pour négocier et finaliser un acte de vente ou d’achat, on faisait
appel à la direction juridique. Après signature, les directions opérationnelles reprenaient le flambeau.
Désormais, le contrat est devenu un outil stratégique que l’ensemble des directions de
l’entreprise s'est approprié. Les conséquences de la non­tenue des engagements contractuels sont
telles que le contrat ­ et son suivi ­ sont appréhendés par les plus hautes instances de la société.
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D’où la nécessité pour l’entreprise de se doter d’« experts du contrat » qui travaillent pendant la
phase de préparation de l’engagement ­ ils le négocient, le rédigent ­ et en assure le « service après­
vente » en accompagnant son exécution jusqu'au dernier jour.
Selon vous, le contract manager doit donc gérer tous les cycles de la vie d’un contrat.
Pourquoi n’est­ce pas encore véritablement le cas dans certaines entreprises ?
Le métier est en train d’évoluer fortement. Il cherche à répondre aux besoins des entreprises de
sécuriser le contrat dès sa phase de conception. Le contract manager a un spectre de plus en plus
large de responsabilités.
Il est vrai, cependant, que le positionnement et le rôle du
contract manager évolue selon le business modèle de
l’entreprise. Mais c’est aussi le cas pour un juriste d’entreprise.
En fonction de l’organisation interne de l’entreprise et de son
secteur, le juriste peut être amené à intervenir uniquement
dans la phase de rédaction et de négociation du contrat, ou en
« mode guichet », afin de donner son avis sur une clause
rédigée par un département opérationnel. Chaque entreprise
décide donc de son organisation. Je pense, toutefois, qu’il y aura une tendance naturelle à mieux
positionner le contract manager en lui accordant un rôle très en amont de l’engagement contractuel
et ce jusqu’à son terme.
...il y aura une
tendance naturelle
à mieux
positionner le
contract
manager... Pour moi, l’acte de contract management doit débuter le jour où est entamée la rédaction d’une offre,
afin d’identifier ses forces et ses faiblesses et de définir les dispositions et les niveaux de provisions
pour risques adaptés. Il est également nécessaire en phase de négociation du contrat. Puis, ses
actions découlent du résultat de la négociation obtenue. Dès lors, en cantonnant le contract
management à la phase d'execution, on demande au contract manager de comprendre et de tirer le
meilleur parti d’un document auquel il n’a ni participé à la conception, à la rédaction et à la
négociation. C’est demander à un sculpteur de réaliser son œuvre sur un bloc de pierre pré­taillé. Le
contract manager doit pouvoir façonner la matière brute.
Le contract management à la française est­il différent de celui à l’anglo­saxonne ?
Le contract management est né dans les pays anglo­saxons ­ bien avant d’émerger en France ­ au
moment où les contrats étaient négociés avec d’importants niveaux de marges [comme explicité plus
haut, ndrl]. La fonction était appréhendée d’une manière différente : il s’agissait davantage de
relationnel commercial. Aujourd’hui encore, dans les organisations anglo­saxonnes, les juristes sont
souvent cantonnés dans un rôle de pur conseil juridique.
En France, le métier a émergé dans un environnement différent, selon un autre tempo. Chez Thales,
il nous a semblé nécessaire d’intégrer totalement les deux fonctions et de les faire intervenir, toutes
les deux, le plus en amont possible. Nous ne faisons plus de distinction entre problématique
commerciale et juridique. Le contract management à la française a une dimension plus juridique que
celui à l’anglo­saxonne.
Si le juriste intervient aussi dans la négociation contractuelle, n’y a­t­il pas un risque de
concurrence entre celui­ci et le contract manager ?
Chez Thales, juristes et contract managers ­ réunis au sein d’une même direction, intitulée legal
& contract ­ partagent leur expertise. Un travail en binôme est mis en place. Il n’y a pas de rivalité,
mais au contraire une complémentarité. Les juristes ont acquis une compétence beaucoup plus
opérationnelle sur les contrats, notamment sur leurs aspects financiers. Les contract managers sont,
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plus étroitement que par le passé, associés aux premières phases contractuelles ; ils participent à la
préparation, à la négociation et à la rédaction du contrat. Nous tirons une grande plus­value du
rapprochement de ces deux expertises.
Quelles sont les possibilités de carrière d’un contract manager ?
Une personne ayant la capacité de maîtriser l’ensemble de la problématique contractuelle : juridique,
financière et opérationnelle, se voit certainement promettre un rôle très important dans l’entreprise.
Au sein de la
direction de
Thales, les postes à
responsabilités ne
sont plus
uniquement
confiés à des
juristes. Au sein de la direction de Thales, les postes à responsabilités
ne sont plus uniquement confiés à des juristes. Certains
contract managers ce sont vus offrir la possibilité de gérer des
équipes complètes comprenant juristes et contract managers.
Ils prennent donc la tête de départements « juridique et
contrat » alors qu’ils ne sont pas juristes. Cela constitue une
ouverture pour des profils non purement juridique vers des
postes à responsabilités au sein de la direction juridique et des
contrats.
Pourquoi y a­t­il un défaut d’identification du contract
manager à sa propre fonction ?
La profession souffre effectivement d’un problème identitaire. Jusqu’à présent, la filière n’était pas
organisée. Par la professionnalisation du métier, nous arriverons à créer l’identité du contract
manager. Certaines personnes aujourd’hui se sentent encore loin de l’image du contract manager
que l’AFCM peut projeter. Elles n’ont pas le profil, le positionnement au sein de leur entreprise ou ne
sont pas responsables du panel de missions contractuelles décrites. Elles ont parfois peur d’être
mises à risques ou n’ont pas nécessairement d’adhérence avec notre vision de la profession. Il
appartient alors au management de chaque entreprise d’insuffler le dynamisme nécessaire au
renforcement de la profession. C’est aussi par cette politique dynamique, que l’entreprise
s’imprégnera dans toutes ses strates d’une culture de contract management. Mais nous parlons ici
d’une prochaine étape…
Propos recueillis par Sophie Bridier
Ecrit par
Propos recueillis par Sophie Bridier
Mots­clés
Contract management
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