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2 Luc Beauséjour, clavecin-pédalier / Pedal Harpsichord Grâce à la virtuosité, à l’élégance et à l’expressivité de son jeu, le claveciniste et organiste Luc Beauséjour a suscité tant l’enthousiasme du public que les éloges des critiques et des spécialistes. « La respiration naturelle de son clavecin, l’attention remarquable aux proportions et au chant en font un artiste rare. » Luc Beauséjour mène une carrière très active au Canada et à l’étranger. Il a également joué en Europe et en Amérique du Nord et du Sud. Il s’est produit dans le cadre de plusieurs festivals canadiens et européens importants. Il a également été invité à jouer les Variations Goldberg au Studio Glenn Gould, à Toronto, pour commémorer la naissance du grand pianiste canadien. Il a été consacré « Interprète de l’année 2003 » par le Conseil québécois de la musique et a remporté deux trophées Félix au Gala de l’ADISQ au Québec (2002 et 2006). Luc Beauséjour a enregistré plus de 25 albums dont plusieurs ont reçu des récompenses et distinctions dans les revues musicales. Luc Beauséjour a fondé en 1994 Clavecin en concert dont il est le directeur artistique. Harpsichordist and organist Luc Beauséjour is renowned for the elegance, virtuosity, and expressiveness of his playing, which has won him an enthusiastic audience and the continuing praise of critics and music specialists. “He plays with impeccable technique, tasteful embellishments, a wide range of emotion and a deep sensitivity.” Mr. Beauséjour leads a very active performing schedule in Canada and abroad that has taken him to Europe and North America. He was invited to perform the Goldberg Variations at the Glenn Gould Studio in Toronto for a CBC commemoration of the great pianist’s birthday. In the last few years, he has won numerous awards, including “2003 Performer of the Year” by the Conseil québécois de la musique and two trophées Félix au Gala de L’ADISQ (2202 and 2006). Luc Beauséjour has recorded more than 25 albums, many of which have won awards and praise from music magazines. Mr. Beauséjour is the Artistic Director of Clavecin en concert since 1994. www.clavecinenconcert.org 3 Œuvres célèbres au clavecin-pédalier Si le clavecin-pédalier n’a jamais connu d’heure de gloire, il a fait partie des instruments de travail de nombre d’organistes, particulièrement au XVIIIe siècle. J.C. Vogler, élève de Johann Sebastian Bach au service de la cour de Weimar, en possédait un aux aptitudes exceptionnelles, vantées aussi bien dans les publicités de l’époque que dans Anleitung zur musicalischen Gelahrteit (Conseils d’apprentissage musical) de Jackob Adlung, datant de 1758 : « On ajoute aussi parfois des pédales à ces instruments (le clavecin), ou mieux encore, on fait un corps de pédalier distinct sur lequel on pose le clavecin. Toutefois, il faut le construire avec beaucoup de soin, d’une part, pour que la tension des cordes ne déforme pas la caisse, d’autre part, pour que ces instruments tiennent bien l’accord. Le plus beau clavecin et, en même temps, le plus beau pédalier de clavecin que j’aie vus sont ceux que m’avait fait voir et entendre M. le bourgmestre Vogler à Weimar, qui avait donné lui-même les instructions pour leur construction. » Notons ici que Vogler, organiste à la cour de Weimar, était un élève et un admirateur de Bach. Adlung poursuit : « Le pédalier avait deux rangées de cordes non filées de huit pieds et une rangée de cordes filées de seize pieds. Le couvercle avait une porte qu’on pouvait ouvrir pour augmenter la sonorité. Les caisses étaient tous deux artistement recouvertes de bois de placage. » Dans son ouvrage posthume Musica mecanica 4 organœdi, il ajoute : « La caisse peut être construite comme celle d’un clavicorde ou comme celle d’un clavecin. Dans le deuxième cas, les cordes seront pincées par des plumes et on aura un clavecin à pédalier. Comme le clavecin se distingue par sa belle sonorité, un pédalier de ce genre sera du plus heureux effet. Cet instrument n’appelle pas une description particulière. Il se construit comme un clavecin ordinaire, mais avec une étendue de deux octaves seulement. Les sautereaux sont pareils, mais on les écartera davantage les uns des autres, puisque les deux octaves prennent autant de place que quatre dans un clavecin ordinaire. » Deux approches ont été privilégiées par les facteurs de l’époque. Dans la première, on juxtaposait au clavecin ordinaire des touches de pédale qui tiraient, à l’aide de ficelles ou d’un mécanisme, les touches les plus graves de l’instrument. Dans la seconde, deux clavecins indépendants l’un de l’autre étaient associés, l’inférieur étant actionné par les touches de pédale et disposant de cordes et registres propres, dans une parfaite complémentarité de timbres. C’est en s’inspirant de cette dernière configuration que le facteur Yves Beaupré a choisi d’imaginer l’instrument sur lequel Luc Beauséjour joue ici. « Le clavecin-pédalier reste un instrument exigeant et formateur, explique le claveciniste. Il permet de tout entendre. La polyphonie ressort avec une grande clarté, tout est restitué avec une remarquable exactitude. » Ceux qui touchent un clavecin-pédalier pour la première fois expriment une réelle fascination pour ses possibilités. On sait que Bach lui-même préférait un son riche, favorisant la résonnance. En 1708, alors qu’il travaillait au projet de restauration de l’orgue de SaintBlaise de Mülhausen, il avait souhaité qu’on intègre à l’instrument de nouveaux soufflets, un basson de 16 pieds, une viole de gambe et une soubasse de 32 pieds « qui donne sa profondeur à l’instrument tout entier ». Alors que l’orgue exige un sens de l’espace tout à fait particulier, qui se dilue souvent à l’enregistrement, le clavecin-pédalier offre à la fois cette profondeur recherchée et une précision dans le discours musical. Peu d’interprètes possédant un tel instrument à l’époque, les compositeurs n’ont pas cru nécessaire de destiner d’œuvres à son seul usage. Des musicologues du début du XXe siècle, dont Philipp Spitta et Albert Schweitzer, ont tenté de prouver que les Sonates en trio BWV 525-530 ou la Passacaille en do mineur avaient été composées pour le clavecinpédalier, mais aucune source fiable n’étaie cette hypothèse. Peu importe la controverse, puisque les pièces pour orgue du cantor de Leipzig se prêtent admirablement à cet instrument aujourd’hui presque entièrement disparu. Afin de mettre en lumière ses spécificités, Luc Beauséjour a souhaité présenter certaines pages célèbres, dont la Toccata en ré mineur BWV 565, afin que le mélomane puisse disposer d’un point de comparaison, mais surtout des œuvres qu’il affectionne particulièrement, propices à regroupements et contrastes. La Toccata s’amorce par un geste théâtral dans le registre supérieur, doublé à l’octave, qui tournoie jusqu’à un accord de septième diminuée se résolvant en ré majeur. Trois courts passages, eux aussi doublés, se chevauchent ensuite, permettant le retour à la tonalité principale. Rédigé alors que Bach était organiste à la cour de Weimar, l’Orgelbüchlein (Petit livre d’orgue) avait été pensé comme un recueil de 164 préludes de chorals. (Seuls 45 seront complétés.) Couvrant l’ensemble de l’année liturgique, ces pièces se voulaient à la fois ouvrage de référence pour les services religieux, traité de composition, profession de foi et manuel didactique. Pour qu’elle demeure facilement reconnaissable, la mélodie du choral est confiée à une voix, généralement le soprano. Parmi ceux ici présentés, Der Tag, der ist so freudenreich est associé à Noël, tandis qu’Es ist das Heil uns kommen her, pour le sixième dimanche de la Trinité, est conçu sur un hymne du catéchisme datant du XVe siècle. Pour plusieurs, le concept du prélude et fugue représente l’apex de l’écriture baroque. Avant d’atteindre la perfection du Clavier bien tempéré, la forme connaîtra toutefois une 5 progression certaine. D’abord mouvements externes du concerto (Allegro – Adagio – Fugue), prélude et fugue deviendront progressivement une unité bipartite. Le Largo de la Sonate en trio BWV 529 est ici inséré entre le Prélude et la fugue BWV 545, pratique courante à l’époque de Bach. L’imposante fugue, alla breve, est basée sur un motif de tétracorde ascendant, traité de façon souvent syncopée. Le Prélude et fugue BWV 541 comporte de nombreuses notes répétées, typique de son « style Weimar » (l’œuvre daterait vraisemblablement de 1712), tant dans la fugue que le prélude, dans lequel la reprise d’accords entiers joue un rôle essentiel. Une ligne fluide sert d’interlude entre les passages plus massifs de cette œuvre dense, dans laquelle Bach déploie sa rigueur compositionnelle. En opposition, le BWV 535, retravaillé de façon extensive par le compositeur, même s’il mise en partie sur les notes répétées dans le motif de la fugue, déborde de figures arpégées presque improvisées mais denses dans le prélude, ponctuées par des traits de gamme brillants et des passages de polyphonie touffue. La Passacaille en do mineur connaîtra une influence certaine sur de nombreuses pages des XIXe et XXe siècles. Robert Schumann lui-même décrivait les variations qui la constituent comme « si ingénieusement entremêlées qu’on ne cesse jamais d’en être étonné ». L’ostinato 6 de huit mesures, d’abord présenté au pédalier, subira 20 transformations. L’organiste Marie-Claire Alain suggère que les 21 évocations du thème peuvent être divisées en 7 groupes de 3 variations, chacun citant un vers d’un choral luthérien, dans un traitement similaire à celui favorisé dans l’Orgelbüchlein, une théorie à considérer quand on sait que, chez Bach, toute musique ne pouvait être offerte qu’au Très-Haut. © Lucie Renaud Famous Works on Pedal Harpsichord Although the pedal harpsichord never had its hour of glory, it was definitely used by a number of organists, particularly in the 18th century. J.C. Vogler, a student and admirer of J. S. Bach and organist at the court of Weimar, owned one of exceptional quality that was praised both in a contemporary advertisement and in Anleitung zur musicalischen Gelahrteit, a book on musical instruction by Jackob Adlung dating from 1758: “Pedals are sometimes added to these instruments (harpsichords), or better still, a separate pedal box is made, which is affixed to the harpsichord. However, this must be built with great care so that the tension of the strings does not deform the case and that these instruments hold their tuning well. The most beautiful harpsichord and, at the same time, the most beautiful pedal harpsichord that I have seen are those that Mr. Vogler, burgomaster in Weimar, allowed me to see and hear, and who had himself given the instructions for their construction.” Let us be reminded here that Vogler, organist at the Weimar Court, was a student and an admirer of Bach. He also noted that “the pedal box had two choirs of unwound 8-foot strings and one choir of wound 16-foot strings. The lid had a door that could be opened to increase the volume. The cases were both artistically covered with veneer.” In his posthumously published work Musica mecanica organoedi, Adlung added that “the case can be built like that of a clavichord or like that of a harpsichord. In the second case, the strings are plucked by quills and one will have a harpsichord with pedals. As the harpsichord is characterized by its beautiful sonority, pedals of this kind will produce a most happy effect. This instrument does not demand a particular description. It is built like an ordinary harpsichord, but with a range of only two octaves. The jacks are similar, but they are spaced farther apart, since the two octaves take as much space as four in an ordinary harpsichord.” Makers of the period favoured two ap proaches. The first was to simply outfit an ordinary harpsichord with a pedalboard, which was attached to the lowest notes of the instrument with cords or a mechanism. The second combined two independent harpsichords, the lower one played with a pedalboard and having its own strings and register, complementing the upper one in timbre. In designing the instrument played by Luc Beauséjour on this recording, maker Yves Beaupré was inspired by the latter configuration. “The pedal harpsichord remains a formative instrument,” explains Beauséjour. “It allows one to hear everything; polyphony comes through with great clarity, and everything is recreated with remarkable precision.” 7 Anyone who plays a pedal harpsichord for the first time is inevitably fascinated by its possibilities. We know that Bach himself preferred a rich, resonant sound. In 1708, while working on an organ restoration project at the Church of Saint Blaise in Mülhausen, he wanted to equip the instrument with new bellows, a 16-foot bassoon stop, a viola da gamba stop, and a 32-foot soubasse “that would give its depth to the entire instrument.” While the organ requires a very special sense of space, one that is often somewhat washed out in recordings, the pedal harpsichord offers both the sought after depth and musical precision. Few performers possessed such an instrument at the time, and composers did not feeling it necessary to indicate its use for specific works. Early 20th-century musicologists such as Philipp Spitta and Albert Schweitzer tried to prove that the trio sonatas BWV 525–530 or the Passacaglia in C minor were composed for pedal harpsichord, but there are no reliable sources to back up this hypothesis. The controversy is of little import, however, since the organ works of the cantor of Leipzig in fact lend themselves remarkably well to this instrument, which has today almost completely disappeared. To highlight the pedal harpsichord’s particular features and give music 8 lovers a point of comparison, Beauséjour wanted to present a number of well-known works, including the Toccata in D minor BWV 565. But above all, he wished to present some of his favourite pieces that lend themselves well to comparison and contrast. The Toccata begins with a dramatic gesture in the upper register, doubled at the octave, which revolves around a diminished seventh chord that resolves to D minor. Three successive short passages, also doubled, bring about a return to the main key. Composed when Bach was the organist at the court of Weimar, the Orgelbüchlein (Little Organ Book) was initially conceived of as a collection of 164 chorale preludes for church services spanning the entire liturgical year; he only completed 45, however. The work stands as a treatise on composition, a teaching manual and profession of faith. To make it more easily recognizable, the chorale melody is confined to one voice, usually the soprano. Among those presented here, Der Tag, der ist so freudenreich is associated with Christmas, while Es ist das Heil uns kommen her, for the sixth Sunday after Trinity, is based on a 15th-century catechism hymn. For many, the concept of the prelude and fugue represents the apex of Baroque writing. Before achieving perfection in the Well- tempered Clavier, however, the form did evolve somewhat. Initially the outer movements of a concerto (Allegro – Adagio – Fugue), the prelude and fugue progressively took on a bipartite form. The “Largo” of the Trio Sonata BWV 529 is here inserted between the Prelude and Fugue BWV 545, which was a common practice during Bach’s time. The imposing fugue, “alla breve” is based on an ascending tetrachord, often treated in syncopation. Prelude and Fugue BWV 541 contains numerous repeated notes—typical of Bach’s “Weimar style” (the work likely dates from 1712)—in both fugue and prelude; indeed, the repetition of entire chords plays an essential role in the prelude. A flowing line acts as an interlude between the more massive passages of this dense work, an example of Bach’s meticulousness as a composer. By contrast, BWV 535—which Bach reworked extensively and which also makes some use of repeated notes in the fugue theme— burgeons with dense but almost improvisational arpeggiated figures, punctuated by brilliant scale runs and thick polyphonic passages. “so ingeniously interwoven that they never cease to amaze.” The eight-measure ostinato, initially played on the pedalboard, undergoes 20 transformations. Organist Marie-Claire Alain suggests that the 21 statements of the theme can be divided into seven sets of three variations, each citing a line of a Lutheran chorale, in a treatment similar to the one Bach used in the Orgelbüchlein. The theory merits consideration, knowing that for Bach, all music was ultimately written for the All Mighty. © Lucie Renaud Translation: Peter Christensen The Passacaglia in C minor would have a marked influence on a number of works of the 19th and 20th centuries. Robert Schumann himself described the variations as being 9 Vous aimerez également / You will also like Mondonville : Pièces de clavecin avec voix ou violon, opus 5 Beauséjour, Mercer, Plouffe 2007 / AN 2 9920 10 Concert parisien - à l’époque de Louis XV Concert parisien - in the era of Louis XV Beauséjour, Quintana, Plouffe, Jeay 2009 / AN 2 9926 Clavecin : Yves Beaupré, 1998, d’après Hemsch et Blanchet Pédalier : Yves Beaupré, 2009, conçu par Yves Beaupré Harpsichord : Yves Beaupré, 1998, after Hemsch and Blanchet Pedalboard : Yves Beaupré, 2009, made by Yves Beaupré Cet enregistrement a été réalisé à l’Église Saint-Augustin de Mirabel en juin 2010 / This recording was made in Church of Saint-Augustin de Mirabel in June 2010. Réalisateur, Preneur de son ; Mixage et mastérisation / Producer, Sound Engineer ; Mix and Mastering : Carl Talbot, Productions Musicom Assistant preneur de son, éditeur / Assistant Engineer, editing : Jeremy Tusz Producteur, Directeur artistique / Executive Producer, Artistic Director : François Mario Labbé Directrice de production / Production Director : Julie M. Fournier Assistantes de production / Production Assistants : Geneviève Langelier, Mélissa Santerre Accordeur du clavecin / Harpsichord Technician : Yves Beaupré Photo de la couverture / Cover picture : © Nicolas Collart Photo Luc Beauséjour : © Michael Slobodian Révision / Proofreading : Rédaction LYRE Conception et production graphique / Graphic Design and Production : Pyrograf Groupe Analekta Inc. reconnaît l’aide financière du gouvernement du Québec par l’entremise du Programme d’aide aux entreprises du disque et du spectacle de variétés et le Programme de crédit d’impôt pour l’enregistrement sonore de la SODEC. / Groupe Analekta Inc. recognizes the financial assistance of the Government of Quebec through the SODEC’s Programme d’aide aux entreprises du disque et du spectacle de variétés and refundable tax credit for recording production services. 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Fugue en do majeur / Fugue in C Major, BWV 545 3:42 13. Choral Wer nur den lieben Gott lässt walten, BWV 690 2:00 14. Choral Wer nur den lieben Gott lässt walten, BWV 642 1:31 15. Choral Alle Menschen müssen sterben, BWV 643 1:35 16. Choral Liebster Jesu, wir sind hier, BWV 731 2:18 17. Passacaille en do mineur / Passacaglia in C Minor, BWV 582 12:48 4:29 1:48 1:03 Prélude et fugue en sol mineur / Prelude and Fugue in G Minor, BWV 535 7. Prélude 2:40 8. Fugue 4:21 9. Choral Ich ruf’ zu dir, Herr Jesu Christ, BWV 639 2:15 Clavecin-pédalier conçu par / Pedal Harpsichord made by: Yves Beaupré AN 2 9970