Associations – Dossiers pratiques

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Associations – Dossiers pratiques
Associations – Dossiers pratiques
La sécurité financière
dans les associations humanitaires
(Dossier réalisé par Laurent Simo, In Extenso Rhône Alpes)
Au sein du secteur associatif, les associations humanitaires, qu’elles interviennent sur le
territoire national ou qu’elles soient des organisations de solidarité internationale, sont
particulièrement soumises à des aléas financiers.
Ainsi, elles doivent mettre en place des processus permettant d’identifier leurs risques afin
de bien se positionner dans un environnement complexe et en pleine mutation.
Quels points de vigilance ?
Les ressources financières
La première caractéristique des associations humanitaires se situe au niveau de la
perception des ressources financières.
En effet, pour leur plus grand nombre, les associations humanitaires exercent peu d’activités
de ventes ou de prestations accessoires leur permettant d’assurer des revenus réguliers. Le
décryptage de chaque niveau de ressources et leur potentiel d’évolution doivent donc être
mesurés.
Les subventions
Toutes les associations sont sujettes aux aléas d’obtention de subventions, de leur
éventuelle restriction ou encore de la réorientation d’enveloppes budgétaires.
Cependant, les associations humanitaires perçoivent le plus souvent des financements pour
des projets spécifiques, ce qui implique pour tout nouveau projet une nouvelle demande de
subvention et une nouvelle justification, sans avoir toutefois l’assurance de son octroi. Par
conséquent, le nombre de financements affectés est volumineux pour ces structures.
Ainsi, des modifications de politiques publiques auront tendance à limiter en priorité des
projets jugés trop ambitieux ou trop fréquents pour certaines associations.
Le premier point de vigilance consistera donc à analyser les différentes sources de
subventions pour les répartir de la meilleure façon possible afin de limiter les risques.
En outre, il convient de surveiller de manière régulière les orientations politiques et
stratégiques de certains bailleurs de fonds pour s’assurer que les projets à venir seront
maintenus dans leur domaine prioritaire. Ceci est notamment valable pour des politiques
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publiques, mais encore davantage dès lors que l’association est financée majoritairement
par des organisations internationales.
Les dons
Seconde catégorie de ressources sujette à de fortes variations, les dons issus de
campagnes d’appel public à la générosité. Les observatoires de mécénat soulignent la
baisse du nombre de nouveaux donateurs et la difficulté à les fidéliser dans un contexte
économique et sociétal qui rend plus volatils les dons réguliers.
Ainsi voit-on se développer les systèmes de crowdfunding (ou financement participatif)
basés sur la captation de montants peu significatifs pour chaque donateur, mais nombreux,
portant souvent sur des projets originaux fixés dans le temps et qui n’engagent pas les
donateurs sur le long terme.
Cette tendance démontre une mutation des attitudes des donateurs et il convient d’anticiper
ces changements, aussi bien en termes de méthodes techniques que de communication,
pour continuer à percevoir des financements de particuliers.
Le mécénat d’entreprise
Bon nombre d’associations humanitaires misent sur le développement du mécénat
d’entreprise qui apparaît comme une manne encore insuffisamment explorée.
Cependant, beaucoup s’aperçoivent qu’il demeure difficile de développer de manière
significative ce type de ressources car le nombre de prétendants s’accroît au fur et à mesure
que les financements publics s’amenuisent.
De plus, si le nombre d’entreprises mécènes a tendance à augmenter, les volumes octroyés
stagnent et ne décollent pas réellement.
Un suivi financier et comptable sans surprise
L’obtention de subventions et de dons affectés à des projets impose la mise en place d’un
suivi rigoureux afin d’éviter les mauvaises surprises. Ainsi, leurs spécificités doivent être
analysées et transcrites en comptabilité analytique.
Les fonds dédiés
Dès lors que des subventions ou des dons affectés à un projet spécifique n’ont pas été
intégralement consommés, l’association doit constater, à la clôture d’un exercice, des fonds
dédiés, c’est-à-dire la partie des ressources non utilisées à reporter sur l’exercice suivant.
Or, la bonne utilisation de ces fonds dédiés nécessite une comptabilité analytique précise, un
suivi dans le temps et une bonne appréciation de la part qui pourra au final être consommée
ou non.
Des fonds dédiés calculés de manière aléatoire ou non suivis peuvent provoquer des
variations significatives de résultat d’un exercice à l’autre, voire un reversement de la part de
financements non utilisés dans le cadre des subventions.
Les clauses conventionnelles des subventions
Une lecture approfondie des conventions de subvention doit permettre d’évaluer les clauses
les plus sensibles.
En effet, malgré les discours de simplification, il est rare de voir des conventions de
financement s’alléger en termes de clauses juridiques. La prudence est donc de mise pour
s’assurer que l’association sera bien en mesure de produire les états sollicités et de
répondre aux exigences de délais ou de critères spécifiques.
Les suivis budgétaires
La gestion de projet implique un suivi régulier pour apprécier si le montant des dépenses
engagées correspond avec le budget défini.
Des suivis budgétaires par projet doivent être mis en place afin de pouvoir alerter, corriger
en temps nécessaire la réalisation de nouvelles dépenses ou accentuer la recherche de
nouveaux financements.
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La sécurité des biens, des personnes et du numéraire
Le fait d’évoluer au sein de projets à destination de personnes défavorisées ou en situation
précaire rend les organisations humanitaires plus vulnérables au risque de vol ou de
détérioration de matériel. Ceci est d’autant plus vrai pour les opérations impliquant le
maniement d’argent liquide.
La mise en place de procédures de contrôle interne adaptées apparaît donc nécessaire pour
ne pas mettre en péril l’accomplissement des projets.
L’incertitude de continuité des fonctions bénévoles
Le secteur associatif s’inquiète (à juste titre) d’une diminution du nombre de bénévoles et
constate une difficulté à en recruter de nouveaux. Sans revenir sur les facteurs impliquant ce
constat, il est certain que l’évolution de la complexité de l’environnement (responsabilité
juridique par exemple) ne favorise pas l’engagement volontaire.
Dans les associations humanitaires, outre les membres du conseil d’administration, ce sont
surtout les bénévoles de tous les jours, ceux qui permettent d’assurer des tâches simples
mais indispensables, qui commencent à manquer.
Or, ceux-ci constituent un moyen d’économiser des ressources pour ces associations car ils
viennent en substitution de prestations ou d’emplois salariés.
Ainsi, les associations humanitaires recourant de manière significative aux bénévoles
doivent veiller au maintien des équipes existantes, voire susciter de nouvelles « vocations »,
pour favoriser la réalisation des missions dans les meilleures conditions.
Le cas spécifique des organisations de solidarité internationale
Évoluer dans des pays nécessitant l’aide internationale accroît les difficultés de mise en
place et de suivi des projets. Cette contrainte peut impliquer une fragilisation financière
importante.
La gestion des devises étrangères
Gérer des devises étrangères est synonyme de risque de perte de change, de dévaluation et
d’augmentation des prix pouvant avoir des incidences fortes sur des gestions de projet.
Outre la surveillance nécessaire de la variation des cours des devises, des politiques
anticipées de gestion des devises peuvent être réalisées par des systèmes d’achats à terme
ou l’utilisation (lorsque cela est possible) de monnaie forte.
Le facteur des financements internationaux
Le cadre de prise en charge des budgets par des financements de l’Union européenne ou
des Nations unies a considérablement changé ces dernières années.
Les contrôles sont fréquents, précis et laissent peu de marge disponible. Ainsi la bonne
interprétation des conditions générales de financement demeure absolument nécessaire
pour ne pas se voir refuser telles ou telles dépenses lors d’un contrôle, plusieurs mois voire
plusieurs années après la fin d’un projet.
Par ailleurs, ces financements d’opérations de développement reposent le plus souvent sur
le principe d’une part d’autofinancement de l’association ou d’apports de ressources
complémentaires. Ceci se matérialise par un pourcentage maximum pris en charge par le
financement sur le budget du projet.
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Dès lors que les autres cofinancements à l’opération ne sont pas assurés, l’association court
le risque de devoir engager le projet dans sa totalité et de devoir mobiliser ses ressources
propres pour compléter la part manquante.
Le cadre juridique des pays d’intervention
L’intervention dans des pays étrangers est souvent facteur de complexité. Les législations et
réglementations applicables peuvent parfois être confuses et peu adaptées aux contextes
d’intervention.
Dans ce cadre, les habilitations en termes d’autorisation de fonctionnement ou la législation
sociale du personnel employé peuvent constituer une réelle source de fragilité
(connaissance des méthodes d’indemnisation de fins de contrat par exemple). Ainsi, un
conseil adapté par des professionnels locaux permettra d’identifier ces risques, de les
mesurer et de trouver les solutions optimales.
Des conditions spécifiques de sécurité
La sécurité est une priorité pour les organismes intervenant dans des pays éprouvant des
tensions sociales importantes ou en état de guerre.
Bien entendu, les associations humanitaires mettent en place les conditions nécessaires
pour assurer cette nécessaire sécurité. Néanmoins, il est plus délicat d’évaluer leurs
conséquences financières en cas d’arrêt d’un projet, d’un départ précipité ou de conditions
nécessitant des remplacements de matériel.
Si possible, c’est dès la construction budgétaire du projet que les impacts financiers de
l’éventuelle mise en sommeil d’un projet pour des raisons de sécurité seront évalués parmi
lesquels l’analyse des charges fixes (frais de personnel, locations, etc.), les coûts de
rapatriement, les conditions spécifiques des financements, etc. Ceux-ci pourront être
complétés par une actualisation régulière de la connaissance des conditions du pays
d’intervention.
Définir un cadre adapté de prévention de risques et de sécurisation
financière
Les associations humanitaires sont le plus souvent très professionnelles et expérimentées
mais il n’en demeure pas moins qu’il n’est pas toujours possible de tout prévoir.
Quelques conseils simples peuvent être appliqués pour insérer la sécurisation financière au
sein des priorités de l’association :
- identifier une ou plusieurs personnes au sein d’un comité dédié dont la responsabilité sera
de mettre à jour des procédures fiables et leur suivi ;
- ne pas agir seul, faire partie intégrante des réseaux associatifs spécialisés ou mener des
partenariats avec d’autres associations ;
- définir une stratégie financière adaptée à l’évolution des sources de financement ;
- faire évoluer sa politique de communication afin de répondre aux attentes des donateurs.
La cartographie des risques, une bonne méthode pour connaître
ses forces et ses faiblesses
Les associations humanitaires se penchent de plus en plus souvent sur les risques relatifs à
leurs activités. Elles mettent en œuvre des réflexions qui impliquent autant bénévoles et
salariés réunis dans des comités d’audit. Les travaux de ces comités sont consignés dans
une cartographie des risques dont les contours et les conclusions sont présentés à leurs
conseils d’administration.
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La cartographie des risques de chaque organisme est propre aux activités déployées, à son
organisation et à ses caractéristiques. À l’instar de ce qui se pratique dans les entreprises
pour appréhender la gestion des risques, on peut citer les orientations suivantes qui sont le
plus souvent examinées :
Au titre des risques externes :
• la concurrence avec d’autres organismes ;
• le lobbying avec différentes instances ;
• la politique étrangère ;
• la législation, la réglementation ;
• le traitement des situations d’urgence (catastrophes naturelles, terrorisme, crise sur le
marché...) ;
• les relations avec les parties prenantes et les partenaires.
Au titre des risques internes :
• les risques stratégiques : stratégie de développement, stratégie marketing, modèle
socio-économique, équilibre financier, gouvernance ;
• les risques opérationnels : santé et sécurité, connaissance et savoir-faire, accident
majeur, dommages aux tiers, dommages aux actifs, carence des fournisseurs ;
• les risques liés à l’organisation des ressources humaines : externalisation, personnes
clés, communication, gestion du changement/recrutement ;
• les risques de gouvernance : leadership, délégation, autorité ;
• les risques liés aux systèmes d’information : technologie, infrastructure, intégrité,
accès, maintenance, disponibilité, confidentialités, externalisation ;
• les risques de conformité : législation et réglementation, contractuelle, juridique,
communication financière ;
• les risques dépendant des règles d’intégrité : fraude, actes illégaux, usage illégal,
éthique, image de marque ;
• les risques liés aux transactions et opérations financières : management finance
(budget, prévision, impôts…), taux d’intérêts, dépréciation d’actifs.
La qualité des risques identifiés est appréciée, d’une part, en fonction de leur niveau ou
degré d’importance (faible, modéré, élevé, important), puis d’autre part, en fonction de leur
probabilité à se révéler et de leur maîtrise par l’organisation en place. Cette démarche
permet ainsi aux organismes gestionnaires d’actions humanitaires d’entreprendre un
véritable plan d’amélioration de leurs procédures qui s’inscrit dans un concept de démarche
qualité actif et rassurant.
Le traitement des legs et donations par Philippe Guay - Deloitte
Les associations humanitaires trouvent fréquemment une grande partie de leurs financements au
moyen de dons et libéralités qu’elles sollicitent par des campagnes d’appel à la générosité.
Si la collecte de dons est une fonction bien souvent confiée à des prestataires spécialisés, le
traitement et le suivi des dossiers de legs et donations est assuré par un service interne à l’organisme.
En effet, la relation avec le donateur requiert une attitude et une relation particulière et confidentielle.
Ensuite, le dénouement des dossiers peut prendre un certain temps, surtout lorsque les attributions
testamentaires visent plusieurs organismes. Dans ce cas, le dossier notarié n’en est que plus
complexe. Les procédures de suivi des legs et donations mises en place au sein de l’association ou
de la fondation permettent de connaître régulièrement les enjeux financiers en cause. Cette
information doit être intégrée régulièrement dans les comptes de l’organisme.
Tous les legs ne sont pas bons à prendre !
En effet, certains dossiers sont parfois accompagnés de conditions exprimées par le testateur qui
peuvent se révéler contraignantes et coûteuses.
C’est pourquoi il convient de faire accepter ou refuser de façon formelle les différents legs par une
délibération du conseil d’administration.
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