Fiducie Vadémécum

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Fiducie Vadémécum
CNB Fiducie 24/08/2010 16h50
Fiducie Vadémécum
Chapitre 1. Comparution
Le constituant
Il doit être désigné par son identité et son domicile, qu’il soit personne physique ou personne
morale.
En cas de pluralité de constituants, époux communs en biens apportant des biens communs
ou indivisaires, la forme notariée du contrat de fiducie s’impose.
Mais en présence de plusieurs constituants non indivisaires, l’acte sous seing privé reste
possible, pour autant que des transferts de biens immobiliers ne soient pas prévus : cas de
l’usufruitier et du nu-propriétaire, sous la condition qu’il n’y ait pas d’indivision sur l’un des
deux droits démembrés, cas de l’apport par plusieurs associés, de leur participation dans une
société et souhaitant une gestion collective de leurs participations, cas d’enfants souhaitant
une gestion collective de biens reçus ou hérités divisément, cas d’époux séparés de biens
apportant des biens divis ou d’époux communs en biens apportant des biens propres.
Dans tous ces cas il paraît utile de faire intervenir les constituants solidairement sous la
dénomination « le constituant ».
Le fiduciaire
Il peut être personne physique ou personne morale dans la mesure où il fait bien partie des
personnes susceptibles d’être fiduciaires. Un avocat peut être fiduciaire, c’est l’apport de la loi
du 4 août 2008.
Si l’avocat exerce sa profession en structure d’exercice, c’est bien la structure d’exercice
qui est fiduciaire. Dans la rigueur des principes, la société d’avocat exerce la profession par
l’intermédiaire de ses membres, lesquels ont donc qualité pour accepter une mission
fiduciaire. Les statuts ou le règlement intérieur de la société peuvent toutefois, compte tenu de
la spécificité de l’activité, prévoir des règles d’habilitation spécifiques pour l’acceptation de
telles missions : être fiduciaire implique en effet de devenir propriétaire d’un patrimoine,
certes affecté, mais comprenant un actif et un passif, et la décision de l’exercice de cette
activité, doit pouvoir relever d’une règle particulière d’habilitation.
Il est admis que lorsque l’avocat est fiduciaire, il agit en tant qu’avocat soumis à ce titre à
sa réglementation professionnelle et à l’intégralité de ses règles déontologiques ; il a en effet
plusieurs fois été souligné que c’est bien sa déontologie qui avait justifié sa possibilité
d’intervenir en cette qualité, ce qui explique qu’il ne saurait s’affranchir du respect des
principes essentiels de la profession d’avocat. Il en résulte qu’en l’état actuel de la
réglementation, l’avocat ne saurait accepter une mission dont l’exécution le ferait « basculer »
dans le régime des incompatibilités avec toute activité commerciale telle que prévue par les
articles 111 et suivant du décret du 27 novembre 1991.
Au regard des principes déontologiques de la profession d’avocat, la gestion que fera l’avocat
du patrimoine fiduciaire ne peut être assimilée à une gestion pour le compte d’autrui, donc
relevant des activités commerciales qui lui seraient interdites, puisque par principe il gère des
biens dont il est propriétaire. Cette remarque ne préjuge pas de celle de savoir si, dans certains
cas, la gestion de son propre patrimoine ne relève pas, à un autre titre, de la qualification
d’activité commerciale ; il en serait manifestement ainsi s’il s’agissait de la gestion directe
d’une entreprise commerciale individuelle ou encore d’accepter un mandat social
(président du CA ou du directoire, gérant) dans une société commerciale. Encore faudra-t-il
réserver le cas où l’activité qualifiée de commerciale pourrait être considérée accessoire de la
mission de l’avocat donc susceptible d’être requalifiée elle-même en activité civile.
Comme on pourra le constater, le contenu de la mission du fiduciaire peut se révéler, dans
chacune des hypothèses envisagées, extrêmement complexe et il sera très souvent opportun de
permettre à l’avocat fiduciaire de se faire assister, voire de déléguer l’exécution de tout ou
partie de la mission. Si tel est le cas, cette éventualité doit impérativement faire l’objet de
stipulations précises indiquant notamment les conditions (information ou autorisation
préalable du constituant) et les effets d’un tel transfert en termes de responsabilité au regard
de l’exécution de la partie de la mission transférée. Cette éventualité doit aussi être intégrée
dans la réflexion préalable à la définition de la mission en ce sens qu’il ne faudrait pas que le
contenu de la mission soit tel qu’il conduise à une impossibilité pratique d’exécution par
l’avocat ou tout autre tiers concerné.
Le bénéficiaire
Le contrat de fiducie sera assez souvent conclu au profit du constituant lui-même ou de ses
héritiers1.
Mais le contrat peut désigner un autre bénéficiaire ou les modalités de désignation future, ou
encore une désignation générique du ou desdits bénéficiaires.
La désignation de ce bénéficiaire ne doit pas procéder d’une intention libérale au risque
d’entraîner la nullité du contrat.
Le bénéficiaire n’est pas obligatoirement signataire du contrat et s’il l’est il devra préciser
la portée de sa signature. Cette signature semble bien impliquer son acceptation du bénéfice
de la fiducie (cas évident du bénéficiaire d’une fiducie sûreté) et bloquer ainsi toute
révocation de la fiducie du chef du constituant au titre de l’art 2028 c.civ.2
Le tiers protecteur
Son intervention dès la signature du contrat est possible ; mais en toute hypothèse, il peut être
désigné ultérieurement sans que le constituant puisse renoncer à cette possibilité s’il est
personne physique (art2017 c.civ.).
1
Sur la possibilité de déroger à l’extinction du contrat par le décès du constituant et à sa transmission aux
héritiers voir supra
2
La question du caractère d’ordre public de l’art 2028 peut se discuter
Toute personne physique ou morale peut être tiers protecteur, y compris un avocat en sa
qualité d’avocat. Il ne semble pas à ce titre soumis à l’obligation d’assurance spécifique, les
articles 123 et 205 du décret du 27 novembre 1991 visant l’avocat exerçant en qualité de
fiduciaire.
Chapitre 2. Exposé préalable et terminologie
Il est en général de bonne technique contractuelle d’expliquer dans un exposé préalable, le
contexte et l’objectif poursuivi par les contractants au travers de leurs conventions. Cet
exposé a principalement pour fonction de guider les parties elles-mêmes ou, en cas de
difficulté, le juge, dans la recherche de la véritable intention des contractants. En matière de
fiducie, cet exposé est d’autant plus important que le contrat est conclu « dans un but
déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires » (art 2011 du c.civ.). Si ce but et cet
intérêt méritent en eux-mêmes la rédaction de clauses spécifiques, l’exposé en décrira le
contexte pour mieux le comprendre. Mais il sera bien évidemment très important de bien
assurer la cohérence de cet exposé avec les clauses du contrat.
L’exposé exprimera, ne serait-ce qu’implicitement, la cause ou la motivation de
l’opération, notamment si la fiducie doit profiter à un tiers autre que le constituant. Cette
cause est évidente lorsqu’il s’agit d’une fiducie sûreté puisque c’est la préexistence de la dette
qui justifie que le créancier en soit le bénéficiaire, elle l’est moins dans les autres cas puisque
le constituant doit, dans ce dernier cas, s’expliquer de ce que le bénéfice de la fiducie (en
revenus ou en capital) ne constitue pas pour lui une libéralité : poursuite d’un intérêt général
lorsqu’il s’agit d’affecter les produits de gestion au financement ou à la constitution de telle
ou telle association, fondation ou fonds de dotation, exécution d’une obligation naturelle, ou
encore à allocation d’avantages liés à des situations onéreuses parallèles (création d’une
fiducie pour compléter le régime social des salariés d’une entreprise en terme de complément
de retraites ou autres avantages sociaux).
Lorsque le constituant est lui-même bénéficiaire, l’absence d’intention libérale est
évidente et la motivation est le plus souvent liée au souhait du constituant de se décharger du
souci de la gestion ou de la valorisation de certains biens ou droits, ou tout simplement de
s’en remettre à la compétence de professionnels dont la gestion ou la valorisation constitue le
métier.
L’exposé pourra être suivi d’un lexique permettant de mieux définir certains termes dans la
compréhension que les parties souhaitent leur donner pour l’interprétation et l’exécution du
présent contrat.
Formule
Mr ou la Sté est (ou sont) propriétaire de… ou a vocation à recevoir ou percevoir … (tels ou
tels créances, revenus ou dividendes liés à la détention qu’il a de tel bien) … dans l’éventuelle
perspective de devenir héritier ou légataire de … dans l’éventuelle perspective de devenir
attributaire de ….
Constatant la difficulté qui est la sienne de … Ne se trouvant plus
Dans le but3 …d’en assurer la meilleure conservation, …d’en améliorer la gestion… de
valoriser lesdits biens ou droits… dans le but de gérer et régler la succession de… dont il est
(sont héritier(s) ensuite du décès de … dans le but de gérer et préparer, dans les meilleures
conditions possibles, la vente de … de contribuer au développement et au financement des
activités de telle œuvre ou association … de permettre le meilleur règlement de la succession
de … de gérer collectivement la participation que les constituants détiennent dans la société
A … de conserver et gérer … de sécuriser l’affectation des financements correspondant à la
réalisation de telle opération…de garantir tel créancier du remboursement de telle dette … de
constituer un socle de garanties à l’ensemble des crédits que tel organisme pourrait consentir
au constituant…
Terminologie
Pour l’interprétation et l’exécution de la présente convention, les parties conviennent de
préciser la signification des termes suivants :
Comparution et désignation des soussignés
Pour le cas où des soussignés interviendraient solidairement, ils seront valablement désignés
par la qualité de Constituant ou de Fiduciaire au titre de laquelle ils contractent
Patrimoine fiduciaire
Cette expression désigne l’ensemble des biens, droits et sûretés transférés au fiduciaire, ainsi
que tous autres biens, droits ou sûretés dont ce dernier ferait l’acquisition ou dont il
deviendrait titulaire, pour quelque cause que ce soit dans l’exercice de sa mission.
Chapitre 3. Nature de la fiducie et prise de qualité
Dans la plupart des cas la qualification de fiducie gestion ou de fiducie sûreté relèvera de
l’évidence et l’exposé des motifs induira sans difficulté cette qualification. Mais il est des
situations où la réponse à cette question sera plus délicate notamment lorsque le droit de
créance du bénéficiaire ne résulte pas expressément d’une créance formalisée à l’encontre du
constituant, affectation de financements spécifiques à la réalisation de projet par exemple : les
créanciers, c'est-à-dire les entreprises intervenantes ne sont pas encore connues, ni le montant
de leurs prestations. La réponse à cette difficulté semble bien se trouver dans l’analyse de la
situation concrète : il n’y a de fiducie sûreté que si la fiducie garantit une dette qui préexiste à
sa constitution et qui a en quelque sorte une existence autonome par rapport à elle-même : la
fiducie n’est pas la garantie de la créance qu’elle établit elle-même au profit du bénéficiaire
dans l’intérêt duquel elle est constituée.
Il faut cependant bien intégrer la nécessité de qualifier la fiducie de ce point de vue, puisque
la fiducie consentie à titre de garantie est soumise à des conditions de validité supplémentaires
par rapport à la fiducie de droit commun (exigence de la mention de la dette garantie et de la
valeur des biens transférés dans le patrimoine fiduciaire (art 2372-2 et 2488-2 du c.civ.
concernant les immeubles et les meubles affectés en garantie).
Formule
Si la fiducie correspond bien à une fiducie sûreté, la formule suivante pourra être utilisée :
3
On fera attention dans cet exposé à ne pas relater un but qui impliquerait de la part du fiduciaire une obligation
de résultat ou une obligation qu’il ne pourrait pas, dans des conditions réalistes, assumer. On se gardera d’utiliser
des expressions à ce titre inadéquates telles que garantir assurer. Le but exposé doit être cohérent avec
l’obligation de moyen et la seule obligation de moyen que puisse raisonnablement accepter le fiduciaire, sauf à
changer de métier
La présente fiducie est consentie et acceptée à titre de garantie du paiement de la dette de …
dont le constituant est tenu envers …. aux termes d’un contrat … ou à raison de …4
Si la fiducie n’est qu’une fiducie gestion, on se limitera à la formulation suivante :
La présente fiducie est consentie et acceptée aux seules fins de gérer et administrer les biens
et droits qui en sont l’objet, dans les conditions ci-après stipulées.
Chapitre 4. Biens et droits transférés au fiduciaire
Nous prenons le parti de désigner les biens et droits mis en fiducie avant même la description
de la mission afin de rendre plus compréhensible la formulation qui sera donnée de cette
dernière : la mission se comprendra d’autant mieux que seront connus les biens et droits sur
lesquels elle porte. Cette clause comprendra tout à la fois la désignation précise des biens et
droits transférés, les charges et conditions de ce transfert, l’éventuelle réserve de jouissance au
profit du constituant.
Si la fiducie porte sur des droits sociaux, et tant que la doctrine ou la jurisprudence n’auront
pas validé la possibilité d’attribuer, au titre de la propriété fiduciaire, le droit de vote détaché
en quelque sorte de la propriété du titre, il est possible de limiter le transfert fiduciaire au seul
usufruit temporaire desdits titres pour autant, bien évidemment, que ce droit de vote
appartienne bien, légalement ou statutairement, audit usufruitier.
Formule
Biens et droits transférés
Par les présentes, le Constituant transfert, dans les conditions de l’article 2011 du c.civ. au
profit du Fiduciaire, les biens et droits suivants, dans les conditions ci après précisées :
Désignation
Date du transfert : les biens ci-dessus désignés seront transférés à compter de ce jour, par la
seule signature des présentes ; toutes formalités nécessaires pour l’opposabilité de ce
transfert seront accomplies dans les plus brefs délais à la diligence du Fiduciaire, le
Constituant s’engageant à fournir au Fiduciaire tout document ou justificatif qui serait
nécessaire à cette fin.
Date d’entré en jouissance : elle aura lieu au profit du Fiduciaire, à compter de … ou de ce
jour, …, par la prise de possession réelle, …par la perception des loyers, … et d’une manière
par l’exercice, à compter de la même date des prérogatives données au Fiduciaire dans les
conditions ci-après.
Ou au contraire : De convention expresse entre le Constituant et le Fiduciaire, ledit
Constituant restera en possession et jouissance des biens ci-dessus transférés ; il
administrera et gérera lesdits biens en s’abstenant de tout acte qui pourrait en altérer la
substance ainsi qu’à prévenir le Fiduciaire de tout évènement ou fait qui aurait pareille
conséquence. Il justifiera, à première demande du Fiduciaire de toutes les garanties
(assurances, contrats de maintenance, …) prises à cette fin. Elle ne donnera lieu au paiement
d’aucune redevance, ni d’aucun loyer5.
4
Il y a lieu, dans cette hypothèse de respecter les conditions des articles 2488-2 et 2372-2 du c.civ imposant la
mention de la dette garantie et la valeur des biens transférés à ce titre
5
Cette réserve du droit de jouissance peut relever de problématiques complexes qu’il pourrait être utile de
développer dans le contrat ou dans une annexe. Certes ; le code civil prévoit bien que ce droit de jouissance ne
relève pas sauf convention contraire, de la réglementation de la location-gérance ou des baux commerciaux, mais
Charles et conditions du transfert. Le fiduciaire gèrera les biens à lui transférés
conformément à sa mission. Il devra restituer lesdits biens et droits ou ceux qui en seront la
représentation libres de toutes charges.
Dans le cas d’une fiducie sûreté : Évaluation : Les biens ci-dessus désignés et affectés à la
garantie de la dette ci-dessus visée sont évalués à la somme de 6…
Chapitre 5. Mission et prérogatives du fiduciaire
Cette partie du contrat est certainement la plus importante puisqu’elle va définir tout à la fois
le contenu et le but de la mission dont se déduiront les prérogatives transmises au fiduciaire
pour lui permettre d’accomplir sa mission et donc les conditions de mise en œuvre de sa
responsabilité.
Plusieurs hypothèses doivent être distinguées.
Section 1. Fiducie gestion au profit du constituant
C’est le cas qui semble devoir être le plus courant en matière de fiducie gestion : le
constituant confie les biens et droits concernés aux fins de les voir gérer par le fiduciaire et
entend se les voir restituer à l’issue de la fiducie.
Applications pratiques
-
-
Gestion de patrimoine (mobilier ou immobilier) pendant une période déterminée.
Une application particulière doit être précisée, relativement au souci que peuvent avoir
des parents d’éviter que leurs enfants jeunes majeurs, ne dilapident trop rapidement
les biens dont ils pourraient hériter prématurément ou qu’ils pourraient recevoir par
donation. Si, comme nous le pensons, (voir note en annexe) le contrat de fiducie est
transmissible par le constituant, y compris à titre gratuit, et si, comme nous le pensons
également, le contrat peut déroger à la révocabilité unilatérale du chef du constituant, le
contrat de fiducie sur des actifs destinés à être donnés aux enfants, peut être mis en place
avant la donation. La gestion fiduciaire s’imposera alors aux enfants devenus constituants
pour toute la durée de la fiducie sauf résiliation avec l’accord du fiduciaire ; le fiduciaire
pourra recevoir mission de libérer tout ou partie du patrimoine fiduciaire au profit des
constituants (les enfants) dans des cas déterminés (investissements immobiliers ou
professionnels) ou en vertu d’un pouvoir discrétionnaire qui lui serait donné.
Gestion de patrimoine appartenant à une indivision conventionnelle ou successorale.
il peut être des cas, notamment lorsqu’il s’agit d’une fiducie sûreté ou que le bénéficiaire n’est pas le constituant
lui-même de mieux caractériser les obligation de l’occupant ; la conservation du bien et de sa valeur dépend en
partie des conditions dans lesquelles il est utilisé. Des précautions particulière peuvent et doivent dans certain cas
à l’évidence être prises, si l’exploitation continuée par le constituant comprend des risques de pollution ou
environnementaux.
6
Application des articles 2372-2 et2488-2 du c.civ., cette évaluation étant exigée comme condition de validité du
contrat de fiducie
-
Gestion technique correspondant à des actifs spécifiques.
Description de la mission
Il s’agit à ce titre de préciser :
-
Le contenu et le but de la mission quant aux biens mis en fiducie ; il s’agit alors de
définir ce que les parties entendent donner au concept de gestion des biens : conservation
stricte, exploitation dépourvue de risque anormaux, capitalisation des revenus nets ou
distribution systématique, orientation (sécuritaire, prudente ou dynamique) de la gestion
d’un portefeuille de valeurs mobilières, gestion dynamique incluant l’amélioration ou la
rénovation d’un bien immobilier … ;
-
Le contenu et le but de la mission à l’égard du constituant bénéficiaire dont le droit de
se voir restituer les biens et droits concernés à l’expiration du contrat, ainsi que, le cas
échéant le droit périodique aux résultat nets de la gestion, le tout dans les conditions qui
seront définies par le contrat. Il n’est pas interdit de prévoir des cas de restitution anticipée
de tout ou partie du patrimoine fiduciaire, soit sur la base de circonstances objectives et
définies dans le contrat, investissements particuliers d’ores et déjà programmés, soit sur la
base d’un pouvoir discrétionnaire du constituant (nous sommes en effet dans une
hypothèse où il n’y a pas d’autre bénéficiaire que le constituant ce qui supprime l’obstacle
de l’art 2028), voire du fiduciaire.
Cette réflexion pourra utilement se nourrir des dispositions du décret du 22 décembre 2008
relatif à la gestion du patrimoine des personnes placées en tutelle ou en curatelle. D’une
manière générale, les actes d’administration y sont définis comme « des actes d’exploitation
ou de mise en valeur du patrimoine de la personne protégée, dénués de risque anormal ».
Cette définition nous semble assez proche de la notion de gestion. Pareillement, le même
décret définit les actes de disposition, donc excédant le cadre de la gestion comme ceux « qui
engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou pour l’avenir, par une
modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital
ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ». On consultera avec beaucoup
d’intérêt la liste donnée par le même décret, des actes définis comme actes d’administration et
de disposition ou présumés tels, en distinguant les biens (immeubles, biens corporels, droits
sociaux…) auxquels cette distinction est susceptible de s’appliquer. Cette problématique de la
définition de la mission du tuteur et des pouvoirs correspondant est tout à fait transposable à
celle de la fiducie en considérant que la liberté contractuelle permet dans ce domaine toute
adaptation possible.
Elle pourra aussi s’inspirer de la problématique du démembrement de propriété où l’on
voit bien d’une manière générale l’usufruitier en charge de la gestion des biens démembrés et
tenu de conserver auxdits biens leur substance ; et l’on a vu comment la jurisprudence a
concilié dans certains domaines, la nécessité de donner à l’usufruitier tous les pouvoirs
nécessaires pour gérer les biens dans les conditions économiques les plus favorables, tout en
sauvegardant le droit de l’usufruitier, en fin d’usufruit, de recouvrer toutes les utilités
économiques du bien initialement démembré7.
7
La lecture des articles 582 et suivant du c. civ. ne donne qu’un aperçu sommaire de la problématique ; la
consultation de la jurisprudence et notamment celle relative à la gestion, par l’usufruitier d’un portefeuille de
valeurs mobilières démembrées (Cas civ. 12 nov 1998 arrêt Baylet) est éclairante de l’équilibre des pouvoirs
donnés à l’usufruitier face à l’impératif de la restitution des biens au nu-propriétaire en fin d’usufruit.
Cette réflexion devra le cas échéant intégrer le souhait du constituant de garder la
maîtrise de la gestion en ne confiant au fiduciaire qu’une mission d’exécution. Dans le cadre
de la gestion d’actifs financiers, fiduciaire et constituant pourraient convenir que le fiduciaire
recevra les instructions du constituant, sa mission se limitant à l’exécution des décisions
d’investissement et leur suivi par les intermédiaires financiers. La mission peut aussi
comprendre, à cette fin, la fourniture et la production de la documentation financière et
économique devant permettre au constituant de prendre ses décisions en connaissance de
cause.
Pouvoirs du fiduciaire
-
Les pouvoirs du fiduciaire doivent être définis d’une manière cohérente avec le contenu et
le but de la mission confiée à ce dernier ; ils seront définis étroitement ou largement
suivant l’étendue donnée à la mission elle-même.
-
Rien n’interdit de prévoir que certains actes ne pourront être accomplis par le
fiduciaire qu’avec le consentement du constituant et même que ce dernier aura un
pouvoir d’injonction sur ce que doit faire le fiduciaire, voire même que ledit fiduciaire
devra « prendre ses instructions » avant d’agir.
-
Il sera de bonne pratique de prévoir que tout ce qui dépasse les pouvoirs, expressément les
pouvoirs, du fiduciaire ne pourront être accomplis qu’avec le concours du constituant.
-
Il sera aussi de bonne pratique de réserver au fiduciaire la possibilité de confier tout ou
partie de la gestion à tout tiers dont la compétence pourrait s’avérer utile dans
l’accomplissement de la mission globale.
-
Une chose est de définir « inter partes » les pouvoirs du fiduciaire, autre chose est
d’envisager la situation vis-à-vis des tiers avec lequel contractera le fiduciaire. De ce point
de vue, et même si obligation est faite au fiduciaire de toujours mentionner (art 2021 du
c.civ.), il est difficile de concevoir que le fiduciaire ne bénéficie par des pouvoirs les plus
étendus, sauf circonstances particulières.8
Formule
La présente fiducie est consentie et acceptée dans l’intérêt du Constituant auquel
reviendront les biens et droits issus de la gestion qu’en aura faite le Fiduciaire pendant
toute la durée de la fiducie
Mission est expressément donnée par le Constituant au Fiduciaire de gérer les biens et
droits transférés et énoncés ci-dessus ; au sens de la présente fiducie, il faudra entendre
par gestion :
- l’administration et la conservation desdits biens et droits sans prise de risques
anormaux,
- ou l’administration, la gestion et le développement desdits biens et droits, notamment
par le réinvestissement des produits nets de la gestion en biens et droits de même
nature,
- l’exercice des prérogatives et notamment des droits de vote ou droits financiers
attachés aux dits biens ou droits dans les conditions ci-après,
Prérogatives, droits et obligations du Fiduciaire
8
Les tiers contractant avec un fiduciaire sont en droit de présumer que la qualité de « propriétaire » du fiduciaire
donne à ce dernier les pouvoirs les plus étendus.
Dans l’accomplissement de sa mission le Fiduciaire agira avec prudence et discernement,
gèrera et administrera conformément aux usages avec tous les pouvoirs et toutes les
prérogatives attachées à sa propriété ; dans ses rapports avec tous tiers il devra
mentionner sa qualité de fiduciaire.
Il percevra tous revenus, produits ou dividendes générés par la gestion qu’il fera des
biens transférés et s’oblige à en demander le paiement dès leur exigibilité ; il les
affectera en priorité aux dépenses d’administration, de conservation et d’entretien des
biens et droits transférés.
Il restituera le produit net de sa gestion après prélèvement de tout impôt et de sa
rémunération ci-après convenue chaque année à l’occasion de la reddition des comptes
de la fiducie, dans les conditions ci-après convenues
ou il réinvestira le produit net de ces revenus ou produit après prélèvement de tous impôts
qui seraient dus et de sa rémunération dans les conditions ci-après convenues.
Il ne pourra cependant, sans l’accord du Constituant, conclure ou renouveler des baux
dont le régime juridique donnerait au preneur un droit opposable au constituant pour une
durée de plus de trois ans à l’expiration de la fiducie, grever de droit réel même à titre
accessoire, les biens faisant partie du patrimoine fiduciaire, exprimer tout vote auquel
donneraient droit les titres transmis.
Il pourra pour l’exécution de sa mission s’adjoindre le concours de tel ou tel
professionnel qu’il proposera au constituant, sur la base d’un cahier des charges
précisant la mission à lui confiée. Dans le cas ou ledit professionnel aurait été agrée par
le constituant, il sera directement responsable à l’égard du constituant de l’exécution de
ladite mission.
Il informera le Constituant de toute convocation relative à une assemblée d’une société
dont les titres ont été transférés, procéder à toute réparation d’entretien, prendre toutes
mesures matérielles ou juridiques que nécessiterait la conservation des la substance des
biens et droits transférés.
D’une manière générale, le Fiduciaire se rapprochera du Constituant pour toute difficulté
qu’il rencontrerait dans l’accomplissement de sa mission.
Section 2. Fiducie gestion
particulières de gestion9
dans l’intérêt du constituant : missions
Applications pratiques
Cette hypothèse concerne le cas où le constituant souhaite confier au fiduciaire la gestion des
biens et droits fiduciaires dans le cadre d’une politique déterminée de gestion et de
valorisation des biens concernés, voire même aux fins de réaliser une opération particulière de
vente, de rénovation, de restructuration :
-
Gestion d’actifs spécifiques : gestion du parc immobilier de l’entreprise, de sa flotte de
véhicules, de ses participations ou produits de placement dans le cadre de la politique de
l’entreprise.
-
Gestion d’actifs financiers sur la base d’un cahier des charges déterminé, voire sous
le contrôle direct du constituant.
9
Toute fiducie comprend comme conséquence naturelle du transfert de propriété au profit du fiduciaire,
l’obligation de « gérer » les biens et droit dont il se trouve désormais propriétaire, dans l’intérêt et au profit du
constituant. Mais outre cette obligation générale de gestion le fiduciaire peut se voir confier la réalisation d’une
mission particulière ou un véritable cadre dans lequel ledit fiduciaire doit inscrire sa gestion
-
Gestion collective d’un bloc de contrôle d’une société mise en fiducie par plusieurs
associés, le fiduciaire ayant pour mission d’exprimer le droit de vote correspondant à
l’ensemble des titres mis en fiducie (pour le cas où le démembrement du droit de vote au
profit du fiduciaire ne serait pas possible au regard du droit des sociétés, la fiducie
pourrait être constituée sur la base du transfert d’un usufruit temporaire des titres
concernés). La différence entre une fiducie constituée à cette fin et la constitution dans le
même objectif, d’une société holding étant que le fiduciaire ne subit pas la même
limitation de pouvoirs que celle du gérant ou du président de ladite société ; alors que les
pouvoirs du représentant légal d’une société voit ses pouvoirs limités au strict respect de
l’objet social, le fiduciaire agit, par nature dans l’intérêt (personnel) du constituant ou du
bénéficiaire : sa mission n’est pas seulement de gérer le bien (comme doit aussi le faire le
dirigeant d’une société), elle est finalisée par l’intérêt du bénéficiaire ou du constituant,
une telle finalisation de la gestion étant inconcevable dans une société.
-
Gestion et vente de l’entreprise (individuelle ou titres sociaux) et restitution du prix au(x)
constituant(s). On observera que dans ce cas particulier et en l’état actuel des textes
régissant les incompatibilités d’exercice s’imposant à l’avocat, celui-ci ne saurait être luimême gestionnaire de l’entreprise individuelle ou titulaire d’un mandat social lui
conférant le pouvoir de représenter la société vis-à-vis des tiers donc de gérer son
patrimoine. Dans ce cas l’avocat fiduciaire ne pourra gérer l’entreprise individuelle qu’au
travers d’une location gérance et l’entreprise sociétaire qu’au travers de la désignation du
mandataire opérationnel par l’exercice des droits de vote attachés aux titres dont la
propriété lui a été transférée.
-
Opération de rénovation d’un immeuble : gestion des situations locatives, organisations
des travaux de restructuration, restitution des profits. Il reste cependant bien clair que
l’activité de marchand de biens ou de promoteur immobilier ne peut être exercée en tant
que telle par l’avocat fiduciaire, sauf le cas où elle serait manifestement accessoire par
rapport à la mission juridique.
-
Opération de restructuration urbaine : remembrement, division, aménagement etc. …
sous les mêmes réserves que dans les cas précédant.
-
Réalisation d’investissements particuliers : création de fonds d’investissement à objectif
particulier.
-
Gestion et vente d’actifs indivis et répartition du prix de vente entre les indivisaires
constituants
-
Gestion et vente groupées de titres sociaux avec négociation globale et répartition du
produit de la vente entre les constituants.
Définition de la mission
Il ne peut y avoir de définition générale susceptible de répondre à tous ces cas particuliers ;
mais la structure de la clause définissant la mission devra en toute hypothèse s’expliquer du
contenu de la mission et son but :
-
Contenu et but de la mission quant aux biens : il s’agira de définir la gestion
(conservation, administration, valorisation, amélioration, vente) qui est attendue du
fiduciaire en intégrant la description de la mission particulière.
-
But de la mission quant à son bénéficiaire : il s’agit à ce titre de préciser le principe de
la désignation du constituant en tant que bénéficiaire et les modalités concrète de ses
droits pendant la fiducie (droit éventuels aux résultats nets) et droits à la restitution des
biens et droits et du bénéfice de la mission particulière à l’expiration de la fiducie.
Pouvoirs du fiduciaire
C’est bien évidemment du cas par cas, la définition des pouvoirs du fiduciaire devant
s’adapter à la mission qui lui a été confiée :
-
Si la gestion porte sur le parc immobilier de l’entreprise, la liberté de gestion du fiduciaire
sera vraisemblablement conditionnée par l’attache de la direction générale de l’entreprise
pour coordonner la gestion immobilière avec la stratégie générale de l’entreprise.
-
Si la fiducie comprend la gestion collective d’une participation, il faudra bien définir les
conditions dans lesquelles le fiduciaire déterminera son vote (consultation préalable des
constituants, majorités à respecter…).
-
Détermination des prix et conditions de la vente ou de la cession dont le fiduciaire est
chargé.
-
Cahier des charges de la gestion du portefeuille de valeurs mobilières.
Formule gestion d’un bloc de contrôle
Mission
Les constituants ont souhaité confier au Fiduciaire la mission de gérer collectivement leurs
participations individuelles ; à ce titre, le Fiduciaire devra, avant tout vote à exprimer lors
des assemblées des (ou de la) sociétés concernés, se rapprocher des constituants dans les
conditions ci-après,
Pouvoirs, droits et obligations du Fiduciaire
Le Fiduciaire disposera à l’égard des tiers et en particulier des sociétés dont les titres ont été
mis en Fiducie des pouvoirs les plus étendus.
A l’égard du constituant et compte tenu du but de la présente fiducie tel qu’il a été exposé cidessus, il est expressément convenu :
- que le Fiduciaire informera sans délais les constituants de toutes convocations ou toutes
assemblées en joignant la documentation correspondante
- qu’il convoquera lesdits constituants au plus tard trois jours au moins avant la tenue
desdites assemblées, sauf meilleure convenance des constituants et du fiduciaire
- que le sens du vote à émettre devra représenter
constituants
§ du capital total détenu par les
- qu’il rendra compte de la tenue des assemblées par la communication d’un compte rendu
sommaire relatant les décisions adoptées et les majorités obtenues ainsi que les éléments
essentiels du débat.
Formule gestion d’un parc immobilier
Mission
La présente fiducie est consentie et acceptée aux fins d’optimiser la gestion des actifs
immobiliers ci-dessus désignés dans l’intérêt du constituant c'est-à-dire, notamment en
parfaite cohérence avec la politique générale de l’entreprise.
Pouvoirs, droits et obligations du Fiduciaire
Le fiduciaire disposera vis-à-vis des tiers, des pouvoirs les plus étendus mais devra
mentionner dans toute correspondance ou acte qu’il accomplirait, sa qualité de fiduciaire.
Dans l’accomplissement de sa mission, le Fiduciaire agira avec prudence et discernement,
gèrera et administrera conformément aux usages avec tous les pouvoirs et toutes les
prérogatives attachées à sa propriété.
Il percevra tous revenus, produits ou dividendes générés par la gestion qu’il fera des biens
transférés et s’oblige à en demander le paiement dès leur exigibilité, il les affectera en
priorité aux dépenses d’administration, de conservation et d’entretien des biens et droits
transférés.
Il restituera le produit net de sa gestion après prélèvement de tout impôt et de sa
rémunération ci-après convenue chaque année à l’occasion de la reddition des comptes de la
fiducie, dans les conditions ci-après convenues
ou il réinvestira le produit net de ces revenus ou produits après prélèvement de tous impôts
qui seraient dus et de sa rémunération dans les conditions ci-après convenues.
Il ne pourra cependant, sans l’accord du Constituant, vendre tout ou partie des biens faisant
partie du patrimoine fiduciaire ni conclure ou renouveler des baux dont le régime juridique
donnerait au preneur un droit opposable au constituant pour une durée de plus de trois ans à
l’expiration de la fiducie, grever de droit réel même à titre accessoire, les biens faisant partie
du patrimoine fiduciaire.
Il procédera à toute réparation d’entretien, prendra toutes mesures matérielles ou juridiques
que nécessiterait la conservation des la substance des biens et droits transférés.
D’une manière générale, le Fiduciaire se rapprochera du Constituant pour toute difficulté
qu’il rencontrerait dans l’accomplissement de sa mission.
Section 3. Fiducie gestion dans l’intérêt d’un tiers
La fiducie gestion au profit d’un tiers ne peut se concevoir que sous la condition que ce tiers
ne soit pas dans une relation de gratuité avec le constituant, ce qui ferait basculer la fiducie
dans la nullité prévue par l’art 2013 du c.civ.
Sur le plan pratique, cette hypothèse peut recouvrir des hypothèses très diverses : stipulation
du fiduciaire, à la demande du constituant, et au profit du bénéficiaire, du produit total ou
partiel, de la gestion du patrimoine fiduciaire sous la condition que la cause de cette
stipulation au profit du bénéficiaire ne soit pas fondée sur une intention libérale du constituant
au profit dudit bénéficiaire.
Applications pratiques
Ce schéma peut correspondre aux cas suivants :
-
Gestion de fonds constitués par une entreprise pour gérer et répartir des avantages sociaux
annexes aux contrats de travail (complément de retraite ou de prévoyance, œuvres sociales
etc.).
-
Gestion d’un plan social d’entreprise.
-
Gestion de fonds dont les revenus sont affectés à une œuvre caritative ou d’intérêt général
pour autant que ce mécénat ne relève pas d’une pure intention libérale (intérêt du
constituant à l’association de son image à celle de l’œuvre bénéficiaire).
Définition de la mission
-
Le contenu de la mission, se trouvera assez souvent lié à la nature des droits du ou des
bénéficiaires : le service de telle ou telle prestation impliquera, par la force des choses un
mode de gestion spécifique en termes de distribution, de constitution de réserve, de
pratiques prudentielles, etc.
-
Au regard des bénéficiaires, la définition de la fiducie et de son but passera par la
description des droits que le constituant souhaite voir attribuer aux bénéficiaires, pendant
la fiducie (prestations particulières, fruits ou revenus périodiques) ou à son expiration
(transfert des biens et droits financiers).
Les pouvoirs du fiduciaire
Ils sont bien évidemment dépendants de la définition et du but de la mission fiduciaire.
En toute logique, ces pouvoirs sont à la fois des pouvoirs d’administration et de gestion du
patrimoine fiduciaire et d’affectation des biens ou des revenus desdits biens au profit du ou
des bénéficiaires.
Section 4. Fiducie sûreté immobilière sans dépossession
Applications pratiques
Cette hypothèse devrait constituer un domaine d’application privilégié pour la profession
d’avocat en ce sens que cette mission du fiduciaire est essentiellement juridique et
n’entraîne aucune implication dans la gestion concrète de l’immeuble, le constituant
restant en possession de celui-ci. La mission du fiduciaire se limite en quelque sorte au
« portage » de la propriété de l’immeuble pour l’attribuer à qui de droit en fonction de la
situation, le moment venu, au regard du paiement ou du non paiement de la dette. La
surveillance du paiement, le rechargement éventuel de la fiducie sont en effet des missions
essentiellement juridiques relevant à l’évidence du métier de l’avocat.
Description de la mission
-
Elle peut paraître extrêmement simple sauf à considérer que l’exécution de la mission sera
d’autant plus aisée que les parties seront convenues, créancier inclus, de définir
précisément la définition de l’impayé et les conditions précises de son constat. C’est en
effet ce constat qui constitue le fait générateur de la mise en œuvre de la garantie
fiduciaire, et l’on imagine mal que le retard d’un seul jour ou l’insuffisance de paiement à
hauteur d’un seul euro puisse être considéré à ce titre comme une inexécution définitive
de l’obligation au paiement.
-
La description de la mission s’attachera à préciser le mode de garantie apportée au
créancier : transfert direct de la propriété ou mise du bien en vente avec désintéressement
du créancier sur le produit de la vente, le tout en respectant les conditions procédurales
prévues par les textes spécifiques (art 2488-1 et suivant du c.civ.).
-
Le contrat de fiducie devra comprendre la convention règlementant les conditions de la
réserve du droit de jouissance du constituant, observation étant faite que ni la
législation des baux commerciaux, ni celle de la location-gérance ne sont applicables à
cette hypothèse.
Pouvoirs du fiduciaire
-
Le fiduciaire n’ayant pas la possession et donc la gestion du bien immobilier mis en
fiducie sûreté, la question de ses pouvoirs de gestion sur le bien ne se pose pas. Peut-être
lui sera-t-il confié une mission de surveillance pour « garantir » le créancier de la
subsistance de son gage et le cas échéant permettre au fiduciaire de prendre toutes
mesures qui s’imposeraient pour le cas où le débiteur, resté en possession des biens,
compromettrait la consistance économique du gage.
-
Un droit d’information pour ne pas dire d’investigation doit lui être reconnu relativement
à la surveillance des paiements à intervenir de façon à donner pleine efficacité à la
garantie fiduciaire en permettant de la faire jouer au moment le plus opportun.
Section 5. Fiducie sûreté immobilière avec dépossession
Applications pratiques
L’hypothèse se conçoit s’il s’agit de mettre en fiducie un immeuble ou un ensemble
immobilier locatif dont la gestion peut aisément être confiée à un tiers pour se limiter à la
seule nécessité d’encaisser des loyers et payer des charges et impôts y afférant, encore que la
gestion des baux relève parfois de problématiques complexes impliquant de véritables
décisions d’opportunité.
Description de la mission
On comprendra que la finalité de la fiducie étant la garantie du créancier, l’objectif de la
gestion soit réduit à la conservation de la consistance économique du gage, ce dont se déduira
aisément le fait qu’il s’agira a priori d’une gestion « a minima », sauf circonstances
particulières. Il n’en reste pas moins que la mission du fiduciaire devra être précisée quant à la
question de savoir si les locations en place doivent être renouvelées ou si, dans la perspective
d’une vente future il est plutôt attendu du fiduciaire qu’il libère les lieux de toute occupation
pour en mieux valoriser le prix en cas de vente.
Pouvoirs du fiduciaire
Dans la fiducie sûreté, le créancier a des intérêts tout aussi importants que ceux du constituant
et c’est la raison pour laquelle il peut être opportun, dans certains cas d’impliquer ledit
créancier dans l’habilitation dont peut avoir le fiduciaire dans l’accomplissement de sa
mission lorsque ses pouvoirs propres se trouvent insuffisants. Le contrat de fiducie peut à
cette fin prévoir que les décisions qui engagent l’avenir soient prises avec l’accord du
créancier bénéficiaire de la fiducie sûreté.
Section 6. Fiducie sûreté mobilière avec dépossession
Applications pratiques
Les hypothèses concrètes se conçoivent facilement ; la fiducie se présente alors comme une
sorte de substitut du gage avec dépossession à la différence importante près que le fiduciaire
n’est pas seulement détenteur des biens constitués en garantie mais qu’il en est véritablement
propriétaire. L’objet de la fiducie sûreté mobilière avec dépossession se conçoit bien sur un
portefeuille de valeurs mobilières mais aussi sur toute participation à une société quel que soit
le pourcentage de détention, la nature civile ou commerciale de la société, voire son objet :
seules les modalités de transfert de la propriété des titres sera différente suivant les cas (ordre
de mouvement à l’appui du contrat de fiducie dans un cas, et seul contrat de fiducie dans
l’autre cas). La fiducie sûreté sur les titres d’une société familiale non cotée peut bien
évidement s’envisager en garantie de l’engagement de caution que le dirigeant pourrait avoir
accordé à un établissement de crédit, ledit établissement de crédit étant bénéficiaire de cette
sûreté au cas où l’engagement directe de caution ne se réaliserait pas comme convenu.
L’objet de la fiducie sûreté mobilière avec dépossession pourrait aussi concerner des meubles
et objets aussi variés que des tableaux, meubles précieux, bijoux etc.…
Définition de la mission
Les mêmes précautions que celles devant être prises en cas de fiducie sûreté sans
dépossession s’imposent quant à la définition de la mission.
S’y rajoutent celles tenant à la jouissance dont le fiduciaire dispose sur les biens au titre de la
propriété à lui confiée. On comprendra cependant que dans ce cas, la mission du fiduciaire
soit plus orientée vers une mission de conservation que sur un objectif de développement et
d’amélioration ou de restructuration des actifs mis en fiducie.
Dans certains cas, la conservation des biens mis en fiducie supposera qu’un certain nombre de
précautions soient prises notamment en ce qui concerne la garde d’objet précieux supposant la
location de coffres ou de locaux spécialisés. Si tel est le cas, le contrat de fiducie devra
réserver cette possibilité de délégation partielle de la mission.
Pouvoirs du fiduciaire
La gestion se faisant partiellement dans l’intérêt du créancier, la définition des pouvoirs
correspondant à la mission se fera le cas échéant avec le concours du créancier.
Section 7. Fiducie sûreté mobilière sans dépossession
Applications pratiques
Les hypothèses semblent plus difficiles à concevoir concrètement, encore que sur un
portefeuille de valeurs mobilières, seule la nue-propriété des titres sous l’usufruit du
constituant pour la durée de la fiducie, pourrait se concevoir ; mais on voit bien la réticence
que pourrait avoir le bénéficiaire créancier à laisser le débiteur en possession des biens en
cause, même au titre d’une seule détention de l’usufruit, tant les risques de mauvaise gestion,
voire de dilapidation des biens par le débiteur, seraient à craindre.
Chapitre 6 Le tiers protecteur
Principe
Pouvoirs
Renouvellement
Chapitre 7 Reddition des comptes
Périodicité
Contenu
Chapitre 8 Délégation
Principe
Procédure d’agrément
Responsabilité
Chapitre 9 Transmission du contrat
Chapitre 10 Rémunération
Principes
Payement
Chapitre 11 Comptabilité
Principes
Modalités
Chapitre 12 Assurances
Responsabilité Civile
Assurance pour le compte de qui il appartiendra
Chapitre 12 Litiges
Chapitre 13 Fin du contrat
Chapitre 14 Formalités