Film américain en couleurs. 1988. 115 min. Titre - Ciné
Transcription
Film américain en couleurs. 1988. 115 min. Titre - Ciné
, - 4 . / 5 0 6 7 , 1 8 2 9 ! " # $ : ; % < & = > ' ( ) ( * ) & + Film américain en couleurs. 1988. 115 min. Titre initial Titre original Scénario Photographie Musique Production Interprétation Twins Dead Ringers David Cronenberg et Norman Snider, d’après le livre de Barri Wood et Jack Geasland Twins. Peter Suschitzky Howard Shore Marc Boyman, David Cronenberg Jeremy Irons Geneviève Bujold Heidi von Palleske Barbara Gordon 3 Mardi 3 février 1998 Beverly Mantle/Elliot Mantle Claire Niveau Dr Cary Weiler Danuta Mardi prochain Le Ciné-Club organise une séance avec Homonormalités. Le Droit du plus fort de Rainer Werner Fassbinder. Film allemand en couleurs. 1975. 118 min. En Allemagne, dans les années 1970, un forain au chômage, Frantz Biberkopf, est introduit dans une société d'homosexuels distingués. Il y fait la connaissance d'Eugen. Ils s'éprennent l'un de l'autre et décident de vivre ensemble. Eugen tente d'inculquer à Franz des manières raffinées mais la différence de classe et de culture reste irréductible. Une comédie irrémédiablement liée au drame. Suite de la programmation Le Ciné-Club ne prend pas de vacances en février et compte sur l’assiduité de ceux qui ne seront pas sur les pistes. Au programme le 17 février : ratrappage de Dies Irae qui avait dû être annulé à la dernière minute en décembre dernier. Et le 24 février L’Homme de la plaine, dans la série des grands westerns d’Anthony Mann avec James Stewart. Nous vous espérons très nombreuxle 3 mars pour une grande nuit consacrée à quelques couples mythiques du cinéma. Résumé : Beverly & Elliot Mantle, jumeaux gynécologues se partagent renommée médicale et conquêtes féminines dans la plus parfaite complicité; jusqu’au jour où Beverly voudrait garder Claire Niveau pour lui seul... Mutation de l’organisme, images et chair contaminées, de sa période “underground” à sa récente posture d’auteur contesté et reconnu, David Cronenberg n’a jamais cessé d’explorer ce morbide univers. Ses personnages se déforment, se transforment, se métamorphosent, pour mourir après une impossible quête de l’homme-machine, du “plus qu’humain” voire surhumain. Le virus infeste les chairs et malgré un processus exclusivement intérieur s’étend peu à peu aux images pour rapidement perturber leur interprétation. Organismes schizophrènes et déconstruits, les films de Cronenberg multiplient en effet les points de vue de manière extrêmement déroutante. Comme si la mise en scène quasiment médicale, qui dissèque et constate en évitant la fable, nécessitait un contrepoint malsain et vicié. Si dans ses premiers films l’auteur utilisaient couramment les techniques visuelles du cinéma “gore” et fantastique1, à partir de Dead Ringers les effets spé- ciaux deviennent invisibles (à l’exception notoire d’une scène de rêve assez perturbante) et de ce fait plus pernicieux et dérangeants. Ce qui modifie progressivement le comportement de Beverly puis d’Elliot Mantle, est bien plus dangereux qu’un alien extérieur aisément repérable et propre à susciter une solidarité de défense, c’est une lente altération intérieure, une mutation qui n’est jamais refusée ou rejetée, l’anormalité est assimilée et admise comme un état de singularité puissante, une humanité dépassée, surpassée. Et les images, à l’instar des personnages dévorés de l’intérieur, se partagent en catégorie saine ou virale, cependant l’onirisme d’un grand nombre de scènes ne permet plus d’en distinguer à coup sur le statut, rêves et réalités s’emmêlent malgré le réalisme jusqu’au boutiste de la mise en scène qui traque la cicatrice, la marque interne, au plus près2. Si la mort est généralement le seul aboutissement possible de ces mutations, ce qui intéresse avant tout Cronenberg c’est se qui se passe avant : le monstrueux vivant. L’image transcrit la mort au travail, seule résolution jouissive de la tension accumulée, mais n’implique jamais d’éventuelles rédemption ou guérison; bien au contraire le mal non disparu plane encore comme une menace, la disparition du corps où le virus a été accepté ne garantie pas l’impossibilité d’une propagation du germe, et les images infestées sont là pour nous le rappeler. Nous sommes bien à l’opposé de la résolution très moraliste de Dr Jekyll & Mr Hyde, où la mort du “mauvais” entraînant celle du “bon, contaminé” prenait un caractère rédempteur pour la victime expiatoire comme pour la société rassurée et surtout préservée en l’état. (Le sentiment permanent de claustration qui émane de l’œuvre est d’ailleurs renforcé par une absence quasi-permanente de plans où figure le ciel, issue condamnée?) Œuvres sur les chairs altérées (scarifications, prothèses et autres ecchymoses de Crash, anomalie médicale de Claire Niveau dans Dead ringers) ou métamorphosées (l’homme mouche de The fly, la machine à écrire changée en cul ou l’inverse - dans The naked lunch, les instruments gynécologiques confectionnés par Beverly), les films de Cronenberg sont eux-mêmes des organismes en évolution, des films-corps. Le côté “underground” a pu laisser planer l’image d’un réalisateur trop cérébral, il n’en est rien et bien que rétréci et focalisé, l’espace ne se limite pas au seul cerveau qui n’est qu’un organe parmi les autres. Si l’analyse est bien là, son expression est très physique et douloureuse, elle fouille l’organisme, son montage plus ou moins raté, et renforce le voyeurisme du spectateur (et son malaise) en éclatant les points de vue, les points d’ancrage. Dead ringers par rapport à cette dispersion, ajoute la dimension complexe de la gémellité. Cette notion du double presque naturellement manichéenne, est également perturbée, brouillée, tant il apparaît difficile de discerner avec certitude lequel des deux frères pourrait constituer l'original sain, lequel la réplique virale. Certes Beverly s'achemine progressivement vers un fatal dérèglement et son frère qui décide finalement de l'accompagner en sera la première victime; pour autant Elliot profitant en parasite des succès de son frère puis refusant de lui laisser Claire (ainsi qu'il le souhaite, alors qu'elle semble elle-même le "préférer") en s'obstinant dans ce partage sexuel qui joue de leur ambivalence, pourrait être considéré comme l'élément perturbateur qui détraquera l'autre et lui montrera le chemin de la mort inévitable. Presque issus de nulle part les frères Mantle nous sont montrés dès l'enfance complices et complémentaires, vivant en sorte d'autarcie volontaire, à l'écart des humains "singuliers". Et cette folie, d’abord relative aux femmes mutantes puis progressivement destructrice, ne pourrait être que l'aboutissement de leur passion exacerbée pour le corps en tant qu'objet d'étude médicale3, une évolution vers une meilleure maîtrise des organismes mutés, perfectionnés4 dans l’optique de leur univers restreint et claustré (on sort très peu du laboratoire ou du studio des frères). Revisitant tout le bric-à-brac du fantastique lié au double (démiurge-créature, homme-monstre, mauvais et bon jumeau) Cronenberg renverse la plupart des thèmes : il n'y a plus de notion d'atteinte périlleuse à la nature mais plutôt une action naturelle et néfaste à l'origine, la chair identique devient son propre ennemi, le monstre première atteinte du corps est dépassé par une plus parfaite mutation : le semblable invisiblement altéré. Les frères Mantle jouissent d'être deux mais chacun va rêver d'être unique, Beverly le premier en réclamant une réelle indépendance puis Elliot en recherchant au contraire une nouvelle fusion. Cette assimilation des doubles ne sera évidemment possible que dans la mort (superbe image d’enlacement maternel et biblique) qui laisse derrière eux (Beverly ira s'en assurer) l'élément commun diviseur : Claire, dont l’utérus trifide implique une irrémédiable stérilité et brise définitivement la symétrie (action que lui prêtait déjà le rêve-cauchemar de la séparation des frères siamois). À l'égal du constat pessimiste et passablement frustré de Crash, ce film nous offre enfin une vision particulièrement morose du sexe. En accord avec une certaine révolution sexuelle qui faisait enfin primer la jouissance sur le fonctionnel, Cronenberg ne présente plus l'acte charnel comme un principe de reproduction de la chair, cependant il semble que cette interaction, consommation, des chairs ait également dépassé les stades du désir et du plaisir : le sexe agit alors comme une maladie incurable dont sont atteints les amants, voire un nouveau vecteur de contagion. Elliot tentera d'ailleurs de s'en servir pour sa "réunification" avec Beverly en le joignant à ses ébats avec le docteur Carry, quant à Claire plutôt masochiste elle entre immédiatement dans ce rapport mécanique et maladif où la chair stérile ne sait plus se reproduire et n'a d'autre résolution que la mort dont elle chorégraphie la danse. Au vu de ces conceptions obsessionnelles, originales et déconcertantes, il n'est guère surprenant que Cronenberg, au fil de son œuvre, ait réussi à choquer aussi bien les tenants de la morale puritaine que les chantres de la "political correctness". Comment le lui reprocher... Olivier Coulon ______________________________ 1 Explosion de cerveau dans Scanners, autoaccouchement dans Videodrome, transformation progressive en mouche dans The fly... 2 Dans le récent et peu compris Crash la scène de photographies du grand accident, au milieu des secours, est l’illustration très réussie de cet onirisme qui mêle le morbide halluciné au réalisme cru. 3 Le “jeu du docteur” des enfants, qui horrifie la fillette, l’instrument gynécologique révolutionnaire fonctionnel seulement sur une femme morte, la fascination de Beverly pour l'anomalie de l'utérus de Claire... 4 Quand la tranformation du personnage de The fly en surhomme bascule vers le pire : l'insecte