E-cigarette : questions-réponses sur les dangers du «vapotage passif»
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E-cigarette : questions-réponses sur les dangers du «vapotage passif»
actualité, info avancée thérapeutique E-cigarette : questions-réponses sur les dangers du «vapotage passif» «Vapoter». Inconnu hier encore, ce verbe du d’e-liquide persistent peu de temps (plus de premier groupe est entré de plain-pied dans 95% de l’aérosol a disparu dans la minute le monde de la francophonie : c’est le symp- quand il est composé de propylène glycol). tôme éclairant de ce phénomène qu’est la La persistance est un peu plus longue avec vogue grandissante pour la e-cigarette (ci- les e-liquides à la glycérine végétale mais, garette électronique). Un phénomène dont en tout état de cause, beaucoup plus courte on est sans doute encore loin d’avoir pris la que celle de la fumée de tabac, écrivent les mesure sociétale et la portée sanitaire. Faut-il auteurs du rapport. Les composants qui y voir une nouvelle addiction a minima ? Prier persistent plus longtemps sont sous forme pour tenir ici la clef plus ou moins rêvée qui gazeuse. Ainsi, alors qu’avec la fumée de tapermettra de faire une croix sur cette ter- bac la pollution environnementale est majorible assuétude qu’est celle au tabac ? En ritairement particulaire, elle est principaleFrance (bientôt près ment gazeuse avec l’ed’un million de fu- … elle offre précisément la cigarette.» meurs plus ou moins possibilité de pouvoir abandonner Selon les auteurs, il consommateurs), ce le tabac en présence de non est acquis que la demiphénomène vient de vie des gouttelettes de vapoteurs … prendre une ampleur la «vapeur» de l’e-citoute particulière, également médicale et garette est environ cent fois inférieure à la politique. A la demande de Marisol Touraine, demi-vie de la fumée de tabac. D’un point ministre française de la Santé, un rapport de vue strictement théorique, les risques liés officiel a été élaboré ; il vient d’être rendu aux gouttelettes émises par l’e-cigarette dans public.1 l’environnement sont donc théoriquement Parmi les très nombreuses questions trai- plus de cent fois moins élevés que ceux de tées dans ce document officiel figure celle l’exposition à la fumée de tabac. «Contrairedu «vapotage passif», cette «contamination» ment à un lieu où l’on fume du tabac, il n’y potentielle de l’environnement par les «va- a pas d’exposition aux particules solides dans peurs» qui sont issues du fonctionnement une pièce où l’on vapote, l’exposition aux des e-cigarettes. Il s’agit là d’une question gouttelettes liquides y étant négligeable, sauf essentielle. On se souvient en effet que la dé- à rassembler de très nombreux vapoteurs. monstration de l’existence et de la nocivité La seule exposition passive est celle aux produ «tabagisme passif» a constitué dans de duits chimiques sous forme gazeuse (nicotine nombreux pays un puissant levier dans la et autres gaz)» peut-on lire dans le rapport. lutte contre la consommation de tabac dans Quelle est la nature du vapotage passif ? les espaces publics. Un quart de siècle plus On trouve, dans la phase gazeuse, du protard, le cas de figure est presque inversé : il pylène glycol (1,2-propanediol) et/ou du glys’agit de savoir si le «vapotage massif» est cérol (1, 2, 3-propanetriol), composés princidangereux pour l’entourage des «vapoteurs». paux du e-liquide. On trouve également des Or si la démonstration est apportée, c’est arômes et des traces de nicotine et parfois de tout un pan des avantages et des vertus sup- la diacétine (un produit issu du glycérol posés de la e-cigarette qui s’effondre. Car également autorisé comme solvant dans les elle offre précisément la possibilité de pou- arômes alimentaires et inscrit au Codex Alivoir abandonner le tabac en présence de mentarius), parfois des traces de métaux ou non-vapoteurs, et ce grâce à un produit dé- de résidus carbonés. Mais, dans tous les cas, barrassé des goudrons et autres toxiques du les taux retrouvés sont bien inférieurs aux tabac, à l’exception de la nicotine ; lorsque valeurs réputées toxiques ou cancérogènes ; nicotine il y a, ce qui n’est pas toujours le et ce même dans les conditions les plus excas. trêmes d’utilisation de l’e-cigarette. Pour les De quelles certitudes démontrées dispose- auteurs, le seul composé pouvant être prét-on ici ? La première concerne le temps du- occupant est le formaldéhyde, mais son taux rant lequel la «vapeur» de l’e-cigarette reste est cinq à dix fois plus élevé dans la fumée du dans l’atmosphère. «Dans une pièce où l’on tabac que dans la «vapeur» de l’e-cigarette. utilise une e-cigarette, les fines gouttelettes Ces mêmes auteurs ajoutent que les gout- 1282 42_45.indd 1 telettes rejetées par l’utilisateur d’e-cigarette ont «quasiment disparu dans la minute» et qu’elles restent donc bien peu de temps disponibles pour l’inhalation par l’entourage. Le risque (s’il existe) est lié aux gaz rejetés et formés lors de l’évaporation des gouttelettes. Une étude2 conduite sur quinze fumeurs (M 15 cigarettes/ jour) a étudié dans le même temps quinze non-fumeurs qui ont subi une «session de contrôle», une «session de tabagisme passif» et une «séance d’exposition passive au vapotage». Il apparaît que le taux de cotinine (un métabolite de la nicotine) sérique est bas mais quasiment identique qu’il s’agisse d’une exposition à la cigarette de tabac ou à l’e-cigarette. La nicotine est retrouvée dans le sang et les urines des non-fumeurs non vapoteurs exposés passivement au vapotage. Dans trois études (non standardisées) menées sur ce thème, les taux de nicotine semblent Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 12 juin 2013 10.06.13 12:27 CC BY Reinald Kirchner substances. Il est surtout important de faire en sorte que l’e-cigarette ne constitue pas une incitation à fumer dans les lieux non fumeurs et ne contribue pas à un retour à la normalisation de l’usage du tabac dans notre société. » C’est là, on le sait, un bien vaste sujet. JeanYves Nau [email protected] 1 Intitulé «Rapport et avis d’experts sur l’e-cigarette Mai 2013 - avec le soutien de la Direction générale de la santé». Ce rapport a été élaboré par un groupe de spécialistes de différentes disciplines réunis sous l’autorité du Pr Bertrand Dautzenberg, spécialiste de pneumologie et tabacologue (groupe hospitalo-universitaire Pitié-Salpêtrière, Paris) et président de l’Office français de prévention du tabagisme (OFT). Ce rapport est disponible sur le site de l’OFT : www.ofta-asso.fr/ 2 Flouris AD, Chorti MS, Poulianiti KP, et al. Acute impact of active and passive electronic cigarette smoking on serum cotinine and lung function. Inhal Toxicol 2013;25:91101. Picture by M0tty moins importants qu’avec une exposition au tabagisme passif. Les conséquences majeures du tabagisme passif causé par la fumée de cigarettes sont liées aux cancérogènes, aux particules, aux irritants, à la nicotine et au CO. L’exposition passive à l’aérosol de l’e-cigarette ne fait pas prendre de risque vis-à-vis du CO, de cancérogènes ou de particules. De faibles traces de cancérogènes ont bien été trouvées dans des e-liquides, en particulier des traces de nitrosamine, cancérogène naturel du tabac dont la nicotine est extraite. Mais les e-liquides actuels (fabriqués avec la qualité USP et EurPh) ne présentent que d’infimes traces et qui plus est à des concentrations similaires à celles trouvées dans certains médicaments de sevrage. Reste l’essentiel : l’utilisateur d’e-cigarette n’expose pas son entourage à des taux significatifs de cancérogènes, à des particules solides ou au monoxyde de carbone. Il l’expose à des produits chimiques irritants et à la nicotine (si nicotine il y a). «A ce jour, si on peut mesurer quelques effets, on ne sait pas confirmer que les effets des substances inhalées en faibles doses par l’entourage sont toxiques ou non» concluent les auteurs. Bien que le risque repose sur des bases scientifiques faibles, il est utile, dans un but sanitaire direct, d’établir des règles pour protéger l’entourage des vapoteurs de ces Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 12 juin 2013 42_45.indd 2 1283 10.06.13 12:28