La Lettre SIMON Associés
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La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES Mai 2003 La lettre d’information mensuelle de SIMON Associés porte sur les dernières évolutions législatives et jurisprudentielles, dans les principaux domaines de son activité (cliquez sur ) ainsi que sur des informations générales concernant la vie du cabinet : Fusion acquisition & droit des sociétés, Droit des contrats, Droit bancaire, Droit économique, Droit des entreprises en difficulté, Droit de l’informatique et des nouvelles technologies, Droit immobilier & construction, Baux commerciaux & d’habitation, Droit des assurances, Droit de la propriété littéraire & artistique, Droit social, Contentieux civil et commercial, Voies d'exécution, Droit pénal, Droit public & administratif, Droit communautaire & européen. Information pratique du Mois : Des risques juridiques liés à la mise en œuvre d’un Intranet dans l’entreprise Vous ne souhaitez plus recevoir cette lettre Cliquez ici : [email protected] Site internet : www.simonassocies.com SIMON & Associés – Société d’avocats 25 rue de Prony 75017 Paris – 01.42.27.36.20. – 01.44.40.41.88. La Lettre du Cabinet Mai 2003 FUSION ACQUISITION & DROIT DES SOCIETES : CRITERES DE VALIDITE DU CAUTIONNEMENT CONSENTI PAR UNE SNC EN GARANTIE D’EMPRUNTS CONTRACTÉS A TITRE PERSONNEL PAR SES ASSOCIÉS [Cass. Com., 18 mars 2003 (cassation partielle)] A la différence des sociétés par actions et des SARL, les sociétés de personnes (SNC, sociétés civiles, etc …) peuvent garantir les emprunts personnels de leurs associés, dès lors cette décision résulte de la volonté unanime des associés, qu’elle n’est pas contraire à l’intérêt social et qu’il n’existe pas de collusion frauduleuse entre les créanciers sociaux. Outre ces trois critères, la Chambre commerciale de la Cour de Cassation, à la différence de la 1ère Chambre Civile, en ajoutait un quatrième : la conformité de l’engagement pris par la société à son objet social. L’arrêt rendu le 18 mars 2003 par la Chambre commerciale de la Cour de Cassation est fondamental puisqu’il constitue un revirement de jurisprudence pour la Chambre commerciale de la Cour de Cassation, dont la position s’aligne désormais sur celle de la première Chambre civile (Cass. Civ. 1ère, 19 mai 1987). En l’espèce, la SNC W… ayant fait l’objet d’un jugement de redressement judiciaire, la Banque X… a déclaré trois créances au titre de cautionnements consentis par la Société W… en garantie des prêts accordés à deux de ses associés, M. Y… et Z… Pour rejeter les créances déclarées par la Banque X… au passif de la Société W…, un arrêt de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence avait retenu que la dette garantie ne correspondait pas à une dette sociale mais à une dette personnelle des associés et que cette garantie, bien qu’ayant été concédée par la Société W… avec l’accord unanime de tous les Associés, ne constituait pas un acte entrant dans l’objet social qui, dès lors, était insusceptible d’avoir pu valablement engagé la société dans ses rapports avec les tiers. Par l’arrêt commenté, la Chambre commerciale de la Cour de Cassation rompt avec sa position antérieure (Cass. Com., 26 janvier 1993) et considère qu’ « en statuant ainsi, alors que l’arrêt constate que les cautionnements en cause avaient été données avec l’accord unanime de tous les Associés lors d’une Assemblée Générale Extraordinaire et dès lors qu’il n’était pas allégué que ces garanties étaient contraires à l’intérêt social, la Cour d’Appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ». Le critère de la conformité de l’engagement à l’objet social disparaît donc. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT DES CONTRATS : CONTRAT DE CAUTIONNEMENT ACTION PAULIENNE A l’ENCONTRE DE LA CAUTION [Cass. Mixte, 21 février 2003 (rejet)] La recherche par la caution de la responsabilité du créancier est un phénomène relativement récent et parfois complexe. Il faut se rappeler en effet la jurisprudence évolutive de la Cour de Cassation qui, après avoir considéré que la caution ne pouvait opposer au créancier que les exceptions appartenant au débiteur principal et « inhérentes à la dette » (Cass. Com., 7 mai 1975), permet à présent à la caution d’opposer aux créanciers les autres exceptions (Cass. Com., 16 mars 1993). En revanche, la jurisprudence n’avait jusqu’alors jamais véritablement tranché la question dernièrement soumise à la Chambre mixte de la Cour de Cassation : la caution peut-elle faire échec à l’action paulienne exercée à son encontre par la banque créancière en invoquant par voie d’exception la faute qu’aurait commise cette banque par un soutien abusif accordé au débiteur principal ? En l’espèce, Mme W… se porte caution solidaire en 1990 des sociétés du Groupe X… pour garantir divers prêts accordés par la Banque Y… auxdites Sociétés, déclarées en redressement judiciaire en 1993. Entretemps, courant 1992, Mme W…, en sa qualité de nu-propriétaire, et Mme Z…, en sa qualité d’usufruitière, ont consenti à M. W… des baux de 30 ans sur des terrains viticoles. Estimant que ces terrains avaient été donnés à bail dans le but exclusif de réduire les garanties immobilières susceptibles d’être reprises par elle en qualité de créancière, la Banque Y… a assigné M. et Mme. W… à l’effet d’obtenir la nullité du bail sur le fondement de l’article 1167 du Code Civil relatif à l’action paulienne. Pour combattre cette action paulienne, M. et Mme W… et Mme Z… ont fait valoir que la créance de la Banque Y… n’était pas certaine, liquide et exigible, au motif que la dette principale résulterait d’un soutien abusif de la Banque au débiteur principal, constitutif d’une faute qui aurait causé un préjudice à la caution en aggravant sa situation. Ils sollicitaient donc la compensation entre la créance de la Banque et la faute commise par cette dernière à leur préjudice. Par son arrêt du 14 février 2003, la Chambre Mixte de la Cour de Cassation retient : « Dès lors que la Banque justifiait d’un principe de créance, la Cour d’Appel… a retenu à bon droit que la faute de la Banque, ne pouvait être invoquée par voie d’exception dans le cadre d’une défense et d’une action paulienne ». La solution est justifiée car : - en exerçant l’action paulienne, le créancier ne poursuit pas le recouvrement de sa créance et ne cherche qu’à prévenir la fraude et protéger les garanties dont il pouvait bénéficier ; - l’obligation de la caution prenant naissance à la date de son engagement, le principe certain de créance, fondement de l’action paulienne, existe dès cette date ; - de sorte qu’admettre que la caution puisse remettre en cause ce principe reviendrait à anticiper le sort de l’action en paiement que le créancier pourrait ultérieurement engager à l’encontre de la caution. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT BANCAIRE : CREDIT A LA CONSOMMATION : POINT DE DEPART DU DELAI BIENNAL DE FORCLUSION OPPOSABLE A L’EMPRUNTEUR [Cass. Civ. 1ère, 18 mars 2003 (cassation)] Importante et utile décision que celle qui vient d’être rendue le 18 mars 2003 par la Cour de Cassation. Selon l'article L. 311-37, alinéa 1er, du Code de la consommation (dans sa rédaction antérieure à la loi du 11 décembre 2001), le point de départ du délai biennal de forclusion opposable à l'emprunteur contestant la régularité de l'offre préalable, par voie d'action ou d'exception, est la date à laquelle le contrat de crédit est définitivement formé. La règle est d’ordre public. En l’espèce, un établissement de crédit X… a consenti une ouverture de crédit permanent remboursable par échéances mensuelles. Les emprunteurs Y… étant défaillants, l'établissement de crédit les a assignés en paiement des sommes dues au titre dudit crédit. Le Tribunal d'instance a relevé d'office le moyen tiré de l'irrégularité de l'offre préalable. Pour appliquer à l'encontre de l'établissement de crédit X… la déchéance du droit aux intérêts, la Cour d'appel a constaté que la mention « à peine de forclusion » ajoutée à l'article L. 311-37, alinéa 1 du Code de la consommation ne figurait pas sur l'offre préalable, que même si les modèles types réglementaires n'avaient pas été modifiés à la suite de la réforme de 1989, il appartenait à la société de crédit de mettre ses offres préalables en conformité avec la loi, que la mention « à peine de forclusion » correspondait à une volonté expresse du législateur dont on voyait mal que le juge puisse s'affranchir et revêtait une importance particulière par l'information qu'elle apportait sur la nature du délai, son caractère impératif de sanction, l'absence de suspension ou d'interruption et qu'il paraissait difficile d'opposer au prêteur une forclusion qui n'était pas précisée dans la convention alors qu'elle aurait dû l'être. Par l’arrêt rendu le 18 mars 2003 par sa première Chambre civile, la Cour de Cassation considère par principe « qu'en statuant ainsi, alors qu'à la date à laquelle le premier juge avait relevé d'office le moyen tiré de l'irrégularité de l'offre préalable, le contrat de crédit était définitivement formé depuis plus de deux ans, de sorte que le délai de forclusion était expiré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ». ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT ECONOMIQUE (CONCURRENCE & BOURSE) : (Communiqué COB du 29 Avril 2003 relatif au projet de réforme de la réglementation relative à l’information permanente des sociétés cotées ) Dans le cadre de ses réflexions en vue de l’amélioration de la qualité de l’information communiquée par les sociétés cotées, la Commission des Opérations de Bourse (COB) envisage à nouveau de procéder à une réforme de la réglementation relative à l’information permanente. Cette réforme – qui a vocation à permettre à la Place de Paris de maintenir sa compétitivité – s’inscrit dans la perspective du processus Lamfalussy d’harmonisation des réglementations européennes autour d’un marché unifié des capitaux, et prépare la mise en œuvre des directives « Abus de marché » et « Transparence », qui présideront bientôt au mode de gestion de l’information permanente et périodique des sociétés cotées. Ces textes européens feront de la diffusion électronique l’un des modes principaux de publication de l’information par les émetteurs et vont par ailleurs remodeler les diverses obligations d’information périodique et permanente des sociétés cotées, dans les domaines de l’information financière, comptable ou relative à la structure du capital. La réforme envisagée comporte essentiellement deux volets : - le premier volet, d’ordre technique, a pour objet de rationaliser et de sécuriser le système actuel de diffusion de l’information permanente au marché, - le second, de fond, consiste à rénover l’ensemble de la réglementation COB dans le domaine de l’information permanente, au moyen d’un nouveau guide de la communication financière. La COB a élaboré une série de propositions concernant la redéfinition du mode de diffusion de l’information permanente, sur lesquelles elle souhaite recueillir dans les meilleurs délais les observations de la Place. Ce document de consultation est disponible sur le site Internet de la COB (www.cob.fr). Les réponses à cette consultation doivent parvenir à la COB avant le 1er juin prochain et peuvent lui être adressées par message électronique à : [email protected]. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE : ACTION EN COMBLEMENT DE PASSIF ET ACTION EN RESPONSABILITE DE DROIT COMMUN [Cass. Com., 1er avril 2003 – (rejet)] La décision commentée fournit une illustration remarquable de la différence entre l’action en comblement de passif prévue à l’article 180 de la loi du 25 janvier 1985 (devenu l’article L. 624-3 du nouveau Code de commerce) et l’action en responsabilité de droit commun fondée sur l’article 1382 du Code Civil. En l’espèce, le liquidateur de la société W…, déclarant agir comme représentant des créanciers, avait assigné MM. X... et Y… en paiement des dettes sociales, M. X… appelant en garantie M. Y… et une Banque Z… . L’arrêt critiqué avait déclaré le liquidateur fondé en son action dirigée contre M. X..., qu’il condamnait au paiement des dettes sociales tout en déclarant mal fondés ses recours en garantie à l’encontre de M. Y… et la Banque Z… . M. X... faisait valoir deux moyens intéressants au soutien de son pourvoi. Selon le premier moyen, le dirigeant avançait que son appel en garantie contre M. Y... était bien fondé, ce dernier devant être considéré comme un dirigeant de fait de la société W… et, qu’en jugeant le contraire, la cour d'appel n'avait donc pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985. L’arrêt rendu le 1er avril 2003 par la Cour de Cassation apporte une solution circonstanciée puisqu’il considère par principe « qu'un dirigeant n'est pas recevable, même à titre de garantie, à exercer l'action en paiement des dettes sociales contre d'autres dirigeants » et que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve justifié de ce chef . Selon le second moyen, le dirigeant considérait que son appel en garantie contre la Banque Z... était recevable et bien fondé, car si l'article 183 de la loi du 25 janvier 1985 réserve l'exercice de l'action en comblement de passif aux organes de la procédure collective, il n'interdit pas au dirigeant condamné d'exercer une action récursoire contre un tiers qui, par sa faute, a concouru à la réalisation du même préjudice. Il estimait en effet que le dirigeant, condamné a payer au moins pour partie la dette d'autrui, se trouvait alors subrogé dans les droits de la société contre ce tiers et qu'en jugeant irrecevable son action récursoire exercée contre la banque, la cour d'appel avait violé, par fausse application les articles 180 et 183 de la loi du 25 janvier 1985, et par refus d'application les articles 1251-3 et 1382 du Code civil. L’arrêt rendu le 1er avril 2003 par la Cour de Cassation considère encore par principe que « le soutien prétendument abusif accordé par la banque à la société débitrice n'ayant pu porter préjudice qu'aux seuls créanciers, le dirigeant social n'est pas recevable, même à titre de garantie, à engager une action en responsabilité contre la banque » et « qu'ayant relevé que seul le liquidateur de la société aurait pu exercer une action en responsabilité contre la banque, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ». ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT DE L’INFORMATIQUE ET DES NOUVELLES TECHNOLOGIES : CRITERES DE COMPÉTENCE DU JUGE DES RÉFÉRÉS POUR CONNAITRE D’ACTES DE CONCURRENCE DÉLOYALE COMMIS SUR LE RÉSEAU INTERNET [Cass. Com., 1er avril 2003 (rejet)] Lorsqu’un acte de concurrence déloyale ou une infraction aux droits de propriété intellectuelle a été commis par une diffusion sur le réseau Internet, l’on sait que le fait dommageable se produit en tous lieux où les informations litigieuses ont été mises à la disposition des utilisateurs éventuels du site et, par voie de conséquences, que le Président du Tribunal dans le ressort duquel le « fait dommageable » (au sens de l’article 46 du NCPC) a été constaté est compétent ratione loci pour connaître de l’action en cessation des agissements litigieux (V. par ex. : CA Paris, 14ème Ch. A, 1er mars 2000). L’arrêt rendu le 1er avril 2003 par la Cour de Cassation complète cette jurisprudence puisqu’il montre qu’il en va autrement lorsque l’infraction a été commise dans le ressort territorial du Juge saisi, sans que le « fait dommageable » ait été constaté dans ce même ressort territorial. En l’espèce, à la suite de la publication sur une base de données accessible sur le réseau Internet, d’informations qu’elle estimait erronées, la Société X… a saisi le Juge des Référés du Tribunal de Grande Instance de PARIS pour qu’il soit ordonné à la Société Y…, la publication dans la même base de données d’une décision déjà rendue et de la décision à intervenir. La Société X… reprochait à l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de s’être déclarée incompétente pour statuer sur sa demande, tendant à obtenir la rectification des informations diffusées par la Société Y… sur le réseau Internet, alors que, selon elle, le Juge Français est compétent pour faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de la publication d’informations erronées sur un site Internet accessible en France. L’arrêt commenté relève que la Société X… « s’étant bornée, dans ses conclusions, à soutenir qu’elle était fondée à saisir le Juge du lieu où avait été commise « l’infraction » et non le Juge dans le ressort duquel le dommage avait été subi, la Cour d’Appel, qui a relevé l’absence de tout lien de rattachement entre l’objet de la mesure réclamée et la compétence territoriale de la juridiction française des référés, a légalement justifié sa décision ». ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT IMMOBILIER ET CONSTRUCTION : RECONSTRUCTION A L'IDENTIQUE D'UN BÂTIMENT DETRUIT PAR UN SINISTRE [C.E, 5 mars 2003 et Rép. Min. 17 mars 2003 )] L'article L.111-3 du Code de l'urbanisme autorise « la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre, nonobstant toutes dispositions d'urbanisme contraires, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié ». La portée du texte vient d'être précisée par une réponse ministérielle et un arrêt du Conseil d'Etat. Pour ce qui concerne la notion de bâtiments « régulièrement édifiés » au sens de ce texte, l'arrêt rendu le 5 mars 2003 par le Conseil d'Etat précise qu'il s'agit des bâtiments « construits sans autorisation ou en méconnaissance de celle-ci, ainsi que ceux édifiés sur le fondement d'une autorisation annulée par le Juge administratif ou retirée par l'administration ». En revanche, l'illégalité du permis de construire initial ne peut être valablement invoquée à l'encontre du permis de construire délivré sur le fondement des dispositions de l'article L. 111-3. Pour ce qui concerne la notion de "reconstruction à l'identique" au sens de ce texte, selon une récente réponse ministérielle (Rép. Min. n°7447, JO AN Q 17 mars 2003 ), elle doit être interprétée strictement : si le projet est différent de la construction détruite, l'article L. 111-3 ne s'applique pas et le projet doit alors être apprécié compte tenu des règles d'urbanisme en vigueur lors de la reconstruction. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 BAUX COMMERCIAUX ET D’HABITATION : RENOUVELLEMENT DU BAIL DEROGATOIRE [Cass. Civ., 3ème, 2 avril 2003 – (rejet)] M. X... avait donné à bail le 5 août 1992 à la société Y… des locaux à usage commercial pour une durée de 12 mois à compter du 1er septembre 1992. Par avenant du 2 septembre 1993, le bail avait été prorogé pour une durée de 11 mois s'achevant le 31 juillet 1994. Le preneur s'étant maintenu dans les lieux au-delà de cette période, le bailleur l'avait assigné en expulsion. Le bailleur reprochait à l'arrêt d’avoir rejeté sa demande d'expulsion en retenant que le preneur bénéficiait de la propriété commerciale au motif : - que si le preneur, étant resté en possession des lieux loués à l'expiration d'un bail dérogatoire, avait acquis le droit au bénéfice du statut des baux commerciaux, il pouvait toutefois renoncer au bénéfice de ce statut et conclure un nouveau bail dérogatoire postérieurement à cette acquisition, - qu’en l’espèce, postérieurement à l'expiration du bail dérogatoire du 5 août 1992, le preneur pouvait, en renonçant à l'acquisition du statut, conclure un nouveau bail dérogatoire au sens de l'article 3-2 du décret, - et qu'en affirmant que l'avenant du 2 septembre 1993, conclu pour une durée de 11 mois, ne pouvait avoir un caractère dérogatoire "réservé uniquement aux conventions conclues lors de l'entrée dans les lieux du preneur", la Cour d'appel avait donc méconnu les articles 3-2 du décret du 30 septembre 1953 et 1134 du Code civil. Par l'arrêt rendu le 2 avril 2003, la Cour de Cassation a retenu que l'acte du 2 septembre 1993, conférant au preneur le bénéfice d'un bail d'une durée de 11 mois à un moment où elle avait acquis le droit au statut, ne comportait aucune référence au décret du 30 septembre 1953 et ne faisait aucune mention de la volonté de cette société de renoncer en toute connaissance de cause et de manière non équivoque au bénéfice du statut, et que la Cour d'appel, abstraction faire d'un motif erroné mais surabondant, selon lequel l'acte avait été conclu alors que le preneur était déjà dans les lieux qu'il exploitait, en a exactement déduit que la société Y… bénéficiait du statut des baux commerciaux. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT DES ASSURANCES : FACULTÉ DE RÉSILIATION DU CONTRAT PAR L’ASSUREUR EN CAS DE REDRESSEMENT OU DE LIQUIDATION JUDICIAIRE DE L’ASSURÉ [Cass. Civ. 1ère, 1er avril 2003 (cassation sans renvoi)] Par dérogation à l’Article L. 621-28 du Code de Commerce (anciennement l’Article 37 de la Loi du 25 janvier 1985), l’Article L. 113-6 du Code des Assurances prévoit que si l’assurance subsiste en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’assurée, l’assureur conserve le droit de résilier le contrat pendant un délai de trois mois à compter de la date de jugement de redressement ou de liquidation judiciaire. En l’espèce, la Société X… avait souscrit le 30 avril 1985 auprès de la Compagnie d’assurances Y… un contrat d’assurance de groupe portant régime de prévoyance pour ses cadres et garantissant les risques décès, invalidité et incapacité de travail. Le 9 octobre 1996, la Société X… était placée en redressement judiciaire et, dans le délai de trois mois de l’article L. 113-6 du Code des Assurances, la Compagnie Y… informa le Représentant des Créanciers et l’Administration Judiciaire de sa décision de résilier le contrat d’assurance. La Société X…. et son Administrateur assignèrent la Compagnie Y … en nullité de la résiliation intervenue. Pour dire la résiliation nulle et de nul effet, l’arrêt de la Cour d’Appel d’Amiens avait retenu que : - l’Article L. 113-6 du Code des Assurances, inséré à la suite de l’Article L. 513-4 du même Code visant le cas d’aggravation du risque en cours de contrat ; - ne peut trouver application, précisément, qu’au cas où la procédure collective intervenue aurait entraîné une aggravation réelle des risques couverts par l’assureur et qu’il appartenait donc à ce dernier de démontrer que la défaillance de l’assurée constituait une circonstance aggravante, objective, modifiant soit la probabilité, soit l’intensité du risque et que la faculté de résiliation devait donc résulter d’une cause « effective indépendante de l’ouverture d’une procédure collective et sans lien obligé avec celle-ci » ; - sauf à violer les dispositions de l’Article 37 de la Loi du 25 janvier 1985 et à méconnaître la volonté de l’Administrateur Judiciaire d’opter pour la continuation du contrat litigieux. L’arrêt rendu le 1er avril 2003 casse sans renvoi la décision du Juge du fond après avoir considéré sans ambages qu’ « en imposant ainsi à l’assureur de poursuivre le contrat, la Cour d’Appel a violé les textes susvisés ». ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT DE LA PROPRIETE LITTERAIRE, ARTISTIQUE ET INDUSTRIELLE : « IMITATION » ET « EMPLOI » DE MARQUES : APPLICATION ALTERNATIVE DES ARTICLES L. 713-5 DU CODE DE PROPRIETE INTELLECTUELLE ET 1382 DU CODE CIVIL [Cass. Com., 11 mars 2003 - (cassation partielle)] Le Comité National Olympique et Sportif Français (C.N.O.S.F.) a assigné, sur le fondement de ce texte, la Société d’Achats des Centres X…, titulaire depuis 1993 de deux marques « OLYMPRIX », afin qu’il lui soit fait interdiction de faire usage de ce terme et qu’elle soit condamnée au paiement de dommages et intérêts pour avoir exploité sans autorisation les marques notoires « JEUX OLYMPIQUES » appartenant au Comité Olympique International. La Cour d’Appel avait accueilli cette demande par application de l’Article L. 713-5 précité et cette décision avait été cassée par la Cour de Cassation en toutes ses dispositions (Cass. Com., 29 juin 1999), tant sur le fondement de ce texte qu’en application de l’article 1382 du Code Civil. Le C.N.O.S.F. faisant valoir que l’usage de la dénomination « OLYMPRIX » par les Centres X… portait atteinte à l’élément essentiel de la marque « JEUX OLYMPIQUES » ainsi qu’à la notoriété de l’événement désigné et engageait donc la responsabilité de son auteur, l’arrêt de la Cour d’Appel de PARIS, rendu sur renvoi après cassation, a retenu que l’article L. 713-5 du Code de la Propriété Intellectuelle instaurant une action spécifique en responsabilité, les dispositions de l’Article 1382 du Code Civil ne pouvaient être utilement invoquées s’agissant des mêmes faits. Par l’arrêt rendu le 11 mars 2003 par la Cour de Cassation, cette décision est cassée par un attendu d’une clarté limpide qui distingue, en pareilles circonstances, les notions d’« emploi » et d’« imitation » : « Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’imitation d’une marque notoirement connue ne constituant pas le même fait que son emploi seul visé par l’article L. 713-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, le dépositaire d’une telle marque est recevable à agir quant à une telle imitation dans les termes du droit commun, la Cour d’Appel a violé le texte susvisé par refus d’application » ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT SOCIAL : PRÉCISIONS QUANT A LA NOTION D’ « ÉTABLISSEMENT DISTINCT » [Cass. Soc., 24 avril 2003 – (cassation)] Aucune définition légale de l’« établissement distinct » n’existe véritablement puisqu’aux termes des articles L. 412-11 et R. 412-3 du Code du Travail, caractérise un établissement distinct permettant la désignation de Délégués Syndicaux, le regroupement sous la direction d’un représentant de l’employeur d’au moins 50 salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques. Pour la première fois, la jurisprudence vient utilement préciser que la circonstance que le représentant de l’employeur ait le pouvoir de se prononcer sur ses revendications est totalement indifférente au regard de la qualification d’« établissement distinct » au sens de ces textes. En effet, pour annuler la désignation effectuée par diverses organisations syndicales de 15 salariés en qualité de délégués syndicaux au sein des agences d’une région, revendiquées comme constituant des établissements distincts le permettant, le Tribunal d’Instance de BÉZIERS, statuant sur renvoi après cassation, avait retenu de l’examen des pièces versées aux débats que le représentant de l’employeur n’ayant pas une délégation lui permettant de négocier et d’accorder des droits supplémentaires par voie de l’accord collectif, les agences ne constituaient donc pas un « établissement » dans le cadre duquel un délégué syndical pouvait être désigné. L’arrêt rendu le 24 avril 2003 par la Chambre sociale de la Cour de Cassation affirme l’inverse. Il retient en effet par principe qu’ « en statuant ainsi, alors que l’étendue de la délégation donnée par le chef d’entreprise à son représentant est indifférente à la reconnaissance de l’établissement distinct, le Tribunal d’Instance a violé les textes susvisés ». ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 CONTENTIEUX CIVIL ET COMMERCIAL : EFFICACITE DE LA CLAUSE DE CONCILIATION PREALABLE [Cass. Mixte, 14 février 2003 - (rejet)] La Jurisprudence a longuement hésité sur la question de la sanction attachée à la reconnaissance d’une clause contractuelle instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du Juge et, plus particulièrement, sur la recevabilité d’une demande en Justice engagée en méconnaissance d’une telle clause. En l’espèce, la clause invoquée était ainsi rédigée : « Pour toute contestation qui s’élèverait entre les parties relativement à l’interprétation ou à l’exécution des présentes, les soussignés s’engagent à soumettre leur différend, préalablement à toute instance judiciaire, à des conciliateurs, chacune des parties en désignant un, sauf le cas où elle se mettrait d’accord sur le choix d’un conciliateur unique. Ce ou ces conciliateurs s’efforceront de régler les difficultés qui leur seront soumises et à faire accepter par les parties une solution amiable dans un délai maximum de deux mois à compter de leur désignation. A défaut de parvenir à un accord, les Tribunaux du lieu du siège de la Société seront seuls compétents. » En présence de telles clauses, les différentes formations de la Cour de Cassation acceptaient jusqu’à présent deux thèses radicalement opposées : la première leur déniait toute force obligatoire au motif que le Juge ne peut faire droit aux seuls fins de non recevoir prévues à l’Article 122 du Nouveau Code de Procédure Civile, la seconde leur reconnaissait une force obligatoire car l’ordre public n’étant pas concerné, cette clause ne serait pas contraire à l’Article 122 précité. La Chambre Mixte de la Cour de Cassation met un terme à ces divergences d’interprétation et consacre la seconde solution, en considérant qu’« il résulte des Articles 122 et 124 du NCPC que les fins de non recevoir ne sont pas limitativement énumérées ». En conséquence, l’inapplication de telles clauses devrait désormais systématiquement conduire à l’irrecevabilité des actions contentieuses engagées en violation de ces stipulations. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 VOIES D'EXECUTION : PORTÉE DE LA SUSPENSION DES EFFETS D’UNE CLAUSE DE RÉSILIATION PAR LE JUGE DES RÉFÉRÉS [Cass. Civ. 3ème, 2 avril 2003 – (cassation)] Saisi dans les formes et conditions prévues aux Articles 1244-1 à 1244-3 du Code Civil, les Juges peuvent accorder des délais ainsi que suspendre la réalisation des effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation en cause n’est pas constatée ou prononcée par une décision de Justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. En l’espèce, la Société X…, propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à la Société Y…, lui avait fait délivrer le 28 août 2000 un commandement de payer un arriéré de loyers visant la clause résolutoire, puis l’avait assignée en référé pour faire constater l’acquisition de cette clause. Par ordonnance définitive du 4 décembre 2000, la Société Y… a été condamnée à titre provisionnel, et des délais lui ont été accordés pour s’acquitter de son arriéré de loyers dus en sus des loyers courants. N’ayant pas réglé à bonne date le terme du loyer exigible au 1er janvier 2001, la bailleresse lui a fait délivrer un commandement de quitter les lieux. Après avoir réglé l’arriéré de loyers dans les délais impartis par l’ordonnance du 4 décembre 2000, la Société Y… a assigné la bailleresse, au fond, le 5 février 2001, pour faire dire que la signification du commandement du 28 août 2000 n’était pas régulière, que la clause résolutoire ne pouvait en conséquence être déclarée acquise, que l’ordonnance de référé n’avait pas au principal autorité de la chose jugée et, subsidiairement, pour solliciter un délai supplémentaire jusqu’au 5 février 2001. Pour accorder rétroactivement à la Société Y… un nouveau délai pour régler l’arriéré de loyers, le loyer courant, et débouter en conséquence la Société X… de sa demande tendant à la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire, l’arrêt critiqué avait retenu qu’en application de l’Article 488 du NCPC, l’ordonnance de référé du 4 décembre 2000, bien que passée en force de chose jugée, n’avait pas au principal l’autorité de la chose jugée et ne faisait donc pas obstacle à ce qu’il soit statué sur l’acquisition de la clause résolutoire par la juridiction saisie au fond du même litige. L’arrêt rendu le 2 avril 2003 par la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation écarte radicalement une telle argumentation en objectant, à juste titre, qu’ « en statuant ainsi alors qu’elle constatait que les délais accordés par l’ordonnance de référé ayant suspendu la réalisation de la clause résolutoire n’avaient pas été respectés, la Cour d’Appel qui, saisie au fond, ne pouvait accorder de nouveaux délais, a violé le texte susvisé ». ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT PENAL : PROTECTION DES INTÉRETS FINANCIERS DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES [Décret n° 2003-355 du 15 avril 2003] La législation pénale de plusieurs États membres (dont la France) en matière de délits liés à l’exercice de fonction publique en général et en matière de corruption en particulier ne vise que les actes commis par ou envers leurs fonctionnaires nationaux et ne couvrent pas, ou ne couvrent que dans des cas totalement exceptionnels, les comportements impliquant des fonctionnaires communautaires ou des fonctionnaires relevant d’autres États membres de la Communauté Européenne. Le décret n° 2003-355 du 15 avril 2003 portant publication du protocole sur la lutte contre les délits de corruption portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés Européennes vient réparer cette omission. Ce protocole, qui vise aussi bien les infractions de « corruption active » que celles de « corruption passive », impose donc à la France de sanctionner les fonctionnaires communautaires dans l’exercice de leur fonction, de la même façon que ses fonctionnaires nationaux. On devine toutefois à la lecture du protocole une possible complexité des règles relatives à la compétence des États membres, qui ont la possibilité de retenir tout ou partie des règles de compétence suivantes : a) L’infraction est commise, en tout ou partie, sur son territoire ; b) L’auteur de l’infraction est un de ses ressortissants ou un de ses fonctionnaires ; c) L’infraction est commise à l’encontre d’une des personnes visées à l’Article 1er ou d’un des membres des Institutions visés à l’Article 4, paragraphe 2, qui est un de ses ressortissants ; d) L’auteur de l’infraction est un fonctionnaire communautaire au service d’une institution des Communautés Européennes ou d’un organisme créé conformément au Traité instituant les Communautés Européennes et ayant son siège dans l’État membre concerné. C’est dire que, pour une même infraction, plusieurs États membres seraient compétents pour connaître et, le cas échéant, sanctionner les auteurs de l’infraction. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT PUBLIC ET ADMINISTRATIF : RÉFÉRÉ SUSPENSION ET CONTROLE DU CONSEIL D’ÉTAT [Conseil d’Etat, 6ème sous-section, 29 janvier 2003] Le référé suspension prévu à l’Article L. 521-1 du Code de Justice Administrative permet d’obtenir en référé la suspension de l’exécution d’une décision administrative lorsque deux conditions sont réunies : - il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision appliquée ; - l’exécution de la décision attaquée porte préjudice à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il défend et ce préjudice est suffisamment grave et immédiat : c’est la condition d’urgence. Par deux arrêts rendus les 8 et 29 janvier 2003, le Conseil d’État fournit une illustration intéressante du contrôle qu’il continue d’exercer sur chacune de ces deux conditions. - pour annuler la décision rendue par le Tribunal Administratif de NICE et suspendre l’exécution d’un permis de construire, le Conseil d’État relève, par sa décision du 8 janvier 2003, que « le Juge des Référés a regardé comme de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de cet acte, le moyen tiré de l’insuffisance de la voie de desserte » mais qu’en définitive « l’ordonnance attaquée repose sur une dénaturation des pièces du dossier et doit, pour ce motif, être annulée » ; - puis, pour annuler la décision rendue par le Tribunal Administratif de DIJON, le Conseil d’État reproche au Juge des Référés de n’avoir pas fait « apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l’argumentation des parties, l’ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d’urgence » alors qu’il appartenait au Juge des Référés « d’apprécier concrètement le contenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue ». ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 DROIT COMMUNAUTAIRE ET EUROPEEN : PUBLICITÉS TROMPEUSE ET COMPARATIVE [CJCE, 8 avril 2003, Aff. C-4401] Par sa décision rendue le 8 avril dernier, la CJCE apporte certaines précisions utiles quant aux dispositions de la Directive Européenne n° 84/450 relative à la publicité trompeuse et à la publicité comparative. Cette décision fait suite à plusieurs questions préjudicielles qui lui avaient été posées par la Cour Autrichienne dans le cadre d’un litige opposant deux distributeurs de lunettes. L’un deux, la Société X…, se procurant des articles grâce aux importations parallèles, avait lancé une campagne publicitaire en Autriche sur des dépliants, à la radio ainsi qu’à la télévision. Ces publicités comparaient les prix de lunettes que cette Société avait pratiqués plusieurs années durant avec ceux de son concurrent, la Société Y… Outre les marques et logos de ce dernier, la façade de l’un de ses magasins apparaissait notamment sur les écrans de télévision et, selon les supports concernés, certaines marques comparées n’étaient pas toujours révélées. Par l’arrêt commenté, la CJCE considère notamment : - qu’il appartient au Juge national de vérifier si l’absence de l’indication d’une marque notoire de la publicité comparative peut être retenue comme trompeuse ; - que des produits provenant de canaux de distribution différents peuvent être valablement comparés entre eux ; - que la multitude de produits comparés, et le fait que les publicités fassent apparaître un écart de prix très important entre les deux distributeurs ne rend pas la publicité comparative dénigrante pour autant ; - enfin, que la diffusion de la devanture du concurrent n’est pas en soi contraire à la Directive précitée. ♦ ♦ ♦ La Lettre du Cabinet Mai 2003 PRATIQUE : Des risques juridiques liés à la mise en œuvre d’un Intranet dans l’entreprise Les projets d’Intranet font partie des sujets les plus fréquemment envisagés par les entreprises pour améliorer la productivité et l’échange d’informations entre les salariés. Ils engagent les entreprises dans des investissements lourds et leur mise en place a souvent un impact sur leur organisation. Les salariés disposent en principe d'une messagerie et d'un accès Internet ainsi que d’autres fonctionnalités spécifiques liées à la gestion et à l’organisation de leur entreprise. La mise en œuvre d’un tel projet a de nombreuses conséquences juridiques notamment au plan des services proposés et des informations diffusées, ainsi qu'au plan de l'encadrement de leur mise en œuvre et de la régulation de leur utilisation. Elle est souvent considérée comme l'introduction d'un projet important de nouvelles technologies, susceptible d’avoir un impact sur les conditions de travail des salariés, l’organisation et le contrôle de leur activité. Or, l'article L.432-2 du Code du travail énonce que « le comité d'entreprise est informé et consulté, préalablement à tous projets importants d'introduction de nouvelles technologies, lorsque celles-ci sont susceptibles d'avoir des conséquences sur l'emploi, la qualification, la rémunération, la formation ou les conditions de travail du personnel ». Dans le cas d’un projet Intranet, l’employeur doit consulter préalablement le comité d'entreprise sous peine de se voir condamné pénalement au titre du délit d'entrave aux fonctions du comité d'entreprise. Préalablement à cette consultation, il appartient à l’entreprise de déterminer l’impact de son projet en termes de mise en œuvre de contrôle de l'activité des salariés et d’incidences sur les conditions de travail. Compte tenu des fonctions de collectes et d’échanges d’informations offertes par un Intranet et notamment la possibilité d’échanger des données nominatives concernant les clients/prospects ou les membres de l’entreprise, il conviendra également de prendre en compte les dispositions applicables en matière de protection des données nominatives. L’entreprise devra s'assurer notamment de la déclaration préalable auprès de la CNIL des conditions de collecte et de traitement des données échangées par l'intermédiaire de ces services. Enfin, il conviendra de définir les conditions d’utilisation de l’Intranet et d’élaborer un ensemble de règles ayant vocation à informer les utilisateurs des spécificités de l'usage de l’Intranet et de porter à leur connaissance les règles de sécurité et de confidentialité à respecter. Ces règles pourront être regroupées au sein d’une charte définissant notamment les règles d’usage des fonctionnalités offertes et les modalités pratiques d’accès. ♦ ♦ ♦