Kyoto sinon rien ! Parlons américain !

Transcription

Kyoto sinon rien ! Parlons américain !
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N E G O C I AT
ATIONS
SUR
LE
CLIMAT.
M
I L AN -- DDECEMBRE
E C E M B R E 22003
003
MILAN
1er
Décembre
Edition
bleue
EDITION FRANCAISE
ECO est publié par les Organisations non gouvernementales depuis la Conférence sur l’Environnement de Stockholm en 1972. Cet
exemplaire est produit de façon collective par les groupes du Réseau Action Climat mondial présents à COP9, Milan, décembre 2003.
Kyoto sinon rien !
Parlons américain !
Le processus du Protocole de Kyoto est bien vivant !
Une très large majorité des Nations – en particulier les 120 qui l’ont déjà ratifié - y
croient et sont décidés à le concrétiser.
L’Union Européenne a lancé sa directive sur les permis échangeables et ses membres ont entamé la mise en œuvre du Protocole.
Concernant les pays en développement, beaucoup d’entre eux mettent en œuvre des
actions sans y être obligés par le traité. Dans le même temps, ils subissent aussi la
réalité des impacts du changement climatique.
De son côté, la Russie, en ratifiant à vitesse d’escargot, n’est pas non plus des plus
collaboratrices. Elle semble encore , à certaines occasions, vouloir maximiser ses
(déjà) considérables avantages. Mais le Président Poutine s’est engagé à ratifier (voir
encadré au verso).
Nul n’ignore que l’administration des Etats-Unis
est connue pour ses déclarations sèches et peu
diplomatiques. ECO suggère donc, qu’ici, à
Milan, les Parties commencent à parler franchement aux USA de leur politique inacceptable sur
le réchauffement climatique : Politique Sur les
Climats Hypotendue, Indiscutablement Imbécile,
Totalement Trash (PSCHIITT). Nous savons tous
que c’est le cas, alors pourquoi ne pas en parler
clairement ?
En particulier, ce sont aussi les pays non partie à l’Annexe 1 qui devraient pousser les
Russes, au lieu de se précipiter sur des miettes de MDP, comme on en a trop souvent
l’impression. Il serait bon qu’ils réalisent que l’avenir du MDP repose uniquement sur le fait
que le Protocole entre en vigueur !
Enfin, certaines Parties pourraient utiliser cette période de transition pour minimiser
l’importance du Protocole de Kyoto, puis glisser subtilement leur solution alternative.
De telles digressions ne doivent pas être tolérées à Milan.
KYOTO !
La délégation américaine va passer les prochaines deux semaines à promouvoir ses plans de
recherche scientifique et technologique. Bien sûr,
il est important d’améliorer la science des climats
et de développer de nouvelles technologies. Bien
entendu, la coopération internationale sur ces
efforts pourrait aider (1). Mais ce n’est pas assez
: bonne science ne rime pas nécessairement
avec bonne politique, et les technologies ne se
déploient pas d’elles-mêmes. Si les Etats-Unis
prennent réellement le réchauffement climatique
au sérieux, ils se doivent de mettre en place un
plan concret pour réduire leurs émissions sur le
court terme.
La réalité est simple, mais, pour faire compliqué,
l’administration Bush est fortement opposée à
toute action concrète. Il n’est plus à rappeler que
ce gouvernement a rejeté le Protocole de Kyoto
et son approche d’une limitation contraignante
des émissions.
Petite histoire donc, pour les délégués qui ignoreraient la situation...
Il y a juste un mois le Sénat des Etats-Unis a voté
pour la première fois une limitation domestique
des émissions de gaz à effet de serre (loi MacCain Lieberman visant la stabilisation en 2012 sur
les niveaux de 2000).
(suite au verso)
NNUUMMEERROO 1
PGURBALTI U
C IATT I O N
CVIIII
G RATUIT
N E G O C I AT I O N S S UR L E C L I M AT L E T T R E D E S O N G
Dans ses propres termes, l’administration « s’oppose
fortement» à cette proposition, somme toute
modeste, car elle est « incompatible avec la stratégie
globale et de long terme du Président » (2). Sans
aucun doute, un plafond d’émissions n’est pas en
accord avec l’objectif «volontaire » du Président Bush,
qui influera à peine sur les projections de croissances
de son pays !
Cet exemple est emblématique de l’hostilité existante
de cette administration à toute action vis-à-vis du
réchauffement climatique.
La COP9 (3) a pour rôle de répondre à ce problème
urgent. Le présent mandat de la délégation US - parler
de coopération scientifique et technologique - est ici
une perte de temps précieux.
Si les Parties sont trop bonnes avec les Etats-Unis à
Milan, cela peut encore retarder le moment où ce
pays deviendra un partenaire constructif du processus international.
Alors, ne restez pas assis diplomatiquement, à vous
taire et à écouter des délégués des Etats-Unis déblatérer hors-sujet et insister sur leur « grande préoccupation vis-à-vis du climat » . A la manière américaine,
parlez leur directement et franchement !
(1) L’attitude américaine de blocage complet d’une récente réunion du
GIEC ne relève pas d’une volonté nette de coopération…
(2) “inconsistent with the President’s comprehensive, long-term strategy.”(“Statement of Administration Policy”, October 29, 2003.)
(3) Chers délégués, fidèle à sa tradition du franglais, l’édition française de
ECO ne va pas vous infliger des « CdP 9» mais, comme tout le monde,
va appeler COP une COP !
La ratification russe… pour bientôt !
Il faut le répéter, c’est une affaire de « quand ? », pas une
affaire de « si ». Bien que des articles soient récemment
parus disant, en substance, que le Protocole de Kyoto
serait mort, il n’en ait rien. Séduisant pour l’administration de
Georges Bush, rien n’est pourtant plus éloigné de la réalité.
Ces articles sont généralement basés sur les commentaires du président Poutine lors de la Conférence sur le
Changement Climatique en septembre dernier, à Moscou.
Pour ceux d’entre nous qui étaient sur place, la réalité est
bien différente de ce que les ennemis de Kyoto aimeraient
croire. S’il est vrai que le président russe prend son temps,
il a néanmoins réaffirmé l’intention de ratifier.
Comme si ce n’était pas assez clair, il l’a certifié en tête à
tête au Premier Ministre Canadien, Jean Chrétien, durant la
Conférence de Coopération de l’Asie Pacifique en octobre.
Finalement, pour être sûr que ses intentions soient limpides, il l’a répété une fois de plus au Président Berlusconi,
lors du sommet de Rome avec l’Union Européenne.
Ceci méritait d’être affirmé et réaffirmé.
En attendant, d’ici à ce que la Russie appose sa ratification,
le monde est tenu en otage des contingences domestiques
de Monsieur Poutine, ce qui est, pour le moins, inacceptable.
NUMERO 1
M I L A N - D E C E M B RE 2 0 0 3
Les puits dans le Mécanisme pour
un Développement Propre (MDP) :
dernier round ?
Chers délégués,
ECO compte sur vous pour protéger la crédibilité du Protocole de Kyoto et du
MDP.
Après ce laborieux marathon de négociations sur les projets de boisement et
reboisement dans le MDP, de « bonnes » règles sont attendues au tournant à
Milan. Le défi est donc de développer un ensemble de règles qui traduit l’esprit
et la lettre de l’article 12, ainsi que les principes acceptés à Marrakech.
Souvenez-vous que vous avez déjà endossé le principe selon lequel un projet
puits doit : « contribuer à la protection de la diversité biologique, et à l’utilisation
durable des ressources naturelles. »
Vous devez ainsi traduire ce principe en pratique, en s’assurant que les développeurs de projets fournissent une information adéquate sur les problèmes
socio-économiques et environnementaux. En un mot, adopter l’appendice E et
exclure toutes espèces exogènes envahissantes ou manipulées génétiquement.
Cela, pour assurer l’établissement d’un système précis de comptabilisation,
tenant compte de l’épineuse question de la permanence.
Le problème n’est pas de fixer des règles qui permettraient à quelques projets
bénéfiques pour la biodiversité d’exister, mais bien de définir des règles qui n’acceptent que des projets ayant des bénéfices pour la population locale, sur la biodiversité, et promouvant l’usage durable des ressources naturelles.
Adopter des règles qui autoriseraient des projets de basse qualité plomberait le
marché du MDP, et rendrait impopulaire l’ensemble du traité. Il ne faudrait pas
que le Protocole de Kyoto devienne un système d’aides aux plantations monospécifiques d’espèces exogènes, au mépris des habitants.
L’échauffement pour ce round a commencé la semaine dernière. Le Canada
s’est encore isolé par sa tentative à pousser une nouvelle mais toujours aussi
scandaleuse version de sa proposition sur « l’assurance ». Il avait une fois
encore omis de considérer la non permanence, par nature, des crédits « puits »,
et le mandat découlant de la décision sur les LULUCF– selon laquelle la perte
de carbone « doit être comptabilisée au bon moment ». Il est tout simplement
inacceptable de proposer la disparition de toute responsabilité pour ré-émissions
après 50 ans. Le Canada a également gaspillé un temps précieux, incapable de
répondre aux questions de clarification de certains de ses collègues, posées
depuis un an et toujours pas résolues. La bonne nouvelle, néanmoins, est que
ce pays a permis aux délégués de plus de 50 ans de s’imaginer eux mêmes permanents !
Pourtant, au cours de sa récente intervention devant la Banque Mondiale (1), le
Canada a présenté ses “éléments pour une stratégie « puits » gagnante”. Ces
objectifs sont de « garantir de crédits de haute qualité », « améliorer la durabilité
des écosystèmes », et « contribuer au développement économique local ». Si
cela est effectivement la stratégie canadienne sur les puits, ils devraient se montrer enthousiastes, et faire leurs, des règles efficaces contenant des critères
socio-économiques et environnementaux.
(1)Environment Canada, Darren Goetze “Carbon Sinks in the CDM: Policy, Opportunity and
Challenges” available at www.worldbank.org/wbi/B-SPAN/docs/policy_nexus_goetze.pdf
Ont participé à ce numéro : Antoine Bonduelle, Raphaëlle Gauthier, Diane Vandaele et l’équipe
de ECO anglophone.
Eco est diponible au format PDF sur : www.rac-f.org
P UBLICATION
CVIIII
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