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Canadian Journal of Behavioural Science
2010, Vol. 42, No. 4, 264 –272
© 2010 Canadian Psychological Association
0008-400X/10/$12.00 DOI: 10.1037/a0019437
La face cachée de l’effet protecteur du désengagement
psychologique au travail : le cas des policiers
Francine Tougas
Natalie Rinfret
Université d’Ottawa
École nationale d’administration publique, Québec, ON, Canada
Faye J. Crosby
Ann M. Beaton
University of California, Santa Cruz
Université de Moncton
Joelle Laplante
Université d’Ottawa
Cette étude comporte deux buts. Le premier est de documenter le lien asymétrique et négatif entre les
mécanismes de désengagement psychologique et le niveau de l’estime de soi. Le deuxième est de poursuivre
l’investigation de l’effet protecteur du désengagement psychologique par l’évaluation d’une autre facette de
l’estime de soi, sa stabilité. Cette étude réalisée auprès de 152 policiers confirme que le désengagement permet
aux personnes d’assurer la stabilité de leur estime de soi. Les résultats de cette étude militent en faveur de
l’hypothèse de la cote sociale du métier comme explication de l’association variable entre le désengagement
et le niveau d’estime de soi. En discussion, nous levons le voile sur la face cachée de l’effet protecteur du
désengagement.
Mots-clés : privation relative, désengagement psychologique, estime de soi
couvert de l’équité, d’aucuns soutiennent que les femmes reçoivent
des avantages non mérités et que les hommes sont désormais
laissés pour compte. Bref selon certains, de nouvelles inégalités de
sexe ont été créées, celles-là au détriment des hommes.
Comment les hommes réagissent aux inégalités perçues; est-ce
que leur statut majoritaire affecte leurs réponses sont les questions
qui ont servi de point de départ à la présente étude. C’est par le
biais des travaux sur le désengagement psychologique que nous
amorçons notre investigation des réactions des hommes à des
conditions qu’ils jugent défavorables.
Les études montrent que l’estime de soi peut être meurtrie
lorsque le groupe d’appartenance affecte la façon dont les individus sont jugés et évalués (Branscombe, Schmitt & Harvey, 1999;
voir aussi Major, Quinton & McCoy, 2002, pour une recension des
écrits). Par exemple, si un travailleur croit que les évaluations de
rendement varient en fonction du sexe et qu’il est ciblé par cette
pratique, son estime de soi pourrait en être déprimée : le traitement
différentiel blesse. Mais est-ce toujours le cas, y a-t-il moyen de
protéger son estime de soi ou de se blinder contre les iniquités ? À
ces questions, certains auteurs répondent par l’affirmative en
soutenant que le recours au désengagement psychologique protège
et même renforce l’estime de soi (Crocker, Major & Steele, 1998;
Major & Schmader, 1998, 2001; Major, Spencer, Schmader, Wolfe
& Crocker, 1998; Schmader, Major, Eccleston & McCoy, 2001;
Schmader, Major & Gramzow, 2001).
Le désengagement psychologique implique un retrait mental
temporaire d’un domaine. Les personnes y recourent
lorsqu’elles se sentent évaluées non pas en raison de leur
performance, mais bien de leur groupe d’appartenance. Ce
retrait du domaine de travail, par exemple, fait en sorte que
La promotion de l’égalité et l’introduction de programmes
d’équité en emploi ont permis à de nombreuses Canadiennes
d’obtenir des emplois dans des milieux traditionnellement réservés
aux hommes. C’est ainsi que le nombre de femmes a sensiblement
augmenté dans divers domaines dont le génie, le management
(Statistique Canada, 2006) et la police (Reitano, 2006). Malgré ces
percées importantes, il reste que les femmes sont toujours sousreprésentées dans les domaines traditionnellement masculins.
Prenons le cas de la police, plus de trente ans après leur entrée
forcée suite aux pressions juridiques et politiques (Beauchesne,
2001), les femmes sont toujours sous-représentées (Reitano, 2006)
et cantonnées dans des emplois culs-de-sac (Gerber, 2001).
Même en petit nombre, l’arrivée des femmes a suscité des
réactions négatives de la part des hommes oeuvrant dans les
domaines traditionnellement masculins en général (Tougas,
Beaton & Laplante, 2005) et dans la police, en particulier
(Beauchesne, 2001). Certains estiment faire les frais de l’égalité :
à preuve, ils considèrent qu’on limite leur accès et leur promotion
dans certains domaines pour faire place aux femmes (Beaton,
McKay & Rouleau, 2007; Tougas & Beaton, 1993). Sous le
Francine Tougas et Joelle Laplante, École de psychologie, Université
d’Ottawa; Natalie Rinfret, École nationale d’administration publique, Québec, ON, Canada; Faye J. Crosby, Départment de psychologie, Université
de California, Santa Cruz; et Ann M. Beaton, École de psychologie,
Université de Moncton.
Toute correspondance concernant le presént article doit être adressée à
Francine Tougas, École de psychologie, Université d’Ottawa, B.P. 450, Station
A, Ottawa, ON, Canada K1N 6N5. Courriel: [email protected]
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LE DÉSENGAGEMENT PSYCHOLOGIQUE
l’estime de soi n’est plus affectée par la discrimination vécue en
milieu de travail. Le désengagement psychologique s’opère au
moyen de deux mécanismes : le discrédit et la dévaluation
(Crocker et al., 1998; Major & Schmader, 1998, 2001;
Schmader, Major & Gramzow, 2001). Par le discrédit, la personne remet en question la validité du feedback reçu en milieu
de travail. Le discrédit peut être utilisé par un travailleur s’il
croit que le fait d’être un homme teinte le regard qu’on porte sur
son travail. Se mettre à l’abri des opinions et des évaluations
biaisées et discriminatoires constitue en quelque sorte un retrait
partiel du monde du travail, puisque la personne se dissocie
temporairement de ses supérieurs et/ou de ses collègues, tout en
continuant d’être impliquée dans son travail. Il en va autrement
du deuxième mécanisme, la dévaluation, qui consiste à accorder
temporairement moins d’importance à son domaine d’activités.
Par la dévaluation, le travail n’est plus un critère déterminant de
valorisation personnelle.
La mise à l’épreuve du cheminement depuis le traitement différentiel à l’adoption du discrédit et de la dévaluation, mécanismes
qui assurent la protection de l’estime de soi, n’a pas donné les
résultats escomptés (Lagacé & Tougas, 2006; Major & Schmader,
1998, 2001; Schmader, Major & Gramzow, 2001; Tougas, Rinfret,
Beaton, & de la Sablonnière, 2005). Par exemple, les études
évaluant le traitement différentiel par le biais de la privation
relative personnelle ont fait ressortir des liens stables avec le
discrédit et la dévaluation, mais différents des hypothèses (Lagacé
& Tougas, 2006; Tougas, Rinfret, et al., 2005). La privation
relative personnelle porte tant sur la reconnaissance d’un traitement de défaveur, par le biais d’une comparaison personnelle
désavantageuse, que sur les réactions émotives (sentiments de
mécontentement) qu’elle provoque (Crosby, 1976; Dubé &
Guimond, 1986; Guimond & Dubé-Simard, 1983; Runciman,
1966). Il a ainsi été démontré que la privation relative personnelle
déclenche une réaction en chaı̂ne : il s’agit, en effet, d’un parcours
depuis la privation relative personnelle jusqu’au discrédit qui, pour
sa part, mène à l’adoption de la dévaluation.
Quant à l’hypothèse selon laquelle le désengagement psychologique protège et renforce l’estime de soi, elle a également été
infirmée. De fait, les études révèlent un lien asymétrique et négatif
entre les mécanismes de désengagement et le niveau de l’estime de
soi (Lagacé & Tougas, 2006; Major & Schmader, 2001; Tougas,
Rinfret, et al., 2005). Dans certains cas, dévaluer blesse l’estime de
soi (Lagacé & Tougas; Major & Schmader), alors que dans
d’autres (Tougas, Rinfret, et al., 2005), c’est le discrédit qui affecte
l’estime de soi à la baisse. Sur la base des travaux de Major et
Schmader (1998) et de la théorie de l’identité sociale (Tajfel &
Turner, 1979), cette différence a été expliquée en fonction du statut
du domaine d’activité. Selon cette théorie, le pouvoir et le statut
associés au groupe d’appartenance nuancent la signification et les
conséquences du traitement différentiel.
Dans un domaine d’activités bien coté socialement dévaluer blesse
: la personne se mettant ainsi à contre courant en dévalorisant un
métier qui lui procure statut et prestige social. C’est ce qui a été
observé chez les infirmières (Lagacé & Tougas, 2006). Soulignons
que les infirmières bénéficient d’un fort appui de la population
(Cohen, 2000). De plus, elles obtiennent un score de 64 sur un
index de statut socio-économique des métiers en cent points où le
métier le moins bien coté obtient un score de 16 et le mieux coté
reçoit un score de 85 (Hauser & Warren, 1997). Basé sur les
265
données du recensement américain de 1990, cet index donne le
rang de 498 métiers et professions. Le rang d’un métier résulte de
la pondération du niveau d’instruction et du revenu rapportés au
recensement par les participants qui exercent une même fonction.
L’index choisi (Hauser & Warren) se démarque favorablement
d’une échelle américaine récente (Nam & Boyd, 2004) et d’une
autre d’origine canadienne basée sur le recensement de 1981
(Blishen, Carroll, & Moore, 1987), en ce sens que trois scores,
plutôt qu’un indice global, ont été calculés pour chaque métier (un
score pour les femmes, un pour les hommes et un global). À noter
qu’il a été établi que les cotes sociales sont très fortement corrélées
entre les pays (Hauser & Warren; Treiman, 1975).
Dans le cas d’un métier moins bien vu socialement, comme c’est
le cas des policières, discréditer blesse en raison du fait que la
personne tire sa fierté personnelle dans ses relations avec les
collègues et les supérieurs. Bref, dans ce contexte, ce serait le
statut du groupe dans le métier (majoritaire ou minoritaire), par
opposition à celui du métier dans la société, qui procure statut et
prestige (Tougas, Rinfret, et al., 2005). Précisons que les policières
ont une cote sociale plus basse (46) que celle des infirmières (64).
De plus, le travail des policiers, un métier synonyme de surveillance et de contrôle (Beauchesne, 2001), est souvent mal vu et
critiqué par la population (Deljo, 2000; Perrott & Taylor, 1994).
L’asymétrie des liens entre les mécanismes de désengagement
psychologique et l’estime de soi peut également être expliquée en
fonction du statut des hommes et des femmes dans le domaine. Par
exemple, les infirmières sont majoritaires dans leur domaine, alors
que les policières sont minoritaires. De plus, les infirmières ont
une meilleure cote sociale que leurs homologues masculins (64
contre 55), alors que les policières ont une cote sociale inférieure
à leurs collègues masculins (46 contre 51). Bref, les études passées
laissent sous-entendre que dévaluer blesse l’estime de soi en
situation majoritaire et que discréditer teinte le regard posé sur soi
en position minoritaire.
Le premier but de cette étude est de confronter les explications
suggérées par les études antérieures pour expliquer les réponses
aux mécanismes de désengagement psychologique. Bref, il s’agit
d’établir si ces réactions sont fonction de la cote sociale du métier
ou du statut du groupe dans le métier (majoritaire ou minoritaire).
L’atteinte de ce but est rendue possible en menant cette étude
auprès de policiers. On peut ainsi s’attendre à reproduire le modèle
des infirmières si les réponses au désengagement sont imputables
au statut majoritaire du groupe dans un métier. Dans le cas où ces
réponses sont reliées à la cote sociale du métier comme tel, on
s’attend à reproduire le modèle obtenu auprès des policières. Ces
modèles sont reproduits aux Figures 1 et 2 respectivement (voir
lignes continues).
Cette étude comporte un deuxième but. Il s’agit de poursuivre
l’investigation de l’hypothèse de l’effet protecteur du désengagement psychologique sur l’estime de soi. À ce jour, la mise à
l’épreuve de cette hypothèse n’a été que partielle. Soulignons que
les études rapportées plus haut ciblaient le niveau d’estime de soi.
Cet aspect de l’estime de soi est certes important, mais il n’est pas
le seul à témoigner du regard que les individus portent sur euxmêmes. En effet, les chercheurs ont identifié d’autres aspects de
l’estime de soi mettant en relief la façon dont les individus se
perçoivent et réagissent dans des situations d’évaluation. Un des
aspects de l’estime de soi qui a été amplement investigué est sa
stabilité (De Cremer & Sedikides, 2005; Heatherton & Wyland,
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TOUGAS, RINFRET, CROSBY, BEATON ET LAPLANTE
Figure 1. Modèle de désengagement psychologique en fonction du statut
du groupe dans le métier.
2003; Kernis, 1993; Kernis & Goldman, 2006; Rosenberg, 1986;
van den Bos & Lind, 2002). La stabilité de l’estime de soi renvoie
à l’ampleur des fluctuations du regard porté sur soi (Greenier,
Kernis, McNamara, Waschull, Berry, Herlocker & Abend, 1999;
Kernis, 1993; Kernis, Grannemann & Barclay, 1989; Rosenberg,
1986) et à sa labilité, bref à la tendance à avoir une estime variable
dans le temps (Kernis, Cornell, Sun, Berry & Harlow, 1993). Une
estime de soi stable est un facteur de bien-être, de sécurité et de
paix affective aussi, sinon plus, important que son niveau (Kernis,
Grannemann, & Barclay, et al.; Paradise & Kernis, 2002).
Le lien entre le désengagement psychologique et la stabilité de
l’estime de soi a été évoqué pour expliquer la baisse du niveau
d’estime de soi suite à l’adoption du discrédit par les policières
(Tougas, Rinfret, et al., 2005). Rappelons que le désengagement
psychologique est une stratégie temporaire adoptée en situations
de traitement différentiel (Crocker et al., 1998; Major et al., 1998;
Major & Schmader, 1998; Schmader, Major & Gramzow, 2001).
Cette particularité du désengagement psychologique implique que
la baisse de l’estime de soi observée suite à l’adoption du discrédit
chez les policières, par exemple, n’est que temporaire. D’où
l’hypothèse que les expériences répétées de traitement différentiel
que vivent les personnes appartenant à un groupe stigmatisé mènent à des baisses fréquentes de l’estime de soi qui, à leur tour,
minent sa stabilité (Tougas, Rinfret, et al., 2005).
Prendre en considération la stabilité de l’estime de soi permet
de tester une variante de l’hypothèse énoncée par Major et ses
collègues, selon laquelle se désengager protège l’estime de soi
(Crocker et al., 1998; Major et al., 1998; Major & Schmader,
1998; Schmader, Major & Gramzow, 2001). Selon les études
antérieures, un des deux mécanismes du désengagement fait
baisser le niveau de l’estime de soi (par exemple, la dévaluation
chez les infirmières et le discrédit chez les policières), tandis
que l’autre n’y touche pas. L’absence de lien avec le niveau de
l’estime de soi ne signifie pas pour autant qu’un mécanisme
n’affecte pas d’autres aspects de celle-ci, dont sa stabilité. En
conformité avec la théorie de désengagement psychologique
(Major et al., 1998), on peut dès lors avancer que, dépendamment des situations, l’un ou l’autre de ces mécanismes protègerait l’estime de soi en assurant sa stabilité. Selon cette hypothèse, lorsqu’un mécanisme de désengagement ne touche pas
à l’estime de soi, il en assure sa stabilité, ce qui constitue un
effet positif important du désengagement sur l’estime de soi.
Certains travaux sur la stabilité de l’estime de soi suggèrent une
conformation du lien entre les évaluations externes, comme celles
mesurées par la privation relative, et la stabilité de l’estime de soi,
analogue à la séquence logique proposée plus haut. Selon
Rosenberg (1986) et Tesser (2001), se fier aux évaluations externes de même que le fait d’y avoir développé une certaine
sensibilité peuvent miner la stabilité de l’estime de soi. Par le biais
du modèle de désengagement psychologique, le parcours depuis la
privation relative à la stabilité est indirect, en empruntant la voie
du discrédit et de la dévaluation. Le fait de cibler les policiers dans
cette étude permet la mise à l’épreuve de deux modèles de prédiction. Dans le cas où la dévaluation déprime l’estime de soi
(comme dans le cas des infirmières), il est prédit que le discrédit
renforce sa stabilité (voir Figure 1, lignes pointillées). En revanche,
si comme dans le cas des policières discréditer abaisse le niveau de
l’estime de soi, dévaluer devrait en assurer sa stabilité (voir Figure 2,
lignes pointillées). De plus, les modèles incluent un lien positif
depuis le niveau de l’estime de soi à la stabilité de celle-ci. Ce lien
suggère qu’une baisse de l’estime de soi provoquée par l’adoption
d’une stratégie de désengagement entraı̂ne par le fait même de
l’instabilité (Tougas, Rinfret, et al., 2005).
Méthode
Participants
Grâce à la participation du Service de police d’une municipalité
canadienne, un questionnaire a été envoyé par la poste au domicile
de 345 policiers. Le questionnaire était accompagné d’une lettre
décrivant les buts de l’étude et assurant les participants de la
confidentialité et de l’anonymat de leurs réponses. Une enveloppe
de retour préaffranchie était également incluse.
Au total, 154 policiers ont retourné le questionnaire dûment
rempli pour un taux de réponse de 44,6 %. Deux de ces questionnaires ont été éliminés en raison du nombre important de réponses
manquantes (20 % ou plus). Les 152 participants qui constituent
l’échantillon de recherche ont, en moyenne, 37,7 ans, 1,5 enfant,
14,2 années de service et 25,6 % ont une formation universitaire.
La majorité des participants sont en couple ou en union libre (115).
Questionnaire
La première partie du questionnaire contient des items relatifs
aux concepts à l’étude. Les réponses ont été rapportées sur une
Figure 2. Modèle de désengagement psychologique en fonction de la
cote sociale du métier.
LE DÉSENGAGEMENT PSYCHOLOGIQUE
échelle de type Likert variant de 1 ( pas du tout d’accord) à 5 (tout
à fait d’accord). Suivait, une section servant à recueillir des
informations d’ordre démographique. Dans ce qui suit, nous présentons les questions à l’étude. Les réponses aux items suivis d’un
astérisque ont été inversées.
Évaluation subjective du métier. Cette échelle, utilisée auprès d’autres échantillons de travailleurs (de la Sablonnière &
Tougas, 2008; Tougas, Lagacé, Laplante & Bellehumeur, 2008),
contient en tout huit questions qui permettent de mesurer les
évaluations subjectives du métier : « En général, la population est
fière des policiers/policières »; « En général, la population n’a pas une
bonne opinion des policiers/policières »*; « En général, la population
a beaucoup de respect pour les policiers/policières »; « En général, la
réaction de la population envers les policiers/policières est favorable »; « En général, la population parle en bien des policiers/
policières »; « En général, la population donne son appui aux
policiers/policières »; « En général, les policiers/policières ont baissé
dans l’estime de la population »ⴱ; et « En général, la population
connaı̂t la situation des policiers/policières. ». Les réponses ont été
regroupées et un score élevé signifie que le policier perçoit son métier
comme étant bien évalué dans la société. L’alpha de Cronbach pour
l’échelle de l’évaluation subjective du métier est de ,93.
Privation relative personnelle. Une échelle de quatre items,
inspirée de travaux antérieurs (Beaton & Tougas, 1997; Tougas,
Brown, Beaton & Joly, 1995; Tougas, Rinfret, et al., 2005) a
permis de mesurer le niveau de privation relative personnelle. La
composante cognitive a été évaluée comme suit : « Comparativement à mes collègues féminines, je me sens mis à l’écart de
certaines activités »; « En ce qui a trait à l’attribution des tâches, je
me sens traité de la même façon que mes collègues féminines »*
et « Comparativement à mes collègues féminines, je suis obligé
d’en faire plus et mieux ». L’item « Je suis satisfait de ma situation
professionnelle »* mesure la composante affective. Les réponses
ont été combinées pour former un score composite. Un score élevé
indique que le participant se sent fortement désavantagé par rapport à ses collègues féminines et en est insatisfait. L’alpha de
Cronbach (,62) est inférieur à celui déjà obtenu auprès de policières
(,78; Tougas, Rinfret, et al.). Étant donné que cette échelle contient un
nombre limité d’items et que l’alpha de Cronbach est sensible à cet
aspect (Black, 1999; Kaplan & Saccuzzo, 2001), la corrélation interitem a été prise en considération (Briggs & Cheek, 1986). Cette
dernière atteint l’étendue recommandée (entre ,20 et ,40), soit une
corrélation interitem de ,30.
Discrédit. L’échelle mesurant le discrédit comporte les
énoncés utilisés dans une étude réalisée auprès de policières
(Tougas, Rinfret, et al., 2005). Elle comporte les items suivants :
« Les attitudes à mon égard reflètent une image positive de moimême »*; « Le feedback que je reçois à propos de mon travail
n’est pas un bon indicateur de mes compétences »; « Mon travail
est évalué de façon juste et raisonnable »*; « Les attitudes à mon
égard sont biaisées et discriminatoires »; « Les comportements de
certains à mon égard n’ont rien à voir avec le travail que je fais »;
« Les jugements qu’on pose sur moi reflètent fidèlement ce que je
suis »*; « Les appréciations (évaluations) de rendement rendent
justice à mes capacités »* et « Les jugements qu’on porte sur mon
travail sont biaisés et discriminatoires ». Un score composite a été
formé à partir de la sommation des réponses (alpha de Cronbach ⫽
,88) et un score élevé indique que le policier discrédite fortement
le feedback reçu.
267
Dévaluation. Les items suivants reproduisent ceux utilisés
auprès de policières (Tougas, Rinfret, et al., 2005) : « Ce n’est pas
dans ma profession que je donne le meilleur de moi-même »;
« Être un bon policier est un aspect important de l’image que j’ai
de moi-même »*; « Être apprécié de mes collègues de travail ne
fait pas partie de mes critères de réussite personnelle »; « Être bien
évalué par mes patrons est un critère important de satisfaction
personnelle »*; « Les appréciations (évaluations) de rendement ont
un impact important sur moi »*; « Réussir dans la police ne fait
pas partie des choses les plus importantes dans ma vie » et « Que
je sois bon ou pas selon les critères établis dans la police ne me
dérange pas ». Les réponses ont été regroupées afin de former un
score composite (alpha de Cronbach ⫽ ,76). Plus le score est élevé,
plus le policier dévalue son travail.
Estime de soi. C’est la version française du « Self-Esteem
Scale » (Rosenberg, 1965), traduite et validée par Vallières et
Vallerand (1990) qui a été adaptée. Les énoncés sont : « J’ai
l’impression d’être une personne de valeur, à tout le moins de
valeur égale aux autres »; « Je crois que je possède un certain
nombre de bonnes qualités »; « De façon générale, j’ai tendance à
croire que je suis un raté »*; « Je me sens aussi compétent que les
autres »; « Il y a peu de choses dont je suis fier »*; « J’adopte une
attitude positive face à ma personne »; « Globalement, je suis
satisfait de ce que je suis »; « J’aimerais avoir plus de respect pour
moi-même »*; « À certains moments, je me sens tout à fait
inutile »* et « À certains moments, je pense que je ne vaux rien »*.
Les réponses ont été regroupées afin de former un score composite
(alpha de Cronbach ⫽ ,81). Un score élevé correspond à une image
favorable de soi.
Stabilité de l’estime de soi. Ce concept a été évalué à l’aide
de quatre items tirés de l’échelle créée par Rosenberg (Rosenberg,
1965, 1979). Les deux premiers énoncés sont : « J’ai remarqué que
les idées que je me fais à mon sujet changent très rapidement »* et
« Il y a des jours où j’ai une très bonne image de moi-même;
d’autres jours, j’ai une image négative de moi-même »*. Les deux
autres items sont sous forme de questions avec une échelle propre
à chacune. Ainsi pour répondre à la question « L’image que vous
avez de vous-même change-t-elle souvent, ou est-elle toujours
pareille? »*, les participants devaient répondre sur une échelle
variant de 1 (change beaucoup) à 5 (ne change pas du tout). La
dernière question « Vous arrive-t-il d’avoir une certaine image de
vous-même un jour, puis une autre image un autre jour? »*
comportait les choix de réponse de 1 (oui, ça m’arrive souvent) à
5 (non, ça ne m’est jamais arrivé). Un score global a été calculé et
l’alpha de Cronbach est de ,80. Plus le score se rapproche de 5,
plus le participant a une estime de soi stable.
Analyse des données
L’analyse des données s’est effectuée comme suit. Dans un
premier temps, les analyses préliminaires, effectuées à l’aide du
logiciel SPSS 14, ont permis de vérifier la normalité de la distribution des données, de même que l’occurrence de données manquantes et extrêmes. Puis, des analyses acheminatoires ont été
effectuées à l’aide du logiciel EQS 6.1 (Bentler & Wu, 2005) afin
d’évaluer les différents modèles. Finalement, des analyses de
régressions, menées avec le logiciel SPSS 14, ont permis d’évaluer
le modèle de modération.
TOUGAS, RINFRET, CROSBY, BEATON ET LAPLANTE
268
élevées que ,90 montrent une adéquation acceptable du modèle aux
données (Hu & Bentler). Finalement, les tests de Lagrange Multiplier (LM) et de Wald ont été utilisés afin d’identifier les liens
qui, une fois ajoutés au modèle améliorent l’ajustement, et les liens
non significatifs qui, une fois retirés, augmentent sa parcimonie
(Bentler, 1990b).
Résultats
Analyses préliminaires
Afin de déterminer s’il y a congruence entre les évaluations
subjectives et objectives du métier de policier, nous avons calculé
la moyenne et l’écart-type des scores relatifs à l’évaluation subjective du métier. La moyenne se situe à 3,19 sur une échelle en
cinq points et l’écart-type est de 0,68. Comme la moyenne des
réponses le démontre, les deux scores sont apparentés en ce que les
policiers évaluent leur métier au centre du continuum comme étant
ni socialement estimé, ni dénigré. Rappelons que le score des
policiers sur l’index socio-économique en cent points est de 51,
alors que celui du métier le plus élevé sur cet index atteint 85
(Hauser & Warren, 1997).
Les analyses préliminaires montrent que la distribution d’une
des variables n’est pas normale : la variable « estime de soi »
s’avère être significativement leptokurtique (voir le Tableau 1 pour
les analyses descriptives). La méthode d’analyse robuste de
vraisemblance maximale du logiciel EQS (Bentler & Wu, 2005;
Hu & Bentler, 1999) permet de pallier cette lacune. Les données
manquantes, soit moins de 3 % par item, ont été remplacées par la
moyenne du participant pour l’échelle donnée.
L’évaluation des modèles a été faite à l’aide de plusieurs indices
d’adéquation (Bollen & Long, 1993; Hoyle & Panter, 1995; Kline,
2005). Dans le cadre de cette étude, nous utilisons d’abord le
chi-carré robuste de Sattora-Bentler (S-B␹2; Sattora & Bentler,
1994). Une valeur de chi-carré non significative est recherchée, par
contre, cet indice est sensible à la taille de l’échantillon. Selon
certains auteurs, le chi-carré normalisé (normed chi-square, NC;
Bollen, 1989) offre un indice d’adéquation moins sensible à la
taille de l’échantillon, en divisant le chi-carré par le nombre de
degrés de liberté du modèle. Des valeurs pouvant atteindre 5,0
indiquent un ajustement raisonnable (Bollen, 1989). Hu et Bentler
(1999) suggèrent en plus l’utilisation du SRMR en combinaison
avec un indice d’ajustement comparatif. Le SRMR ou l’indice de
la moyenne standardisée des valeurs résiduelles (standardised
root-mean-square residual; Bentler, 1995) évalue l’ajustement
global du modèle. Les valeurs de SRMR de ,10 et moins sont
jugées acceptables (Kline, 2005). L’indice de correspondance
comparé robuste (comparative fit index, CFI*; Bentler, 1990a;
Bentler & Chou, 1987) est, pour sa part, utilisé pour comparer
l’ajustement du modèle de prédiction à celui du modèle
d’indépendance. Cet indice varie de 0 à 1 et des valeurs plus
Modèle de désengagement psychologique en fonction
du statut du groupe dans le métier
Les résultats de l’analyse acheminatoire indiquent un faible
ajustement du modèle aux données : S-B␹2(5, N ⫽ 152) ⫽ 36,43,
p ⬍ ,001 (NC ⫽ 7,29; CFI* ⫽ ,76; SRMR ⫽ ,17). De plus, le Test
LM suggère l’ajout du lien partant du discrédit et menant à
l’estime de soi, alors que le test de Wald indique que le lien entre
le discrédit et la stabilité de l’estime de soi n’atteint pas le seuil de
signification. Puisque ce sont ces deux liens qui permettent de
distinguer le modèle en fonction du statut du groupe dans le métier
de celui de la cote sociale du métier, nous devons rejeter ce modèle
comme explication plausible des données recueillies.
Modèle de désengagement psychologique en fonction
de la cote sociale du métier
Les résultats de cette seconde analyse acheminatoire permettent
de confirmer que le modèle postulé (voir la Figure 2) correspond
adéquatement aux données : S-B␹2(5, N ⫽ 152) ⫽ 17,48, p ⬍ ,05
(NC ⫽ 3,50; CFI* ⫽ ,90; SRMR ⫽ ,09). Le test de Wald relatif
au retrait de paramètres indique que tous les liens du modèle sont
significatifs et qu’aucune modification n’est nécessaire. La solution standardisée du modèle est présentée à la Figure 3.
Modèles alternatifs
Deux modèles alternatifs, testant d’autres points de vue concernant
le rôle de la stabilité de l’estime de soi suggérés par les études
antérieures, seront évalués. Le premier modèle alternatif s’inspire de
travaux de chercheurs soutenant que la stabilité de l’estime de soi
influence les perceptions de traitement différentiel (van den Bos &
Lind, 2002). Bref, la stabilité de l’estime de soi tamise les perceptions : plus une personne a une estime de soi stable, moins elle se
percevra comme étant l’objet de traitement différentiel.
Tableau 1
Analyses descriptives et corrélations
1
1–Privation relative
2–Discrédit
3–Dévaluation
4–Estime de soi
5–Stabilité de l’estime
Moyenne
Écart-type
Asymétrie
Voussure
ⴱ
p ⬍ ,01.
ⴱⴱ
p ⬍ ,001.
—
1,79
0,69
0,82
0,14
2
3
ⴱⴱ
,46
—
2,41
0,80
0,69
⫺0,33
4
ⴱ
,23
,26ⴱⴱ
—
2,06
0,63
0,50
⫺0,02
5
ⴱⴱ
⫺,36
⫺,41ⴱⴱ
⫺,22ⴱ
—
4,47
0,42
⫺0,94
1,48
⫺,34ⴱⴱ
⫺,27ⴱⴱ
,02
,58ⴱⴱ
—
3,99
0,67
⫺0,67
0,08
LE DÉSENGAGEMENT PSYCHOLOGIQUE
269
reliée à la stabilité de l’estime de soi et vient en quelque sorte
contrer l’effet déstabilisant du discrédit (coefficient non standardisé de l’effet direct ⫽ ,15, p ⬍ ,05, coefficient standardisé ⫽ ,15).
Voir la solution standardisée du modèle à la Figure 3.
Discussion
Figure 3. Solution standardisée du modèle final.
Hypothèse du rôle déclencheur de la stabilité de
l’estime de soi
Dans ce modèle alternatif, la stabilité de l’estime de soi constitue la
variable de départ du modèle. Les autres liens sont identiques à ceux
du modèle de désengagement psychologique en fonction de la cote
sociale du métier. Les résultats de l’analyse acheminatoire révèlent
que le modèle ne correspond pas bien aux données : S-B␹2(10,
N ⫽ 152) ⫽ 60,87, p ⬍ ,001 (NC ⫽ 6,09; CFI* ⫽ ,57; SRMR ⫽
,15). L’hypothèse du rôle déclencheur de la stabilité de l’estime de
soi, inspirée de travaux antérieurs (van den Bos & Lind, 2002) et
adaptée au modèle du désengagement psychologique, est par conséquent rejetée.
Hypothèse du rôle modérateur de la stabilité de
l’estime de soi
Le deuxième modèle alternatif confère à la stabilité de l’estime
de soi le rôle de modérateur des réactions au traitement différentiel. Ce modèle a été conçu conformément aux assertions de
certains chercheurs (De Cremer & Sedikides, 2005; Kernis et al.,
1993), avançant que les réactions au traitement différentiel divergent selon que la personne a une stabilité de l’estime de soi forte
ou faible. Le rôle modérateur de la stabilité de l’estime de soi a été
évalué par le biais d’une série d’analyses de régression mesurant
l’effet d’interaction entre la stabilité de l’estime de soi et la privation
relative sur le discrédit (Baron & Kenny, 1986; Frazier, Tix & Barron,
2004). Tel que l’indiquent les auteurs, un terme d’interaction significatif (produit des scores standardisés du prédicteur et du modérateur),
alors qu’on contrôle les effets respectifs du prédicteur et du modérateur, appuie l’hypothèse d’un effet d’interaction. Les analyses de régressions multiples (voir Tableau 2) infirment cette
hypothèse : l’ajout du terme d’interaction ne contribue pas significativement à la prédiction du discrédit.
Tout compte fait, seul le modèle en fonction de la cote sociale
du métier, soit celui reproduisant la séquence observée auprès de
groupes de policières, est doté d’indices d’adéquation acceptables.
Selon ce modèle, la privation relative personnelle est reliée au
discrédit qui pour sa part, est associé à la dévaluation. Le discrédit
affecte à la baisse le niveau de l’estime de soi qui est en lien avec
sa stabilité et provoque indirectement une instabilité de l’estime de
soi (coefficient non standardisé de l’effet indirect ⫽ ⫺,18, p ⬍ ,05,
coefficient standardisé ⫽ ⫺,21). La dévaluation, par ailleurs, est
Est-ce que les policiers réagissent de la même façon que leurs
collègues féminines au traitement différentiel en fonction du sexe
ou est-ce que leur statut dominant dans le métier affecte leurs
réponses sont des questions auxquelles cette étude a tenté de
trouver réponse. En reproduisant le modèle de désengagement
obtenu auprès de trois échantillons de policières, il est permis de
croire que c’est la cote sociale du métier et non le statut du groupe
d’appartenance dans le domaine qui module l’estime de soi des
personnes. Il a ainsi été démontré que plus les policiers sont
mécontents de leur situation personnelle désavantageuse, en comparaison à celles de leurs collègues féminines, plus ils s’engagent
dans le processus de désengagement. Ils s’embarquent ainsi sur la
voie du discrédit pour ensuite s’orienter vers la dévaluation. Le
discrédit a pour effet de noircir le regard porté sur soi dans un
groupe dont la cote sociale du métier est faible.
Est-ce que le désengagement psychologique a un effet protecteur,
et ce en dépit du fait qu’il peut avoir pour effet de diminuer le niveau
d’estime de soi, constitue la deuxième question à laquelle cette
étude trouve réponse. C’est par l’investigation d’une autre facette
de l’estime de soi, la stabilité, que nous avons pu déterminer si,
comme prédit à l’origine (Major & Schmader, 1998), le désengagement permet à l’individu de se mettre à l’abri du traitement
différentiel. Les modèles de prédiction et les modèles alternatifs
ont été élaborés à la lumière d’études antérieures sur le désengagement psychologique (Lagacé & Tougas, 2006; Tougas, Rinfret, et
al., 2005) et la stabilité de l’estime de soi (De Cremer & Sedikides,
2005; Kernis, 1993; Rosenberg, 1986; van den Bos & Lind, 2002).
C’est ainsi que les hypothèses selon lesquelles la stabilité de
l’estime de soi agit soit comme modérateur de l’effet de la privation relative sur le discrédit, soit comme point de départ, ou
d’aboutissement du processus de désengagement psychologique
ont été mises à l’épreuve. C’est cette dernière hypothèse qui a été
confirmée. Une interprétation prudente est toutefois de rigueur en
raison du fait qu’un seul aspect de la stabilité de l’estime de soi a
été estimé, soit la magnitude des fluctuations du regard porté sur
soi mesurée par une échelle d’auto évaluation de quatre items
(Rosenberg, 1965). L’autre aspect, la labilité, renvoie à la fréquence des variations du niveau de l’estime de soi dans le temps.
Bref, il s’agirait d’évaluer le niveau d’estime de soi de travailleurs
à différents moments dans le temps et d’en chiffrer les modulations
(Kernis et al., 1993). Dans ce cas, ce n’est plus la personne qui
jauge la stabilité de son estime de soi, elle est établie à partir des
nombreux scores d’estime de soi rapportés.
Les résultats obtenus suggèrent que dévaluer le domaine de
travail permet de stabiliser l’estime de soi. D’une part, ce lien
montre les effets bénéfiques de la dévaluation. Par exemple, si une
personne a mis en veilleuse sa vie personnelle en raison d’un
travail exigeant, dévaluer le domaine de travail pourrait permettre
à la personne de rééquilibrer sa vie. Il s’agirait alors d’une saine
gestion des priorités de vie. Dévaluer son métier serait aussi positif
dans le cas où les personnes réorientent leur carrière. D’autre part,
on peut penser à des effets pervers de la dévaluation. Dévaloriser
270
TOUGAS, RINFRET, CROSBY, BEATON ET LAPLANTE
Tableau 2
Analyses de régressions multiples (hypothèse du rôle modérateur de la stabilité de l’estime de soi)
Modèle 1
Privation relativea
Stabilité de l’estime de soia
Modèle 2
Privation relativea
Stabilité de l’estime de soia
Privation relativea ⫻ Stabilité de l’estime de soia
B
SE B
␤
t
p
0,33
⫺0,10
,06
,06
0,41
⫺0,12
5,39
⫺1,62
,00
,11
0,35
⫺0,12
0,07
,06
,06
,05
0,43
⫺0,15
0,10
5,54
⫺1,86
1,27
,00
,06
,21
Nota. Variable dépendante: Discrédit. R2 ⫽ ,22 pour le Modèle 1; ⌬R2 ⫽ ,01 pour le Modèle 2 ( p ⬎ ,05).
a
Scores standardisés.
un métier dans lequel on s’est investi peut faire mal ou laisser un
grand vide si la personne n’a pas de solution de rechange. Le
travail étant un a priori de l’intégration sociale (Gaullier, 1982),
dévaluer son importance marginalise en quelque sorte la personne.
Bref, se désengager peut être coûteux. D’ailleurs, la séquence de
liens depuis le discrédit au niveau d’estime de soi et, finalement, à
sa stabilité en témoignent. Lorsque la personne discrédite à répétition le feedback reçu du fait qu’elle est traitée différemment en
raison de son groupe d’appartenance, c’est non seulement son
niveau d’estime de soi qui baisse fréquemment, mais aussi sa
stabilité qui est mise en péril.
Si cette étude a permis de répondre à certaines questions, elle en
soulève une d’importance à savoir pourquoi les liens entre les
mécanismes de désengagement et le niveau de l’estime de soi
diffèrent selon la cote sociale du métier exercé. Il est logique de
penser que le standing social d’un métier détermine les conséquences de chaque mécanisme de désengagement. C’est d’ailleurs
ce qui a été suggéré dans les études antérieures (Lagacé & Tougas,
2006; Tougas, Rinfret, et al., 2005). Lorsqu’un métier donne du
prestige social, le dévaluer blesse. Par ailleurs, lorsque le métier est
moins bien coté, le prestige provient de la reconnaissance dans le
milieu de travail, ce qui exacerbe les effets négatifs du discrédit
(Tougas, Rinfret, et al.). Ces hypothèses explicatives trouvent leur
écho dans la théorie de l’identité sociale (Tajfel, 1978; Tajfel &
Turner, 1979). Selon cette théorie, les individus cherchent à avoir
une identité sociale positive. Différentes composantes de l’identité
contribuent à la fierté personnelle (Breckler & Greenwald, 1986;
Greenwald, 1982; Luhtanen & Crocker, 1992). Deux des composantes identifiées sont particulièrement pertinentes à notre propos. Il s’agit de l’estime collective d’appartenance, qui renvoie au
rôle que la personne occupe dans son groupe, et de l’estime
collective publique qui est liée à la cote sociale du groupe. On peut
dès lors avancer que les personnes évoluant dans un domaine bien
coté socialement ont une estime publique forte et dominante, ce
qui rend la dévaluation du métier difficile en ce qui a trait au
niveau de l’estime de soi. En revanche, il est permis de croire que
les personnes exerçant un métier moins bien coté socialement sont
davantage portées à mettre en priorité l’estime d’appartenance, ce
qui a pour effet de rendre le discrédit blessant pour l’estime de soi.
Ces hypothèses restent à être mises à l’épreuve.
Tout compte fait, deux aspects fondamentaux de cette étude font
en sorte qu’elle se démarque de ce qui a été fait par le passé.
Premièrement, il a été démontré que le modèle de désengagement
s’applique non seulement aux groupes discriminés reconnus dans
la société, mais aussi aux personnes qui croient faire partie d’un tel
groupe. Être policier est un métier d’hommes. Aux yeux de certains, le métier a été émasculé pour faire place aux femmes
(Beauchesne, 2001). Les hommes ont l’impression d’être placés
sur une voie d’évitement, d’où la conclusion de certains qu’ils font
désormais partie d’un groupe stigmatisé. Deuxièmement, cette
étude a permis de mettre en évidence l’importance de traiter de
plus d’une facette de l’estime de soi et de mettre ainsi à l’épreuve
l’hypothèse de l’effet protecteur du désengagement psychologique.
Si cette étude a confirmé cet effet, elle a néanmoins mis en relief
le côté caché de l’effet protecteur du désengagement psychologique. En effet, garantir la stabilité de l’estime de soi par le
biais de la dévaluation du métier peut avoir des conséquences
négatives. Travailler ne permet pas seulement de gagner sa vie et
d’assurer sa sécurité financière. D’autres besoins peuvent être
comblés sur le marché du travail. On pense ainsi aux relations
sociales, au prestige, au sentiment d’accomplissement. Dévaluer
son travail peut aussi vouloir dire rejeter un projet de vie ou un
rêve. À la lumière de cette étude, il semble donc que même sous
des dehors positifs, se désengager peut être coûteux. Mieux
comprendre les tenants et aboutissants du désengagement psychologique permet de mieux saisir les enjeux du traitement
préférentiel en fonction du sexe, même s’il s’agit d’une perception et peut-être pas d’un état de fait.
Abstract
This study has two goals. The first is to provide more information
on the asymmetrical and negative link between psychological
disengagement mechanisms and self-esteem level. The second is to
pursue the investigation of the protective effect of psychological
disengagement via the evaluation of another facet of self-esteem
that is, its stability. This study conducted amongst 152 policemen
confirms that disengagement allows individuals to secure their
self-esteem stability. Results militate in favour of the occupation’s
social status to explain the variable association between disengagement and self-esteem level. In the discussion, we raise the veil on
the hidden face of the protective effect of disengagement.
Keywords: relative deprivation, psychological disengagement,
self-esteem
LE DÉSENGAGEMENT PSYCHOLOGIQUE
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Reçu le 10 novembre 2008
Accepté le 9 mars 2010 䡲

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