φ Mild Cognitive Impairment - site de l`association GENS

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φ Mild Cognitive Impairment - site de l`association GENS
Alzheimer’s Association International Conference 2012 • Vancouver, 14-19 juillet 2012
Peut-on prévoir son évolution ?
n Le MCI est-il “réversible” ? Qu’en est-il de la stabilité du diagnostic de MCI ? Les seuils neuropsychologiques restent les seuls dont disposent les cliniciens pour déterminer le risque de
conversion. Et Ronald Petersen rappelle que, dans la “vraie vie”, tous les sujets MCI ne sont
pas appelés à développer une MA.
MCI : retour  
vers le passé ?
Des études, davantage épidémiologiques que cliniques, ont montré
que 6 % à 53 % des MCI revenaient
à un statut neuropsychologique
“normal”. Existe-t-il des causes
médicales de réversibilité ?
Dans ce travail de Jicha et al.
(Lexington), après 6 ans de suivi,
sur 179 patients MCI, 41 cas (23 %)
redevinrent “normaux” quels que
fussent leurs sous-types. Pour
30 d’entre eux (73 %), il s’agissait
de causes médicales réversibles :
dépression (34 %), maladies cérébrovasculaires (15 %), troubles
métaboliques (10 %), épilepsie
(5 %), maladie de Parkinson (2 %),
divers (7 %). Six patients ont fluctué pour évoluer finalement vers
une démence.
Seulement 5 patients sur 179 (3 %)
peuvent être considérés comme
réellement instables, ayant récupéré un statut “normal” sans la
moindre explication, suggérant
que le diagnostic de MCI est plus
“stable” que ce que dit la littérature.
Ce travail montre surtout que le
diagnostic de MCI est trop souvent
posé ex abrupto, sur des scores psychométriques, sans tenir compte
* Service de Neuropsychologie, Hôpital neurologique, CHU de
Lyon-Bron
** Unité de Neuropsychologie-CMRR, CHU Nord, Saint-Etienne ;
Laboratoire EMC, Université Lyon 2
Neurologies • Septembre 2012 • vol. 15 • numéro 150
Bernard Croisile* et Catherine Thomas-Antérion**
d’éléments non explicites dans les
critères du MCI, mais néanmoins
soulignés en 2003 par Petersen et
Morris (Hawaii, AAN) : le jugement
clinique est déterminant pour poser
l’étiquette de MCI. Ceci confirme ce
que savaient depuis longtemps les
cliniciens, c’est-à-dire qu’un examen
clinique et biologique minutieux apporte des informations précieuses
lors de situations médicales responsables de plaintes et de troubles cognitifs potentiellement réversibles.
tially ordered sets = POSETS).
Le taux de conversion vers une
maladie d’Alzheimer était de
65,2 % chez les sujets associant
un génotypage ApoE4 et de mauvais scores de mémoire épisodique
(mémoire de textes et rappel différé de l’ADAS-cog), de 23,2 % en
cas d’ApoE4 et de scores intermédiaires au rappel différé de l’ADAScog, et de seulement 7,8 % en cas
de génotypage non ApoE4 et de
scores élevés aux rappels différés
Le diagnostic de MCI est trop souvent posé sur
des scores psychométriques, mais le jugement
clinique et les examens biologiques sont
déterminants.
ApoE4 et mémoire : le mauvais profil de MCI
Certains se demandent à juste titre
quel sera le devenir de la neuropsychologie face à l’avalanche des
données de biologie et d’imagerie.
C’est trop vite oublier que la neuropsychologie est un marqueur
comme un autre et que, combinée
à d’autres, elle se révèle toujours
utile, comme par exemple pour
identifier les facteurs prédictifs
d’une évolution péjorative.
Dans ce travail d’Alan Lerner et al.
(Cleveland) (2), 513 sujets MCI ont
été suivis pendant 2 ans au moyen
d’algorithmes de classement (Par-
des tests de mémoire épisodique.
Un peu curieusement (par rapport
à d’autres travaux), ni la mémoire
de travail, ni la flexibilité cognitive, ni la vitesse de traitement, ni
la fluence verbale n’intervenaient
de manière significative lors d’une
conversion élevée, ce qui signifie
sans doute qu’une mémoire catastrophique a un poids plus important dans la conversion que
d’autres tests non mnésiques.
Alors que nous ne disposons pas
de seuils individuels pour l’IRM
et que le marquage amyloïde à
grande échelle n’est pas encore
disponible, il est important de
souligner que les seuils neuropsy307
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chologiques sont toujours les seuls
dont disposent les cliniciens pour
déterminer le risque de conversion et donc établir le type de surveillance (avec quel fréquence revoir les sujets MCI à risque).
La vraie vie ou  
le suivi dans  
les études du MCI
Ronald Petersen a présenté la cohorte de sujets MCI de la Mayo
Clinic (3), soit 143 sujets âgés de 70
à 89 ans ayant tous réalisé un PETFDG et une IRM 3 Tesla (marqueur
de dégénérescence) et un PET-PiB
(marqueur d’amylose), revisitée au
regard de la critériologie de 2011 :
17 % des sujets n’avaient aucun
marqueur positif (et sont donc
considérés comme n’ayant probablement pas de MA), 44 % une
forme intermédiaire : 14 % avec
le seul marqueur d’amylose positif, 30 % avec un seul marqueur de
dégénérescence positif et 38 % les
deux marqueurs positifs (à haut
risque de MA).
Une nouvelle fois, cet éminent collègue souligna que TOUS les sujets
MCI n’étaient pas des sujets appelés à développer une MA et que
les sujets observés dans la “vraie
vie” étaient bien différents de ceux
des études (notamment la banque
ADNI).
Ceci mérite effectivement d’être
rappelé.
n
Correspondance
- Dr Bernard Croisile
Service de neuropsychologie
Hôpital neurologique
59, Bd Pinel
69677 Bron cedex
E-mail : [email protected]
- Dr Catherine Thomas-Antérion
Unité de Neuropsychologie-CMRR
CHU Nord
42055 Saint-Etienne Cedex 2
Et laboratoire EMC
Université Lyon 2
E-mail : [email protected]
Mots-clés :
Démences, Maladie d’Alzheimer, Mild
cognitive impairment, MCI, Evolution,
Tests neuropsychologiques
Bibliographie
1. Jicha G et al. Reversion from mild cognitive impairment to cognitively
intact is associated with medically reversible causes for cognitive decline
rather than overt instability in the diagnosis of mild cognitive impairment.
Alzheimer’s Association International Conference, Vancouver, July 14-19,
2012 : Oral session 02-13-05.
2. Lerner A et al. Identifying high risk subjects for Alzheimer’s disease
among subjects with mild cognitive impairment using partially ordered
models of neuropsychological functioning. Alzheimer’s Association International Conference, Vancouver, July 14-19, 2012 : Oral session 04-10-04.
3. Petersen R et al. NIA-AA MCI criteria applied to the Mayo Clinic Study of
aging Alzheimer’s. Association International Conference, Vancouver, July
14-19, 2012 : Oral session 04-04-04.
• En bref
Alzheimer précoces et Alzheimer tardifs : comparaison des extrêmes
Lors d’une très élégante présentation orale, Hanna Cho
(Corée du Sud) a comparé le suivi de 14 Alzheimer précoces (Early Onset Alzheimer’s Disease = EOAD ; début
avant 60 ans) et 22 tardifs (LOAD, début après 70 ans),
tous ayant un PIB+.
En 3 ans, les EOAD ont un déclin plus rapide du MMS,
de la dénomination (Boston Naming Test) et de la
fluence sémantique. Le groupe EOAD a un amincissement cortical plus important de manière bilatérale
(frontal, pariétal, précuneus) alors que l’atrophie est
plus marquée en parahippocampique gauche chez les
LOAD. Avec le suivi, l’atrophie progresse plus vite à
gauche dans les régions déjà très atrophiées des EOAD
et des LOAD. Lors de l’examen PIB, les EOAD ont une
charge amyloïde plus importante, de manière bilatérale (basal ganglia, thalamus) ou à gauche (cuneus,
régions occipitales et temporales supérieures), ce qui
est en accord avec les données autopsiques de la littérature révélant plus de plaques séniles et de dégénérescences neurofibrillaires chez les EOAD.
Les EOAD ont donc un profil plus prononcé en termes
de performances cognitives et d’évolution clinique,
ainsi qu’une atrophie et des dépôts amyloïdes plus
importants.
Cette étude, qui sera sans doute aussi autopsique un
jour, révèle une grande cohérence, reste à savoir pourquoi les formes jeunes évoluent plus vite et de manière plus diffuse, l’explication traditionnelle est pour
l’instant celle d’une réserve cognitive plus efficace chez
les jeunes qui ne deviennent symptomatiques que
lorsqu’elle est dépassée par la profusion des lésions.
Bernard Croisile
(Lyon-Bron)
Référence : Cho H et al. Amyloid burden in early-onset versus late-onset Alzheimer’s disease: comparison of two extremes. Alzheimer’s Association International Conference, Vancouver, July 14-19, 2012 : S2.02.04.
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