Fiche N°59

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Fiche N°59
[agir ensemble]
janvier 2004.
n° 59
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n
f
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fiacat.
Fédération internationale de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture
L’ACAT-France Un anniversaire commun
a trente ans à toutes les ACAT
Torturé :
mon semblable,
mon frère
Cette année anniversaire a pour
thème général : « Torturé : mon
semblable, mon frère ». Il met
d’abord l’accent sur l’humanité des
victimes et renvoie aux valeurs universelles de compassion et de solidarité. Il fait aussi écho à la notion
d’humanisation de l’homme :
l’homme est appelé à réussir son
humanisation comme Dieu a réussi
la sienne dans le Christ. Les termes
de « semblable » et de « frère » ont
un sens très fort pour les chrétiens
que nous sommes. Ne prions-nous
pas pour les victimes comme pour
les bourreaux ?
Une campagne
nationale d’actions
Riche de son identité chrétienne et de
son œcuménisme vécu, forte des
nombreuses actions entreprises
durant ces trente dernières années,
l’ACAT-France marquera l’année de
son trentième anniversaire par une
campagne de sensibilisation et
d’action qui se déclinera en cinq
thèmes : guerres civiles (janvierfévrier), détenus (mars-avril), problèmes de la terre (mai-juin), réfugiés et déplacés (septembre-octobre),
disparus (novembre-décembre). Ces
thématiques ont toutes pour point
commun d’être une situation donnant à voir l’un des visages actuels
de la torture pratiquée dans le
monde.
En cette année 2004, l’ACAT-France fête
son trentième anniversaire. Avec elle,
se sont les 27 ACAT dans le monde et
la FIACAT qui célèbrent trente ans de
lutte pour parvenir à l’abolition de la
torture et des exécutions capitales,
trente ans au service des victimes,
trente ans d’engagement en faveur
des droits de l’homme.
C’est le moment de revivre les temps
forts, les inspirations prophétiques qui
sont à l’origine de notre création et
qui nous permettent d’aller toujours
plus avant. C’est le moment de nous
réjouir de nos réussites, celles qui
nous ont permis de sauver des vies…
C’est le moment de prendre un peu
de temps pour nous interroger :
Qu’est-ce que cela
veut dire : humaniser
l’homme ? Pour nous,
à l’ACAT c’est concourir à construire un
monde où, parce que le
torturé, le prisonnier, le
condamné à mort, le disparu, le réfugié, est mon
semblable, mon frère, je
partage avec lui une commune humanité. « On ne
s’humanise donc vraiment
qu’à la mesure où on s’engage pour redresser l’homme,
dans les autres comme en soimême. L’innocent abusé, l’innocent souffrant. L’homme
blessé, l’homme condamné *.»
Nous nous nourrissons de cette
fraternité de l’espérance qui
nous réunit, celle qui nous fait
découvrir, respecter et aimer
l’autre dans sa différence.
De nombreux
événements tout
au long de l’année
L’année 2004 sera l’occasion de rendre
l’action de l’ACAT plus efficace et plus
visible encore en multipliant les
actions et événements à destination
du grand public, d’inciter de nouvelles personnes à adhérer à notre
mouvement, d’associer tous les
acteurs de notre combat (ACAT
sœurs, partenaires, victimes) aux festivités pour valoriser leur travail.
Un événement national
et international
Réunis à Paris les 2 et 3 décembre 2004
à l’occasion d’un mini-Conseil international de la FIACAT, les délégués des
ACAT retrouveront les membres de
l’ACAT-France pour une grande célébration œcuménique, ouverte au
public, en la cathédrale Notre-Dame
de Paris, le 3 décembre 2004, à 20 heures.
Cette manifestation marquera la
dimension chrétienne et œcuménique
de l’association et de son combat.
Le lendemain, 4 décembre 2004, l’ACATFrance accueillera, dans la grande salle
de l’assemblée générale de l’UNESCO,
1 300 personnes (adhérents de l’ACATFrance, délégués des ACAT, représentants de la FIACAT, partenaires associatifs, personnalités civiles et religieuses,
journalistes…).
La matinée sera consacrée aux témoignages et interventions de représentants de différentes ACAT. L’aprèsmidi, au cours d’une table ronde,
plusieurs intervenants réfléchiront et
débattront ensemble autour de l’interrogation : « Pourquoi encore la torture
aujourd’hui ? » Lors de son rassemble-
ment national au Bourget en 1988,
Guy Aurenche, alors président de la
FIACAT, lançait, en effet, le défi : « Plus
de torture en l’an 2000 ». Force est de
constater que ce message d’espoir
n’est pas devenu réalité : la torture,
loin d’avoir disparu, est pratiquée dans
les deux tiers des pays de la planète
en dépit des mécanismes de contrôle
mis en place. Prétextant du respect dû
aux traditions culturelles ou religieuses, certains États justifient ainsi la
pratique des mutilations physiques et
des châtiments corporels. Sous couvert
de lutte antiterroriste, les États — à
commencer par les plus démocratiques —édictent des lois d’exception
restreignant considérablement les
libertés fondamentales et les droits de
l’homme. On n’hésite plus, par
ailleurs, à tenir ouvertement un discours public qui légitime la torture.
Nous devons donc nous interroger sur
la libéralisation de ce discours public
la justifiant, sur la régression idéologique que cela représente et les restrictions imposées aux droits de
l’homme sous prétexte de lutte contre
le terrorisme.
En fin de journée, après une intervention théologique qui sera une relecture chrétienne de ce que nous
vivons, nous réfléchirons aux actions
que nous devons engager pour les
années à venir. Afin de dynamiser
l’événement, de nombreux temps de
respiration viendront ponctuer la
journée : prières, chants, extraits de
pièces jouées par des comédiens,
documentaires et diaporamas.
Le soir, nous aurons la joie de vérifier
une fois encore que la musique est
universelle et qu’elle « adoucit les
mœurs » en écoutant le concert qu’interprètera l’Orchestre pour la paix,
dont le nom comme la composition
constitue un beau symbole. Créé par
le pianiste argentin Miguel Angel
Estrella, qui a été aidé par l’ACATFrance alors qu’il était prisonnier
dans son pays, il réunit, en effet,
depuis dix ans une cinquantaine de
musiciens, israéliens, libanais, égyptiens, jordaniens et français — de
religions chrétiennes, juive et musulmane —, qui parcourent le monde
pour promouvoir la paix et changer,
par la musique, le quotidien des per-
Trente ans de lutte, trente ans d’espoir
Des publications
Pour un chemin d’humanisation, changer le regard
Cinq numéros spéciaux du Courrier
de l’ACAT seront publiés en 2004
sur les thèmes « Guerre civile »,
« Détention », « Terre et violences »,
« Réfugiés et déplacés », « Disparition », ainsi qu’un numéro spécial
sur « Humaniser l’homme ». De
plus, un hors-série sera consacré
aux trente ans de l’ACAT.
Par ailleurs, l’ACAT-France prépare la
publication d’une revue francophone de réflexion transdisciplinaire
sur la torture afin de permettre l’ouverture d’un espace de réflexion et
de débat suffisamment riche et
diversifié pour contribuer à la fois à
la formation de ceux que le sujet
intéresse et à l’approfondissement
des questions spécifiques que pose
la réalité de la torture.
Quand nous sommes las, usés, quand
nous manquons de courage et de
confiance, quand l’espérance nous
abandonne, rappelons-nous que
nous ne sommes pas seuls parce que
nous sommes des « êtres avec » . Nous
savons pouvoir compter les uns sur
les autres ; c’est notre force. Nous faisons partie d’un ensemble, celui que
forme chacune des ACAT, lui-même
englobé dans le réseau plus vaste des
ACAT réunies autour de la FIACAT.
Nous sommes un exemple vivant des
richesses qu’apporte la pratique de la
Foi et de l’œcuménisme : vécue au
quotidien, cette dimension spirituelle
est pour nous essentielle. Nombreux
sont ceux qui prient pour nous, pour
nous soutenir dans notre action :
nous n’avons pas le droit de les décevoir. Dans leur silence, les victimes
de la torture comptent sur nous ;
dans leur aveuglement – et même
s’ils ne le savent pas – les tortionnaires aussi. Si, trop essouflés ou
affaiblis, nous nous taisons : qui
criera pour eux, qui parlera pour
27, rue de Maubeuge
75009 Paris — France
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Tél. : 33 (0)1 42 80 01 60
Fax : 33 (0)1 42 80 20 89
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eux, qui priera pour eux ? Leur prêterons-nous notre voix ?
Alors, dans la confiance et la foi dans le
Christ ressuscité, ne nous laissons
pas gagner par la lassitude, le découragement, le désespoir. Pour changer
le monde, changeons d’abord notre
regard. Regardons le monde avec les
yeux du Christ Jésus. Et nous croirons en l’homme qui est à faire. Et
nous aimerons l’homme, et l’aimant,
nous l’aiderons à se dresser debout
dans la vie. « Le chemin d’humanisation de l’homme est […] directement
confié à la responsabilité des hommes
faisant ensemble leur histoire au travers des conflits où leur “inhumanité”
les conduit. *»
Avec ce regard du Christ, ensemble, continuons ce chemin d’humanisation.
Sylvie Bukhari-de Pontual,
membre du bureau international de
la FIACAT, présidente de l’ACAT-France
[* Yves Burdelot, Devenir humain, Le
Cerf, Paris, 2003.]