Des nouvelles du Sénégal…

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Des nouvelles du Sénégal…
Des nouvelles du Sénégal…
En septembre dernier, j'étais au Sénégal pour une brève visite de travail. Enfance Tiers Monde y a un projet
en cours à Nianing, un petit village de pêcheurs. Ce projet est en grande partie financé par la Région
Wallonne. Nianing est situé à 85 km au sud de Dakar.
Le projet est entré dans sa dernière phase et à ce stade une évaluation s'imposait, afin de pouvoir
entreprendre les mesures nécessaires afin de garantir sa durabilité. Quelques adaptations nécessaires ont été
portées à la coordination et au suivi. L'équipe locale qui gère le “Centre d’Activités et Commercial Dablii de
Pêche” a reçu une formation en informatique, communication via Internet et
gestion commerciale.
Quelques bénéficiaires du projet suivent attentivement le cours de gestion commerciale.
Je n'avais plus été au pays depuis février 2004. Maintenant c'était la saison des pluies, très chaude et humide
et par conséquent il n'y avait pas ou peu de toubabs (blancs). Je me suis vite aperçue que la population s'était
appauvrie. La situation m'a fort surprise. Les conditions de vie de la plus grande partie de la population ne
s'est certainement pas améliorée...
Dakar est devenue une vraie décharge publique et il y règne une odeur nauséabonde. Des travaux de
construction de routes prévus de longue date ont été arrêtés pour diverses raisons, les rues sont inondées à
cause du manque d'écoulement des eaux. L'entrée et la sortie de la capitale occasionne des bouchons
interminables jusque tard dans la nuit. Des coupures d'électricité paralysent le pays plus que jamais. De
nombreux endroits ne sont plus approvisionnés en eau du fait que la compagnie des eaux est sans électricité.
La Senelec coupe donc volontairement le courant sans prévenir, pour des périodes variant de 4 heures à plus
de 24 heures. Ils réduisent ainsi leurs frais et espèrent que cela les sauvera de la faillite. Planifier et donner
des cours d'informatique n'était pas chose facile vu les coupures de courant régulières. Il n'est pas vraiment
confortable non plus de prendre sa douche à la lumière des chandelles.
Le désespoir fait surface à chaque conversation. Les gens sont mécontents et se plaignent qu'ils doivent
quand même payer la facture, qui comprend un taux fixe jusqu'à un certain niveau de consommation, sans
tenir compte s'il y avait du courant ou non. Et tout le monde accuse le régime du président Abdoulaye Wade.
En quelques années, l'image de héros du peuple s'est transformée en celle de antihéros. En 6 ans de temps
son gouvernement a subi 26 réformes. Des références ne sont plus requises pour obtenir un poste ministériel.
La corruption a beau jeu. Aucune des maquettes et des plans du président n'ont été réalisés. En 2000, après
près de 40 ans de pouvoir du PS, le PSD de Abdoulaye Wade vint au pouvoir après une longue lutte
d'opposition. C'était la fête au Sénégal, les gens étaient fiers, ils étaient parvenus, au moyen d'élections
démocratiques, à chasser un régime vieux en corrompu, qui fit du tort au pays pendant des décennies. C'était
un évènement assez unique sur le continent africain. Wade annonça la fin de la corruption, promit des
réformes politiques et une politique ouverte. Le ciel était plein d'espoir, le peuple avait des perspectives
d'avenir.
Pendant les premières années le Sénégalais moyen constatait peu de changement, mais Wade bénéficiait
toujours du crédit nécessaire. Il se faisait surtout remarquer lors de rencontres internationales, en tant
qu’émissaire de la paix dans des conflits africains, comme organisateur de nombreux symposiums
internationaux à Dakar et recueillait de cette manière les suffrages de la communauté internationale. Dans
son pays il était plus connu comme le président des "maquettes", faisant référence aux maquettes des
nombreux projets futuristes qu'il annonçait régulièrement sur la chaîne nationale RTS. Sarcastiquement, les
habitants de Nianing ont baptisé depuis cette chaîne “Rien Tous les Soirs”…
A la campagne la crise s'est encore accrue et paraît sans issue. Elle ne bénéficie d'à peu près aucun soutien
gouvernemental. La désillusion règne à l'intérieur du pays et on y craint la réélection de Wade.
La semaine où j'ai séjourné à Nianing, les milliers de réfugiés sénégalais rejoignant les îles Canaries faisaient
la une dans la presse belge.
Dans ce contexte on peut comprendre le geste de désespoir accompli par ces jeunes: la jeunesse du Sénégal a
vu les perspectives créées par la venue du président Wade fondre comme neige au soleil. Chaque jour le
régime politique continue à vider le pays, et ne laisse aucun espoir. Ils sont nombreux à vouloir partir, à
vouloir enfin construire un véritable avenir.
Premiers cours d'informatique
La population de Nianing et des petits villages environnants a heureusement des perspectives d'avenir
grâce à votre soutien régulier dont elle bénéficie depuis quelques années, ainsi que de celui de quelques
écoles wallonnes. Ainsi une petite école gardienne a été construite voici quelques années dans le village
de brousse Sintouketa par un groupe d'élèves de l'institut Don Bosco de Verviers. Il est évident que les
enfants qui ont déjà fréquenté l'école avant d'entamer le cycle de l'école primaire sont réellement en
avance par rapport à ceux qui y vont pour la première fois. A Sintouketa, une soixantaine de bambins
vont à l'école. Pour cela les parents doivent payer une contribution de 500 Cfa, ou 0,75 euros par mois
aux deux enseignantes, ce qui signifie que le salaire mensuel de ces dernières ne dépasse pas les 45 €…
Il semble pourtant que pour beaucoup de parents cette contribution s'avère élevée. Pendant les trois mois
de vacances les enseignantes ne bénéficient d'aucune forme de salaire. J'ai parlé avec Angèle, l'une
d'elles, qui se trouvait complètement démunie. Le désespoir se lisait sur sa figure. Elle loue une petite
chambre à Nianing, sans eau, ni électricité et tous les jours elle parcourre le trajet d'une bonne demiheure vers la petite école de brousse à pied, sous le soleil brûlant. Mais elle ne veut pas refuser un enfant,
et c'est tout à son honneur.
Nous souhaitons aider cette petite école et prendre en charge une partie des frais de fonctionnement de cette
année scolaire, afin que les petits puissent suivre les cours sans soucis et que les maîtresses puissent vivre
dignement.
J'ai visité une autre école gardienne en construction dans le village de brousse de Gandiol. Les murs ont été
construits grâce à la générosité d'une dame belge. La population a réussi à construire l'école en deux
semaines. Mais maintenant il n'y a pas suffisamment d'argent pour le toit, une couche de peinture, les bancs
et les petites chaises. Nous souhaitons également aider ici.
Au nom de ces bambins et du personnel enseignant nous vous remercions vivement d'avance pour l'aide que
vous pourrez leur apporter !
Johanna Vandamme
Merci de bien vouloir mentionner “Ecole gardienne Sénégal” sur votre bulletin de versement.