interview

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MONDE
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LE CHIFFRE
L’ESSENTIEL
1,5
million de passagers ont voyagé vers le Tibet
à bord du nouveau train chinois mis en service il y a
un an. La moitié de ces voyageurs sont des touristes
MARDI 3 JUILLET 2007
I
La Croix
I
chinois et occidentaux. La ligne ferroviaire la plus
haute du monde qui relie Lhassa jusqu’à Pékin aurait
permis, selon les autorités chinoises, à la région
du Tibet, de bénéficier de retombées économiques.
ASIE DU SUD Des inondations
CORÉE DU NORD « Une menace pour
DIPLOMATIE Bush et Poutine tentent
Les intempéries et les pluies de mousson torrentielles qui
ont accompagné le passage du cyclone Yemyin ont fait 110
morts depuis une semaine au Pakistan, pays le plus touché, portant à plus de 600 le nombre de personnes tuées
en Asie du Sud par ce cyclone qui a laissé plus d’un million
et demi de sinistrés. Près de 500 personnes sont mortes
au Pakistan, en Inde et en Afghanistan dans les premiers
jours du passage du cyclone, qui a touché terre le 23 juin
dans le sud du Pakistan où une grande partie de la province
du Baloutchistan était toujours sous l’eau hier.
La Corée du Nord représente « une des plus grandes menaces » qui pèsent sur la paix dans le monde, a estimé hier
le général B.B. Bell, commandant les forces américaines
stationnées en Corée du Sud. « Sa technologie dans le domaine des missiles alliée à sa puissance nucléaire prouvée
représente l’une des plus grandes menaces à la paix et la
stabilité », a-t-il déclaré. Ce discours tranche avec les progrès enregistrés avec l’Agence internationale de l’énergie
atomique qui a annoncé ce week-end s’être mise d’accord
pour démanteler le site nucléaire de Yongbyon.
Le président américain George W.Bush et son homologue
russe Vladimir Poutine ont poursuivi hier dans la résidence
de la famille Bush dans le Maine leurs discussions afin
d’évoquer de nombreux dossiers épineux. Au menu de ces
échanges, des dossiers qui fâchent entre ces deux pays
dont les relations sont au plus bas, notamment après le
projet des États-Unis d’installer en Europe son bouclier
antimissile. Les discussions devaient également porter
sur les programmes nucléaires de l’Iran et de la Corée du
Nord, le Proche-Orient et le statut du Kosovo.
ont fait plus de 600 victimes
la paix », selon un général américain
de désamorcer les tensions
V
ENTRETIEN F Lech Walesa, ancien président de la République polonaise
« A l’époque communiste,
tout le monde était agent, moi compris »
L’ancien président,
accusé d’avoir
collaboré dans
les années 1970 avec
la police politique,
revient
sur l’ouverture
des dossiers secrets
qui a lieu aujourd’hui
en Pologne
ORLIN WAGNER/AP
P
ourquoi avoir publié sur
Internet une partie des archives communistes vous
concernant ?
LECH WALESA : Je n’avais plus le
choix. J’en avais assez d’être accusé
à tort alors que je n’ai rien à cacher
et que je n’ai rien fait que je puisse
regretter aujourd’hui. Ce n’est pas
moi qui ai écrit ces documents, donc
je ne suis pas responsable de ce qu’il
y a dedans. Je ne les ai même pas lus
en détail, j’ai simplement souhaité
les mettre à la disposition de tous
pour que l’on puisse discuter sur
une base concrète. Je m’y plongerai
quand on me reprochera quelque
chose qui y figure.
Que contiennent ces archives ?
Ces archives regroupent pour le
moment 700 pages d’actes. J’ai par
ailleurs obtenu de l’IPN (l’Institut de
la mémoire nationale, qui conserve
les archives de la police communiste)
7 000 pages que je n’ai pas encore publiées, et j’attends encore plusieurs
lots de l’institut : en tout, il devrait y
avoir 20 000 pages me concernant.
Ces documents ne me sont pas
très favorables, car les textes qui
décrivaient mon combat ont été
Lech Walesa en 2005, au cours d’un voyage aux États-Unis. L’ancien président polonais rejette l’idée de s’être fait manipuler par le régime communiste.
détruits. Du coup, on n’y perçoit pas
les subtiles différences qu’il y avait
entre moi et les autres opposants,
comme Anna Walentynowicz ou
Andrzej Gwiazda (qui aujourd’hui
accusent Lech Walesa d’avoir été un
agent du régime), dont les dossiers,
En Pologne, les archives empoisonnent
la vie politique
dquestion des archives secrètes empoisonne toujours la vie politique.
Près de vingt ans après la fin du régime communiste en Pologne, la
Personne n’échappe aux accusations d’avoir collaboré, pas même Lech
Walesa, ancien leader du syndicat Solidarité et prix Nobel de la paix. Les
frères Kaczynski, au pouvoir, ont voulu mettre en place une loi dite « de
lustration », destinée à écarter de la vie publique toute personne ayant
collaboré. La Cour constitutionnelle a invalidé cette loi, très restrictive et
qui apparaissait inapplicable. Mais le premier ministre polonais prévoit
désormais de publier l’ensemble des dossiers sur Internet. Prenant les
devants, Lech Walesa a lui-même publié, le 10 juin dernier, son dossier
obtenu auprès de l’IPN, l’institut chargé de conserver les archives. Il
est disponible sur les adresses : http://www.mojageneracja.pl/1980 ou
http://www.lwarchiwum.home.pl
eux, ont été conservés entièrement.
Autre problème : certains dossiers
abordent des aspects intimes, tellement personnels qu’ils exigent des
explications. Or tout est question
d’interprétation : il y a notamment
un document qui indique que, pendant un certain temps, les services
secrets se sont servis de moi, qu’ils
m’ont manipulé. Mais selon moi,
c’est l’inverse ! C’est moi qui ai utilisé
les services secrets… Dans les années 1970, en effet, je me suis rendu
compte que je n’avais aucune chance
de réussir, donc j’ai arrêté d’aller à la
confrontation. Les services secrets
ont cru que c’était grâce à eux. Peutêtre ! Question d’interprétation. Mais
en réalité, je préparais la suite, l’année 1980…
Est-ce à dire que les archives de la
police communiste ne peuvent rien
prouver ?
Les fonctionnaires de la SB (Sluzba
Bezpieczenstwa, les « services de sé-
curité ») pouvaient écrire n’importe
quoi sur nous, ils ne nous prenaient
pas au sérieux. Pour comprendre ces
documents aujourd’hui, il faut donc
s’y connaître.
Ce ne sont pas des documents fa-
« Les archives sont
devenues un élément
du jeu politique
et l’on peut ruiner
la carrière d’un excellent
candidat en l’accusant
d’avoir collaboré. »
ciles. Il y a beaucoup d’omissions,
et une grande partie des dossiers
a, en fait, disparu : les documents
qui étaient défavorables aux dirigeants ont été détruits, tandis que
les documents qui étaient le moins
favorables à la population ont été
conservés. Comme si la SB avait
préparé une ultime provocation :
faire en sorte que la population se
chamaille autour de ça quelques
années plus tard… Qu’il y ait des
luttes au sein même de l’ancienne
opposition.
Que répondez-vous à ceux qui vous
accusent d’avoir été un agent des
services secrets ?
Que se serait-il passé si Walesa,
Chrzanowski (premier président
de la Diète – le Parlement – de la
Pologne démocratique) et d’autres
n’avaient pas légèrement été des
agents ? Eh bien le pays tout entier
se serait lancé dans des règlements
de compte ! Or nous, nous avons fait
en sorte de sauver la Pologne, nous
avons empêché qu’elle ne s’engouffre
dans cette voie. Certes, il y a des moments où je me demande : pourquoi
me reproche-t-on tout cela ? Mais j’en
arrive très vite à la conclusion f