prevention des incontinences secondaires au traumatisme obstetrical

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prevention des incontinences secondaires au traumatisme obstetrical
PREVENTION DES INCONTINENCES SECONDAIRES AU
TRAUMATISME OBSTETRICAL
INTERVENANTS : XAVIER FRITEL, XAVIER DEFFIEUX, DANIEL FALTIN, PATRICK DEVILLERS,
ARNAUD FAUCONNIER
Nous savons depuis longtemps que la grossesse et l’accouchement peuvent provoquer une
incontinence, William Buchan précisait ainsi dans son traité de Médecine Domestique (1783) à propos
de l’incontinence d’urine « Chez les femmes grosses, elle se guérit en général par l’accouchement ».
Diderot et d’Alembert dans leur encyclopédie (1779) traitaient déjà de l’incontinence urinaire
postobstétricale « Les déchiremens de cette partie ont principalement lieu chez les femmes ; les
accouchements laborieux, ou la maladresse du chirurgien, en sont les causes les plus fréquentes ».
Depuis nous avons appris que la prévalence des symptômes d’incontinence urinaire augmente au
cours de la grossesse (entre le premier et le troisième trimestre) puis diminue spontanément dans les
trois premiers mois du post-partum. De nombreuses interventions obstétricales ou périnéales ont été
proposées pour prévenir l’incontinence de la grossesse et de l’accouchement. Malheureusement les
modalités d’accouchement (position pendant l’accouchement, durée du travail, durée de la seconde
phase du travail, extraction instrumentale, épisiotomie, anesthésie péridurale ou pudendale) ne
semblent pas avoir d’impact sur l’apparition ou la persistance d’une incontinence urinaire dans le postpartum ou à long terme :
L’épisiotomie systématique ne diminue pas la prévalence postnatale de l’incontinence urinaire, de
l’urgenturie, de l’incontinence anale, de la douleur périnéale ou de la dyspareunie. La seule qualité,
identifiée avec certitude, de l’épisiotomie est de diminuer le nombre de déchirures vulvaires
antérieures. Son rôle protecteur du sphincter anal se limite à l’extraction instrumentale, situation qui
est associée à un sur-risque de périnée complet.
La ventouse comporte moins de risque de périnée complet que le forceps. Le risque d’incontinence
anale est deux fois plus important quand on utilise un forceps plutôt qu’une ventouse. En revanche, le
risque d’incontinence urinaire est similaire avec les deux instruments.
Une position d’accouchement latérale, assise suspendue ou debout, réduit la durée de l’expulsion,
comparée à la position couchée, mais ne modifie pas les symptômes périnéaux. Le massage périnéal
anténatal diminue le risque de suture périnéale mais n’a pas d’effet sur les symptômes périnéaux. La
poussée retardée (au moins deux heures après dilatation complète) diminue les interventions à partie
moyenne (forceps, ventouse ou rotation manuelle) mais ne modifie pas le risque d’incontinence
fécale.
Après le premier accouchement, la prévalence de l’incontinence urinaire est deux fois plus importante
chez les femmes accouchées par voie vaginale que chez les femmes accouchées par césarienne.
Cependant cette différence transitoire tend à disparaitre avec le temps et les accouchements suivants.
Pour ce qui est de l’incontinence anale ou fécale il n’existe aucune différence en fonction du mode
d’accouchement. La césarienne programmée ne permet pas de réduire le risque d’incontinence
urinaire d’effort, d’incontinence fécale, ou de dyspareunie à 2 ans de l’accouchement. Après 50 ans
on ne retrouve pas de différence entre les accouchées par césarienne et les accouchées par voie
vaginale pour le risque d’incontinence urinaire ou d’incontinence fécale.
La rééducation périnéale par des exercices de contraction musculaire est le traitement de première
intention de l’incontinence urinaire pré et postnatale. Le rôle prophylactique de cette rééducation
demeure discuté. Trois essais randomisés contenant des sous-populations de femmes primigestes
continentes en début de grossesse ont exploré ce rôle préventif de la rééducation prénatale. Il semble
que seules les femmes primigestes continentes ayant une hypermobilité cervico-urétrale à 20 SA
(évaluée par échographie), bénéficient d'un effet prophylactique de la rééducation en cours de
grossesse avec une diminution de la prévalence de l'incontinence urinaire à trois mois du post-partum
dans le groupe des femmes ayant eu la rééducation prénatale (RR 0,37 IC95 % 0,18-0,77). Toutefois,
le suivi de ces patientes n'objective pas d'effet protecteur à long terme et la valeur diagnostique
l'échographie en cours de grossesse pour évaluer l'hypermobilité cervico-urétrale reste discutée. Par
ailleurs, il n'a aucune donnée de la littérature qui soit en faveur d'un effet préventif à long terme de la
rééducation périnéale chez des patientes continentes dans le post-partum, ni même chez des
patientes incontinentes.
Une prévention secondaire est possible dans le cas des déchirures périnéales, une échographie
postnatale immédiate permet de diagnostiquer, réparer les lésions du sphincter anal passé inaperçues
à l’examen clinique et diminuer la prévalence de l’incontinence anale postnatale.
Le principal facteur modifiable pour diminuer les séquelles périnéales de l’accouchement est
l’accouchement instrumental. Il ne s’agit plus comme le proposait de Lee en 1920 de réaliser
systématiquement extraction instrumentale et épisiotomie mais au contraire de s’abstenir en limitant
les extractions instrumentales et en employant l’instrument le moins traumatique. Le Collège des
Gynécologues et Obstétriciens Français a publié en 2008 ses recommandations sur les mesures à
prendre pendant le travail pour réduire le nombre d’extractions instrumentales.