Prédication pour le 15ème dimanche après la Trinité 02 octobre 2011

Transcription

Prédication pour le 15ème dimanche après la Trinité 02 octobre 2011
Message (Ésaïe 58)
Je me souviens d'un temps, où l'animateur de télévision Jacques Martin, celui de l'Ecole des
Fans, offrait lors d'un jeu des voyages autour du monde. C'était un temps durant lequel on ne
parlait pas encore de crise, de récession, et d'autres calamités économiques. Jacques Martin
avait une formule qui m'a marqué, et qui a encouragé en moi la passion du voyage. Jacques
Martin disait à ses candidats que Dieu nous avait placés dans un beau jardin, et que la moindre
des politesses était d'en faire le tour du propriétaire. Je n'ai jamais eu la chance de faire ce
tour du propriétaire grâce au jeu de Jacques Martin. Mais d'une certaine manière, il disait vrai
à propos de la terre qui nous est confiée en gérance, de la nature que nous devons
transmettre à nos enfants. Un écolo avant l'heure, notre Jacques Martin des années 80.
Je vos propose aussi un petit voyage ce matin, très petit même, une simple balade à pied dans
le vignoble. Je vous propose de méditer ensemble les deux photos que vous avez sur votre
programme de culte.
La première est une invitation au farniente.
Une invitation à se coucher dans les coquelicots pour goûter le soleil de la fin du printemps,
devant ces murs abandonnés d'une vielle abbaye.
La seconde est une invitation à la promenade.
Une promenade sur ce chemin qui part de la croix pour s'en aller au loin, vers cet horizon
bleuté que l'on aperçoit à l'arrière-plan, au-delà peut-être de ce ciel menaçant qui n'annonce
rien de bon.
Je vous propose ce farniente et cette promenade, avec l'éclairage d'une parole du prophète
Ésaïe, la suite de ce texte que nous avons entendu tout à l'heure, ce texte dur qui nous parlait
du jeune auquel Dieu prenait plaisir1, un texte qui, après le constat tragique de la misère
humaine, ouvre sur l'espérance d'un monde meilleur. Ésaïe donc, au chapitre 58 :
Alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et ta plaie se fermera vite. Tes bonnes actions
marcheront devant toi, et la gloire du Seigneur fermera la marche derrière toi.
Quand tu appelleras, le Seigneur répondra. Quand tu crieras, il dira : "Je suis là !" Si tu fais
disparaître de ton pays ce qui écrase les autres, les gestes de menace et les paroles blessantes,
alors ta lumière se lèvera dans la nuit, ton obscurité sera comme la lumière de midi. Ce sera la
même chose si tu partages ta nourriture avec celui qui a faim, si tu donnes à manger à ceux qui
sont dans la misère. Le Seigneur sera toujours ton guide. Même en plein désert, il te donnera à
manger et te rendra des forces. Tu seras comme un jardin bien arrosé, comme une source qui
coule toujours.
Revenons un instant sur le jardin dans lequel Dieu nous a placés, et dont nous devons faire le
tour du propriétaire, par politesse. D'une certaine manière, Dieu ne nous a pas simplement
déposés dans un jardin, mais il nous a confié la mission de l'entretenir, de le gérer. Plus encore,
je suis convaincu que Dieu a besoin de nous, de vous et de moi, pour gérer ce monde, et les
hommes et les femmes qui l'habitent. Lors de la préparation quelqu'un disait que nous
sommes des ouvriers, placés dans ce jardin pour la moisson de Dieu.
Restons encore un instant couchés dans les blés qui sont mûrs. La récolte est prête. D'une
certaine manière, nous le savons tous, notre monde a besoin de sortir du marasme dans lequel
il végète. Et toutes les solutions politiques et économiques de toutes les nations n'y
changeront rien. La crise n'est pas uniquement financière, ou économique. Nous vivons une
véritable crise de société. Une recherche de sens, que les vieilles institutions en ruine ne
peuvent plus assouvir. Les hommes et les femmes de ce temps ont soif. Ils sont mûrs comme
les blés, mûrs pour recevoir une parole qui ferait sens dans leur vie, qui donnerait du sens à
leurs actes, à leur travail, à leur existence. Mes amis, cette parole, nous l'avons. Depuis le
Christ des Évangiles, nous l'avons. C'est une parole d'amour. Elle nous dit l'amour de Dieu pour
chacune et chacun d'entre nous. Mais elle dit surtout l'amour de Dieu pour tous les êtres
humains. Dieu a tant aimé le monde… dit Jésus dans l'évangile de Jean. Cette parole d'amour,
elle retentit au-dessus du champ de blé mûr. Elle retentit aussi au-dessus des coquelicots en
fleur. Et en regardant l'image, je me dis qu'il est temps de sortir de notre langueur paresseuse,
je me dis que Jésus a besoin de nous pour proclamer l'amour de Dieu au monde. Je me dis
aussi que Jésus avait raison dans la parabole du bon grain et de l'ivraie : ce n'est pas à nous de
faire le tri. Vous et moi, nous sommes simplement appelés à annoncer l'amour de Dieu, à qui
veut l'entendre et à qui veut le recevoir. Il faudra certainement laisser derrière nous les vieux
murs de nos institutions, de nos habitudes et de nos traditions, mais sans les perdre de vue. Il
faudra certainement nous laisser inspirer et guider pour inventer de nouvelles pistes et trouver
de nouveaux chemins.
Et voyez-vous, cela m'amène à notre deuxième image, celle du chemin qui part de la croix et
qui nos invite à nous mettre en route. Souvent on nous dit qu'il faut aller vers la croix. Ce n'est
pas faux. Mais la croix n'est pas le terminus de notre cheminement. La croix en est une étape
obligatoire par laquelle il nous faut tous passer. Derrière la croix, il y a un chemin, un chemin
1
Voici le jeûne qui me plaît : libérer les gens enchaînés injustement, enlever le joug qui pèse sur eux, rendre la liberté
à ceux qu’on écrase, bref, supprimer tout ce qui les rend esclaves. C’est partager ton pain avec celui qui a faim, loger
les pauvres qui n’ont pas de maison, habiller ceux qui n’ont pas de vêtements. C’est ne pas te détourner de celui qui
est ton frère. (Ésaïe 58)
qui s'enfonce dans les turpitudes du monde, sous les nuages des soucis et des inquiétudes. La
parole d'amour de Dieu dit aussi que ceux et celles qui voudront vivre de cet amour n'auront
pas forcément la vie facile dans le monde. Certains passages de cette parole nous parlent de
gros soucis, de grosses inquiétudes, de persécutions pour certains. Mais mes amis, ce n'est pas
le plus important, car le chemin de la croix, celui qui descend tout droit vers l'horizon, vers je
ne sais où, vers l'infini peut-être, ce chemin conduit tout droit à l'infini de l'éternité de Dieu, de
la vie éternelle. Le chrétien est invité à vivre de cette espérance. Le chrétien est appelé à vivre
de cette promesse. Le théologien allemand Dietrich Bonhoeffer, qui a résisté dès l'origine aux
puissances maléfiques du nazisme, Dietrich Bonhoeffer qui en est mort, exécuté dans une
prison allemande, Dietrich Bonhoeffer écrivait : Dieu ne réalise pas tous nos souhaits, mais
toutes ses promesses !
Vous et moi, dans ce jardin qui invite au tour du propriétaire, devant ce champ de blés mûrs,
devant ce chemin qui s'ouvre devant nous derrière la croix, vous et moi, nous sommes appelés
à vivre de la promesse de Dieu, la promesse faite à ses témoins, à tous ceux qui seront
porteurs de l'amour de Dieu : Alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et ta plaie se fermera
vite… alors ta lumière se lèvera dans la nuit, ton obscurité sera comme la lumière de midi … Le
Seigneur sera toujours ton guide. Même en plein désert, il te donnera à manger et te rendra
des forces. Tu seras comme un jardin bien arrosé, comme une source qui coule toujours.