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Anthologie de la musique citadine Algérienne
Essoundoussia
direction d’orchestre Saîm Hinni
çanaa d’Alger
Nouba
Maya
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Essoundoussia
La Nouba Maya
L’association Essoundoussia a été créée en 1986 à Alger. La libéralisation des moeurs
politiques issue des réformes de 1980 en Algérie a en effet permis à de nombreux
groupes, plus ou moins informels, de musiciens de se constituer pour produire des
spectacles et former des élèves. D’autres musiciens ont préféré garder leur statut de
musiciens professionnels.
Dès le début de son activité, l’association Essoundoussia a donné la priorité à la
diffusion musicale. Guidée par la volonté d’ascension rapide, ses dirigeants se sont
attachés à enregistrer un grand nombre d’œuvres, à être présents dans les plus grands
festivals, à remporter le plus de gratifications possibles… L’objectif était clairement
de dominer la scène musicale algérienne. Cette fougue s’est vite révélée fructueuse
et une multitude d’enregistrements discographiques, de concerts dans le pays et à
l’étranger, d’actions de formation, a fait de cet ensemble un des fleurons de la culture
algérienne.
Culture et histoire de l’association musicale algéroise
A l’écoute de l’ensemble Essoundoussia, on est souvent surpris par le nombre
important de musiciens. L’auditoire occidental est peu attiré par ce type de formation.
Les groupes de musiques ethniques que le public parisien découvre chaque année
dépassent rarement les six à sept interprètes. L’acculturation “nécesssaire“ qui a
façonné et transformé le paysage des sociétés maghrébines n’est souvent pas pris en
considération par les producteurs de musique étrangers. La recherche d’esthétiques
anciennes garantit pour eux l’aspect folklorique des musiques traditionnelles, ce fait
se traduit par un rejet enbloc d’une certaine modernité à laquelle aspire la majorité
des musiciens maghrébins.
Pour tenter de concilier ces deux tendances contradictoires, j’ai demandé à Smaïn
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Hinni, président et chef d’orchestre de Essoundoussia, d’enregistrer deux noubas- avec un minimum de musiciens et en prise de son directe*. Le résultat est
extraordinaire : les musiciens (la plupart ont été formés dans l’esprit des grands
ensembles) ont, d’une part découvert le plaisir et l’art de s’écouter mutuellement, de
s’exprimer et d’échanger leur savoir-faire, et le public, d’autre part, par nostalgie ou
par goût, crée avec ces mêmes artistes une relation hédonique.
Dans cet enregistrement, l’ensemble Essoundoussia montre que les musiciens qu’il a
formés sont capables d’égaler leurs maîtres - j’entends par “égaler“ «avoir acquis le
même niveau de maîtrise de l’instrument et de l’interprétation des œuvres» … Les
choses sont différentes en matière de connaissance du répertoire.
On peut aussi se poser la question de savoir pourquoi à Alger et ailleurs, les chefs
d’orchestres veulent toujours rassembler le plus d’interprètes possibles, la réponse à
cette question n’est pas simple, j’avancerai trois arguments pour tenter d’y répondre.
Il est étonnant de voir que “consciemment ou inconsciemment”, Smaïn Hinni, tout
en voulant rendre hommage au personnage le plus illustre du mouvement associatif
musical algérien (Mahieddine Bachetarzi), rompt en même temps avec les dogmes
et l’histoire de ce mouvement. C’est sur un point précis, celui de l’élargissement des
formations musicales que s’est faite l’histoire contemporaine de la musique algéroise.
S’agit-il d’une remise en question des principes pédagogiques associatifs, inaltérables
depuis la naissance de la société El Moutribia dans les années trente ? Est-ce une prise
de conscience ? Celle qui consiste à privilégier l’esthétisme au profit de la pédagogie
? L’institution musicale, financée et contrôlée par l’Etat, n’est elle pas en perte de
vitesse face à une nouvelle recherche du “beau“ ? Toutes ces questions semblent
exprimer “qu’un retour aux valeurs anciennes est primordial, même si ces valeurs
sont contraires aux statuts associatifs“. Tous les dirigeants d’associations musicales le
proclament. Je dirais simplement pour ma part que la puissance de l’art l’emporte, une
fois de plus, face aux stratégies idéologisantes des pouvoirs.
Le second argument s’avère aussi important. Tout en préservant la structure moderne
de formation et de production musicales, les responsables des groupes reviennent aux
notions du mérite et de l’élite. Permettre aux seuls élèves en fin de cycle de formation
de participer aux différentes manifestations crée un certain élitisme vigoureusement
combattu par les associations d’amateurs. On considère aujourd’hui que seuls le
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travail et l’assiduité mènent à la maîtrise de la musique. Il est même sournoisement
toléré - autre interdit associatif - de fréquenter les maîtres non-enseignants.
Est-il nécessaire de dire, dans un troisième temps, que la production de la musique
dans le monde occidental est soumise aux conseils des spécialistes. Scientifiques
ou mélomanes avertis, ces intermédiaires conçoivent des programmes adaptés aux
“goûts“ du public local. Cela va souvent à contre courant de l’évolution de la musique
dans les pays du sud méditerranéen. Cette assistance artistique oblige les artistes à
réorganiser les ensembles et à travailller sérieusement les œuvres. Le consensus est
parfois difficile à atteindre, mais quand les projets se réalisent enfin, producteurs,
artistes et conseillers goûtent tous à la même passion, celle de la musique dans l’intimité.
A propos de la terminologie de la nouba
La plupart des musicologues semblent unanimes sur le sens du terme “nouba“.
Rappelons que la nouba est le protocole qui gére une suite de pièces instrumentales
et vocales selon un agencement de modes et de rythmes bien particuliers. Depuis la
naissance de ce protocole en Andalousie au Moyen-Age, toutes les composantes de la
nouba ont subi plus ou moins de changements, seul le nom est resté.
Les écrits des historiens et des musicologues arabes du Moyen-Age définissent la
Nawba comme une alternance de musiciens de cour rivalisant devant les princes et les
monarques pour obtenir des faveurs.
La racine Nâba, qui signifie “survenir, remplacer, alterner“, semble ne pas avoir de
rapport étymologique avec la suite musicale telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Le tour de chant devant la cour est une chose révolue, et même si cette manifestation
avait régulièrement lieu autrefois, il est difficile d’admettre l’idée d’une alternance où
des musiciens rivaux devaient respecter un ordre de mouvements, de rythmes et de
modes.
La Niâba, autre substrat du verbe Nâba, est une autorisation que les poètes
professionnels accordaient aux musiciens qui interprétaient leurs compositions…
Droits d’auteur oblige.
La notion d’alternance sur laquelle est fondé le concept de nawba me paraît donc
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inadéquate. Par contre, quand on observe le verbe Intâba - dont la racine est toujours
Nâba - et qui signifie “atteindre quelqu’un, s’emparer de l’esprit de quelqu’un, “trotter
dans la tête” de quelqu’un, “envahir quelqu’un sentimentalement” on peut se poser
de sérieuses questions. Car dans ce contexte sémantique, la notion de Tarab, notion
fondamentale de la musique arabe et persane, est tout à fait adaptée. Le Gh’râm des
maghrébins, équivalent du Tarab chez les Levantins, énonce l’idée de passion. La
passion est un concept clef et quasiment intemporel. Ceci peut expliquer l’immuabilité
du terme Nawba pendant sept siècles.
Si la Nawba est, du point de vue technique un ensemble de matériaux
mélodiques, rythmiques et poétiques, du point de vue affectif et métaphysique, elle est
l’émotion qui envahit toute personne initiée. Pour l’apprentissage de la musique et la
pérénité de la tradition orale, maîtres et disciples doivent totalement s’investir dans cette
musique par passion et y trouver un lien affectif profond. La musique doit véritablement
“habiter“ les apprentis musiciens pour leur permettre de mémoriser les centaines de
pièces du répertoire et d’en restituer toutes les dimensions.
La Nouba Maya
On retrouve dans la Nouba Maya tous les ingrédients de la suite musicale andalouse
algéroise. Les mouvements Mçaddar, B’taïhi, Darj, Insiraf et Khlâç (Largo, Andante,
Andantino et Final) sont entrecoupés d’interludes instrumentaux appelés Kriçi . Les
soli instrumentaux sont placés entre le troisième et le quatrième mouvement. Cette
tradition permet aux musiciens de se reposer avant d’entreprendre la deuxième
partie de la cérémonie musicale. Il est également de coutume à Alger d’interpréter
des Inklâbât’, courts poèmes assez vifs qui donnent le ton et remplacent souvent la
Touchia, le prélude instrumental.
Les cinq mouvements cités plus haut n’ont pas dans la çanaa algéroise la signification
et l’importance qu’ils ont dans les traditions classiques de l’Est et de l’Ouest algérien.
Ce sont en réalité deux grands mouvements regroupant cinq sous mouvements. Le
premier englobe le M’çaddar, le b’taïhi et le darj. Les trois ont un même rythme
binaire, qui va crescendo. Dans ce contexte il est parfois difficile de faire, par exemple,
la différence entre un B’taïhi et un Darj . Le seul moyen d’identifier les pièces est de
revenir à la métrique et à la structure du poème.
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Les voix féminines : une ère nouvelle dans le chant arabo-andalou
Quand on écoute l’ensemble Essoundoussia, on ne peut manquer d’être attiré par le
mélage de voix masculines et féminines. L’intégration des femmes dans la musique
date des années soixante-dix. Cette expérience instaurée en Algérie par la société El
Mossilia n’était pas la première du genre. Bien avant elle, la Rachidia de Tunis avait
créé des choeurs mixtes.
Le but recherché à travers cette nouvelle organisation de la musique n’était sans
doute pas d’ordre esthétique. Ni la classification des voix, ni l’adaptation des œuvres
n’avaient fait l’objet de réflexions préalables. Le but de cette action était de marquer
une nette distinction entre l’aspect éducatif des associations et l’activité des groupes
professionnels où les femmes n’avaient pas leur place…
L’introduction de voix féminines a changé radicalement l’économie sonore de la musique ; Il est vrai que le mélange des voix est couramment utilisé dans le chant choral,
mais la combinaison est bien étudiée. Elle regroupe généralement des soprani, des alti,
des ténors et des basses. Dans la musique arabo-andalouse le contexte est totalement
différent : la musique n’est pas polyphonique et rien n’a été changé dans les structures
mélodiques. Les modes sont fixés sur des tonalités prores au chant masculin.Jadis les
chanteuses avaient leur propre répertoire, elles ne s’accompagnaient que d’instruments à percussions, et si l’on n’entendait pafois un ou deux instruments mélodiques,
ils étaient accordés sur la voix de la chanteuse principale.
En fin de compte, les voix féminines ont fini par “s’adapter” aux voix masculines. Mais
comme elles sont placées à une octave supérieure et qu’il n’y a pas de véritables voix
de basses chez les hommes, on a l’impression que les voix féminines dominent dans
tous les cas. Il fallait donc démultiplier les voix d’hommes.
Un nouveau style de chant, basé sur la mixité des voix existe bel et bien aujourd’hui
et fait la spécificité des associations musicales. Il est l’emblème même de l’ensemble
Essoundoussia, et largement présent dans la nouba Mezmoum.
Taoufik Bestandji
* Tous les disques produits par l’ensemble Essoundoussia étaient, jusqu’à celui-ci,
enregistrés en re-recording.
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La Nouba Maya
1 Ist’ikhbâr Snitra 2 Touchia Maya 3 Mçaddar : Râni na’chaqak 4 Is’ikhbâr Moual 5 B’taîhî : Mâ Mak’sadî 6 Darj : Youkâlî T’oub 7 Insrâf : Sâfî Ett’ibrou 8 Ist’ikhbâr Qanoun 9 Insrâf : El Aînou T’encheb 10 Kh’lâç : Kam Wa Kam 11 Kh’lâç: At’ânî Min El Khouldi 12 h’lâç : Yaouma Kouna 13 Kh’lâç : Allah Yahdîk Solo instrumental
Ouverture instrumentale
1er mouvement
Solo vocal & instrumental
2ème mouvement
3ème mouvement
4ème mouvement
Solo instrumental
4ème mouvement
5ème mouvement
5ème mouvement
5ème mouvement
5ème mouvement
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Essoundoussia
The Nouba Maya
Essoundoussia was founded in 1986 in Algiers. The liberalisation of politics following
the 1980 reforms in Algeria allowed musicians to form more or less informal groups
to perform and train other musicians. Other musicians preferred to keep their status as
professional state musicians.
From the start Essoundoussia made distribution their priority. The directors wanted
the group to become known quickly so made a large number of recordings, performed
in the biggest festivals and took part in as many contests as possible... Their goal was
clearly to dominate the Algerian musical scene. This policy quickly paid off and this
group is now one of the jewels of Algerian culture.
Culture and history
When listening to Essoundoussia one is often surprised by the large number of
musicians. Western listeners are not particularly attracted to this type of group. The
ethnic groups that are discovered in Paris rarely count more than six or seven musicians.
The necessary acculturation that has shaped and transformed north African society is
not usually taken into consideration by western music producers. This emphasis on
traditional music and folklore has resulted in a massive rejection of the modernisation
that is aspired to by the majority of musicians from the maghreb.
I have attempted to reconcile these contradicting trends by asking Smaïn Hinni,
chairman and orchestra leader of Essoundoussia, to record two noubas with a small
number of musicians, in a direct take. The result is extraordinary: the musicians (most
were trained within large orchestras) discovered the pleasure and art of listening to
each other and exchanging their knowledge. The public, either by nostalgia or by taste,
created a hedonistic relationship with these same artists.
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We can also wonder why conductors in Algiers and elsewhere always bring together as
many musicians as possible. There is no easy answer and I see three possible reasons.
It is interesting to see that in his effort to pay tribute to the most illustrious personality
of Algerian musical associations, Mahieddine Bachetarzi, Smaïn Hinni has broken,
either consciously or unconsciously, with the dogma and history of this movement. The
growing size of orchestras is representative of modern musical tradition in Algiers. Did
this evolve from a questioniong of the teaching principles that had been unchanged since
the forming of the El Moutribia society in the 1930’s? Was it a rise of consciousness?
One that places aesthetics over pedagogy? Is the musical institution that is financed and
controlled by the State losing ground to the new tendency to search for «beauty»? All
these questions seem to express that «a return to former values is essential, even if these
values are contrary to the statutes of musical societies.» All directors of musical associations proclaim this. I will simply say for myself that the strength of the art itself once
again overcomes the ideological strategies undertaken by the State.
The second reason is just as important. While preserving the modern structure of musical
training and production, the leaders of musical groups are coming back to the notion of
merit and elitism. Amateur musicians strongly criticise the fact that only the final year
students are allowed to perform in concerts. They also tolerate that musicians associate
with non-teaching masters, which is forbidden by state associations.
It also needs to be said that musical production in the west is subject to the counsel of
specialists. These intellectuals and informed music lovers are intermediaries who design
programs that are adapted to local preferences. This often goes against the musical
trends of southern Mediterranean countries and forces the musicians to reorganise their
groups and rework their music. A consensus is often hard to reach. However, when
they finalise a project, the producers, musicians and counsels all are gratified with the
intimacy of the music.
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Nouba terminology
Most musicologists seem unanimous on the meaning of the word nouba. Nouba is the
protocol that defines a suite of instrumental and vocal pieces according to specific modes
and rhythms. From the birth of this protocol in Andalusia in the Middle Ages every part
of the nouba has undergone changes, only the name has remained.
Historians and musicologists of the Middle Ages defined Nawba as court musicians
competing with each other to gain the favour of princes and monarchs. The root Nâba
which means «to come about, replace, alternate» does not seem to have any relationship
with the musical suites that we know today. The time of alternating court singers is
now long gone. While it was a common practice for musicians to take turn playing, it
seems hard to accept that the different musicians would respect an order of movements,
rhythms and modes.
The Niâba, another substrate of the verb Nâba, is an authorisation that was given by
poets to musicians who wanted to put their poems to music... a copyright.
It therefore seems that the idea of alternation on which the nawba is founded is not
appropriate. On the other hand, when we look at the verb Intâba - which also has Nâba
for root - and means «waiting for someone, to capture one’s mind, to run through one’s
mind, to overwhelm someone with feeling» we are getting closer. In this context Tarab,
a fundamental notion of Arab and Persian music is well adapted. The Gh’râm of the
maghreb, equivalent to the Tarab further east, gives the idea of passion. Passion is a key
concept and almost (intemporel). This can explain how the term Nawba has lasted over
seven centuries.
From the technical standpoint the nawba is a set of elements including melody, rhythm
and poetry. From the metaphysical standpoint, it is the emotion that invades everyone
who is initiated into the art. Those who study the music and perpetuate the oral tradition, masters and disciples, must be totally invested and feel a deep affective link. The
musicians who are learning the art must be inhabited by the music so that they may
memorise the hundreds of pieces contained in the repertory and restitute them in
their full.
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The Maya Nouba
We find all the ingredients of the Algiers Andalusian musical suite in the Maya Nouba.
The Mçaddar, B’taïhi, Darj, Insiraf and Khlâç movements (Largo, Andante, Andantino
and Final) are interspersed with instrumental interludes called Kriçi. The instrumental
solos are placed between the third and the fourth movement. This gives the musicians
a chance to rest before the second part of the musical ceremony. It is also a custom in
Algiers to interpret the Inklâbât, short poems that set the tone and often replace the
Touchia, the instrumental prelude.
The five movements mentioned above do not have the same meaning and importance
that they are given in classical music in the East or West of Algeria. These are actually
two long movements that combine five sub-movements. The first includes the M’çaddar,
the b’taïhi and the darj. The three have the same binary rhythm, that goes crescendo. It
is therefore sometimes difficult to hear the difference between one sub-movement and
another. The only way to identify a piece is by going back to the metrics and structure
of the poem.
Female vocals: a new era in Arab-Andalusian song
When you hear Essoundoussia you can only notice the pleasant mix of masculine and
feminine voices. Women were integrated into music in the 1970’s. The El Mossilia
society was among the first to initiate women into their group but it was the Rachidia
society of Tunis that first did so with a mixed chorus.
The societies did not introduce women into their groups for musical reasons. There was
no previous research done to classify voices nor to adapt the repertoire. The purpose was
to make a clear distinction from the educational aspect of independent societies and the
professional groups which did not include women...
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The introduction of female voices radically changed the sound of this music. It is true
that such mixing of voices is commonly used in western choirs but the combination
is well balanced. There is generally a soprano group, alto, tenors and basses. This is
very different in Arab-Andalusian music: the music is not polyphonic and nothing was
changed in the melody structure. The modes are defined for tones that are specifically
masculine.
Before, there was a specific repertory for female singers who were accompanied only by
percussions. Sometimes one or two other instruments would play the melody but they
were tuned to the voice of the lead singer.
At the end of the day, the female voices adapted to male voices. However, since women
sing one octave higher and there are no true basses in these groups, it seems that the
females voices are always dominant. To balance this out they increased the number
of male singers. Today there is a new style of song based on a mix of voices that is
specific to musical societies. This is the emblem of Essoundoussia that is widespread in
the Mezmoum nouba.
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Mçaddar maya
Sans nul douteje t’aime
Je t’adore, toi sœur de la lune, toi qui ressemble à une gracieuse gazelle
Fais moi la grâce d’une rencontre ! ô ma biche
Je t’aime depuis toujours, jamais je ne t’oublierai, ô mon astre éclatant
Si jamais tu te détournais de moi
Tu le regretterais à la longue
Je te dévoilerais alors ce qui était caché
et te dirais que le temps n’a rien changé à mon amour pour toi
je te le jure par Dieu et son prophète.
Mçaddar maya
Without a doubt I love you
I adore you, you sister of the moon, you look like a graceful gazelle
Grant me an encounter! Oh my doe
I have always loved you, I will never forget you, Oh my shining star
If ever you turn away from you
You will end up regretting it
Then I will show you what was hidden
And I will tell you that time has not altered my love for you
I swear it before God and his prophet.
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Ist’ikhbâr Moual
De toute mon âme s’élève une voix
Qui veut exprimer l’amour que je te porte
le feu qui me consume !
Mon cœur est meurtri ! Mes larmes en sont le témoignage.
Ist’ikhbâr Moual
From the bottom of my soul a voice rises
that wants to express the love I have for you
the fire that consumes me!
My heart is wounded! My tears attest to it.
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B’taîhî maya
Mes amis je n’aspire qu’à m’isoler
avec celle que je désire
En compagnie de sveltes jeunes filles, d’un tar, d’un luthet d’un rbâb
à la lulière des bougies
pendant que, de main en main, les coupes de vin rosé, pareilles à ses joues, circulent
Et près de nous une source
Qu’elle est belle l’eau qui jaillit du rocher !
et mon aimée est la plus belle d’entre ses compagnes.
Elle est unique ! Puisse Dieu lui garder toujours son allure sans pareille !
B’taîhî maya
My friends, I only wish to be alone
with the one I desire
In the company of slim young girls, a tar, a lute and a rebab
in candlelight
while, from hand to hand, the cups of rosé wine, the same color as her cheeks, go round
And near us is a source
How beautiful the water is coming out of the rock!
and my beloved is the most beautiful of all the girls.
She is unique! May God keep her always so beautiful!
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Darj maya
On me dit : repends toi égaré !
en vérité comme l’on est injuste envers moi !
Comment me repentir ? J’ai perdu le sommeil car je suis amoureux
Que reprocher à celui qui aime ?
Il n’existe rien de plus doux et de plus délicieux que le vin
servi par un échanson et dégusté en bonne compagnie
bercé par ds chants mélodieux
mordoré est ce vin, suave et pétillant
Comment me repentir ? J’ai perdu le sommeil car je suis amoureux
Darj maya
I have been told: repent you lost soul!
How unjust they are with me!
How can I repent! I have lost sleep because I am in love
How can you blame he who loves?
There is nothing sweeter and more delicious than wine
served by a cup-bearer and tasted in good company
with sweet singing in the background
this wine is reddish-brown, smooth and sparkling
How can I repent? I have lost sleep because I am in love
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Insrâf (I) Maya
La saison verdoyante des fleurs est arrivée à la lumière
pure et limpide comme un fil d’or
Sèche elle est déjà porteuse de fruits
Telle la bien aimée qui s’offre sans pudeur
Viens mon échanson ! Sers nous la coupe parfumée
Profitons de cette heure propice qui précède l’aurore
Insrâf (I) Maya
The green season of flowers has come to light
pure and clear like a gold thread
Dry it already carries/bears fruit
Like the lover who offers herself without modesty
Come my servant! Serve us the perfumed cup
Let us take advantage of this moment that precedes dawn.
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Insrâf (II) Maya
Ses yeux m’ont fixé
Qui veut me réconforter aura bien du mal
Pour peu qu’il ait goûté à la passion
Il m’en offrirait des coupes pleines
Ce regard qui sans pitié m’a fixé
ce regard furtif, langoureux et brillant comme une étoile
me fait craindre de défaillir et de fondre
croyez moi mes commençaux
vermeille est sa joue
pourpres sont ses lèvres
dont je me désaltère
Pou peu qu’il ait goûté à la passion
Il m’en offrrait des coupes pleines.
Insråf (II) Maya
Her eyes transfixed me
He who strives to comfort me will have a hard time
If he has tasted of passion
Then he will fill my cup
Those pitiless eyes transfixed me
that furtive gaze, languorous and shining like a star
I am afraid I will faint and melt
Believe me
Vermillion are her cheeks
purple are her lips
where I drink
If he has tasted of passion
he will fill my cup.
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Kh’lâç(I) Maya
O comme son regard m’a fixé !
et personne pour comprendre, m’excuser et me plaindre
j’adrese ma plainte à celui qui connaît le secret de ma souffrance
A Dieu qui, peut seul me pardonner
L’amour m’a anéanti
il a envahi les profondeurs de mon âme
et ma bien aimée me dirige
j’adresse ma plainte à celui qui conna^t le secret de ma souffrance
A Dieu qui, seul peut l
me pardonner.
Kh’lâç (I)
Oh how she looked at me!
and no one to understand, to excuse me, to feel sorry for me
I address my complaint to he who knows the secret of my suffering
To God who, alone can forgive me
Love has anihilated me
it has taken over the deepest part of my soul
and my love directs me
I address my complaint to he who knows the secret of my suffering
To God who, alone can forgive me
- 19 -
Kh’lâç (II) Maya
Un don du ciel ! de l’Eternel
Une biche est venue du fleuve paradisiaque kawter
sa salive est douce comme unrayon de miel
sa bouche est belle comme une perle
et parfumée comme les grains d’ambre
Elle est là, rose parmi les coquelicots,
et se protège en clignant des paupières
Kh’lâç (II) Maya
Oh gift of heaven! of the Eternal
A doe came from the river of paradise, kawter
her saliva is sweet like a ray of honey
her mouth is like a pearl
and smells of amber
She is there, a rose among poppies,
and protects herself by fluttering her eyelashes.
- 20 -
Kh’lâç (III)
Un jour nous étions en bonne compagnie, en un lieu magnifique
unis, moi, la coupe et ma bien aimée
loin du mal et du regard des envieux
plongeant toujours davantage dans les délices
comment puis je patienter et vivre sans celle qui
s’est installée dans mon cœur;
Kh’lâç (III)
One day we were enjoying pleasant company, in a beautiful place
together, me, the cup and my love
far from evil and envious looks
plunging always deeper into the delicacies
how can I wait and live without the one who
has settled in my heart.
- 21 -
Kh’lâç (IV)Maya
Puisse Dieu te mettre sur la bonne voie
t’inspirer ma rencontre
et t’aider à ne pas t’éloigner
pour augmentermes tourments
Dieu peut te faire souffrir ma gazelle
comme tu m’as fait souffrir
Dieu ! Pardonnez ce grand amour
j’implore Dieu ! J’implore Dieu
pour qu’il me rende mon esprit envolé!
Dieu ! Toi qui pénètre les secrets
et ce qu’il est possible de dire.
Mon cœur, seul parmi les autres, quitte mon corps
Sachez vous quil’ignorez
que contre ce grand amour nul ne peut lutter
Le soir comme au lever du jour
Tu tireras profit de tes réjouissances.
Sois tendre et généreux envers ma défaillance
Dieu est éternel.
Kh’lâç (IV) Maya
May God set you on the right track
inspire you to meeting with me
and help you to stay near
to increase my torment
God can make you suffer my gazelle
like you made me suffer
God! Forgive this great love
I beg you God! I beg God that he give me back
my spirit that has flown away!
God! You who knows the secrets
and what can be said.
My heart, alone, leaves my body
Let it be known
that no one can fight against this great love
At night as at dawn
you will benefti from your rejoicing.
Be tender and generous with my failings
God is eternal!
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Traduit de l’arabe par
Boulenouar Abdessemed
Alger 1995
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Les musiciens :
Hini Smaîn
Kateb Nadji
Aliane Nour-eddine
Nouar Youcef
Azzoug Rabah
Bekadi Brahim
Kebladj Djamel
Zaarir Hocine
Djedaîa Nacer
Ghazi Khaled
Cithare et Direction d’orchestre
R’beb et Soliste Vocal
Oud et Soliste Vocal
Mandoline et Soliste Vocal
Ney et Chœur
Alto et Chœur
Alto et Chœur
Alto et Choeur
Darbouka et Chœur
Tar et Chœur
Les voix féminines :
Marniche Mounia
Marniche Samia
Nouacer Amel
Dif Fazilet
Prise de son :
Senoussi Mamoune, studio «Office Riadh El Feth», Alger 1995
Poèmes traduits par : Abdessemed Boulanouar
Calligraphie arabe et sélection iconographique : Taoufik Bestandji
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Mahieddine Bachetarzi
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