boiteries et maladies du Pied - Chambre d`Agriculture des Deux

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boiteries et maladies du Pied - Chambre d`Agriculture des Deux
COLLECTION THEMA
RÉSEAUX D’ÉLEVAGE POUR LE CONSEIL ET LA PROSPECTIVE
boiteries et maladies du Pied
les dépenses de santé dans les élevages bovins lait
de Poitou-Charentes
les troubles locomoteurs constituent par leur fréquence et leur
impact économique global le troisième trouble de santé en
élevage laitier après les troubles de la reproduction et les
infections intra-mammaires. Chez les éleveurs enquêtés, les
boiteries représentent un coût moyen de 5 € /vl /an soit un peu
plus de 6 % du coût vétérinaire total.
Origine
Les boiteries sont dues à 90 % à des
maladies du pied, mais d’autres
origines sont possibles : arthrite,
tendinite, choc… Les lésions du pied
sont nombreuses et variées. Elles sont
associées à trois maladies principales :
le fourchet, la fourbure (subclinique
ou chronique), la dermatite digitée ou
maladie de Mortellaro. Les boiteries
ont une origine multifactorielle
(traumatique, infectieuse,
métabolique).
Calculez les pertes
économiques engendrées
par les boiteries de votre
élevage en vous rendant sur
les sites internet suivants :
www.casdarsante.com
www.idele.fr
Trois grands groupes de facteurs de risque de boiterie peuvent
être distingués : ceux liés à l’habitat, à l’alimentation et à la conduite
sanitaire. Ils sont différents selon les maladies du pied. Ainsi, la
composante infectieuse du fourchet, de la maladie de Mortellaro
et du panaris implique un défaut d’hygiène des sols, alors qu’il n’est
pas à suspecter lors de fourbure subaiguë ou chronique.
La fréquence des boiteries en troupeaux bovins laitiers est en
constante augmentation : en 2001, en moyenne 10,9 cas pour 100
vaches présentes/an (Fourichon C et al, 2001) et en 2006, 25-30
cas pour 100 vaches/an (Toczé C. 2006). Cette augmentation est
à mettre en relation avec l’évolution des logements (logettes
notamment) et de la structure des troupeaux.
Prévention
Les mesures de prévention sont basées sur l’hygiène des aires de
vie des animaux, la limitation des risques traumatiques, le respect
des apports alimentaires afin d’éviter le risque d’acidose, les déficits
énergétique et les carences marquées en minéraux, une prévention
des boiteries par un parage régulier et des traitements adaptés.
> Tableau 1 : Boiteries - Facteurs de risque
Maladie
Fourbure
Fourchet
Mortellaro
Risques liés à l’habitat
- diminution du temps de couchage des animaux
- traumatismes lors des déplacements des animaux
- humidité et défauts d’hygiène des aires de vie
+++
+
-
+++
+
+++
+++
Risques liés à l’alimentation
- acidose subaiguë du rumen
- déficit énergétique
- carences marquées en minéraux
+++
+
+
+
+
+
+
Risques liés à la conduite sanitaire
- sous-détection des boiteries ou méconnaissance des lésions
- mesures de prévention absentes ou inadaptées
- traitements absents ou inadaptés
+
+
+++
+
+++
+++
+
+++
+++
Poitou-Charentes
1
les déPenses de santé dans les élevaGes bovins lait de Poitou-Charentes
- boiteries et maladies du Pied
imPaCt éConomique
• elle porte une atteinte évidente au bien-être des animaux :
phénomènes d’hyperalgésie associés et modifications du comportement,
• la réalisation des soins représente une surcharge de travail
importante.
Selon l’étude réalisée par V. JEGOU en 2006, l’impact économique
“boiteries” est de 12 €/VL :
- 4 €/VL de coût de maîtrise, ce qui confirme les données PoitouCharentes,
- 8 €/VL de pertes indirectes, soit un manque à gagner deux fois
supérieur aux frais engagés.
Pour ce type de pathologie, les déplacements du vétérinaire sont
assez rares, souvent à l’occasion d’une autre consultation sur
l’élevage, ce qui explique que les honoraires ne représentent que
14 % des dépenses liées aux boiteries.
Les conséquences néfastes des troubles
locomoteurs sont multiples :
• la baisse d’ingestion, consécutive à
l’affection elle-même et aux difficultés
de l’animal à se déplacer, est à l’origine
d’une baisse des performances de
production, et le risque de réforme
anticipée est plus élevé chez un animal
boiteux,
• les performances de reproduction
sont aussi impactées : l’inactivité
ovarienne est liée à l’amaigrissement et
la non détection des chaleurs à la
douleur lors des déplacements,
> Tableau 2 : Pertes et manques à gagner liés aux boiteries
Source : Philippe ROUSSEL, Institut de l’Élevage, 2009
Baisse de
production
kg/an
Type d’expression clinique
Probabilité de réforme
Reproduction
sur une année pour
Augmentation de
une vache atteinte
l’intervalle vêlage-vêlage
(dont % d’euthanasie)
(en jours)
Boiteries non repérées et non soignées
100
0
3
Boiteries légères (boiteries dont la durée
d’expression clinique est inférieure à 8 jours)
50
4 % (2 %)
6
Boiteries modérées (boiteries dont la durée
d’expression clinique est comprise entre 8
jours et un mois)
250
8 % (2 %)
15
Boiteries sévères (boiteries dont la durée
d’expression clinique dépasse un mois et
implique notablement la réforme)
800
35 % (10 %)
30
> Tableau 3 : Boiteries - Localisation - Symptômes - Traitement
Pathologies
Panaris
espace inter digitée
Symptômes
Traitement
Pied enflé
nettoyage et antiseptique
nécrose de l’espace inter digitée
antibiothérapie
espace inter digitée
talon
Fissure en v au niveau du talon
Dermatite digitée
ou
Maladie
de Mortellaro
Peau au niveau de la
couronne à l’arrière
lésion ovalaire rouge framboise
nettoyage
bourrelet blanchâtre
désinfection
Poils hirsutes agglutinés en
Pédiluve avec formulations
périphérie
commerciales autorisées
sabot
1er stade : trace de sang dans
la corne de la sole
2e stade : corne molle
consistance betterave
3e stade : déformation interne
des os du pied ; bascule de la
troisième phalange
Commentaires
boiterie d’apparition
brutale et marquée
Complications possiParage
bles vers décollement
Pédiluve avec formulations de la corne du talon
commerciales autorisées très fréquente dans
les régions humides
Fourchet
Fourbure
2
Localisation
bain de pied dans l’eau
froide
Parage du pied
Grande contagiosité
boiterie pouvant
être marquée
attention aux
acidoses, aux sols
durs
les déPenses de santé dans les élevaGes bovins lait de Poitou-Charentes
AVIS D’EXPERT :
DENIS PELLETREAU,
PAREUR, SPLV (85)
Quelles sont les pathologies des pieds
que vous rencontrez le plus
fréquemment ?
1 - La Dermatite digitée (ou maladie de
Mortellaro) :
C’est une maladie purulente dégageant une
odeur particulière, avec l’apparition de
taches rondes et rouges (grosses comme une
pièce de 2 € en fonction du stade de la
maladie) au niveau de la zone digitée du
talon. Cette maladie est très contagieuse. Le
rôle du pareur sur les animaux atteints est :
- un parage fonctionnel préventif,
- un nettoyage, une désinfection de la plaie et
si nécessaire un bandage adapté avec une
bande aérée.
L’objectif du pareur et de l’éleveur est
d’intervenir le plus rapidement possible après
détection des premiers symptômes de
boiterie. Le rôle du pareur est
d’assécher la plaie (attention les
pansements trop hermétiques sont
fortement déconseillés). L’éleveur devra
poursuivre avec des passages en pédiluve de
tout le troupeau.
- boiteries et maladies du Pied
3 - Le décollement de la sole ou des talons
- Le fourchet (dermatite inter digitée) : pathologie très fréquente dans les
élevages en zéro pâturage à forte densité d’animaux dans les bâtiments.
Elle peut engendrer des décollements de talons. Un à deux parages
préventifs par an et un pédiluve tous les mois (surtout après le parage)
sont préconisés en traitement.
- La fourbure chronique due à des problèmes d’alimentation ou de
logement.
- Le clou des rues provoqué par les cailloux dans les chemins d’accès aux
pâturages ou par les bétons délabrés de mauvaise qualité.
- Le panaris est une boiterie aiguë pouvant apparaître en 24 heures, avec
un gonflement à l’avant et au-dessus du talon, au niveau de la couronne.
Pour cette pathologie le pareur n’a aucun rôle d’intervention. Par contre
l’éleveur devra intervenir le plus rapidement possible pour une guérison
rapide par une injection d’antibiotique ou d’anti-inflammatoire.
Qu’est-ce qu’un bon pédiluve ?
Le pédiluve est efficace s’il est bien utilisé, et avec des produits adaptés. La
meilleure utilisation sera en sortie de salle de traite avec un passage de
100 à 120 animaux par pédiluve. La fréquence recommandée pour un
élevage sans problème est de un toutes les 3 à 4 semaines.
Recommandation personnelle : les bacs fixes dans les couloirs de
sortie de salle de traite sont souvent très difficiles à nettoyer et
peuvent être source de contamination les jours où ils ne sont
pas utilisés. Pour ce qui concerne les tapis mousse, le produit utilisé ne
monte pas toujours suffisamment haut sur le pied de l’animal au niveau de
la couronne.
Attention à l’utilisation du Formol et du sulfate de cuivre qui
sont en cours d’interdiction par la législation pour des raisons
environnementales (pour le sulfate de cuivre), et de santé
(cancérigène pour le formol).
Conclusion
Quelle que soit la taille du troupeau, tous les élevages devraient être
équipés d’un moyen de contention (cage mobile ou fixe, couloir équipé d’un
système de levage des pattes avants et arrières avec accès des deux côtés
de l’animal) afin d’intervenir en toutes sécurité (pour l’animal et l’éleveur)
pour toutes les pathologies de l’animal (boiteries, vêlage, vaccination,
traitement individuel). L’objectif est d’intervenir le plus rapidement possible
afin de faire un premier diagnostic pour soulager l’animal au plus tôt (sans
antibiothérapie) en attendant l’intervention d’un professionnel.
2 - L’abcès de la sole (“La Cerise”)
C’est un bourgeon de chair dans la sole
occasionné par une surcharge de l’onglon. La
principale cause est une acidose datant
d’environ 2 mois avec mauvaise qualité de la
corne. On retrouve la Cerise la plupart du
temps sur les onglons internes des pattes
postérieures et sur les onglons externes des
pattes antérieurs. Le traitement préconisé
pour ce type d’animaux est un parage
plus fréquent, 2 à 3 fois par an.
3
TÉMOIGNAGE
D’ÉLEVEUR : OLIVIER
GOURDEAU, ÉLEVEUR
À LHOMMAIZÉ (86)
Il y a 3 ans, je ne faisais
aucun parage sur mes
vaches. J’avais quelques problèmes de
boiteries, mais je n’y prêtais pas trop
attention. A cette époque, j’ai suivi une
formation à la Chambre d’agriculture sur les
boiteries et le parage.
Suite à cela, je me suis rendu compte que
quelques vaches avaient de la dermatite et
j’ai fait venir un pareur. Après sa première
visite, j’ai gagné près d’un litre de lait par
vache. J’ai également mis en place un
pédiluve et je n’ai plus d’appréhension à
soulever une patte.
Ce n’est pas possible de faire venir un pareur
pour seulement 1 ou 2 vaches, donc c’est à
moi de me débrouiller. Je bloque la vache
dans une logette ou au cornadis pour pouvoir
y regarder. En général, ce n’est pas grand
chose et j’arrive à traiter le problème. Si ça
me paraît trop compliqué, je fais intervenir
mon vétérinaire.
- boiteries et maladies du Pied
Depuis 2 ans, j’ai un robot de traite et
je me suis rendu compte qu’il est indispensable de ne pas avoir de problème
de patte. Dans ce système, on multiplie
l’impact de la boiterie : la vache va moins à
l’auge et surtout ne va plus se faire traire.
J’ai observé que les problèmes de pattes
surviennent plutôt par crises. Il y a une
corrélation entre boiterie et alimentation, je
l’ai bien observée l’année dernière lorsqu’il y
a eu un épisode d’acidose sur le troupeau,
des boiteries sont apparues ensuite.
Aujourd’hui, je pense faire venir le pareur
deux fois par an, car j’ai plus de dermatites
et avec le robot, il faut minimiser les
problèmes de pattes. Dans mon système,
c’est un “investissement” qui s’avère rentable.
Pour en savoir plus
• Harmony BOUTIN Chambre d’agriculture
de la Charente
Tél. 05 45 84 09 28
• Christophe MAUGER Chambre d’agriculture
de la Charente-Maritime
Tél. 05 46 50 45 00
• Anne-Laure GOMAS Chambre d’agriculture
des Deux-Sèvres
Tél. 05 49 77 15 27
• Arnaud MOUILLET Chambre d’agriculture
de la Vienne
Tél. 05 49 36 33 63
Coordination régionale :
• Benoît RUBIN - Institut de
l’élevage
Tél. 02 40 07 73 13
Dossier réalisé avec l’appui de
Philippe ROUSSEL (Institut de
l’élevage), Philippe DUBOIS
(vétérinaire conseil
COPAVENIR) et Xavier
POUQUET (docteur
vétérinaire, Secondigny 79)
les réseaux d’élevaGe
les réseaux d’élevage sont un dispositif partenarial associant des éleveurs et des ingénieurs
des Chambres d’agriculture et de l’institut de l’élevage.
les Partenaires FinanCeurs
le travail d’enquête réalisé en 2010 a reçu l'appui financier du Casdar et de Franceagrimer.
avec la contribution financière
du compte d'affectation spéciale
"Développement agricole et rural"
Octobre 2011
document édité par l’institut de l’élevage - 149 rue de bercy, 75595 Paris cedex 12
www.idele.fr - Pub ie : 0011 55 030 - isbn : 978-2-36343-118-9
Création : bêta ¨Pictoris - Réalisation : Corinne maigret (institut de l’elevage) - Crédit photo : Christophe mauger (Ca 17) - arnaud mouillet (Ca 86) - Philippe roussel (institut de l’élevage) - Jean-marie nicol
les déPenses de santé dans les élevaGes bovins lait de Poitou-Charentes

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