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Journal Africain d’Imagerie Médicale, 2014, 6,(2)
Published Online ** 2014 (http://www.jaim-online.net/)
Place de l’imagerie médicale dans la gestion du pré- et post- mastectomie chez la femme
congolaise
Place of medical imaging in the management of pre and post mastectomy in congolese women
Gertrude Luyeye Mvila, MD1,2, B. Longo-Mbenza, PhD3, Fons Verdonck, MD, PhD4, Erik Vanlimbergen, MD, PhD5, Guy Marchal, MD, PhD2,6, Chantal Van Ongeval, MD, PhD2,6
1
Hôpital Général de Kinshasa, Université de Lubumbashi, RD Congo
Service d’imagerie et pathologie, KU Leuven, Louvain, Belgique
3
Université de Kinshasa, Walter Sisulu University in South Africa
4
Faculté de Médecine, KU Leuven, Leuven, Belgique
5
Service de Radiothérapie et oncologie, UZ Leuven, Louvain, Belgique
6
Service de Radiologie, UZ Leuven, Louvain, Belgique
2
Correspondance
Dr Gertrude Luyeye Mvila ; E-mail: [email protected]
RESUME
But: Démontrer l’importance des examens d’imagerie médicale et du soutien familial avant et après une mastectomie
pour cancer de sein.
Matériel et Méthode: Entre mars 2010 et décembre 2012 une campagne de sensibilisation contre le cancer de sein menée à Kinshasa (RD Congo) a suivi des femmes avec cancer de sein avant et après mastectomie. Le follow-up était fait
d’échographies abdominales et de radiographies du thorax face et profil. La radiothérapie, la chimiothérapie ainsi que
l’hormonothérapie étant souvent indisponibles, le seul traitement possible qui reste pour ces femmes avec cancer du
sein est la mastectomie.
Résultat: 497 sur 4315 participantes ont rapporté une masse palpable, dont 162 se sont présentées à l’hôpital pour une
mammographie, une échographie mammaire et une biopsie écho guidée. 47% (76/162) ont une tumeur au stade III. 22%
(21/162) n’ont pas eu de traitement: 4 sont décédés 2 ans après le diagnostic, 7 ont refusé le traitement par mastectomie,
10 n’ont plus jamais donné signe de vie. Seules les femmes bien entourées par leur famille ont suivi un traitement complet.
Conclusion: Si l’échographie et la mammographie sont disponibles avec un personnel formé, les tumeurs du sein seraient découvertes plus petites et, dans l’absence de radio- ou chimiothérapie, l’impact d’une mastectomie sur le suivi
serait plus grand.
Les femmes devraient être encouragées dans leur décision du traitement, non seulement par leurs familles, mais également par le gouvernement.
Mots-clés: cancer du sein, mammographie, échographie, mastectomie, suivi, tabou
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G. Luyeye Mvila
ET AL
SUMMARY
Objective: To show the place of imaging and of the support of the family before and after the decision of treatment (in
case of mastectomy) for breast cancer.
Methods and materials: Between March 2010 and December 2012 an awareness campaign was conducted in Kinshasa
(DR Congo); women who felt a palpable mass were advised to go for a mammography, ultrasound and biopsy if necessary. For the diagnosis of metastases, ultrasound of the abdomen and chest X-ray were performed. Because neither radiation therapy nor chemo-hormonal treatments are available in Kinshasa, mastectomy was the only available treatment.
An evaluation of the stage of breast cancer and the number of women who followed treatment was done.
Results: Four thousand three hundred and fifteen women participated in the campaign and 497 women felt a palpable
mass, 162 of them consulted the radiologists for a mammography, ultrasound and biopsy. Of these 162 patients 47%
(76/162) presented with a stage III cancer. This study showed that 22% of the women (21/162) never received any
treatment: 4 women died within 2 years after diagnosis, 7 women refused a mastectomy and 10 never showed up again.
Only women who were well supported by their husband and family underwent a complete treatment.
Conclusion: If medical imaging tools were available, malignant tumors would be smaller at diagnosis and mastectomy
could have a larger impact on the survival. Women should be supported during diagnosis and treatment; not only by
their family and friends but by the government as well by means of financial support.
Key-words: Breast cancer, mammography, ultrasound, mastectomy, follow-up, taboo
1. INTRODUCTION
Le cancer du sein est, avec le cancer du col de l’utérus,
le cancer le plus fréquent chez la femme en Afrique subsaharienne.1, 2 Il est la première cause de mortalité parmi
les cancers gynécologiques des pays développés, alors
qu’en Afrique subsaharienne, il talonne de très près le
cancer du col cervical.1-3 Malgré que la prévalence du
cancer du sein soit 4 fois plus élevée dans les pays développés en comparaison avec l’Afrique et l’Asie, elle
augmente également dans les pays en développement.4-7
En Afrique subsaharienne, le cancer du sein atteint souvent les jeunes femmes. Exactement comme chez les
femmes afro-américaines où des études américaines ont
démontré que chez les femmes de moins de 35 ans,
l’incidence du cancer du sein est plus élevée par rapport
aux Américaines de type caucasien du même âge. Ces
études ont aussi démontré que le taux de mortalité est
plus élevé parmi les femmes afro-américaines, comptant
pour environ 36.4 décès pour 100,000, ce qui représente
un taux de 37% plus élevé de décès chez les femmes de
moins de 50 ans.8-10
Dans les pays développés une stratégie de sensibilisation,
de dépistage par simple mammographie avec ou sans
échographie et de traitement précoce ont contribué à
améliorer la survie du cancer du sein.11, 12
Malheureusement, en République démocratique du
Congo (RDC) il n’existe pas d’archives nationales pour
le cancer en général. Dans ce contexte, une étude préliminaire sur le cancer du sein a récemment été réalisée à
l’Université de Kinshasa.13 Une étude sur le cancer du
sein a Rwanda montre le même problème
d’enregistrement: l’incidence du cancer du sein est esti-
mée à 12.3 pour 100,000 femmes, mais ceci est une extrapolation des résultats d’autres pays de l’Afrique. 14
Cette étude démontre non seulement qu’en Afrique les
femmes sont plus jeunes (48 contre 61 ans comme âge
moyenne en Amérique) et se présentent dans un stade
plus développé de la maladie, mais également que le
délai entre le diagnostic et le traitement est très long.15
En Afrique en général et au Congo en particulier, des
résistances culturelles freinent souvent le progrès de la
santé de la femme, surtout quand il s’agit de cancers gynécologiques qui constituent un sujet tabou. Sur le plan
national il n’existe pas encore une structure pouvant
prendre en charge la femme avec un cancer du sein et
aucun programme de sensibilisation n’a encore été créé.
Beaucoup d’hôpitaux n’ont pas d’appareil de mammographie (le tout premier n’a été installé qu’en 2009 à
l’hôpital général de Kinshasa); on en compte que 3 pour
une ville d’environ sept millions d’habitants. Une prise
de conscience des femmes est donc nécessaire afin de se
faire dépister par simple mammographie avec un bon
follow-up des examens d’imagerie médicale disponibles
et abordables.
Afin d’augmenter leurs chances de survie, elles doivent
rompre avec la stigmatisation qu’elles subissent après
une mastectomie, pour s’émanciper dans tous les domaines de la société.
La présente étude avait pour objectif d’évaluer la situation actuelle du traitement du cancer du sein à Kinshasa,
ainsi que l’influence du comportement des conjoints,
fiancés, partenaires et familles vis-à-vis des femmes qui
ont reçu le diagnostic du cancer du sein et qui doivent
subir un traitement chirurgical. L’autre volet était de
mettre en évidence l’importance des examens d’imagerie
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médicale abordables et simples non seulement pour le
dépistage, mais aussi pour le follow-up du traitement.
2. MATERIEL ET METHODE
Une étude prospective a été réalisée à l’hôpital Provincial Général de Kinshasa sur des patientes référées par de
nombreux centres médicaux de Kinshasa et du
Bas-Congo, mais également des provinces du Kasaï, du
Kivu, de Bandundu et de l’Equateur. Plusieurs campagnes de sensibilisation ont été organisées pendant lesquelles la notion de cancer du sein et la détection par
autopalpation ont été expliquées. Les patientes avec une
masse palpable du sein sont prises en charge par une
équipe composée de radiologues, oncologues, gynécologues et chirurgiens, des anatomopathologistes congolais et belges (Université de Gent), ainsi que des généticiens belges (KU Leuven). Le projet a commencé en
mars 2010.
Les coordonnées des patientes (âge, situation familiale),
les entretiens personnalisés, l’examen clinique ainsi que
les données de l’échographie, de la mammographie et de
la biopsie constituent le dossier médical. Les critères
d’exclusion sont: les masses normales et bénignes (Birads 1, 2) ainsi que le sexe masculin (tableau I).16
Pour la classification TNM des tumeurs (Tumor, Nodes,
Metastasis), seules les informations diagnostiques sur le
plan clinique et radiologique sont disponibles, à priori,
c’est la cTNM, vu que les renseignements après traitement ne sont que rarement disponibles du fait du non
suivi médical pour raisons diverses. Le stade I équivalait
donc à un nodule palpé au sein de moins de 2 cm mais
sans adénopathie axillaire de type métastatique objectivée cliniquement, pas à l’échographie, ni à la mammographie. Le stade II correspondait à un nodule mesurant
entre 2 et 5 cm sans visualisation d’adénopathie de type
métastatique. Le stade III correspondait à une masse de
plus de 5 cm avec présence d’adénopathie de type métastatique (présence d’adénopathie axillaire ou
sus-claviculaire hypoéchogène à l’échographie). Les
patientes avec une tumeur au stade IV avaient d’énormes
masses pour la plupart très évoluées et ulcérées avec des
métastases multiples; elles ont directement été référées
chez les oncologues après une échographie abdomino-thoracique et une radiographie de thorax face/profil.
Des entretiens approfondis avec les patientes sont entamés lorsqu’elles doivent subir une mastectomie, en présence des conjoints – si la femme l’accepte – ou avec les
membres de la famille (étant donné qu’en Afrique, les
familles sont généralement très soudées).10, 15
Le comportement de la femme et de son entourage est
noté avant l’annonce du diagnostic, avant et après
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l’amputation mammaire, ainsi que pendant toute la phase
de chimiothérapie et des examens d’imagerie médicale
pour exclure des métastases.
A Kinshasa il n’existe pas beaucoup d’hôpitaux avec une
facilité de chirurgie mammaire oncologique. Il y a un
seul hôpital privé avec une radiothérapie (pas toujours
disponible) et dans environ six centres la chimiothérapie
peut être administrée d’une manière compétente.
3. RESULTATS
Nos différentes campagnes de sensibilisation menées de
mars 2010 à juin 2013 ont permis d’entrer en contact
avec plus de 4,315 femmes parmi lesquelles 497 masses
ont été palpées. De ce nombre, 162 femmes se sont présentées à l’hôpital et toutes ont reçu une mammographie,
une échographie et une biopsie écho-guidée.
Dans la catégorie clinique stade I, on trouve seulement
des cas bénins (36/162, soit 22%) dont plus que la moitié
est constituée d’hyperplasie mammaire atypique et non
atypique.
On trouve 49 masses sur 162 (30%) au stade II, dont 18
cas malins et 31 bénins, composées de pathologie telle
que l’hyperplasie mammaire.
Au stade III toutes les masses sont des tumeurs malignes
(76 sur 162, soit 47%).
Une patiente se présentait avec un ganglion axillaire malin, prouvé histologiquement, mais sans visualisation
d’un cancer dans le sein c'est-à-dire stade 0 sur ses examens de mammographie ou échographie mammaire (tableau II).
Une fois que le cancer du sein est diagnostiqué par
mammographie, échographie et biopsie, les femmes
consultaient l’oncologue et le chirurgien (figure 1). Les
femmes (30% c.-à-d. 28/94) qui ont reçu un traitement
total ont été convaincues par nous d’accepter
l’amputation et la chimiothérapie (tableau II). Malgré
l’avis que le meilleur traitement consiste en une mastectomie combinée avec soit l’hormonothérapie, soit la
chimiothérapie (traitement complet), 45 femmes n’ont
reçu qu’un traitement partiel (chirurgie), tandis que 21
des femmes ont refusé à priori tout traitement. Ces
femmes disparaissent donc dès l’énoncé du traitement
pour éventuellement réapparaître plus tard, après avoir
cherché sans succès un traitement non mutilateur chez
des médecins traditionnels. Malheureusement à ce moment-là leur cancer se trouvait déjà à un stade trop avancé pour pouvoir encore réaliser un traitement curatif. Sur
les 17 femmes encore en vie mais n’ayant jamais reçu de
traitement, 7 sont âgées de moins de 50 ans qui refusaient l’amputation par crainte de stigmatisation et qui ne
voulaient pas non plus un suivi. Les autres 10 patientes
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n’ont plus jamais donné signe de vie et on n’a aucune
idée de ce qu’elles sont devenues (tableaux III et IV).
De ce groupe, 4 femmes ont refusé l’amputation pour des
raisons psychologiques, tels que la crainte de ne plus
pouvoir se marier ou d’être rejetées par l’entourage ou
par le conjoint (tableau IV).
Pour mieux comprendre l’impact du diagnostic du cancer
du sein sur l’attitude vis-à-vis du traitement, une description des 4 cas est faite.
La première patiente était Mlle B, âgée de 29 ans, qui
consultait pour une masse irrégulière et indolore au sein
gauche, avec des antécédents familiaux de cancer du sein
et où la présence du gène BRCA1 a été découverte. La
mammographie,
l’échographie
mammaire
et
l’anatomopathologie ont révélé un adénocarcinome ductal invasif avec des récepteurs hormonaux de triple négatif. Le traitement préconisé par l’oncologue (composé de
mastectomie et de chimiothérapie) a été refusé d’emblée;
le motif étant qu’aucun homme ne voudrait plus d’elle et
que son entourage se moquerait d’elle dès qu’il apprendrait qu’elle n’avait plus qu’un seul sein. Elle s’est présentée à nouveau plus de 11 mois plus tard pour se faire
traiter, mais une échographie thoraco-abdominale et une
radiographie du thorax a révélé déjà des métastases au
niveau des viscères, elle a décédé malheureusement
quelques semaines plus tard.
La deuxième patiente était Mlle M, âgée de 38 ans: adénocarcinome invasif du sein gauche, ER+PR+, Her2/Neu
négatif. Traitement proposé: mastectomie et chimiothérapie. La réponse était un net refus à cause de sa peur du
rejet de l’entourage, mais également de la peur de mourir
après une mastectomie. Elle a réapparu 8 mois plus tard
après avoir été persuadée par une autre patiente qui avait
subi une ovariectomie bilatérale pour traiter un cancer
ovarien. Elle a accepté le traitement proposé, mais finalement le traitement n’a pas commencé parce qu’elle ne
disposait pas de moyens financiers. Une intervention de
notre équipe a aidé à pratiquer cette mastectomie, mais
sans hormonothérapie. Le follow-up de l’imagerie pratiqué après six mois et une année n’a pas révélé de métastase.
La troisième patiente, Mlle NG, âgée de 49 ans et sans
antécédent de cancer était une mère célibataire de 3 enfants et fiancée. Chez elle on a diagnostiqué un DCIS
avec adénocarcinome ductal modéré au sein droit. Des
récepteurs hormonaux (ER 100% positif, PR 100% positif, Neu négatif, Ki 67<5%) permettraient d’entamer un
traitement. Or elle a refusé catégoriquement sous prétexte que son fiancé la quitterait si elle n’avait plus qu’un
sein et si elle perdait ses cheveux suite à la chimiothérapie.
La quatrième patiente était Mme DJ: âgée de 38 ans,
mariée et mère de 4 enfants, sans antécédent de cancer.
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Chez elle, on a diagnostiqué un DCIS au sein gauche.
Son mari l’accompagnait tant dans les consultations chez
l’oncologue qu’en imagerie médicale. L’amour et le soutien de son mari lui ont permis, après une brève hésitation, d’accepter une mastectomie. Elle est actuellement
en convalescence sous chimiothérapie avec un très bon
moral grâce au support de son mari et de sa famille. Les
examens d’imagerie pratiqués six mois et une année
après sont sans particularité.
Tableau I: Classification BI-RADS
Catégorie 0: évaluation complémentaire et/ou comparaison avec mammographies antérieures est nécessaire
Catégorie 1: examen négatif
Catégorie 2: anomalie bénigne (non-cancéreuse)
Catégorie 3: anomalie probablement bénigne – surveillance à court terme est proposée
Catégorie 4: anomalie suspecte – une biopsie doit être
envisagée
Probabilité de malignité est faible
Probabilité de malignité est moyenne
Probabilité de malignité est haute, mais pas si haute
que dans catégorie 5
Catégorie 5: haute probabilité de malignité – mesures
appropriées à prendre
Catégorie 6: malignité prouvée par biopsie – mesures
appropriées à prendre
Tableau II: Aperçu des stades cliniques des tumeurs
biopsiées (162 cas)
Stade clinique
% pour 162
Conclusion
Stade 0
0,6 (1/162)
Malin
Stade I
22 (36/162)
Bénin
Stade II
20 (32/162)
Bénin
10,4 (17/162)
Malin
47 (76/162)
Malin
Stade III
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Tableau III: Vue d’ensemble du traitement de 94 femmes
diagnostiquées avec un cancer du sein
% pour 94
Décédées dans les 2
ans
Traitement complet + 30 (28/94)
15
follow-up d’imagerie
médicale
Traitement partiel + 48 (45/94)
7
follow-up d’imagerie
médicale
Pas de traitement
22 (21/94)
4
Tableau IV: Age et nombre de décédées sans traitement
Age
Nombre (total: Raison particulière
21)
25 - 35 1
a refusé pour cause de stigmatisaans
tion
36 - 50 7
1 femme a refusé pour cause de
ans
stigmatisation
51 - 65 9
1 femme a refusé pour cause de
ans
stigmatisation
> 65 ans 4
1 personne a refusé par manque
de moyens financiers
Fig. 1B. Echographie : Femme de 45 ans avec une nodule
au sein droit QSI. Echographie montre une masse vascularisée à grand axe longitudinal, avec atténuation postérieure du faisceau ultrasonore, contours pseudopodiques
(Birads 5).
Fig. 1C. Image clinique de mastectomie
Fig. 1:1A. Mammographie montre un sein graisseux avec une
nodule irrégulière dans le creux axillaire (Birads 4). Une
biopsie écho guidée a montré un cancer invasif ductal. La
thérapie consiste en une mastectomie
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4- DISCUSSION
Le diagnostic de cancer du sein est une expérience dramatique pour chaque femme, mais,
dans un pays à ressources limitées, un nodule
palpable dans le sein est encore plus effrayant:
même si la femme peut payer les examens
(mammographie, échographie, biopsie), il lui
manque souvent l’argent pour la thérapie. Le
follow-up d’imagerie médicale pourtant disponible à coût abordable est souvent difficile à
acquérir pout toutes les femmes par manque de
moyens financiers déjà largement entamés par
la chirurgie et la chimio/hormonothérapie.
Sur le plan épidémiologique, plusieurs études
ont démontré que le cancer du sein chez les
femmes africaines se présente plus tôt (avant
l’âge de 50 ans) et que la plupart des femmes
se présentent dans un stade avancé de la maladie.3, 15, 17 Dans l’étude de Mody et al, incluant
145 patientes avec un cancer du sein au
Rwanda, 57% des femmes ont un cancer au
stade III ou plus.14 Dans notre étude 47% des
patientes sont diagnostiquées avec un stade III
et 30% avec un stade II. Comme les tumeurs
sont grandes et qu’en plus la radiothérapie
n’est quasiment pas disponible, il est évident
que pour les pays à ressources limitées, la
mastectomie est le traitement le plus approprié
pour sauver la vie des femmes.14, 15 En d’autres
mots, il faut voir le traitement en fonction du
contexte familial/personnel et économique.
Vingt-deux pour cent des femmes n’ont jamais
reçu de traitement non seulement pour des
raisons financières (dans un pays où le gouvernement ne prend qu’en charge 30% des
soins de la population), mais aussi pour des
raisons psychologiques.18, 19 Les mêmes résultats sont rapportés par Mody et al. au Rwanda
où 85% de patientes ont un délai diagnostique
de plus de 12 semaines.14 Dans ce cadre Odigie et al. rapportent qu’au Nigéria 38.3% des
patientes ayant subi une mastectomie sont divorcées après l’opération tandis que le taux
global des femmes divorcées y est de 2.6%.20
La mastectomie est un événement dramatique
pour chaque femme au monde, mais pour une
femme africaine c’est en plus un choix de survivre et d’être encore acceptée par la société.
Sur
le
site
«adjuvant
online»
(www.adjuvantonline.com/online.jsp) le taux
de survie 10 ans après l’intervention chirurgi-
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cale sans chimiothérapie adjuvant est de 59%
pour un cancer entre 3 et 5 cm et de 76% pour
en cancer entre 2 et 3 cm. Ces chiffres montrent qu’avec une mastectomie en cas d’un tumeur au stade II la femme a une chance de
survivre et de rester active dans la famille.
C’est dans ce contexte-là que l’imagerie du
sein joue un rôle important dans la survie du
cancer du sein: dès le moment que la femme
palpe un nodule, une mammographie est nécessaire afin de trouver le cancer plus tôt.
Plusieurs études ont démontré l’impact positif
du soutien des conjoints et de l’entourage dans
le traitement du cancer de sein.14, 20, 21 En Ouganda, au Nigéria, au Ghana et en Afrique du
Sud, des études ont montré le succès de la
guérison chez les femmes souffrant de cancer
du sein ayant bénéficié du soutien familial, le
même effet a été observé en Asie.15, 20-22 Ce ne
sont que les femmes qui sont accompagnées
avec amour par leurs proches, conjoints ou
membres de famille qui acceptent plus facilement la mastectomie et l’ensemble des examens d’imagerie médicale, lorsqu’elles ressentent que l’attitude de leur entourage
vis-à-vis d’elles ne va pas changer; il faudrait
donc que les familles et les entourages congolais puissent s’en inspirer.
Aujourd’hui les patientes ont malheureusement un sentiment d’incompréhension ou de
rejet ce qui les poussent à refuser cette thérapie
en mettant ainsi leur vie en danger: le traitement d’une pathologie trop avancée n’a aucune chance de réussir. C’est davantage dramatique lorsqu’il s’agit d’un cancer in situ qui
si opérée à temps, la femme a beaucoup de
chance de survivre même sans association de
chimio- ou d’hormonothérapie.
CONCLUSION
En Afrique en général et au Congo en particulier, des campagnes de sensibilisation devront
donc être menées à travers les médias, des
groupes de théâtre, des églises, non seulement
pour augmenter la connaissance du cancer du
sein et les moyens pour le détecter à temps, le
plus simple étant la mammographie, mais également pour changer la mentalité de
l’entourage afin que les femmes atteintes
n’aient plus la crainte du rejet et acceptent de
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se faire soigner. Savoir s’accepter soi-même
après une mutilation mammaire est le défi que
la femme congolaise et même africaine doit
savoir relever, afin de ne pas laisser à d’autres
la décision sur sa survie. Le simple examen
d’échographie abdomino-thoracique ainsi
qu’une banale radiographie de thorax peuvent
s’avérer importantes pour exclure les métastases dans le suivi des cancers de sein dans les
pays à ressources limités comme la RDC.
7
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