BAROMETRE SPIRITUEL 2008
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BAROMETRE SPIRITUEL 2008
BAROMETRE SPIRITUEL 2008 CHIFFRES-CLES PARUS DANS « DIMANCHE » 91% considèrent que c’est aux parents qu’il revient de donner une éducation religieuse ou philosophique aux enfants 74% croient qu’il y a quelque chose après la mort 68% se disent croyants 66% ont eu une éducation catholique avec suivi du catéchisme 64% trouvent du divin dans la nature 59% estiment l’existence de Dieu au moins probable et pour 39%, Dieu existe « sûrement » 50% prient au moins de temps en temps 47% entrent dans un lieu de culte pour se recueillir 47% se déclarent chrétiens 43% s’affichent catholiques 37% considèrent l’amour comme la valeur la plus importante Le baromètre du religieux 2008, deuxième du nom – le premier remonte à 2005 – a été réalisé par le bureau d’études Sonecom, sous la supervision scientifique du Pr. O. Servais, à partir d’une enquête auprès de 658 habitants de Wallonie et de Bruxelles, de plus de18 ans, en face à face et selon la méthode des quotas (en fonction du statut socio-professionnel, de l’âge ou encore du sexe) du 26 janvier au 22 février 2008. Il s’agit d’un partenariat de “La Libre” avec “Dimanche”, la RTBF, l’Institut Lumen Vitae et l’Université Catholique de Louvain. Cette année, l’accent a été mis plus particulièrement sur la transmission de la foi et des valeurs La Belgique terre religieuse La société belge francophone n’est pas aussi a-religieuse qu’on le pense. Le baromètre du religieux montre que le christianisme interpelle toujours un francophone sur deux. L’islam perce surtout à Bruxelles. Le baromètre du religieux 2008 porte bien son nom. En effet, alors qu’on aurait pu s’attendre au constat d’un déclin des religions en Belgique, avec une chute radicale du catholicisme, les chiffres rassemblés … s’inscrivent en faux contre cette vision. Mais, bien entendu, si la Belgique reste une terre religieuse, c’est dans le contexte d’un pays occidental à l’aube du XXIe siècle. Ainsi 43 pc de Belges francophones se disent encore catholiques face à 17 pc d’athées, 10 pc d’agnostiques et 0,8 pc qui se reconnaissent clairement dans la laïcité organisée. Mais la donnée la plus marquante de la deuxième édition du baromètre du religieux est quand même la présence désormais en communauté française de Belgique de 12 pc de musulmans. Si à Bruxelles, ils représentent un tiers de la population, leur présence est plus relative dans les provinces francophones mais leur position face aux grands enjeux de transmission des valeurs est telle que la donne devrait interpeller les décideurs politiques comme le dit dans notre dossier le sociologue et anthropologue Olivier Servais (UCL) dans une optique plus positive de nécessité de dialogue que, par exemple, celle de Samuel Huntington qui y verrait surtout un choc des civilisations… Du reste, les données récoltées tendent à montrer que les Belges restent très religieux : 80 pc se disent attachés aux traditions religieuses mais 68 pc se disent croyants. Dont 42 pc de non-pratiquants mais aussi plus d’un quart qui disent encore pratiquer. Certainement pas tous les dimanches comme jadis : 23 pc des Belges francophones ont assisté à au moins 10 offices religieux ces douze derniers mois et il y a un noyau dur de 8 pc qui a assisté à au moins une cérémonie par semaine. Mais en même temps, un sur trois n’a pas mis les pieds dans une église, un temple ou une synagogue. Lieu de recueillement Cela dit, lorsqu’on interpelle les visiteurs de lieux du culte, leurs réponses sont intéressantes : près d’un sur deux y entre pour se recueillir et un tiers pour participer à des célébrations religieuses communes. Un Belge francophone sur sept participe à la vie de la communauté religieuse : 13 pc font des pèlerinages et une quantité équivalente est familière de retraites. La prière ? Elle interpelle un Belge sur deux. De temps en temps ce qui contraste avec un tiers de la population qui ne prie jamais… Il est aussi intéressant d’approcher l’expérience du divin : 64 pc disent l’avoir trouvé dans la nature et à peine moins dans l’amour et dans la prière. Mais pour deux Belges sur cinq, c’est dans l’engagement social. Et Dieu dans tout ça ? Pour près de 60 pc, son existence est au moins probable. Et 38 pc en sont sûrs. Un tiers est dans le doute ou l’incertitude mais 12,5 pc affirment sa non-existence. La mort ou plutôt ce qui pourrait se passer dans son sillage divise aussi très fort les francophones : près d’un francophone sur quatre estime qu’il n’y a rien mais ils sont quand même 72 pc à estimer qu’il y a quelque chose lorsqu’on passe de l’autre côté du miroir. Mais au-delà de ce portrait spirituel, le baromètre est surtout très éclairant sur la manière dont se fait ou devrait se faire la transmission des valeurs religieuses mais aussi laïques. A l’heure de la famille éclatée, l’école est le premier lieu d’éducation religieuse ou philosophique. A l’inverse, à l’autre bout de l’échelle, les médias sont considérés comme n’entrant pas du tout dans l’éducation religieuse ou philosophique par 55 pc des personnes consultées. Selon le baromètre, ce rôle devrait revenir prioritairement aux parents avant l’école et les grands-parents. Et même avant les communautés religieuses ou philosophiques. Christian Laporte pour « La Libre » L’analyse du P.Charles Delhez “Dieu est quelque peu malade mais…” Entretien : Christian Laporte pour « La Libre » Charles Delhez curé de paroisse et rédacteur en chef du journal “Dimanche”, mais aussi sociologue. “La dimension religieuse reste importante dans notre société. 59 pc des Belges francophones estiment l’existence de Dieu au moins probable, 74 pc croient qu’il y a quelque chose au-delà de la mort, 50 pc prient au moins de temps en temps, 75 pc estiment plutôt ou très important que les enfants reçoivent une éducation philosophique et religieuse et 53 pc estiment très ou plutôt important d’éveiller leurs enfants ou petits-enfants à leur propre foi. Dieu n’est donc pas mort même s’il est quelque peu malade. Il se situe plus dans le registre du doute que de la certitude. Reste que nombreux sont encore ceux qui veulent transmettre leur foi à la génération suivante et qui estiment que l’éducation philosophique et religieuse est importante.” Autre constat important : on assiste à une privatisation de la transmission. “La tendance se confirme, poursuit le P. Delhez, sj. Le parcours est de plus en plus individuel, surtout du côté chrétien mais l’attente demeure importante vis-à-vis des communautés. Mais qui transmettra puisque chacun se contente de consommer de manière privée ? On cherche des témoins, mais on ne cherche pas à l’être. La réalité pastorale confirme cette question : on ne recrute plus les “permanents du spectacle”. Il n’y a plus que des“intermittents”. “Minoritéprophétique” Si Charles Delhez constate “que la pratique religieuse est de l’ordre d’une fois par mois chez les croyants pratiquants, la laïcité organisée ne fait pas le plein : son nombre d’adhérents est seulement de 0,8 pc”. La crise religieuse est d’abord institutionnelle : “Ce sont des institutions que les gens quittent, plus que des croyances qui demeurent nombreuses et un peu folles.” Commentant la percée de l’islam, il constate que “cette religion correspond moins à l’éthique et à l’humanisme mis en place dans la modernité occidentale. Je ne serais pas heureux que les racines chrétiennes de l’Europe disparaissent. Il y a un réel risque de perdre la mémoire de notre culture. Si ça se confirme, nous risquons de voir se transformer petit à petit l’ADN de notre vieux continent. Il faut donc un sursaut. La présence croissante de l’islam peut produire une certaine émulation. Les chrétiens sont devenus une minorité, mais encore significative (46 pc). Encore faut-il qu’elle soit signifiante. Jacques Maritain parlait d’une minorité de choc prophétique”. Le P. Delhez ose croire que “son” Eglise réagira : “L’Eglise institutionnelle doit veiller à l’unité, au respect, à l’inter-fécondation de ses communautés plutôt que d’être rigide ou d’imposer un modèle. Je craindrais une centralisation trop grande. On peut plaider pour un oecuménisme interne avec l’expression des différentes sensibilités. En fait, elle doit se garder de suivre la désinstitutionnalisation et éviter le communautarisme. Quant à la base, ce baromètre l’invite à se ressaisir et à passer d’un christianisme de consommation à une religion dans laquelle on s’investit davantage. Ensemble, car à terme l’individualisation est la ruine de la démocratie mais aussi de la religion.” Et la famille comme lieu de la transmission ? “Je vois son avenir avec une certaine inquiétude parce qu’elle est aussi emportée par cette vague. Or, l’école très pluraliste n’est plus outillée pour transmettre les valeurs fortes. L’idéal serait d’en arriver comme dans le Brabant wallon où il semble rester du temps pour la recherche de sens dans les familles. Mais elles y ont une certaine aisance culturelle et économique. Dans trop de familles, domine une certaine souffrance et une grande carence sur le plan religieux.” L’analyse de l’anthropologue Olivier Servais: Olivier Servais, anthropologue, chercheur de l’UCL, et superviseur scientifique de l’enquête Entretien : Charles DELHEZ pour « Dimanche » Olivier Servais, la dimension religieuse reste présente, alors que dans la société elle semble si discrète… Elle reste très présente et il y a une forte attente, toutes orientations philosophiques et religieuses confondues. 65% se considèrent d’éducation catholique et 43% se disent aujourd’hui catholiques. C’est une baisse certes, mais qui reste relative. Par contre, la laïcité a de la peine – c’est le moins qu’on puisse dire – à décoller. Ses adhérents sont en-dessous de 1%. Un signe que la crise est institutionnelle. Ce sont les institutions que les Belges de souche quittent, et non tant les questions métaphysiques et religieuses. La transmission demeure une question importante pour la population… Une personne sur deux se préoccupe de la transmission et 67,5% des personnes concernées. Il y a une forte attente surtout vis-à-vis des parents, mais aussi des communautés religieuses ou philosophiques. Une attente aussi visà-vis de l’école qui a joué un rôle très important. 40% considèrent que c’est le lieu de leur éducation philosophicoreligieuse (à peu près à égalité avec les parents). On assiste cependant à une inversion, les parents prenant plus de place aujourd’hui que l’école. Un signe de plus de la crise institutionnelle de notre société… La religion ne devient-elle pas plus individuelle ? On a souvent cru qu’il y avait une baisse de la pratique religieuse, mais on l’analysait essentiellement de manière collective. Au niveau individuel, c’est plus difficile à observer. Remarquons que 40 à 45% des gens prient régulièrement (souvent seul dans son lit, le soir). Entrer dans un lieu de culte demeure la pratique la plus importante (47%). Autant d’indicateurs que nous assistons plus à une désinstitutionnalisation qu’à une disparition. N’y a-t-il pas un réflexe de consommation du religieux ? On demande aux institutions d’accompagner les démarches individuelles, mais à terme, il n’y aura plus d’institution. Qui va accompagner ? C’est là, la vraie question. La logique d’accompagnement “personnalisé” demande plus de moyens humains, car c’est une démarche qualitative. Quand on voit les chiffres du clergé chez les catholiques (et chez les protestants aussi), on peut s’interroger. Il faudra prendre des décisions. Une des solutions adoptées est notamment “l’importation de prêtres”, ce qui assume l’entrée dans une société multiculturelle. Mais le fait qu’une société ne produise plus ses propres pasteurs pose question. Il faudra aussi redéfinir la place du prêtre dans la communauté. Dans le cas des aumôneries, les prêtres ne sont d’ailleurs plus majoritaires, les laïcs prennent le relais, et c’est heureux. Quelles conclusions pastorales tirez-vous de ce baromètre ? Il faut arrêter de se donner l’image d’une société a-religieuse. Il y a une réalité religieuse, quoi qu’on en pense. Les croyants sont majoritaires, même s’il y a une érosion. Quant aux institutions religieuses, elles font face à l’individualisation et à la désinstitutionnalisation. Elles doivent offrir des lieux et des moments adaptés à une foi plus personnelle, elles doivent être à l’écoute des gens. C’est un véritable défi. Ainsi, peut-être insiste-t-on trop sur la paroisse et pas assez sur les aumôneries… Dans ces lieux d’accompagnement, les questions de sens se posent. Il y a aussi tous les rites de passages : naissance, mariage, mort… Et au niveau de la société elle-même ? La question religieuse doit être vraiment prise en compte. Nous sommes dans une société incertaine au point de vue économique (le coût de la vie), environnemental, politique (ici en Belgique). Les individus sont insécurisés. Le religieux est un lieu de stabilisation, de sécurisation que les pouvoirs publics ne peuvent ignorer. Dans les milieux chrétiens , l’enquête révèle une grande attente vis-à-vis des communautés religieuses, notamment en termes d’enseignement, d’homélie… La communauté est en effet le troisième lieu d’éducation. Il y a clairement une attente de ce côté-là. Les Églises doivent remplir leur fonction d’enseignement, d’éducation, de prise de parole sur le religieux. C’est l’individu qui fera son choix, qui gérera sa trajectoire spirituelle, mais pour cela il faut que les communautés proposent un certain nombre de discours, de pratiques, et tout cela doit être diversifié pour que chacun puisse choisir en fonction de ses aspirations du moment. Telles sont les règles de la modernité. On “consomme”, mais on n’est pas prêt pas à “produire”… Pas encore ! On vient d’une situation où la production religieuse était prise en charge par les institutions. Aujourd’hui, ces dernières croulent de toutes parts. Le défi est de faire passer les individus de récepteurs de question de sens à producteurs. Dans les années 60, il y a eu rupture de tradition par contestation. Ne doit-on pas se préparer à une rupture de traditions faute de relais ? Contrairement à ce qu’on entendait voici une quinzaine d’années, on ne passe pas à une rupture d’indifférence, mais de transmission. Là il y a un enjeu. L’enquête montre que la question religieuse est majeure pour nos contemporains. C’est aux différents protagonistes de prendre les choses en main. Il ne s’agit donc pas d’inquiéter, mais de responsabiliser. Résultats synthétiques (RTBF) Géographie Une stratification géographique se confirme et des profils par province sont discernables : Bruxelles est la zone la moins catholique mais la plus pluraliste. La pratique y est particulièrement forte. (1/3 de musulman et un plus grand pourcentage pour les autres religions). A l’inverse, le Luxembourg est la zone la pus homogène, mais le moins pratiquante (par exemple : 71% de chrétiens mais 71% de croyant non pratiquants). Plus on quitte Bruxelles sur l’Axe E411, plus les Chrétiens croissent, et moins la pratique est importante. Le Brabant-Wallon se caractérise par un taux élevé de chrétiens, mais avec une foi de doute, en lien avec son statut de région prospère et à haut niveau d’éducation. Niveau d’études L’Islam est le plus populaire ; le christianisme est le plus présent dans toutes les strates ; Plus les répondants ont un niveau d’éducation élevé, moins ils prient ; La foi des répondants s’affaiblit (doute) avec l’accroissement du niveau d’étude ; La préoccupation pour l’éducation aux valeurs des enfants s’accroît avec l’accroissement du niveau d’étude. A contrario, plus le niveau d’étude des répondants est bas, plus ils sont soucieux de transmettre leur foi à leurs enfants. Identités religieuses Un axe des identités religieuses selon l’intensité moyenne de la foi peut être construit : L’Islam (le plus de croyants-pratiquants, l’importance de la famille comme lieu de transmission de la foi, l’importance des valeurs spirituelles et religieuses, la plus grande certitude que Dieu existe), le Catholicisme (le plus de croyants non pratiquant, une foi incertaine, les valeurs relationnelles et personnelles - amour, liberté, harmonie avec soi-même -, le rôle de la reconnaissance de rôle de l’école à côté de la famille), les croyants sans appartenance (cfr catholique, avec une foi essentiellement personnelle), agnostique (idem avec une diminution de la pratique et l’accroissement de l’indifférence, athées (cfr agnostiques avec la valeurs d’égalité comme 4ème valeurs de référence ; le non-attachement aux religions d’abord, l’opposition aux religions ensuite). Auto-Identification 47% de chrétiens (43,5% de catholiques et 3,5% de protestants) 17% d’Athées 12% de Musulmans 12% de Croyants sans religion 10% d’Agnostiques Croyances et Pratiques Croyances 80% des répondants attachés aux traditions religieuses 68% des répondants se disent croyants (13,8% de ceux-ci ont été tentés par une autre religion ou ont changé de religion, soit environ 8% du total) 27% des répondants se disent croyants et pratiquants 42% des répondants se disent croyants non-pratiquants 12 % des répondants se disent non-croyants mais attachés aux traditions religieuses Offices religieux 23% des répondants ont assisté à au moins 10 offices religieux les douze derniers mois 8% des répondants ont assisté à au moins 52 offices religieux les douze derniers mois 30% des répondants n’y ont jamais assisté. La moyenne est de 12,3% et la médiane de 2% (l maximum de 366). Prière 50% des répondants prient au moins de temps en temps 31,5% ne prient jamais. Expérience du divin Trio de tête 64% des répondants trouvent le divin dans la nature 61% dans l’Amour 51% dans la prière (cet item détrône de peu l’amitié. Cette avancée est largement due à l’importance de la prière chez les répondants musulmans). Notons le score de 49% de la Bible qui est en croissance. Duo de fin 43% dans l’engagement social et 39% dans la liturgie. Existence de Dieu : C'est sûr C'est probable Je n'en sais rien C'est peu probable Il n'existe pas 38,4% 20,4% 22,3% 6,4% 12,5% Dieu est une force, une énergie, un esprit, pour 56% des répondants. Il est une personne pour 23%. Les autres ne se prononcent pas ou le voient autrement. Après-mort 72% des répondants estiment qu’il y a quelques choses après la mort ; mais 40% ne savent pas quoi ; 23% estiment qu’il n’y a rien. Les valeurs importantes (total de 2 choix) : 52% l’amour 38% la liberté 27% l’harmonie avec soi-même