30.01.2013 / Le Matin (Interview)

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30.01.2013 / Le Matin (Interview)
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LE GUIDE CULTURE
LE MATIN MERCREDI 30 JANVIER 2013
ANGOULÊME
BD­FIL
COSEY, UN VAUDOIS EN LICE
Le dessinateur Cosey est sur la
short­list du Grand Prix du Festival
d’Angoulême 2013, considéré comme
le Prix Nobel de la BD. Le papa de
«Jonathan» est en lice aux côtés
de quinze candidats, de Chris Ware
à Willem. Rappelons que Zep
avait raflé le Grand Prix en 2004.
ENRICO MARINI À L’AFFICHE
Pour sa 9e édition, BD­FIL confie les clés de
son festival à l’Italien Enrico Marini. Invité
d’honneur, il a aussi signé l’affiche 2013,
mettant en scène Le Scorpion, son person­
nage phare. Le dessinateur est aussi prési­
dent du jury dans le concours de BD, où les
«nouveaux monstres» sont à l’honneur.
DR
Jean­Christophe Bott/Keystone
> BD­FIL, Lausanne, du 13 au 16 sept. www.bdfil.ch
ILS N’ONT PAS PEUR DU WITZ
u’est-ce qu’ils ont tous (ou
presque) à vouloir gravir la
muraille de rœsti pour tester
leurs vannes chez les bourbines? Après le succès continu de Karim Slama dans «Welsh ein Slamassel», c’est Carlos Henriquez qui
s’est lancé dans les «h» aspirés avec
«I bi nüt vo hie». En quittant ses
Peutch le temps d’apprivoiser la
langue d’Ueli Maurer, l’humoriste
fait aussi le grand saut du one-manshow. Il drague même les Suisses
alémaniques du coin en testant son
spectacle en Romandie. Banco.
Q
Pourquoi ça fonctionne?
Karim Slama. – Le public apprécie
qu’on fasse l’effort de parler sa langue. Et les fautes nous rendent
moins conquérants.
Carlos Henriquez. – L’humour
n’est pas le même là-bas. Et ils sont
curieux. Les Suisses alémaniques se
lèchent les babines à l’idée de savoir
comment les Welches les perçoivent. Je grossis volontairement les
clichés pour mieux les tordre.
Photos Joseph Carlucci, DR (2x), Cirque Knie, Chantal Dervey
Le déclic
Karim Slama. – On est venu me
chercher, en fait, grâce à la bourse
au spectacle de Thoune. Si c’est très
vite devenu un réel plaisir, ça n’a jamais été une volonté de ma part.
Carlos Henriquez. – C’est au fil
des soirées d’impro à Berne que j’ai
compris que je pouvais parler suisse
allemand sur scène. Le public riait
aussi de mon accent approximatif.
Un jour je me suis dit: «Ce serait con
de ne pas utiliser ça.» Ma rencontre
avec Emil a été déterminante pour
me lancer franchement.
La langue
Karim Slama. – Je
ne la parle pas, alors
ne dévoilez pas les
origines alémaniques
de ma mère! J’ai dû
faire traduire mon
spectacle en bon allemand et certains jeux
de mots ne fonctionnent plus.
Carlos Henriquez.
– Mon suisse allemand est aussi mauvais que le français
d’Emil et mon objectif, c’est de ne surtout
pas m’améliorer! Emil m’a conseillé de ne pas traduire mes sketches, mais de les créer dans la langue. Et j’ai gardé le même humour.
RIRE Karim Slama file en Suisse alémanique
et le Peutch Carlos Henriquez étrenne son
schwytzertütsch dans «I bi nüt vo hie».
L’humour welsh fait recette outre­Sarine.
Les difficultés
Karim Slama. – Ma grande frustration, c’est de ne pas pouvoir improviser.
Carlos Henriquez. – La syntaxe,
sans hésitation! Comment faire
pour ne pas planter la chute avec
cette saloperie de verbe à la fin des
phrases. (Rires.)
Le rêve alémanique
Karim Slama. – C’est un marché
non négligeable et un grand défi culturel. Et je crois que le rêve parisien
s’essouffle.
Carlos Henriquez. –
C’est un hobby. Mais si
ILS ONT DRAGUÉ LA LANGUE ENNEMIE
tout le monde aime ce
CELLE QUI A FAIT SON CIR­ CELUI QUI A PIQUÉ L’ACCENT «Tip CELUI QUI A FAIT L’IN­
que je fais, c’est clair que
QUE «Uf Düütsch!» Dans les ca­ top», «Okayyy?» Un exemple à part ce VERSE Le premier à oser dé­
j’aurai du boulot! Pourfés­théâtres mais aussi dans la Hans­Peter Zweifel, et pourtant. En fier les Romands dans son ac­
quoi pas.
sciure de Knie, Marie­Thérèse
Porchet a pris son courage et le
dialecte ber­
nois à deux
mains pour
aller dire aux
bourbines à
quel point
elle les mépri­
sait. Un suc­
cès fou. ●
1995, le fonctionnaire fédéral alémanique
est engagé dans l’émission «Ça cartonne»
sur la TSR. Et c’est le
carton. Le person­
nage crée par Laurent
Nicolet abrite tous les
clichés du Suisse alé­
manique obtus et su­
rorganisé qu’on cô­
toie au boulot ou à
l’armée. ●
cent inimitable. Pour Karim
Slama et Carlos Henriquez, Emil
Steinberger
est l’exemple
magnifique.
Peu, depuis,
ont réussi à
s’imposer
des deux cô­
tés de la
frontière. ●
● FRED VALET
[email protected]
«I bi nüt vo hie», Carlos Henri­
quez. Demain au Lido, à Lau­
sanne, le 2 février au Chat Noir, à
Carouge, et les 7 et 8 février au
Théâtre Montreux­Riviera, à Mon­
treux. «Welsh ein Slamassel»,
Karim Slama, dès le 8 février en
tournée dans toute la Suisse alle­
mande.

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