Note technique sur le Manioc sur la zone CMA/AOC
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Note technique sur le Manioc sur la zone CMA/AOC
CONFERENCE OF WEST AND CENTRAL AFRICAN MINISTERS OF AGRICULTURE CONFERENCE DES MINISTRES DE L’AGRICULTURE DE L’AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE CMA/WCA CMA/AOC ___________________________________________________________________________ Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Cap Vert, Centrafrique, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Guinée Equatoriale, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Tchad, Togo NOTE TECHNIQUE SUR LE MANIOC DANS LA ZONE CMA/AOC Juillet 2004 TABLE DES MATIERES INTRODUCTION ........................................................................................ 1 1. LA PLANTE ........................................................................................... 2 1.1. Description et origine ....................................................................... 2 1.2. Aspects biophysiques ....................................................................... 2 1.3. Utilisations ..................................................................................... 3 2. CONJONCTURE INTERNATIONALE ............................................................ 3 2.1. Production ...................................................................................... 3 2.2. Consommation ................................................................................ 4 2.3. Echanges commerciaux et prix ......................................................... 4 2.4. Prévisions pour la campagne 2004/2005 ............................................. 5 3. SITUATION DE LA CULTURE DANS LES PAYS DE LA CMA/AOC ..................... 6 3.1. Politiques agricoles en vigueur et impacts ........................................... 6 3.2. Place de la culture dans les principales zones d'exploitation ................... 7 3.3. Production et commercialisation ........................................................ 7 3.3.1. Production ................................................................................ 7 3.3.2. Commercialisation ..................................................................... 8 3.4. Consommation ................................................................................ 8 3.5. Importation/Exportation ................................................................... 9 4. PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT DE LA FILIERE EN AOC ..................... 10 4.1. Les contraintes.............................................................................. 10 4.2. Les facteurs dynamisants ............................................................... 11 4.3. Rôle dans la prévention et l'atténuation des crises alimentaires ............ 12 INTRODUCTION Le manioc est la troisième source de calories dans les tropiques, derrière le riz et le maïs. Plus de 600 millions de personnes en dépendent en Afrique, en Asie et en Amérique Latine. Il est généralement produit par les agriculteurs pauvres, des femmes pour la plupart, souvent dans des zones marginales. Pour ces personnes, cette plante est vitale à la fois pour la sécurité alimentaire et comme source de revenus.1 Le manioc est une culture adaptée aux sols peu fertiles et aux climats arides. Cette rusticité, combinée avec ses multiples utilisations alimentaires, en fait une culture vivrière importante pour la sécurité alimentaire des zones marginales de l’AOC. En outre, il devient une culture de plus en plus commerciale destinée à la fabrication industrielle d’amidon, de fécule, d’alcool, etc. Cependant, le développement de la filière manioc en AOC est limité par des contraintes phytosanitaires, l'aptitude au stockage limitée de la racine, la faiblesse de la transformation industrielle, etc. Pour défendre la cause du manioc, la FAO a mis en place une Stratégie mondiale de développement du manioc. Cette Stratégie a été lancée par le FIDA et vise à promouvoir cette importante culture vivrière. Elle a été préparée après une série de consultations avec les différents partenaires: producteurs, transformateurs, secteur privé, ministères, organisations internationales et non gouvernementales, centres techniques et de recherche et les organismes de donateurs.2 1 2 http://www.fao.org http://www.fao.org 1 1. LA PLANTE 1.1. Description et origine Le manioc est une espèce tropicale originaire d'Amérique du Sud. Il a son centre principal de diversification au Brésil. Sa diffusion à partir du continent américain s'est faite en Afrique dès le XVIe siècle, puis elle a gagné l'Asie et enfin l'Australie à la fin du XIXe siècle. L'Afrique peut être considérée comme un centre secondaire de diversification (Mémento de l'agronome, 2002). Le manioc (Manihot esculenta Crantz) appartient au genre Manihot, famille des Euphorbiaceae. C'est une plante arbustive pérenne de 1 à 4 m de hauteur. Il est cultivé dans les régions tropicales et subtropicales pour ses racines comestibles riches en amidon et pour ses feuilles également comestibles. Le mode de propagation en culture est la bouture de tige. Une bouture émet des racines au niveau des nœuds en contact avec le sol humide et à la base (racines basales plus nombreuses)3. La récolte des racines commence généralement 1 an après plantation. Les rendements moyens tournent autour de 10 tonnes/ha et varient en fonction de la variété et des conditions édapho-climatiques et culturales. Sur les 300 variétés identifiées, deux seulement sont cultivées: - le manioc amer: les racines séchées sont transformées généralement en " tapioca " ou en farine appelée " cassave ", - le manioc doux: les racines sont directement consommables sans risque.4 Ces variétés sont parfois considérées comme deux espèces différentes et désignées sous les noms respectifs de M. utilissima et M. dulcis. Elles se distinguent par la teneur en acide cyanhydrique qui est plus élevée pour la première où elle peut atteindre 250 milligrammes par kilogramme de racines fraîches (GRACE, 1977).5 1.2. Aspects biophysiques Le manioc est cultivé dans toute la zone intertropicale avec des régimes pluviométriques à une ou deux saisons des pluies et des pluviosités annuelles variant de 600 à plus de 4 000 mm. Il est aussi cultivé dans la zone équatoriale dans les défriches récentes des forêts. La température minimale est de 12°C, le taux maximum de croissance se situe entre 25 et 29°C6. Cependant, un rayonnement faible, un vent fort et une forte pluviométrie avant arrachage peuvent être défavorables à la production. Le manioc affectionne les sols légers et sablonneux, bien drainant et à fertilité moyenne. Il a des exigences modestes en ce qui concerne la fertilité des sols. Il fournit même des rendements corrects sur des sols acides, pauvres en éléments 3 Mémento de l'agronome, 2002 http://fr.wikipedia.org 5 www.izf.net 6 Mémento de l'agronome, 2002 4 2 nutritifs et impropres à la culture d'autres plantes. Les sols salins, fortement alcalins et sujets à l'humidité de stagnation sont impropres à la culture du manioc. Les sols rocailleux, quant à eux, entravent la formation des racines de stockage. Le manioc peut survivre à des périodes de sécheresse prolongées ou à de faibles gelées. Dans ce cas, les substances nutritives emmagasinées dans les racines de stockage permettent à la plante de survivre.7 1.3. Utilisations Le manioc est essentiellement cultivé pour l'alimentation humaine. Le manioc doux peut être consommé frais ou cuit comme la pomme de terre tandis que le manioc amer n'est comestible qu'après détoxification. Une bonne partie du produit est transformée en tapioca, farine, couscous, Gari, cossettes, etc. Ces produits entrent dans la constitution de plats bien appréciées par les populations de l'AOC (foufou, attiéké, chikwangue, etc.). Dans certaines régions de l'Afrique et de l'Amérique latine, les extrémités avec les jeunes feuilles sont cueillies et consommées en cours de végétation. Les feuilles, épluchures, cossettes et granulés sont utilisés pour l'alimentation animale tandis que le bois de manioc sert de combustible. Plus de 30% de la production latino-américaine sont utilisés pour l'alimentation animale intérieure, contre moins de 2% en Afrique.8 Les utilisations industrielles du manioc concernent la production de fécule, d’amidon de blanchisserie, de boissons alcoolisées, etc. 2. CONJONCTURE INTERNATIONALE 2.1. Production Avec une production moyenne des quatre dernières années se chiffrant à 183,4 millions de tonnes9 de racines fraîches, le manioc est la racine la plus produite dans le monde. Cette production se répartit entre l'Afrique (54%), l'Amérique latine et les Caraïbes (18%) et l'Asie (28%). Les plus grands producteurs sont: le Nigeria (33,4 Mt en 2003), le Brésil (22,23 Mt), l'Indonésie (18,4 Mt), la Thaïlande (18,4 Mt), et la République Démocratique du Congo (15 Mt). Le manioc joue un rôle capital dans la sécurité alimentaire de plusieurs pays africains, notamment du fait de sa résistance à la sécheresse. La croissance de la production mondiale en 2002 est due essentiellement à l’Afrique, où près de 100 millions de tonnes ont été récoltées, soit 3 % de plus qu'en 2001. Le déficit hydrique enregistré en 2002 au Mozambique, à Madagascar, au Malawi et au 7 www.gtz.de www.fao.org 9 D'après données FAO 8 3 Rwanda a particulièrement favorisé l'expansion de la production de manioc (FAO, perspectives alimentaires n°3, juin 2003). En 2003, la production a une nouvelle fois augmenté de 4,35% par rapport à 2002, passant à 192 millions de tonnes de racines fraîches. Cette hausse a eu lieu essentiellement en Asie (Indonésie, Thaïlande, Vietnam) où le niveau élevé des prix intérieurs et des prix à l'exportation a booster la production. 2.2. Consommation Une bonne partie de la production est consommée en Afrique subsaharienne où le manioc est une denrée alimentaire de base. Sur les treize plus grands consommateurs de manioc, neuf sont Africains parmi lesquels la RDC et le Nigeria qui représentent respectivement 15,2 et 14,6% de la consommation mondiale10. Celle-ci a été estimée à 104 millions de tonnes en 2003, soit 2 millions de plus qu'en 2002. L'utilisation du manioc pour l'alimentation animale, sous forme de cossettes et de granulés secs, concerne essentiellement l'Amérique latine et les Caraïbes, le Nigeria, la Chine et l'Union Européenne. En 2003, l'utilisation mondiale de manioc dans l'alimentation animale est établie à 54,5 millions de tonnes, soit environ 4% de plus qu’en 2002. Cette augmentation s'explique par l'évolution de la situation dans l'UE, en Chine, au VietNam et en Malaisie où le resserrement des disponibilités de céréales fourragères et la hausse consécutive des prix par rapport aux produits de remplacement ont entraîné une utilisation accrue du manioc dans l'alimentation du bétail. Les utilisations industrielles du manioc ont aussi enregistré une progression en 2003. La production d'alcool et de fécule s'est développée au VietNam, grâce à une forte augmentation de la production et à une croissance économique rapide. L'usage industriel du manioc a également augmenté au Ghana, en République de Corée, Singapour, Hong-kong, Philippines et Chine. 11 2.3. Echanges commerciaux et prix 12 La structure du commerce international a connu un revirement majeur en 2001, lorsque les importations des pays en développement ont, pour la première fois, dépassé celles des pays développés. En effet, les pays en développement de l'Extrême Orient ont été, en 2002, le lieu principal de destination des courants commerciaux internationaux de manioc avec des importations estimées à 3,4 millions de tonnes. La contraction des échanges s'est surtout concentrée dans l'UE qui était depuis des années le principal importateur de manioc, sous forme d'agglomérés pour l'industrie fourragère dans le cadre d'un contingent préférentiel à bas tarif. En 2002, les importations de l'Union ont chuté de 43%. Une chute qui traduit la perte de compétitivité des produits fourragers à base de manioc par rapport aux céréales produites localement. 10 Calculées d’après données FAO FAO, Perspectives de l'Alimentation, No 2, juin 2004 12 FAO, Perspectives de l'Alimentation 11 4 Dans l'ensemble, le commerce mondial de manioc a progressé en 2003. Les flux ont été dirigés essentiellement vers la Chine et l'UE qui ont importé respectivement 3 et 2 millions de tonnes soit 20 et 32% de plus par rapport à 2002. Ces importations proviennent essentiellement de la Thaïlande qui fournit à elle seule 95% des exportations. En octobre 2003, la création d'une zone de libre échange entre la Thaïlande et la Chine a permis l'élimination d'un droit de 6% sur les produits dérivés du manioc en provenance de la Thaïlande, stimulant davantage les échanges entre les deux pays. En outre, d'autres pays comme les Philippines et Hong-kong ont augmenté leurs achats de fécule et de farine sur le marché international tandis que ceux de l'Indonésie ont chuté. Les mesures prises par le gouvernement de la République de Corée pour réduire les réserves céréalières en remplaçant les aliments pour animaux importés, tels que le manioc, par du riz a entraîné un effondrement des importations de cossettes et de granulés. Toutefois, les importations de fécule et de farine de ce pays ont considérablement augmenté. Les cours internationaux du manioc ont été en moyenne supérieurs à ceux de 2002. La réduction des approvisionnements exportables de la Thaïlande et la demande ferme des pays de l'Extrême Orient en sont probablement les causes. 2.4. Prévisions pour la campagne 2004/2005 Les perspectives de la production de manioc pour 2004/05 sont bonnes. Les résultats devraient être voisins des 192 millions de tonnes de la campagne écoulée. En Afrique, des augmentations sont prévues au Nigeria, au Ghana, en RCA, en Tanzanie, en Angola et en Ouganda. Cette progression serait consécutive: - à l'accroissement des superficies et aux conditions météorologiques favorables en Angola, - à la distribution par la FAO de boutures à croissance rapide et résistantes aux maladies en RCA et au Rwanda, - aux politiques de développement de la filière manioc entreprises au Nigeria, en Tanzanie, au Ghana et au Mozambique. La production asiatique devrait, quant à elle, poursuivre sa croissance en raison du niveau élevé des prix intérieurs et des prix à l'exportation, notamment en Thaïlande et en Indonésie. En Amérique latine, le Brésil devrait augmenter sa production de 8% et atteindre 23,9 millions de tonnes à la suite d'une augmentation de 50 % des prix de soutien du manioc (FAO, perspectives alimentaires n°2, juin 2004). 5 Selon les prévisions d’IFPRI, la consommation de manioc dans les pays en développement devrait atteindre en 2020, 280 millions de tonnes. Ces prévisions sont fondées sur une estimation conservatrice des effets futurs de la croissance des revenus et des changements technologiques.13 L’essentiel de cette consommation devrait provenir de l’Afrique subsaharienne en raison de la forte croissance démographique de cette région. En Amérique latine, l’augmentation de la consommation de manioc concernera plus l’alimentation du bétail que celle humaine. En effet, les consommateurs de cette région se tournent de plus en plus vers les céréales les plus économiques (IFPRI, 2000). Le commerce du manioc devrait augmenter en 2004/05. Par rapport à la même période l'année dernière, les exportations thaïlandaises de granulés et de cossettes ont augmenté de plus de 50%. L'essentiel des importations devraient provenir de la Chine et de l'UE. Pour la période janvier-avril 2004, les cours des granulés de manioc exportés vers l'UE ont augmenté en moyenne de 36% par rapport à la période correspondante en 2003, tandis que ceux des cossettes destinées à l'ExtrêmeOrient ont augmenté de 5%. Les cours de la farine et de la fécule, bien qu'inférieurs à ceux de la période correspondante l'an dernier, ont progressé de 10 % au cours du premier semestre (FAO, perspectives alimentaires n°2, juin 2004). 3. SITUATION DE LA CULTURE DANS LES PAYS DE LA CMA/AOC 3.1. Politiques agricoles en vigueur et impacts En dépit de son importance en tant que denrée vivrière de base dans de nombreux pays en développement, les politiques de développement agricole ont souvent ignoré le manioc14. La majorité des pays de l'AOC ne disposent pas de politique spécifique de développement de la filière manioc. Néanmoins, certains pays comme le Nigeria, le Ghana et le Cameroun attribuent une priorité au développement de la culture de manioc. Le Nigeria a mis en place un programme de développement de la production destinée à la filière commerciale. Elle bénéficie pour cela du soutien d'un groupement d'organismes internationaux. Le Ghana, quant à lui, a mis en place des investissements de grande ampleur dans l'infrastructure du manioc, notamment dans des installations de transformation. Ce qui est un facteur encourageant de la production. 15 Au Cameroun et au Congo, le bâton de manioc a été substitué dans beaucoup de ménages au pain pour le petit déjeuner depuis la dévaluation du Fcfa. L'implication des décideurs dans la diffusion des résultats de recherche a porté ses fruits au Burkina Faso, avec la vulgarisation de la culture du manioc. Une expérience sur laquelle le Sénégal qui a, cette année, un programme de production de 1 million de tonnes, pourrait s’inspirer.16 13 http://www.ifpri.org http://www.fao.org 15 http://www.fao.org 16 http://www.africatime.com 14 6 Le manioc est considéré dans le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) comme une culture essentielle de lutte contre la pauvreté en Afrique. Dans le cadre de l'Initiative de développement du manioc en Afrique subsaharienne, un processus consultatif a été lancé et se propose "de recueillir les expériences réussies, d’identifier les défis et d’élaborer des recommandations" en matière de stratégie de transformation de tout le secteur du manioc en Afrique.17 3.2. Place de la culture dans les principales zones d'exploitation Cultivé dans presque tous les pays de l’Afrique sub-saharienne, le manioc est une culture vivrière d’une importance spéciale dans un grand nombre de pays de l'AOC dont le Nigeria, la République démocratique du Congo, le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Cameroun et le Bénin. Il y est également dénommé mandioca, cassava, yuca, etc. La culture fut introduite en Afrique de l'Ouest dès le XVIe siècle par les portugais, mais il a fallu attendre le début du XXe siècle pour que sa distribution se généralise dans les zones humides et semi-humides de l'Afrique. Depuis, la culture a acquis dans de nombreux systèmes d'exploitation villageois une place fixe, supplantant même d’autres cultures vivrières traditionnelles comme la plantain en Afrique orientale ou le millet et le sorgho dans le sud africain (LYNAM, 1991).18 Le manioc peut être planté en culture intercalaire, parmi des céréales (maïs, sorgho) ou des espèces arborescentes (caoutchouc, cacaoyer, caféier, cocotier)19. Sa rusticité en fait une plante de fin d'assolement, plantée en fin de saison des pluies. En AOC, il est généralement cultivé par les petits exploitants, en général comme culture de substance. En 2003, les emblavures de manioc dans la zone CMA/AOC sont estimées à 5,8 millions d'ha. Le Nigeria et le Ghana y occupent respectivement 59 et 17%. En zone guinéenne la culture entraîne tout un artisanat de fabrication d'attiéké (couscous) et de gari (semoule). Au Bénin, la production des zones rurales approvisionne correctement les villes littorales du pays et même du Nigeria.20 3.3. Production et commercialisation 3.3.1. Production L'évaluation de la production de manioc en AOC n'est pas toujours aisée, les racines pouvant être laissées en terre pendant plus d'un an et récoltées durant les pénuries alimentaires. 17 NEPAD News Express, 9 mars 2004 in www.isa-africa.com/nepad/news09304.htm 18 www.gtz.de http://fr.encyclopedia.yahoo.com 20 http://www.ac-nantes.fr 19 7 Depuis 1999, la production de manioc dans la zone CMA/AOC augmente régulièrement. Elle a atteint son sommet en 2002 avec 54,4 millions de tonnes. Ce record provient essentiellement du Ghana et du Cameroun dont les productions ont crû de 14%. En 2003, la production a légèrement baissé, passant à 53,5 millions de tonnes. Une baisse consécutive à celle des productions ivoirienne, centrafricaine et congolaise du fait principalement de la guerre. Le Nigeria et le Ghana sont, avec respectivement 64 et 17% de la production, les deux grands centres de production de la zone. En dehors des conditions climatiques favorables, ce sont des politiques délibérées qui ont permis à ces pays de booster leur production. Celles-ci ont mis l'accent sur la diffusion de semences à haut rendement et résistantes aux maladies, le remplacement progressif des variétés existantes par de nouvelles variétés et la promotion de nouvelles applications agricoles. Ces deux pays pourraient continuer d'augmenter leur production en 2004 et entraîner ainsi toute la zone. 3.3.2. Commercialisation Comme pour l'ensemble des racines et tubercules, la commercialisation du manioc en AOC est difficile, en raison notamment de l'enclavement des zones de production. L'essentiel de la production est autoconsommé par les producteurs. Seul le surplus, estimé à environ 10% de la production, est mis sur le marché. La commercialisation concerne essentiellement les produits dérivés du manioc tels que la farine et le couscous. Les racines fraîches, hautement périssables, sont généralement vendues sur les marchés villageois. Leur transport vers les villes entraîne des pertes importantes, ce qui gonfle leur prix de vente. La majorité des citadins africains sont aussi pauvres que les populations rurales, ce qui entraîne un manque de pouvoir d'achat accentué qui freine le commerce.21 3.4. Consommation Le manioc constitue une denrée de base dans certains pays comme le Nigeria, la Côte d’Ivoire, le Congo, etc. Environ 90% de la production de l’AOC sont consommés par l’Homme sous forme de racines fraîches et de produits transformés. Une faible proportion (9%) est transformée en cossettes et granulés pour l’alimentation animale, au Nigeria, notamment. La consommation humaine de manioc dans la zone CMA/AOC est l’équivalent de 27 millions de tonnes de racines fraîches. La part des principaux pays consommateurs se présente comme suit : 21 www.fao.org 8 PAYS Part dans la consommation (%) Nigeria 57 Ghana 15 Cameroun 5 Bénin 4 Côte d'Ivoire 5 Guinée 3 République du Congo 3 Tableau 1. Répartition de la consommation humaine de manioc dans la zone CMA/AOC La consommation animale est estimée à environ 10,6 millions de tonnes. Le Nigeria et le Ghana occupent respectivement 77 et 15% de l’utilisation animale du manioc. Une faible proportion de la production (1%) est transformée industriellement en amidon, fécule, etc. La demande d'aliments traditionnels à base de manioc augmentera avec la croissance démographique, mais les tendances de consommation devraient changer avec l’urbanisation et l’exode rural. Les producteurs et transformateurs de manioc devront donc répondre à une demande urbaine croissante d'aliments plus modernes, comme le pain acheté à la boulangerie et les produits cuits au four à partir de farine de blé importée.22 3.5. Importation/Exportation Le commerce régional de manioc est limité par la forte périssabilité du produit et la faiblesse des infrastructures de transport. On note néanmoins quelques échanges entre pays estimés à environ 1500 tonnes en 2002. La direction des flux est difficile à prévoir car n'obéissant à aucune logique. Par exemple, le Niger et le Cameroun importent quelques dizaines de tonnes du Nigeria, qui lui-même en importe du Bénin. Au niveau international, la zone CMA/AOC ne participe quasiment pas au commerce mondial. 22 www.fao.org 9 4. PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT DE LA FILIERE EN AOC 4.1. Les contraintes 4.1.1. Contraintes phytosanitaires Maladies La culture de manioc a été dévastée dans beaucoup de pays par de nouvelles formes plus virulentes du virus de la mosaïque du manioc. Cette maladie est la contrainte la plus importante à la production et a menacé ces dernières années la sécurité alimentaire de millions de familles rurales et urbaines, notamment en Afrique de l’Est23. Elle peut entraîner des chutes de rendement allant de 20 à 60%, voire une destruction totale de la récolte. La bactériose vasculaire peut endommager les boutures et entraîner des pertes allant de 20 à 100% de la production. D'autres maladies comme l'anthracnose et la pourriture des racines peuvent également attaquer le manioc. Ravageurs Ce sont le tétranyque, la cochenille et les sauterelles. Ils peuvent attaquer les différentes parties de la plante: feuilles, tiges et les racines. Les dégâts causés par ces ravageurs peuvent être visibles, mais il n’en résulte pas nécessairement des pertes de rendement. Adventices Les adventices attaquent les champs de manioc et font subir à l’agriculteur d’énormes pertes de rendement dues à la compétition livrée au manioc pour les éléments nutritifs, l’éclairement et l’espace. Les adventices peuvent fournir un abri aux ravageurs et maladies ou infliger des dégâts physiques aux pieds de manioc et aux racines tubéreuses. Elles peuvent également abriter des ennemis naturels d’insectes nuisibles. 24 4.1.2. Autres contraintes Aptitude au stockage limitée des racines de manioc fraîches Une fois récolté, le manioc se détériore rapidement de sorte qu'il doit être consommé ou traité très vite. Les racines pourrissent dans les 2 à 3 jours qui suivent la récolte. Sa marchandise devenant rapidement invendable, le vendeur va essayer de compenser ce risque commercial au niveau de la formation des prix, ce qui explique que le consommateur urbain achète les racines de manioc fraîches à un prix relativement élevé (F.A.O., 1988)25. Au Cameroun, les pertes post-récolte dues au pourrissement peuvent aller jusqu'à 45% de la production (CMA/AOC, Rapport final 2003). Faiblesse des infrastructures de transformation et de transport 23 http://www.worldbank.org http://www.iita.org 25 http://www.gtz.de 24 10 En AOC, la transformation du manioc se fait essentiellement de manière informelle, à l'échelon familial, 1% seulement se retrouve dans les industries de transformation. En plus, les zones de production sont parfois difficilement accessibles du fait des réseaux routiers défectueux et de l'absence de réseaux ferroviaires performants. Faible investissement dans la recherche de manioc et amélioration génétique de la plante difficile26 Malgré l'utilité reconnue du manioc dans la lutte contre la faim, l'investissement dans la recherche reste faible dans ce domaine. Au cours des 30 dernières années, les avancées ont été mineures en ce qui concerne la productivité du manioc : moins de 1% comparé aux 2-5% pour le riz, le blé et le maïs. En Afrique, le rendement moyen d'un hectare de manioc est de 8 tonnes contre 80 tonnes en théorie. Par ailleurs, en utilisant des méthodes de sélection classiques, les scientifiques ont cherché à améliorer la productivité du manioc, sans grand succès car la constitution génétique de ce tubercule est complexe et rend les recherches longues et difficiles. Présence de substances toxiques dans le manioc Les racines fraîches de certaines variétés de manioc contiennent de l'acide cyanhydrique qui est un poison violent. Une alimentation uniforme, essentiellement fondée sur la consommation de ces produits peut être cause d'intoxications, de carences ou de malformations. Ce type de manifestations apparaît notamment lorsque les racines de manioc ont été insuffisamment détoxiquées et quand l'apport en protéines est insuffisant.27 Le matériel végétal utilisé est parfois insuffisant et n'est pas toujours de bonne qualité 4.2. Les facteurs dynamisants Existence de débouchés (intérieur, sous-régional et international), particulièrement pour les produits transformés (cossettes, gari et tapioca);28 Climat favorable et existence de vastes zones agro-écologiques propices à la culture du manioc; Grande expérience des populations dans la production et la transformation du manioc; 26 27 28 http://www.fao.org www.gtz.de www.fao.org 11 Le développement de variétés résistantes au virus de la mosaïque du manioc est l'un des grands succès de la recherche en Afrique et a déjà amélioré la sécurité alimentaire de plusieurs centaines de milliers de personnes. Dans certaines régions de l'Ouganda, jadis en proie à la famine, le changement est énorme: l'introduction de trois variétés en 1994 a entraîné une surproduction de manioc.29 Selon la FAO, les techniques de pointe en matière de biologie moléculaire et de biotechnologies peuvent rendre le manioc beaucoup plus productif, nutritif et rentable. Productivité du travail élevée: comparé aux autres plantes à racines et tubercules, le manioc a une productivité du travail élevé. Pour un rendement de 10 tonnes à l'hectare, il faut prévoir 120 journées de travail (niveau travail manuel) (COCK, 1985), ce qui correspond à peu près à un quart de la somme de travail nécessaire pour produire la même quantité d'igname.30 4.3. Rôle alimentaires dans la prévention et l'atténuation des crises Le manioc constitue une denrée vitale pour la sécurité alimentaire parce que sa culture est fiable et produit des rendements permettant de survivre lorsque des conditions climatiques défavorables provoquent l’échec des cultures de céréales et de graines de légumineuses.31 En effet, la plante s'accommode très bien de la sécheresse et des terres arides. Elle est également peu exigeante en engrais et produits phytosanitaires et ne demande aucun soin spécifique. En culture extensive, le manioc peut avoir des rendements de 10 tonnes à l'hectare. A maturité, le manioc peut être récolté ou laissé en terre pendant plus d'un an. Il permet ainsi de se prémunir contre les pénuries alimentaires et de couvrir les dépenses familiales imprévues. Les propriétés économiques de la plante, ainsi que sa rusticité, sont à l'origine de sa réputation de "plante de disette".32 La racine de manioc a une forte teneur en calorie, la plus élevée de toutes les cultures vivrières de base rencontrées en AOC. Elle constitue donc une source peu coûteuse d’hydrates de carbone pour les populations urbaines. Les feuilles sont consommées comme légumes verts et contiennent 5 à 8% de protéines et des vitamines A et B. En AOC, la racine est utilisé dans la cuisson d'une gamme variée de plats très prisée par les consommateurs: crêpe, foufou, attiéké, etc. L'amélioration des techniques de production, de transformation et de stockage pourrait éradiquer la faim et la malnutrition dans certaines régions de l’AOC. La FAO rapporte que le Ghana, en introduisant partiellement des variétés de manioc à haut rendement, a réduit son taux de sous-alimentation plus rapidement que 29 http://web.idrc.ca www.gtz.de 31 http://www.fews.net 32 www.gtz.de 30 12 tout autre pays dans le monde, entre 1980 et 1996 (FAO: Communiqué de presse 00/25, 2000). L'essor de la farine de manioc de qualité supérieure pourrait aider de nombreux pays en développement à réduire leur dépendance à l'égard des céréales importées. D'après un rapport, en substituant 15% de farine de blé par de la farine de manioc, le Nigeria pourrait économiser près de 15 millions de dollars EU par an.33 Au Cameroun, la recherche a montré que l'incorporation du manioc dans les rations de volaille permet une réduction des coûts de production d’environ 40%. 33 www.t-a-c.org 13