"TRAFFIC", UN FILM POLITIQUE QUI REVEILLE LES CONSCIENCES

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"TRAFFIC", UN FILM POLITIQUE QUI REVEILLE LES CONSCIENCES
Liberte Politique
"TRAFFIC", UN FILM POLITIQUE QUI REVEILLE LES
CONSCIENCES
Article rédigé par Damien Meerman, le 13 mars 2001
PARIS,[DECRYPTAGE/analyse] - Steven Soderbergh, dans son dernier film " Traffic " (5 nominations aux
Oscars), nous met en face du problème social et politique numéro 1 dans le monde : la drogue.
Il montre avec une grande virtuosité et dans un style quasi documentaire comment la drogue gangrène tout
et comment certains tentent de combattre ce fléau.
Mais le message qui ressort de ces 2 heures 27 de suspens et d'émotions, c'est le constat pessimiste d'un
échec de la lutte contre les trafiquants. Le combat est trop inégal devant la puissance financière des cartels.
Soderbergh est réaliste. En effet, au-delà de la fiction, les chiffres sont effarants : le marché mondial de la
drogue est évalué à 500 milliards de dollars par an. Par comparaison, le programme des Nations Unies pour
le contrôle international des drogues est de 75 millions de dollars par an, soit une somme totalement
dérisoire. Les douanes estiment que 5 à 10 pour cent seulement des quantités de produits illicites en
circulation sont saisies. Les trafiquants disposent d'un pouvoir économique et politique gigantesque,
absolument sans précédent. Ils disposent de moyens financiers bien supérieurs à l'ensemble des budgets
consacrés par tous les pays du monde pour la lutte anti-drogue. Par le fait même, ils disposent aussi de
nombreux appuis politiques dans les institutions légales. La corruption pénètre les gouvernements, les
parlements, les palais de justice et l'économie légale est largement infiltrée par l'argent blanchi.
Dans diverses interviews, le réalisateur de " Traffic " a donné son interprétation politique et philosophique
du film. Il insiste beaucoup sur le fait que le problème de la drogue devrait concerner tout le monde. La
politique antidrogue aux USA a été un échec, dit-il, parce qu'on a eu tort de croire ou de faire croire qu'il
s'agissait seulement du problème de la police. " Je constate qu'on a fait de la drogue un problème criminel,
aux Etats-Unis, au lieu d'en faire un problème de santé. " Or chaque famille représente une cible pour la
drogue et chaque individu est une victime potentielle. On ne peut pas lutter contre les trafiquants si on ne
lutte pas d'abord dans la société elle-même contre la dépendance aux drogues. L'offre n'existe pas sans la
demande. Or la demande de drogue, avant d'être un délit est d'abord une détresse, la détresse d'un malade,
privé de liberté, qui ne peut survivre sans sa dose...
Le véritable enjeu c'est la prévention, plus que les soins eux-mêmes. Car la prévention s'effectue en amont
de la drogue, elle s'adresse d'abord à ceux qui ne sont jamais passés à l'acte, à ceux qui ne sont pas encore
consommateurs et pour lesquels l'interdit social, sanctionné par une politique de pénalisation claire,
constitue une protection déterminante. Avec une bonne politique de prévention, on évite ensuite de
nombreux ravages humains et sociaux.
Contrairement à Oliver Stone et à son école, Steven Soderberg signe ici un film politique tout en finesse, qui
réveille les consciences, sans faire de militantisme idéologique.
Damien Meerman anime le site www.drogue-danger-debat.org
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