Pakistan:lacriseavec lesEtats-Uniss`aggrave

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Pakistan:lacriseavec lesEtats-Uniss`aggrave
LIBÉRATION LUNDI 28 NOVEMBRE 2011
MONDEXPRESSO
Par LUC MATHIEU
LA MALAISIE SE
LANCE DANS LES
FEMMES TAXIS
24
C’est le nombre d’oppo­
sants koweïtiens dont la
garde à vue a été prolon­
gée, hier, alors que des
milliers de protestataires
étaient réunis devant le
palais de justice. L’opposi­
tion demande le départ du
Premier ministre, neveu de
l’émir accusé de corruption.
LES GENS
SALEH ANNONCE
UNE AMNISTIE
AU YÉMEN
Le président yéménite, Ali
Abdallah Saleh, a annoncé,
hier, une amnistie générale
pour «tous ceux qui ont
commis des erreurs durant
la crise», selon un commu­
niqué diffusé à la télévision
d’Etat. Rentré samedi au
Yémen, Saleh vient de
signer en Arabie Saoudite
un plan de médiation après
dix mois de contestation
populaire. L’accord prévoit
son départ dans les quatre­
vingt­dix jours en échange
d’une immunité pour lui et
ses proches. Toutefois,
l’aministie accordée, hier,
ne concernera pas les
auteurs de l’attentat à la
bombe qui a visé le 3 juin
le palais présidentiel. Gra­
vement brûlé, Saleh avait
été transféré dans un hôpi­
tal saoudien pour y être
soigné. PHOTO AFP
7
DÉCRYPTAGE
L’HISTOIRE
Après les trains et les bus,
les taxis. La Malaisie, pays à
majorité musulmane, a
lancé un service de fem­
mes taxis à Kuala Lumpur.
Cinquante conductrices
ont commencé à travailler
sur la base d’appels télé­
phoniques dans la capitale
malaisienne et sa banlieue.
«Nous espérons que cela va
faire baisser le nombre de
femmes victimes de viols et
de vols impliquant des
taxis», a déclaré Heng Seai
Kei, vice­ministre chargé
des Femmes et de la
Famille. Un service de bus
et de train –peints en rose–
réservés aux femmes avait
été inauguré l’an dernier.
•
Au Maroc, les islamistes
prêts à partager le pouvoir
omme la Tunisie, le
Maroc devrait désormais être dirigé par un
parti islamiste. Le PJD (Parti
justice et développement) a
remporté au moins 107 sièges
lors des législatives anticipées de vendredi. Un scrutin
marqué par une participation
de 45,4%, en hausse par rapport aux élections de 2007.
C
Hier, à Peshawar. Hommage aux victimes de la frappe aérienne de l’Otan. PHOTO M. SAJJAD. AP
Pakistan:lacriseavec
lesEtats-Uniss’aggrave
OTAN La mort de 24 militaires pakistanais, ce week-
end, ravive les tensions entre les deux «alliés».
était déjà le «pétrin»,
et cela «s’aggrave»
résume, le plus clairement peut-être, l’ancien
officier de la CIA Bruce Riedel – aujourd’hui analyste à
la Brookings Institution –,
après la très grave «bavure»
de ce week-end à la frontière
entre le Pakistan et l’Afghanistan. Des hélicoptères et
avions de chasse de l’Otan
ont ouvert le feu sur deux
bases de l’armée pakistanaise, tuant 24 soldats et officiers.
Islamabad a fait savoir ce dimanche à Washington qu’il
ressentait un «profond sentiment de fureur» et a aussitôt
décrété des mesures immédiates de rétorsion. Le gouvernement a fermé les deux
principaux points de passage
qui permettent de ravitailler
les forces de l’Otan en
Afghanistan, et a donné
quinze jours aux Etats-Unis
pour évacuer la base aérienne de Shamsi, au Baloutchistan. Elle avait servi par le
passé à mener des attaques
de drones.
Talibans. L’Otan et les EtatsUnis ont exprimé leurs «condoléances» aux forces armées
pakistanaises et promis une
enquête sur les circonstances
de cette bavure, la plus grave
depuis le début de la guerre
en Afghanistan, en 2001. «Il
est clair que quelque chose a
très mal tourné», a reconnu
un haut responsable américain, cité par le New York Times. Côté américain, on rappelle pourtant que les forces
C’
de l’Otan déployées dans
l’est de l’Afghanistan sont
fréquemment l’objet de tirs
provenant de positions proches de postes militaires pakistanais. Ils pourraient ainsi
avoir provoqué les frappes de
ce week-end, laisse-t-on
entendre à Washington.
Cette tuerie survient à un
moment où la relation entre
le Pakistan et les Etats-Unis
est en train de «s’écrouler»,
rappelle Bruce Riedel, chargé
gne que les Américains violent, de façon répétée, la
«souveraineté nationale». A
Washington, on soupçonne
les militaires pakistanais
d’avoir protégé pendant des
années l’ennemi public numéro 1 des Etats-Unis.
Si envenimée soit-elle, la relation avec le Pakistan est
pourtant «sans alternative»
pour les Etats-Unis, souligne
l’analyste Vali Nasr, autre
expert à la Brookings qui a
aussi conseillé le
gouvernement :
Si envenimée soit-elle,
«A partir du mola relation avec Islamabad
ment où l’adminisest pourtant sans alternative tration Obama a
pour Washington.
décidé de retirer
ses troupes d’Afau début de la présidence ghanistan d’ici à 2014, elle n’a
Obama d’un état des lieux de pas d’autre choix que d’esla politique américaine dans sayer de stabiliser ses relations
la région. En Afghanistan, avec le Pakistan.»
Pakistanais et Américains «Patience». L’attention et
sont même pratiquement en l’aide accrue apportées à Isguerre indirecte, les forces lamabad aux débuts du manpakistanaises continuant de dat de Barack Obama ont
soutenir les talibans afghans. d’ailleurs porté leurs fruits,
Obama, qui avait bien re- rappelle Vali Nasr. «Le proconnu à son arrivée à la Mai- blème est qu’à partir de 2009,
son Blanche qu’Islamabad les Etats-Unis ont commencé
était l’une des clés de toute à trouver que le verre était à
solution en Afghanistan, et moitié vide, explique cet anaqui avait promis une visite au lyste. L’administration amériPakistan cette année, n’a caine manque de patience.
toujours pas mis cette pro- Mais les pressions exercées sur
messe à son agenda.
le Pakistan ne font qu’aggraLe problème est aussi que le ver les tensions. A partir du
raid de mai qui a permis de moment où on décide de quitter
tuer le chef d’Al-Qaeda, l’Afghanistan, on ne peut pas
Oussama ben Laden, au se permettre une escalade de
cœur d’une ville de garnison tension sur le terrain.»
pakistanaise, a avivé les resDe notre correspondante
sentiments dans les deux
à Washington
pays: au Pakistan, on s’indiLORRAINE MILLOT
Comment s’explique
la victoire du PJD ?
Conservateur, le parti islamiste a axé sa campagne sur
la lutte contre la corruption
et la nécessité de réformer la
justice, l’enseignement et la
santé. Il a surtout promis de
diminuer le chômage, un
thème porteur dans un pays
où plus de 30% des moins
de 34 ans n’ont pas d’emploi.
«Le PJD a joué sur la proximité
avec le citoyen en utilisant un
langage simple et rassurant. Il
tire sa légitimité de son implication dans les réseaux associatifs d’aide aux plus démunis», explique Haoues
Seniguer, enseignant à l’institut d’études politiques de
Lyon.
Historiquement proche des
Frères musulmans, le PJD
avait fait campagne il y a
quelques années contre l’organisation de festivals musicaux et pour l’obligation
faite aux femmes de porter le
voile. Abdelilah Benkirane,
le chef du PJD, a tenu cette
fois à donner l’image d’un
parti modéré, assurant par
exemple qu’il n’entendait
pas bannir la consommation
d’alcool. Il a aussi assuré que
les relations du Maroc avec
les pays occidentaux
n’étaient pas menacées.
Dans des élections marquées
par l’appel au boycott du
mouvement contestataire du
20 février, le parti islamiste,
qui comptait 47 députés dans
la précédente Assemblée, a
enfin bénéficié de sa position
d’opposant. «Les membres du
PJD n’ont jamais fait partie du
gouvernement. Ils ne sont pas
victimes de l’usure du pouvoir
et du discrédit qui frappe
depuis plusieurs années les
partis traditionnels», explique Haoues Seniguer.
Le PJD pourra­t­il
gouverner seul ?
La dispersion des voix entre
des dizaines de partis oblige
les islamistes à former une
coalition. Le «G8» libéral,
qui regroupe huit formations
proches du pouvoir, a refusé
toute alliance avec le PJD.
L’Istiqlal, dirigé par Abbas
el-Fassi, l’actuel Premier ministre, et l’Union socialiste
des forces populaires (USFP)
se sont en revanche dits prêts
à intégrer une coalition. Les
négociations seront menées
par le futur chef du gouvernement, qui devrait, selon
les termes flous de la nouvelle Constitution, être choisi
par le roi Mohamed VI au
sein du parti islamiste. Mais
les marges de manœuvre du
PJD, qui ne remet pas en
cause la monarchie, seront
d’autant plus limitées que le
roi conserve la gestion de
«domaines réservés», dont la
Défense, la Sécurité intérieure, la Religion et les Affaires étrangères. •
adopté des sanctions contre
le régime, dont le gel des
transactions avec le gouvernement syrien. PHOTO REUTERS
COLOMBIE Quatre otages
des Farc ont été tués samedi
lors de combats entre la guérilla marxiste et l’armée dans
le sud du pays, selon le gouvernement. Parmi eux figure
le militaire José Libio Martinez, enlevé en 1997. Un
otage a pu s’enfuir.
SYRIE Au moins 15 civils ont
été tués et plus de 25 blessés,
hier, par des tirs des forces
de sécurité, selon une ONG
syrienne (en photo, une manifestation à Deir-Baalba).
La Ligue arabe a par ailleurs
MALI L’une des voitures des
ravisseurs des deux Français
enlevés jeudi a été localisée
dans le nord du Mali. Les ravisseurs se seraient scindés
en deux groupes après l’enlèvement pour semer les militaires français et maliens
qui les recherchent.