La vie quotidienne au XXIe siècle

Transcription

La vie quotidienne au XXIe siècle
CLAUDE LEBRUN
De la rédaction
La vie quotidienne
au XXIe siècle
...et zeste de zen
rois choses m’ont frappée dans notre dossier travail :
l’absence de plus en plus grande de ce que nos chercheurs
nomment le « temps de flânerie »; l’association faite entre le
manque de temps libre et la perte d’âme dans nos cultures ;
et le fait que les enfants soient soumis très jeunes à la pression de
produire en vitesse.
***
Le temps de flânerie est du temps pour soi. Cela suppose un vide,
de l’ennui peut-être, de la perte de temps, une capacité de ne rien
faire et de laisser être toutes choses qui ne sont pas au palmarès de
nos valeurs collectives. Pourtant, ce temps spontané, non structuré,
est essentiel au goût de vivre, à la régénération, à la réflexion et à la
créativité. Sans cet entre-deux non productif : pas d‘espace pour élaborer des visions. Le lien entre le manque de temps et notre absence
flagrante de vision collective s’est imposé à moi à la relecture de ce
dossier.
***
Dans un tout autre contexte, une chercheuse du Centre d’études
sur la mort et le deuil, commentant les problématiques reliées au
deuil dans nos sociétés, a eu cette expression lapidaire : « (…) être
malade vite, mourir vite, faire le deuil vite, et retourner au travail
vite. » Nos recherches montrent que nous rognons sur les activités
fondatrices de la vie quotidienne pour dégager du temps de production. L’hypothèse du manque de temps nous permet soudain de lire
sous un tout autre angle « la perte de sens » qu’on déplore souvent
dans les médias, et que les ados nous pointent régulièrement du
doigt.
***
Terminons le tout par une petite touche de zen bien au goût du
jour, teintée de maturité baby-boomer et de résistance sociale
(qui semble elle aussi revenir au goût du jour, vous le verrez dans
ce numéro…).
Il y a vingt ans, lors d’un long séjour en Asie, j’avais rencontré un
vieil homme qui m’avait demandé à brûle-pourpoint : « Where are
you running so fast Paula ? »*
Cette simple question que j’avais décodée au niveau métaphysique (Asie in the sixties oblige !) m’avait alors frappée comme une
claque en plein visage. Plus tard, il avait terminé l’entretien en disant :
« There is nowhere to go ! » **
La question du vieil homme et son commentaire final, sont
aujourd’hui plus que jamais pertinents. Pourquoi courons-nous si
vite ? Pour aller où ?
Bref, voici pour ce numéro de Réseau une saisie anthropologique,
si rapide soit-elle, de certains aspects de la vie quotidienne aux
XXIe siècle.
Bonne lecture.
Paule Lebrun
Rédactrice en chef
* Où courez-vous si vite Paule ?
** Il n’y a nulle part où aller !
Courrier
Écrivez-nous !
Éloge de la lenteur
J’ai aussi été touchée par les propos d’un autre de nos chercheurs
dont les études démontrent que les enfants, dès la garderie, sont
soumis à la loi de la vitesse et au manque chronique de temps. Je me
suis rappelé un neveu, dont j’aime l’intelligence, qui a beaucoup de
difficultés à l’école parce que c’est un lent, qu’il aime réfléchir et
prendre le temps de faire le tour d’une question alors que les tests
doivent être faits dans un temps record. Ici aussi un lien s’est
imposé : comment la vitesse et l’information semblent aller de pair
et comment la connaissance (qui demande un approfondissement)
exige du temps. Mais qui veut vraiment la connaissance aujourd’hui ?
***
Membres du réseau de l’Université du Québec, professeurs,
chercheurs, administrateurs, membres du personnel, retraités, étudiants, lecteurs, faites-nous connaître votre opinion et
vos commentaires sur les articles.
Les textes, d’un maximum de 250 mots, doivent être signés,
en plus de préciser l’établissement auquel vous appartenez.
La rédaction se réserve le droit de réduire, de modifier et de
publier ou non votre texte.
Au plaisir de vous lire.
Magazine Réseau
a/s Paule Lebrun
Rédactrice en chef
322, rue Ontario Est
Montréal (Québec)
H2X 1H6
Téléphone : (514) 990-5225
Fax : (514) 847-5323
Courriel :
[email protected]

Documents pareils