Deuxième partie

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Deuxième partie
Société Astronomique du Valais Romand
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Introduction à la spectrométrie
Deuxième partie : le spectre du corps noir
par Alain Kohler
par Alain Kohler
1. Le rayonnement du corps noir
Un corps noir est un corps qui absorbe tout le rayonnement extérieur qui lui vient dessus. Dans la réalité
un corps noir parfait n’existe pas : le noir du carbone absorbe par exemple
97 % du rayonnement incident donc les 3 % sont réfléchis ou diffusés. Un corps noir n’apparaît pas forcément noir : on demande seulement qu’il absorbe
tout mais il réémet ce qu’on appelle un rayonnement
thermique qui peut être visible.
Le spectre du Corps noir
Le corps noir
de l’intensité émise en fonction de la longueur d’onde
fut trouvée par le physicien allemand Max Planck
(1858-1947) et fut à l’origine de la mécanique quantique (cf plus loin), la mécanique classique étant incapable d’expliquer cette distribution.
La meilleure façon de s’imaginer un corps noir est de
penser à une enceinte complètement fermée sauf à un
seul endroit où l’on perce un petit trou : le rayonnement qui pénètre par le petit trou a quasiment aucune
chance d’y ressortir directement, il tappera des tas de
fois la paroi de l’enceinte, sera « mélangé » avec les
autres rayonnements. On dit qu’il sera thermalisé.
Le rayonnement émis par l’enceinte qui sort par le petit trou est appelé rayonnement du corps noir : fait remarquable, cette radiation thermique ne dépend pas
de la nature des parois de l’enceinte mais ne dépend
que de la température.
Max Planck
2. Spectre du corps noir et spectre continu
Le corps noir n’émet pas une seule longueur d’onde
(ou une couleur précise) mais en fait toutes les longueurs d’onde sont représentées mais avec des intensités très différentes. Cette distribution de l’énergie en
fonction de la longueur d’onde est appelée distribution spectrale ou spectre du corps noir.
Comme toutes les longueurs d’onde sont représentées
on parle de spectre continu. La courbe de distribution
On remarque par ailleurs que notre Soleil a un spectre
continu très proche de celui d’un corps noir. Il en va
de même pour la plupart des étoiles.
Pour le Soleil, on remarque un pic d’intensité pour
une longueur d’onde proche de 500 nm (couleur
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Le spectre solaire (en jaune)
superposée au spectre du
corps noir (en gris)
verte) : le Soleil émet toutes les couleurs de l’arc en
ciel, avec une intensité prononcée dans la lumière
verte, et moins d’intensité dans le rouge et le violet.
La somme de ces couleurs est perçue par notre œil
comme une unique couleur jaune claire. Remarquez
en passant que les étoiles perçues comme vertes
n’existent pas : cela tient à une sorte d’équilibre des
couleurs (le bleu et le rouge sont à peu près de même
intensité) et l’addition donne du blanc. En cas de léger
déséquilibre, on aura des étoiles blanches un peu
bleutées ou des étoiles blanches un peu jaunes.
Pour les étoiles, la loi de Wien sert à mesurer la température de surface de l’étoile. Il suffit de repérer
quelle longueur d’onde est la plus intense, puis en déduire par la loi de Wien, sa température de surface.
Prenons l’exemple du Soleil avec un pic à la longueur d’onde
λ max
= 500 nm = 0,5 µm.
Sa température de surface est :
T = 2'900 / λ max
3. La loi de Wien
Le physicien allemand Wilhelm Wien (1864-1928)
mit en évidence que plus la température du corps noir
est élevée, plus le pic d’intensité se déplace vers les
courtes longueurs d’onde :
λ max
=
2'900 / T
λ max = longueur d’onde en µm ayant la plus
grande intensité
T = température absolue en degré Kelvin
Autrement dit si on constate un corps A avec un pic
d’émissivité à 500 nm et un corps B avec un pic à
1'000 nm ( = 1 µm), le corps A aura une température
deux fois plus élevée que le corps B.
C’est un phénomène bien connu : quand on chauffe
une plaque, elle est au début noire, puis passe dans le
rouge sombre (longueur d’onde grande) puis dans le
rouge-orange (moins grande longueur d’onde). Donc
quand la température de la plaque augmente, la longueur d’onde du pic d’émissivité baisse.
Wilheim Wien
= 2'900 / 0,5 = 5'800 K
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Les étoiles perçues bleues par notre œil rayonnent
beaucoup plus en couleur bleue qu’en couleur rouge.
Elles rayonnent aussi beaucoup de violet et d’ultraviolet. Soit une étoile ayant un pic à 250 nm = 0,25
µm (proche ultraviolet). Sa température de surface
vaut :
T = 2'900 / 0,25 = 11’600 K,
soit le double que sur le Soleil
Pour les étoiles perçues rouges, c’est le contraire : elles ont une température de surface assez « basse » de
l’ordre de 3'000 K.
Les étoiles rouges ont des températures de surface
plus basses que les étoiles bleues
C’est exactement l’opposé de l’information de notre bon vieux robinet !! En éclairage, on parle également « à l’envers » en parlant de
couleur chaude pour un éclairage
tirant plus vers le rouge et de couleur froide pour un éclairage tirant
vers le blanc-bleu.
En résumé, si par un moyen quelconque (prisme ou réseau, voir plus
loin), on est capable de décomposer
la lumière d’une étoile, la mesure
spectrométrique de la longueur
d’onde relative au pic d’émissivité
nous donne la température de surface de l’étoile.