L`art-thérapie en contexte d`intervention interculturelle
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L`art-thérapie en contexte d`intervention interculturelle
2016-02-19 L’expression par l’art pour soutenir l’intervention auprès de personnes réfugiées 1 Elizabeth Aubin D.Ps. Psychologue Maryse Benoit Ph.D. Professeur département de psychologie Chercheur Institut de recherche CIUSS -CHUS Estrie 10 février 2016 Introduction 2 MISE EN CONTEXTE ORIGINES DE L’INTERVENTION COLLABORATIONS / RECHERCHE -ACTION Chercheure principale: Maryse Benoit Co-chercheurs: Elizabeth Aubin, D.Ps. Louise Rondeau, T.S. Sonia Godbout, Pséd. Anne Giguère, M.Ps. Consultant: Dr. Daniel Guimaraes, MD Introduction 3 INTERVENTION DE GROUPE OBJECTIFS DE L’INTERVENTION OBJECTIFS DE LA RECHERCHE-ACTION Pérenniser l’intervention Création d’un manuel d’intervention 1 2016-02-19 L’art-thérapie 4 La formation 5 Le titre d’art-thérapeute AATQ (Association des art-thérapeutes du Québec) Pas d’ordre professionnel pour le moment Discussion en lien avec la loi 21 (psychothérapie) Qui fait de l’art-thérapie Les art-thérapeutes D’autres intervenants intègrent des modalités artistique dans leur pratique (ergothérapeutes, psychologues, travailleurs sociaux, psychoéducateurs, éducateurs spécialisés, enseignants…) - pas de « l’art-thérapie » par contre La formation Formation 2e cycle (Université du Qc. en Abitibi-T., Université Concordia) (Formation de premier cycle: arts visuels, la psychologie, la sociologie, la psychiatrie, les soins infirmiers, le travail social, l’ergothérapie, ou l’éducation) Modalités d’intervention artistique 6 Théâtre Jeu de sable Musique Danse Poésie Artisanat Arts visuels Etc 2 2016-02-19 Avantages de l’art en intervention 7 Moyen de communication moins connu (résistance réduite) Produit concret: permet une distanciation permet de reconnaître des émotions tout en s’en dissociant pour transiger avec elles et les réintégrer consciemment par la suite Permanence de l’objet créé: on peut y revenir dans le temps Si on arrive à se libérer des contraintes de l’esthétique, permet d’aller dans l’imaginaire et l’inconscient Spatialité du langage, permet d’exprimer l’expérience plutôt que de la décrire Référence (Marie Gérin, M.A., ATPQ) « L’art en thérapie » 8 Soit l’unique modalité thérapeutique ou ajoutée à d’autres interventions (Malchiodi, 2012) Les techniques varient selon: buts, clients et fondements théoriques (Forestier, 2007) Thérapeutique en soi ou comme moyen de communication symbolique (Heller, 2012) Controverse sur le besoin de verbaliser « L’art pour l’art » versus « l’art comme modalité d’intervention » Lignes directrices 9 Certains éléments font généralement consensus: Aucun talent artistique préalable n’est requis (Liebmann, 2004) L’image ou l’objet créé est considéré d’abord en fonction de sa valeur affective (Heller, 2012) L’intervenant ne cherche pas à interpréter l’œuvre, mais incite plutôt celui qui l’a créé à interagir avec son œuvre, à investir sa production artistique (Benoit & Makhoul, 2004) 3 2016-02-19 Capsule pratique 10 EXPÉRIMENTATION D’UNE MODALITÉ D’INTERVENTION: LE DESSIN COLLECTIF FORME Z D E S GROUPES D E 5 PE RSONNES MAT É RIEL ART ISTIQUE: LIBRE T E MPS AL L OUÉ: 20 SE CON DES PAR T OUR Intervention auprès de personnes immigrantes et réfugiées 11 Population immigrante / réfugiée au Québec 12 Portrait de l’immigration au Québec (2014): 50 275, (2013): 51 976, (2012): 55 044 Recensement de 2011: 12.6 % de la population québécoise est issue de l’immigration (20.6% pour le Canada) Le portrait en Estrie Actuellement, les communautés de réfugiés: Afghanistan, Bhoutan, Colombie, Irak, Région des grands Lacs en Afrique *Référence: statistiques de Immigration et communautés culturelles, Québec. 4 2016-02-19 Quelques ressources à Sherbrooke 13 SANC Accueil, soutien, suivi Clinique des réfugiés Internat spécialisé en intervention post-traumatique et transculturelle (CIPUS – UdeS) CSSS – Centre hospitalier Santé mentale adulte (groupe pour réfugiés ayant vécu de la violence) Intervention de quartier (Ascot et Jardin-Fleuris) Quelques particularités des populations immigrantes 14 Exposition à différents types de violence (violence organisée ou liée à la guerre) – traumatismes multiples et répétés Déplacements forcés , fuites, exils Parcours migratoires / transit dans des camps de réfugiés Présentement, communauté Bhoutanaise (plus de 15 ans dans camps de réfugiés dans certains cas) Statuts de réfugiés / demandeurs d’asile Réalité psychosociale et santé psychologique 15 Deuils multiples, séparation des proches/ famille Perte de statut (social, familial) Perte de repères identitaires et culturels Réactions post-traumatiques Difficultés d’adaptation Anxiété, dépression, abus de substances Conflits familiaux et interpersonnels 5 2016-02-19 Situation de consultation 16 Les personnes réfugiées / immigrantes semblent sous-utiliser les services d’aide psychologique conventionnels (Par ex: psychothérapie individuelle verbale) + Les intervenants témoignent parfois d’un sentiment d’impuissance – d’être peu outillés pour intervenir en contexte interculturel (Chen 2010; Vasilevska & Simich, 2010) Défis pour la consultation 17 Peu familiers avec ce type d’intervention (psychothérapie) Réticences à reparler de ce qu’ils ont vécu (Peur de se blesser ou de blesser (traumatiser) l’intervenant) Connaissance limitée des services et disponibilité de ceux-ci Méfiance face aux institutions gouvernementales Barrières de la langue Différences culturelles quant à La conception de la « santé mentale » et de la pathologie Stratégies de régulation émotionnelle Méthodes de guérison Défis pour les intervenants 18 Complexité des cas Histoires difficiles à entendre + charge émotionnelle Barrières de la langue + travail avec les interprètes Être confrontés à des valeurs différentes qui font réagir Risque d’impasses dans l’intervention 6 2016-02-19 Nécessité d’adapter les services 19 D’où l’importance d’adapter les services: - Demande à l’intervenant d’être plus pro-actif, interactif, aller vers… - Intervention de proximité - Trouver des alternatives ou des compléments aux interventions de soutien psychologique conventionnelles Intervention de groupe (effet de portage) Moins axée sur la verbalisation et l’expression directe des émotions Incorporation de pratiques de guérison culturellement significatives Maximiser les liens sociaux Intervention en contexte post-traumatique 20 Intervention en contexte post-traumatique 21 Près de 60% des réfugiés et 40% des immigrants ont été exposés à des actes de violences et persécutions pré-migratoires » (Rousseau & Drapeau, 2004) Particularité de l’exposition à la violence liée à la guerre et à la violence organisée : Brisure identitaire + brisure des liens sociaux - Violence intentionnelle faite pour briser l’autre, une société, des liens sociaux - Exposition à la brutalité humaine - Violence à répétition provoque une méfiance qui s’immisce dans les relations à l’autre, à ses proches, à Dieu et à soi 7 2016-02-19 Objectifs d’intervention en contexte post-traumatique 22 - Décristalliser l’identité traumatique - Favoriser régulation émotionnelle - Redonner une sentiment de pouvoir - Favoriser l’intégration de l’expérience émotionnelle et les mémoires du vécu traumatique Intervention en contexte post-traumatique 23 Des souvenirs traumatiques difficilement accessibles Encodés dans les zones pré-verbales de l’hémisphère droit (Harris, 2009) Mécanismes de défense et de protection (évitement émotionnel, cognitif, comp) Censure Menace de représailles si dévoilement Peur de traumatiser son interlocuteur (traumatisme vicariant) Ne veut pas en reparler – se retraumatiser Tabou dans certaines cultures de parler de souffrance personnelle Se sent honteux de ses réactions et de ce qui est arrivé Intervention en contexte post-traumatique 24 L’alternative du groupe → Pour permettre de recréer des liens sociaux, réapprivoiser le rapport à l’autre Modalités non verbales (par le mouvement, danse, expression artistique ) → Pour revisiter de manière sécuritaire le vécu traumatique et exprimer autrement la souffrance 8 2016-02-19 L’art en soutien à l’intervention 25 Fonction de l’art en contexte interculturel 26 Canal de communication plus inhabituel contourner les mécanismes d’adaptation Langage alternatif Contourner difficultés communication intervenants – clients Moins besoin de la traduction: une communication affranchie des mots Faciliter un certain laisser-aller, relâchement des pulsions et affects réprimés, et ventilation de surcharge émotionnelle aider à laisser émerger des souvenirs traumatiques L’art en contexte interculturel 27 Abstrait ou symbolique Permet une certaine expression tout en maintenant de saines défenses psychiques (fonction de contenant) Exprimer l’essentiel de l’émotion sans entrer dans les détails du trauma Symboliser artistiquement d’éventuels secrets et ainsi les externaliser de façon plus implicite Moins confrontant de parler de sa création que de soi 9 2016-02-19 L’intervention proposée 28 L’intervention proposée 29 Dans les locaux d’intervention de quartier Milieu moins « institutionnel », collation, friperie gratuite sur place, proche de chez elles… Intervenantes du CSSS Deux intervenantes (psychoéducatrice ou Travailleuse sociale ou psychologue) Un psychiatre répondant Équipe de recherche de l’Université de Sherbrooke Psychologue chercheure (spécialisée en intervention transculturelle + trauma) 2 thèses de doctorat + observateurs participants + assistanats recherche Les participantes 30 Critères de sélection être une femme adulte immigrante ou réfugiée avoir subi des expériences de violence être physiquement et psychologiquement en mesure de participer à 12 séances hebdomadaires d’une durée de deux heures chacune Critères d’exclusion éprouver des difficultés psychologiques pouvant nuire à la participation au groupe (p. ex. des symptômes psychotiques ou une dépression sévère) * Références provenant CSSS, SANS, Francisation… 10 2016-02-19 Colombienne Inter. Arable Colombienne Inter. Dari Afghane Inter. Esp. Afghane Observateur Congolaise Iraquien ne Observateur Psycho éd. 31 T. Sociale Séquence d’intervention 32 12 séance de 2 heures Rencontre pré-groupe (2 mois avant début du group) Entrevue sélection + entrevue « post-test » Organisation autour d’une ligne de vie Le présent (séance 1 à 3) Souvenirs d’enfance (séances 4 à 6) Expériences migratoire et pré-migratoire (séance 7 à 9) Le futur, rêve, projet (séance 10 à 12) Inclut expérience post-migratoire et défi liés à l’adaptation à un nouveau pays « Bricolage » entre diverses modalités d’intervention. Activités artistique, psychoéducation, relaxation, génogramme, rituel, discussions… Les activités artistiques 33 Séance 1: Démonstration médiums + exploration médiums + Dessin collectif Séance 2: Autoportrait Séance 3: Carte postale * Séance 4: Espace sécurisant Séance 5: Génogramme * Séance 6: (pas d’activité artistique) Séance 7: Décoration porte-folio Séance 8: Les quatre cadrans Séance 9: Bol de lumière Séance 10: (pas d’activité artistique) Séance 11: Rétrospectives œuvres les plus significatives + création collective Séance 12: Poursuite création collective 11 2016-02-19 34 Expériences antérieures avec des médiums Vignette clinique artistiques (avant le groupe) Aucune expérience antérieure avec l’art Elle considérait le dessin comme une activité d’enfant et en avait elle-même peu fait (retrait de l’école pour travailler avant 10 ans) Verbalise une crainte du jugement et d’une peur de ne pas pouvoir dessiner « correctement » Participation lors des activités artistiques Auto-portrait: représente ses principaux intérêts pour se décrire Espace sécurisant: repense et représente des souvenirs d’enfance positifs dans la maison familiale. Elle présente son dessin comme une époque où elle n’avait pas de soucis et était heureuse 35 Participation lors des activités artistiques (suite) Vignette clinique Dessin des 4 cadrans: Activité très émotive pour P4. Cadran 1 : douleurs actuelles P4: « Cette activité m’a permis de libérer des émotions qui étaient cachées en moi. Ça m’a vraiment aidée à accepter ce qui m’est arrivé et à voir comment je pourrais me libérer de ces souvenirs” 2 1 Cadran 2: première fois où a ressenti la douleur Cadran 3: Comment serait sans la douleur Cadran 4: la transition entre le cadran 1 et 3 3 4 36 Participation lors des activités artistiques (suite) Vignette clinique Bol de lumière: Représente ses principales qualités ainsi que ses espoirs sous une forme symbolique Création collective: Représente le travail qu’elle aimerait occuper dans 5 ans (intervenante au CLSC). Implique qu’elle peut envisager un futur positif (décristalisation de l’identité traumatique), qu’elle a une vision positive du CSSS et un sentiment d’attachement face à cette organisation 12 2016-02-19 37 Évolution de l’investissement dans les activités artistiques Vignette clinique Après l’activité des 4 cadrans, investi davantage l’aspect symbolique des activités artistiques. Prend conscience du potentiel thérapeutique de l’art Au début, participante plus discrète. Vers la fin, assume un certain leadership durant les activités artistiques (p.ex. demande a une autre participante la signification des couleurs qu’elle a choisies) Développe un important lexique personnel des couleurs et symboles (signe d’investissement et d’appropriation des modalités artistiques en tant qu’outil thérapeutique). P. ex. : Noir = douleur, vert = espoir et Soleil = Dieux ou sa foi Appréciation des activités artistiques : très positive P4: « une façon de s’exprimer très appropriée pour moi (…) permet d’exprimer des choses que je ne peux pas mettre en mots » P4: « J’aurais aimé participer à ce groupe avant, je pense que je me serais sentie mieux plus tôt » Évaluation de l’intervention: Les principales retombées 38 Aide à intégrer le vécu traumatique Favorise l’accès aux souvenirs traumatiques Espace de partage et dévoilement du vécu traumatique Favorise la « décristallisation » de l’identité traumatique Favorise la régulation émotionnelle Fonction « contenante » Possibilité d’expression des affects Opportunité de soutient et de normalisation Favorise un état de relaxation et de détente Favorise l’intégration à la société d’accueil Partage de difficultés et d’informations Création de liens entre les participantes Normalisation des difficultés Augmentation envers les services d’aide offerts et envers la société d’accueil Investissement d’un futur prenant place au Québec Résultats: Satisfaction et défis 39 Participantes généralement satisfaites de cette intervention Grande satisfaction des participantes face à ces activités continuer des activités artistiques après le groupe Auraient aimé de telles activités plus tôt après leur arrivée Auraient aimé qu’il y ait poursuite du groupe et des activités artistiques Désirent Interprètes ont aussi apprécié les activités artistiques « moi je suis jalouse des activités artistiques; moi aussi j’aimerais ça pour moi » « je vais proposer ces activités à mes enfants » Une seule participante les a moins appréciées (P6) Peut-être pas les bonnes modalités artistiques « aurait préférée la broderie » Semble avoir moins compris la pertinence des activités C’est la richesse de l’intervention de type « bricolage »; offrir plusieurs modalités pour que chaque participante trouve ce qui lui correspond 13 2016-02-19 Les résultats : Les défis 40 Difficultés « techniques » avec les médiums artistiques Vécus émotifs suscités par les activités parfois intenses P6: « J’avais plein de choses dans ma tête, mais je ne savais pas comment les dessiner » P3: « Pour moi, dans l'activité du bol, c'était le souvenir le plus lourd qui était là. C'était difficile, émotif, de le sortir » Peur du jugement ou anxiété de performance P6: « Au début, je me suis dit, non je ne vais pas dessiner, je ne sais pas dessiner (…), mais à la fin, j'ai quand même réussi à le faire (…) j'étais vraiment très très heureuse (…) En fait, c'est une bonne idée d'essayer de faire les activités malgré ma peur de ne pas le faire correctement » Recrutement Financement et pérennité de l’activité Conclusion Merci de votre participation! 41 Questions Commentaires Partage d’expérience Références 42 Baker, B. A. (2006). Art Speaks in Healing Survivors of War. Journal of Aggression, Maltreatment & Trauma, 12, 183-198. Benoît, A. & Makhoul, D. (2004). Sur le chemin de l’espoir. Guide pratique pour groupe d’entraide à l’intention des femmes ayant subi de la violence suite à des conflits armés. Montréal: Centre des femmes de Montréal. Camic, P. M. (1999). Expanding treatment possibilities for chronic pain through expressive arts therapies. Dans C. A. 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