Transfert chômage-CPAS: quelle conséquence pour les CPAS

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Transfert chômage-CPAS: quelle conséquence pour les CPAS
Association de la Ville et des Communes de la Région de
Bruxelles-Capitale
Section CPAS
Vereniging van de Stad en de Gemeenten van het Brussels
Hoofdstedelijk Gewest
Afdeling OCMW
CONFERENCE DES 19 CPAS
DE LA REGION DE BRUXELLES-CAPITALE
LES PRESIDENTS ET SECRETAIRES
CONFERENTIE VAN DE 19 OCMW’S
VAN HET BRUSSELS HOOFDSTEDELIJK GEWEST
DE VOORZITTERS EN SECRETARISSEN
Bruxelles, le 21 mai 2015
TRANSFERTS CHOMAGE-CPAS :
QUELLES CONSEQUENCES POUR LES CPAS BRUXELLOIS ?
Depuis 2014, les « fins de droit » aux allocations d’insertion font l’objet de débats.
En effet, le gouvernement fédéral précédent a limité la durée des allocations d’insertion à 3
ans maximum. Et le gouvernement fédéral actuel a changé les règles pour l’ouverture du
droit à celles-ci en y rajoutant des conditions de diplôme pour les moins de 21 ans et des
conditions d’âge fixées à maximum 25 ans.
Ces changements législatifs décidés au niveau fédéral s’ajoutent à d’autres mesures telles
que :

la prolongation de 3 mois du stage d’insertion,

les sanctions et exclusions liées au « Plan d’Accompagnement des Chômeurs »,

la dégressivité des allocations de chômage.
Toutes ces mesures ont un impact sur les CPAS.
En effet, en tant que dernier filet de la protection sociale, les CPAS constituent l’ultime
rempart contre la précarisation totale des publics les plus fragilisés de notre Région.
Pour mesurer les conséquences de ces réformes sur les CPAS bruxellois, la Section CPAS de
l’Association de la Ville et des Communes de la Région de Bruxelles-Capitale, en
collaboration avec la Conférence des 19 CPAS, a mis en place un monitoring en janvier 2015.
Cette démarche des CPAS bruxellois a été soutenue par le Ministre-Président Rudi Vervoort
et par le Ministre de l’Emploi Didier Gosuin.
Section CPAS de l’AVCB – rue d’Arlon, 53 bte 4 - 1040 Bruxelles – tél. 02/238.51.57 – fax 02/280.60.90 –
e-mail : [email protected] - site internet : www.avcb.be
Conférence des Présidents et Secrétaires des CPAS – CPAS de Saint-Gilles, 40, Rue Fernand Bernier à 1060 Bruxelles–
tél. 02 /600.54.11– fax 02 /600.54.19
1
Aujourd’hui, nous pouvons vous donner une première évaluation précise du nombre
d’exclus qui ont demandé une aide aux CPAS.
Combien sont-ils exactement? Quel est leur profil ? Sont-ils aidés par les CPAS ?
L’ONEm nous annonçait pour la Région de Bruxelles-Capitale 3.300 personnes sanctionnées
à partir de janvier 2015 suite à des fins de droit aux allocations d’insertion.
Sur les chiffres provisoires du 1er trimestre récoltés auprès des 19 CPAS bruxellois, nous
avons comptabilisé pour le moment :
-
1.480 demandes d’aide liées à des transferts du chômage vers les CPAS,
-
dont 977 uniquement liées à ces fins de droit aux allocations d’insertion,
-
et ces 977 demandes d’aide ont abouti à 736 décisions d’octroi d’aide et 174
décisions de refus (67 demandes sont encore en attente de décision).
Pour donner un ordre de grandeur de ce volume de personnes pour lesquelles les CPAS
bruxellois ont accordé une aide au cours du 1er trimestre 2015, cela équivaut à la charge
mensuelle de bénéficiaires du RIS1 du CPAS de Jette en 2014 (mensuellement, sur l’année
2014, ce CPAS faisait bénéficier 742 personnes du RIS).
Il ressort également de notre monitoring que :
-
Au total, 27% des personnes sanctionnées pour fin de droit ont introduit une
demande d’aide aux CPAS bruxellois2.
-
Ce sont principalement les grands CPAS (soit les CPAS qui bénéficient d’un taux de
remboursement par le niveau fédéral à 70% du montant RIS3) qui ont reçu les
demandes d’aide (Anderlecht, Bruxelles-Villes, Etterbeek, Evere, Forest, Ixelles,
Molenbeek, Saint-Gilles, Saint-Josse-ten-Noode et enfin Schaerbeek). Ces CPAS, qui
représentent 85% de la population RIS au niveau de la Région et 70 % de la population
communale bruxelloise, ont réceptionné 80% des nouvelles demandes suite aux fins
de droit aux allocations d’insertion.
-
Dans plus de 80% des cas, les CPAS ont accordé une aide suite à la demande
introduite.
RIS = Revenu d’intégration sociale
Ce pourcentage est légèrement plus élevé que celui mis en avant par la Fédération des CPAS wallons (22,2%) mais
leurs données couvraient une période de 2 mois.
3 Le solde étant, pour rappel, à charge des communes.
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Au niveau du public en fin de droit des allocations d’insertion ayant introduit une demande
d’aide auprès du CPAS, il faut souligner trois éléments :
-
Ont introduit une demande d’aide auprès du CPAS : 43% des chefs de ménage
sanctionnés, 49% des isolés sanctionnés et 11% des cohabitants sanctionnés.
-
Il s’agit principalement de femmes (58,8%), âgées de 35-44 ans (50,3%) ou entre 25
et 34 ans (33,2%). Les femmes de moins de 25 ans sont très peu représentées (3,6%).
-
Les hommes représentent 41,2% des demandes. Ils sont principalement âgés de 3544 ans (à 49,3%) ou de 25-34 ans (à 32,0%). Les hommes de moins de 25 ans
représentent 5,9% des demandes.
A titre de comparaison, la proportion habituelle des femmes / hommes aidés en RIS par les
CPAS en Région de Bruxelles-Capitale est de 54,8% / 45,2% (chiffres annuels de personnes
différentes, moyenne sur la période de 2008 à 2014) mais les jeunes de moins de 25 ans
représentent 29,5%.
QUELQUES REMARQUES ET QUESTIONS PAR RAPPORT AUX DONNÉES CHIFFRÉES
REPRISES DANS NOTRE MONITORING

Dans les communes dites du croissant pauvre y-a-t-il eu proportionnellement plus de
demandes que dans les autres communes ? La réponse est négative.

Nous avons également vérifié cette dimension au niveau des catégories de personnes. Il
s’avère qu’il n’y a pas eu plus de demandes introduites par des ménages ou des isolés
auprès des CPAS des communes du croissant pauvre. Il n’y aurait donc pas de lien entre
l’introduction de demandes d’aide et le lieu de résidence des personnes touchées par les
mesures.

Introduire une demande d’aide dans un CPAS est un choix individuel. A ce jour nous n’avons
pas d’explication au fait que seuls 27% des personnes sanctionnés pour fin de droit ont
introduit une demande d’aide au CPAS.
Les CPAS craignent cependant le passage d’une situation d’appauvrissement (en termes
financier mais aussi de droits, d’identité sociale et de lien avec la société) à une mise en
abîme pour une partie de cette population. Ce qui, si une demande est introduite au CPAS
tardivement, peut entraîner une personne dans une spirale de problèmes et pour l’institution
une charge de travail qui est beaucoup plus importante que si la demande est introduite plus
tôt. La poursuite de notre monitoring dans les mois à venir permettra de voir si ce risque est
réel.
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Les CPAS bruxellois restent également attentifs aux messages venant du monde associatif.
Jusqu’à présent, nous n’avons pas entendu de signaux d’alarme précisant que le public qui
n’a pas introduit de demande au CPAS ferait appel en masse aux services du monde
associatif.

Dans une Région comme Bruxelles, décrite comme celle des disparités les plus importantes
et où la pauvreté ne fait que croitre, ces chiffres sont interpellants. Nous ne savons pas
pourquoi 73% des personnes sanctionnées pour fin de droit aux allocations d’insertion n’ont
pas franchi la porte des CPAS alors qu’elles se sont appauvries.

Cela nous interpelle aussi en tant qu’institution. Le CPAS pourrait-il ne pas/plus remplir son
rôle de dernier filet de la protection sociale pour ce public ? Au-delà des discussions sur la
fusion ou non des Communes et des CPAS, discussions qui masquent la forêt des problèmes
que rencontrent les gens, il nous semble primordial de remettre les personnes au centre du
discours et de penser les institutions comme forme de réponse à leurs besoins.
Dans cette optique, il faut des informations sur le devenir de ces personnes. Une analyse de
leurs trajectoires dans la Banque Carrefour de la Sécurité sociale nous semble indispensable.
De notre côté, nous allons continuer à monitorer les demandes qui continuent d’être
introduites dans les CPAS bruxellois dans les mois à venir.

Suite aux réformes du système chômage et plus spécifiquement aux fins de droit aux
allocations d’insertion, les CPAS sont confrontés un public qui a (eu) des qualifications mais
qui, à priori, ne les a pas assez validées sur le marché du travail que pour avoir un droit
complet à la sécurité sociale. L’accompagnement par le service régional de l’emploi n’a pas
permis de mettre toutes ces 3.300 personnes à l’emploi. C’est maintenant aux CPAS de s’y
essayer. D’après nos chiffres, 88,5% des personnes sanctionnées (fin de droit aux allocations
d’insertion) émargeant maintenant auprès des CPAS peuvent travailler. Pour les 11,5%
restants, des raisons de santé ou d’équité peuvent être invoquées pour dispenser ces
personnes d’être disponibles sur le marché de l’emploi.

L’insertion socioprofessionnelle des CPAS et la mise à l’emploi via la politique « art 60§7
LO » permettent d’intégrer de manière pérenne certaines personnes sur le marché de
l’emploi. Pour d’autres, cela conduit au chômage. Vu la régionalisation du contrôle de la
disponibilité des chômeurs, il ne s’agit pas que les personnes soient sanctionnées par Actiris
pour ensuite être mises à l’emploi par les CPAS dans un jeu de ping-pong institutionnel.
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NOS CONCLUSIONS

Les CPAS font leur travail avec les moyens qu’ils ont.

Le Fédéral a décidé de compenser ce transfert de charge mais, pour le moment, nous
ne voyons rien venir. Nous exigeons le respect des engagements pris par le Ministre
Borsus de compenser les charges induites par le transfert. Cela peut passer par une
augmentation du taux de remboursement du RIS et de la subvention pour les coûts
liés au traitement des dossiers.

Ce transfert de la sécurité sociale vers l’aide sociale entraine aussi un transfert de
l’accompagnement en insertion socio-professionnelle de ces personnes, du régional
vers le local ; ce n’est plus Actiris qui va suivre ces personnes mais les CPAS. Cela
implique des moyens, que ce soit pour l’accompagnement ou pour la mise à l’emploi,
au-delà des moyens actuellement nécessaires pour que les CPAS puissent poursuivre
leurs politiques d’insertion socio-professionnelle. Or, ces moyens ne sont sans doute
pas prévus dans le cadre de la VIe Réforme de l’Etat… Nous lançons clairement un
appel à la Région pourra aider les CPAS à remplir leurs missions. Laurette Onkelinx,
qui a négocié l’accord de majorité bruxellois, a lancé le chiffre de 10 millions d’euros
supplémentaires pour la politique des articles 60. Les CPAS bruxellois sont prêts à
relever ce défi.

Dans le cadre de la politique régionale de l’emploi, les actions d’Actiris et des CPAS
doivent être complémentaires. Un lieu de discussion et de concertation entre la
Région, Actiris et les CPAS est indispensable.
Pour plus de renseignements :
Michel COLSON, Président de la Section CPAS : 0478 49 26 55
Jean SPINETTE, Président de la Conférence des Présidents et Secrétaires : 0498 58 87 51
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