COMMUNICATION : LES DONNEES ETHNIQUES ET RACIALES

Transcription

COMMUNICATION : LES DONNEES ETHNIQUES ET RACIALES
1
XXVII Congrès International de la population
Busan, Corée 26-31 août 2013
Thème : Collecte des données ethniques et raciales dans les recensements et
enquêtes
COMMUNICATION : LES DONNEES ETHNIQUES ET
RACIALES DANS LES RECENSEMENTS AFRICAINS :
EXEMPLE DE QUELQUES PAYS
Par Benjamin ZANOU, Statisticien-démographe
à la retraite
[email protected] , tél : (00225)08824545
Les pays africains, particulièrement ceux de l’Afrique Subsaharienne, ont inauguré l’ère de la
collecte des informations scientifiques dans les domaines démographique et socioéconomique
au cours des années 1970. Ainsi, on a assisté à la première vague de Recensements Généraux
de la Population et de l’Habitation (RGPH) à partir de la deuxième moitié de la décennie
1970 : Congo Brazzaville (1974), Côte d’Ivoire (1975), République Centrafricaine (1975),
Burkina Faso (1975), Cameroun (1976) Mali (1976), Mauritanie (1976), Sénégal (1976),
Niger (1977) Sénégal (1978), Bénin (1979), Burundi (1979), etc. La deuxième vague pour
certains pays et la première pour d’autres a suivi au cours des années 1980 : Togo (1981),
Burkina Faso (1985), Congo (1985), Cameroun (1987), Mali (1987), Niger (1988), Sénégal
(1988), Mauritanie (1988), République Centrafricaine (1988), etc.
Ces recensements ont été complétés par des enquêtes démographiques (enquête mondiale sur
la fécondité, enquêtes sur la mortalité, etc.), surtout après la conférence mondiale sur la
population tenue à Bucarest en 1974 ; et des enquêtes socioéconomiques (enquêtes budgetconsommation, enquêtes sur les conditions de vie des ménages). Depuis cette période, la
plupart des pays ont réalisé au moins deux Recensements Généraux de Population et de
l’Habitation (RGPH), tandis que d’autres en sont à leur quatrième. Plusieurs générations
d’enquêtes se sont suivies pendant ce laps de temps : en dehors des enquêtes sur les
conditions de vie des ménages, on peut citer les Enquêtes Démographiques et de Santé (EDS)
et les Enquêtes à Indicateurs Multiples (MICS).
La caractéristique commune aux recensements généraux de population est qu’au départ, dans
la plupart des pays, la collecte prenait en compte, l’ethnie et les populations particulières
quand elles existaient. Mais au fil des années, malgré l’alourdissement des questionnaires, la
variable « ethnie » est de plus en plus absente de la collecte.
S’agissant des enquêtes, certains pays collectaient des informations sur l’ethnie au cours des
enquêtes démographiques et socioéconomiques, mais par la suite, cette variable a tendance à
disparaitre des questionnaires de certaines enquêtes.
2
L’IMPORTANCE DE LA VARIABLE « ETHNIE »
DEMOGRAPHIQUES ET SOCIOECONOMIQUES
DANS
LES
ETUDES
L’Ethnie se définit dans la langue française comme un groupe humain possédant un héritage
socioculturel commun, comme une langue, une religion ou des traditions communes. En
démographie, elle est utilisée le plus souvent comme une variable discriminante, ou
explicative,
puisqu’elle
permet
parfois
d’expliquer
certains
phénomènes
sociodémographiques et culturels comme : le comportement vis-à-vis de la nuptialité, de la
fécondité, des migrations, etc.
Durant la période coloniale, le terme était utilisé pour désigner les communautés linguistiques
et culturelles africaines, océaniennes, amérindiennes et asiatiques. Il s’agissait, semble- t-il,
de distinguer les nations civilisées des autres. Depuis ce temps, l’usage de terme ethnie
comme « communautés linguistiques et culturelles » est maintenu dans la plupart des pays
concernés par la colonisation. On parle souvent de groupes ethniques ou grands groupes
ethniques pour désigner des communautés apparentées, et de l’ethnie pour chaque élément du
groupe. Dans certains pays, la différence entre deux ethnies n’est pas si évidente qu’on
l’aurait pensé. De ce fait, ce qui peut être considérer comme un groupe ethnique dans un pays
ne serait qu’une ethnie dans un autre. Il peut s’agir parfois d’une distinction fictive, à des fins
politiques, pour diviser certaines communautés jugées trop importantes. Dans la plupart des
pays africains, on dénombre plusieurs ethnies ; certains en comptent des dizaines
d’ethnies (Côte d’Ivoire, Burkina Faso, République Centrafricaine, Niger, Nigeria, Ghana,
RDC, etc.), tandis que d’autres enregistrent deux cent (200) ethnies ou plus. Selon le nombre
d’ethnies, les études peuvent se limiter soit aux grands groupes ethniques, soit aux groupes
ethniques ou encore aux ethnies.
Si en Afrique et dans d’autres pays hors du continent noir, la différentiation entre
communautés se fait sur la base de l’ethnie, dans d’autres pays, on parle de race ou de caste.
En effet, les pays multiraciaux se servent également de la race comme critère de
différentiation. Il en est de même pour les pays où les communautés sont structurées en castes.
Dans tous ces pays, les dénombrements de populations se font sur la base de ces critères, afin
de disposer des informations concernant les différentes catégories.
Cependant, « la catégorisation ethnique ou autre n'est pas nécessairement une action politique
à des fins discriminatives. Il peut s'agir de discrimination positive et de mise en place de
mesures particulières pour ces groupes, comme le font les États-Unis pour ses minorités
raciales, l'Inde pour la caste des intouchables, la République populaire de Chine envers ses
diverses nationalités », et certainement le Canada depuis qu’il considère les groupes sociaux
issus de l'immigration comme des « groupes ethniques ».
« ETHINE » COMME VARIABLE DE COLLECTE DANS LES RECENSEMENTS
AFRICAINS
Nous examinons ici, les questionnaires des recensements généraux de population de quelques
pays africains. Comme nous le mentionnons plus haut, la plupart des pays africains ont inclus
la variable « ethnie » dans leurs questionnaires de recensement des années 1960 et 1970.
Mais, au fil du temps, l’on se rend compte que cette variable a disparu des questionnaires de
collecte de données de certains d’entre eux.
3
Ainsi, au Burkina Faso, la variable figurait dans le questionnaire du premier recensement
général de la population en 1975. Mais elle était absente aux recensements de 1985, 1996 et
2006. Les structures organisatrices des recensements lui ont préféré la langue parlée qui ne
recouvre pas les mêmes réalités que l’ethnie. Cependant, la variable « ethnie » est revenue
dans certaines enquêtes du pays comme l’enquête démographique de 1991, et l’enquête
démographique et de santé (EDS) de 1998/1999 ; ce qui n’est pas le cas pour l’EDS 2003.
Comme le Burkina Faso, d’autres pays ont intégré la variable ethnie dans le premier
recensement et l’ont abandonné par la suite. Par contre, d’autres ont poursuivi la collecte des
informations sur l’ethnie et les minorités.
Cette communication se propose de passer en revue les questionnaires des recensements de
quelques pays africains depuis les années 1970 pour y voir l’existence ou non des questions
sur l’ethnie ou sur des populations particulières (minorités). Deux groupes de pays seront
constitués : celui des pays qui ne collectent plus d’informations sur l’ethnie ou qui n’en ont
jamais fait, et celui des autres qui continuent de le faire. Pour ce dernier groupe, nous
examinerons l’utilité des analyses qui sont faites des données collectées et les difficultés
rencontrées. Quant au premier groupe, les raisons déclarées ou supposées et qui sont à la base
d’une telle position seront examinées.