La profession de musicien
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La profession de musicien
La profession de musicien Recherche dans le domaine des musiques improvisées dans le canton de Genève en 2001 Certificat en gestion culturelle, 2000-2001 Universités de Genève et de Lausanne Château de Dorigny Astrid Stierlin 15, rue des Gares 1201 Genève Tél. (022) 734 89 23 Email : [email protected] 30 juillet 2001 Table des matières 1. Introduction p. 3 2. Situation en Suisse, et à Genève en particulier 2.1. Fonctionnement de l’encouragement à la culture 2.2. Promotion de la musique improvisée 2.3. Réseaux nationaux et internationaux 2.4. Scènes des pratiques pour la musique improvisée 2.5. Protection sociale des artistes 2.6. Droits d’auteurs p. 5 3. Réflexions sur la politique culturelle en France 3.1. Reconnaissance de la gestion culturelle 3.2. Organismes chargés de l'accompagnement, de la création et de la diffusion artistique 3.3. La situation des musiques actuelles 3.4. Protection sociale des artistes p. 12 4. Questionnaires aux musiciens. Analyse des réponses 4.1. Fonctionnement 4.2. Promotion de la musique improvisée 4.3. Perception du rôle des institutions 4.4. Statut professionnel et prévoyance sociale 4.5. Investissements avancés par les musiciens 4.6. Investissements supplémentaires envisagés p. 16 5. Conclusions 5.1. Au plan de la gestion 5.2. Au plan de la prévoyance sociale 5.3. Au plan de la structuration de la profession 5.4. Au plan de la promotion nationale et internationale 5.5. Propositions pour le futur immédiat p. 20 6. Proposition de constitution d'un collectif de services administratifs à destination d'artistes p. 26 7. Annexes p. 29 Introduction "Le rôle de gestionnaire de la culture" nous a dit Mme Yvette Jaggi, présidente de Pro Helvetia, dans la conférence qu'elle a donné à notre volée de C.G.C., "est d'être des passeurs pour les créateurs, et les meilleurs passeurs possibles." Côtoyant de nombreux musiciens indépendants dans mon parcours professionnel, j’ai souvent entendu des remarques amères sur les difficultés qu’ils rencontrent dans leur parcours professionnel. Il m'a paru utile de comprendre où se situent les carences dans leur cas précis, tant il est évident que sans un soutien approprié aux artistes, la culture ne peut rayonner sereinement au sein de la société. L'évolution de la musique au 20ème siècle a fortement diversifié la profession de musicien. De nouveaux courants de musiques ont émergé, créant des genres nouveaux : jazz, blues, rock, chansons à texte, musique électronique, etc…. Le terme "musiques actuelles" a été introduit récemment pour décrire ces nouvelles formes apparues et on rassemble sous cette appellation la chanson française, les musiques amplifiées, les musiques improvisées, les musiques traditionnelles et les musiques du monde. Les techniques de reproduction, la généralisation de l'informatique, le déploiement des médias (radios, TV, films, vidéos, multimédia, internet, etc.) et l'apparition des supports de diffusion (disques, cd, cassettes, films, cd-rom, etc.) ont produit des industries qui représentent un poids important dans les échanges commerciaux et dans l'économie des pays, facteur capital pour les milieux financiers. C'est un secteur en prise avec l'époque, qui transcende les frontières et subit les effets de la mondialisation. En France, la musique est la première des pratiques culturelles après la télévision. On peut dès lors extrapoler que pour la Suisse romande il doit en être à peu près de même. En Suisse, on note un accroissement qualitatif et quantitatif de l'offre dans le domaine de la formation et de l'éducation. En plus du Conservatoire de musique classique, du Conservatoire de Musique populaire et de l'Institut JaquesDalcroze, l'A.M.R., l'E.T.M., l'E.P.I., les Ateliers d'ethnomusicologie et de multiples écoles privées et associations sont venus diffuser l'enseignement des styles contemporains et traditionnels des musiques actuelles. Le nombre d'élèves augmente et au fil des années de nombreux musiciens professionnels émergent de ces écoles ou d'autres filières. Le niveau de l'enseignement du jazz est reconnu comme étant élevé partout en Suisse1 et désormais plusieurs villes offrent une filière de formation complète dans ce domaine. 1 (1) "Payante, la culture ?" La situation de la culture suisse en 1999, p. 317 - Office fédéral de la culture 3 Je n’ai pas trouvé d’étude officielle portant sur la musique à Genève, même si on reconnaît aisément qu’il y a dans cette ville un potentiel de musiciens énorme. J’ai choisi l’étude des musiques improvisées, expression contemporaine du jazz, car si elles sont très présentes dans notre région, leur visibilité et leur importance dans le paysage culturel ne sont pas valorisées à la mesure de leur apport artistique à notre époque. Voici quelques-unes des questions que je me suis posées, et auxquelles j’ai essayé de trouver des éléments de réponse dans cette recherche, en compilant les informations récentes provenant des différents partenaires rattachés à ces domaines. • Comment les collectivités publiques prennent-elles en compte la réalité sociale des artistes locaux ? • Quelles sont les possibilités d’organisation courantes pour les musiciens poursuivant une carrière professionnelle dans le domaine des musiques actuelles ? • Quel statut va-t-il pouvoir choisir pour entamer une vie professionnelle conforme aux exigences de notre époque ? • Comment le chômage, la retraite, les vacances et les assurances sociales sont-ils gérés dans leurs cas ? • La situation particulière de la Suisse en Europe est-elle un frein pour la professionnalisation des artistes ? • Quelles structures existantes sont-elles prévues pour l'aider à trouver sa place dans un marché économique où la mondialisation domine toujours davantage ? • Où en sont actuellement les actions des syndicats concernés par les métiers de la musique ? 4 2. Situation à Genève et en Suisse 2.1. Fonctionnement de l’encouragement à la culture En raison du régime confédéral, la subsidiarité est le mode de fonctionnement du soutien public à la culture dans notre pays. Les Villes et les Communes d'abord (53 %), puis les Cantons (38 %) et enfin la Confédération (9 %) prennent en charge l'encouragement à la culture. L'accès du public, la conservation du patrimoine, le maintien des institutions, l'enseignement et l'aide à la création des différents domaines artistiques sont les différents secteurs englobés par cette action. De manière générale, le soutien des arts vivants en Suisse est plus particulièrement dévolu aux communes et aux municipalités. Cette structuration explique entre autres le manque d'informations synthétiques sur l'activité artistique elle-même dans notre pays, le peu de statistiques existant dans le domaine ainsi que l'inexistence d'une politique fédérale concertée en matière culturelle. Les comparaisons entre les différentes villes ou cantons, forcément organisés de manières diverses, manquent. La Conférence des responsables des villes dans le domaine de la culture amène quelques informations importantes, mais il n'existe pas de synthèse globale sur les politiques culturelles en Suisse. Heureusement, le récent rapport mandaté par l'Office fédéral de la culture, qui est un état des lieux des politiques culturelles de chaque discipline, amène enfin quelques analyses globales au niveau national, et met en lumière la façon dont pourrait intervenir la Confédération grâce au nouvel alinéa 69 sur l'encouragement de la culture dans la nouvelle Constitution, adoptée en avril 99 et appliquée depuis janvier 2000. En Suisse, l'enveloppe dévolue à la culture par les principales municipalités s'est accrue ces dernières années. Pour un petit canton, Genève témoigne d'une grande vitalité et le budget de 20 % du budget global de la Ville attribué à la culture est le plus important de Suisse romande. La politique culturelle de la Ville a ces dernières années maintenu et même accru le soutien à de nombreuses associations et compagnies indépendantes. Parallèlement s'est poursuivi l'accroissement de l’enveloppe attribuée aux institutions officielles (Grand Théâtre, O.S.R., Conservatoires, etc.). Ces dernières années, Pro Helvetia a financé toujours davantage le secteur musical, par l'aide à la diffusion, notamment, et par des commandes d’œuvres à des compositeurs. A l’heure actuelle les autorités genevoises ont dressé une inventaire des dépenses en faveur de la culture afin d’assurer une meilleure coïncidence entre les trois cercles que sont les décideurs, les payeurs et les bénéficiaires. Un rapport analysant la répartition des investissements financiers entre le Canton, la 5 Ville et les communes a été rédigé, à la suite d’une étude détaillée de leur ventilation2. Le but de ce recensement est d’identifier si les retombées de l’action culturelle vont bien vers ceux qui la financent, et d’ajuster la répartition des dépenses en impliquant les collectivités publiques qui profitent de leurs effets. Sa publication doit servir de base pour ouvrir une discussion sur une meilleure coordination des politiques culturelles, et les magistrats ont la charge de déterminer une plate-forme commune destinée à mieux coordonner les pratiques culturelles genevoises. Le débat induit par ce rapport est repris dans les associations au sein du Ric-Rac (regroupement des associations culturelles indépendantes genevoises). Ce pool des indépendants souhaiterait avoir les moyens de mandater une commission pour étudier les retombées de cette étude et cherche à obtenir des fonds pour sa création. Découlant des audits imposés dans les administrations par le New Public Management, les collectivités publiques envisagent dorénavant d’établir davantage des contrats de prestations à l’intention des associations et groupes qu’elles subventionnent. Cela permettrait de définir clairement le cadre des missions qui leur sont confiées et d’exercer un contrôle sur l’utilisation des aides financières attribuées. Ces contrats sont actuellement discutés entre tous les partenaires. La plupart des associations ne s’opposent pas à des modifications contractuelles avec les institutions si elles sont cohérentes avec les actions qu'elles poursuivent et certaines sont prêtes à utiliser cette modalité de contrôle pour affermir leurs lignes directrices. Les discussions sur ce sujet brûlant commencent à peine, et les pronostics sur les négociations qui suivront sont encore incertains. 2.2. Promotion de la musique improvisée Dans le domaine de la musique, l’Etat soutient principalement la formation, les Conservatoires, écoles et associations dévolues à l’enseignement, par des lignes de subventions annuelles. Quelques compagnies et associations bénéficient également de “ contrats de confiance ” de trois ans, renouvelables une fois, qui leur permettent pendant quelques années de développer leurs programmes avec davantage de moyens. L’évaluation de cette forme d’aide est en cours, car certaines associations qui en ont bénéficié ont pris un essor considérable, qui serait compromis dans le cas d’une réduction de subventions, tant il est patent que les activités culturelles ne peuvent se financer uniquement par les prestations qu’elles offrent. A Genève, la plupart des subventions sont versées aux associations chargées de promouvoir les musiques : A.M.R. (Association pour la musique improvisée), 2 Rapport de l’IDHEAP (Institut de hautes études en administration publique), février 2001 6 P.T.R. (Post Tenebras Rock), Ateliers d'ethnomusicologie (Association dévolue aux musiques et danses du monde), pour ne citer que les plus visibles, et parviennent donc indirectement aux artistes. Les activités de ces associations comportent plusieurs volets, parmi lesquels la programmation de concerts de groupes, locaux et de l’extérieur, la formation pédagogique, l'administration de locaux, etc. Les musiciens qui en sont membres profitent de prestations sous plusieurs formes allant de l'accès facilité à des locaux de répétition, de proposition de quelques dates de concerts pour leurs groupes par année, et de quelques postes de travail dans l’enseignement, en général limités à quelques postes salariés à temps partiels très enviés. La Ville de Genève, depuis 10 ans, a instauré la “ Fête de la Musique ”, grande fête populaire qui, au solstice d’été, prend ses quartiers pendant trois jours sur 43 scènes réparties dans les rues, les parcs, les places et les salles de spectacle et récemment aussi dans les communes genevoises. Le budget pour l’organisation de cette manifestation avoisine cette année le million et demi de francs, montant élevé en raison d’importants aménagements architecturaux et de la logistique déployée, mais elle est une pièce maîtresse pour la promotion de la Ville, qui met ainsi en valeur l’ouverture de sa politique culturelle et la richesse de la diversité de sa population. Cette année la chaîne de télévision TV5 Europe a choisi la Fête de la Musique de Genève pour la diffuser sur son canal, carte de visite appréciable pour la promotion d’une ville. La plupart des musiciens y jouent gratuitement, ou pour un cachet rarement à la hauteur de celui qu’ils toucheraient dans un cadre traditionnel, car ils apprécient de jouer devant un public diversifié et de participer à l’ambiance inoubliable de cette fête. Plus de 600 formations sont conviées à donner autant de concerts gratuits à la population, déployant tout l’éventail des genres, et la musique est magnifiquement fêtée comme l’une des pratiques culturelles les plus appréciées du public. Cela représenterait, si l’on calcule grossièrement, un groupe pour 5'000 habitants du canton ! En ce qui concerne la diffusion, la Ville et l’Etat subventionnent la production de quelques CD de groupes locaux par année, et l’Etat par le biais du Département de l’Instruction publique octroie un soutien ponctuel pour quelques tournées de groupes par année. 2.3. Réseaux nationaux et internationaux Quelques festivals de jazz proposent en Suisse des programmations où les groupes internationaux croisent les ensembles helvétiques. Celui de Willisau, le plus connu et le plus ancien, a une réputation d’excellence qui va bien au-delà 7 des frontières suisses, et c’est une référence qui prouve l’impact du jazz en Suisse. Réunissant les amoureux du jazz et des musiques improvisées dans un cadre convivial, il créée des liens importants entre les musiciens. Tous les deux ans la fondation du Pourcent-culturel Migros organise un festival de Jazz, qui engage 5 à 7 groupes suisses pour une tournée dans différents cantons. Cette initiative est exceptionnelle et a le mérite de permettre à un art qui s’exprime par les notes de dépasser les frontières linguistiques. L’AMR est membre depuis ses débuts du réseau Euro-Jazz Network, association européenne de musiciens sise en Italie, mais les collaborations effectives restent ponctuelles. En avril 2000 Bologne, élue capitale européenne de la culture cette année-là, a mandaté l’Euro-Jazz Network pour organiser des échanges avec plusieurs villes. Des résidences proposées à un artiste de chaque ville du réseau leur ont permis de donner des concerts avec des musiciens de la région piémontaise ainsi que des stages. Pour clore, un week-end présentant l’état actuel de la scène jazz de chaque ville était tour à tour présenté. Grâce à la collaboration de longue date avec ce réseau et aux contacts privilégiés des représentants de l’AMR et du Moods à Zurich, la Suisse a pu y être présente. Ces manifestations ont été financées en partie par l’Union européenne et en partie par Pro Helvetia, et la Suissea bénéficié ainsi de la manne et de la promotion dévolues à ces événements culturels par les fonds européens. En 1999, 9 organisateurs se sont réunis pour organiser le festival Suisse diagonaleS 99 dans 11 villes conjointement afin de faire découvrir aux publics des ensembles confirmés de la scène jazz d’autres régions du pays. Cette expérience ponctuelle a été soutenue par Pro Helvetia ainsi que par d’autres sponsors privés et publics. La bourse de l’ATP (Association des Théâtres de Poche) propose une fois par année, un “ marché des arts de la scène ” où sont montrés des extraits de spectacle ou de concerts, sous forme de “ show-case ” les différentes productions de notre pays. Elle présente un nombre croissant de projets musicaux, et s’ouvre surtout à la chanson et aux productions de musiques du monde. Principalement fréquentée par les organisateurs de Suisse-alémanique, la bourse possède d’un bon réseau d’organisateurs dans tous le pays et permet des rencontres entre les artistes et les responsables de lieux culturels. Elle n’est pas assez connue dans notre région et peu d’artistes et d’organisateurs genevois la fréquentent. Dans notre région, l’association Jazz ContreBand fonctionne depuis plusieurs années comme un festival transfrontalier, programmant dans plusieurs salles de la région des concerts de jazz prestigieux, mais aussi une floraison de groupes locaux des deux côtés de la frontière. Réunissant, l’AMR, le Chat Noir, le 8 Manège d’Onex, le ForuMeyrin, Château Rouge, le Brise-Glace d’Annecy, la dynamique ainsi insufflée permet d’amener de nouveaux publics à cette musique exigeante et de confronter les pratiques entre les deux pays, qui se différencient surtout au niveau de l’organisation des concerts. Récemment fondée, la fondation CMA (fondation pour les musiques actuelles) créée par les responsables du Paléo Nyon Festival, s’est profilée comme un intermédiaire entre les groupes et le show-business. Présents pour leurs achats de spectacles dans tous les marchés importants de musique actuelle, ils se proposent d’y représenter les groupes réunis sous leur égide afin de les faire connaître en dehors de nos frontières. Les critères de choix des organisateurs travaillant avec les maisons de disques ne sont pas les mêmes que ceux qui prévalent dans les genres où l’intérêt culturel et artistique dominent, et il est peu probable que les musiques improvisées y trouvent une place. Cette initiative est néanmoins dotée de bon sens, même si ses moyens sont encore restreints, et l’on ne peut que regretter que les musiques jazz et traditionnelles n’aient un organisme dévolu aux mêmes buts. 9 2.4. Scènes des pratiques pour la musique improvisée En dehors des grandes salles (Alhambra, Palladium, salle Franck Martin, Victoria Hall), destinées en général à recevoir des groupes d’accueil relativement prestigieux, la création locale s’exprime surtout dans les clubs. Le Sud des Alpes, principale vitrine de ce genre musical, offre une foison de concerts de musique improvisée, et programme un grand nombre des groupes d’ici. Mariant de manière équilibrée les accueils et les prestations de groupes locaux, elle demeure le sein dans lequel la plupart des groupes genevois ont évolué. Plusieurs communes ont récemment développé une politique culturelle en investissant davantage dans l’animation de leur territoire, et de nouvelles scènes de concerts sont nées aux quatre coins du canton (les Caves de Bon-Séjour à Versoix, la Villa Bernasconi au Petit-Lancy, la Villa Dutoit au Petit-Saconnex, le Manoir d’Onex, l’Undertown à Meyrin, etc). proposant un nombre croissant de prestations pour les groupes locaux. Des scènes alternatives, souvent issues du mouvement squatt (le Bist’OK, la Cave 12, l’Ecurie, la Galerie), produisent ponctuellement des concerts expérimentaux ou improvisés. Les cachets touchés dans ces différents lieux sont très disparates, et ne représentent qu’une proportion infime d’un salaire décent. Néanmoins ces scènes sont fort appréciées car elles permettent de toucher de nouveaux publics, et les occasions de jouer étant plutôt rares pour la plupart des groupes, c’est un moyen prisé de présenter de nouveaux répertoires ou de débuter une tournée par une répétition générale en public dans des lieux conviviaux. Quelques restaurants ou bars tentent régulièrement d’agender quelques soirées avec des groupes, sans toujours pouvoir tenir sur la durée. La Fanfare du Loup réunit un nombre important, variable de musiciens professionnels issus de la scène improvisée. Souvent engagés comme orchestre pour des productions théâtrales, ils sont constitués en association gérée par un responsable administratif. Ils ont l’avantage de pouvoir compter sur des revenus réguliers, et pour certaines productions sur des cachets de moyenne durée. Unique à Genève dans le milieu du jazz, cette structure permet aux musiciens d’avoir un emploi dans un cadre professionnel, de développer des créations régulières et de trouver des soutiens financiers pour les réaliser. Ceux qui y sont affiliés bénéficient d’ailleurs des prestations d’intermittents du spectacle. 2.5. Protection sociale des artistes Sur l'initiative de l'Office fédéral de la culture, en collaboration avec les organisations culturelles, un groupe de recherche dénommé "Suisseculture 10 Sociale" a été créé pour faire un état des lieux de la situation des assurances sociales dans les milieux artistiques et chercher des solutions pour compléter le cadre des prestations sociales. Pour le moment, il s’agit de répartir un fonds accordé par l’Office fédéral de la culture pour les créateurs en situation de crise, mais l'on se réjouit qu'enfin les institutions officielles se penchent sur ce problème lancinant. Il faut rappeler que la période de crise économique et de chômage des récentes années 90 a mis en évidence la carence de protection sociale des artistes, carence qui avait en outre déjà été relevée dans le "Rapport Clottu", enquête sur la culture mandatée par la Confédération remise en 1975 ! La fragilité et la particularité des professions liées à la création artistique dans les métiers liés au spectacle s'est particulièrement fait ressentir quand la crise économique a fortement sévi. Voyant le statut des travailleurs de ce secteur mis en péril par les nouvelles dispositions de l’assurance-chômage, une mobilisation de ce secteur s’est opérée. De là plusieurs initiatives sont issues pour pallier le déficit de couverture sociale de ces professions. L'action "Intermittents du spectacle" a été créée à la suite de la mobilisation de la profession face à l'introduction de nouvelles normes en matière de chômage. En effet, la plupart des travailleurs de ce secteur sont au bénéfice de contrats de travail à durée limitée et n’ont qu’une faible protection sociale. Une politique concertée a permis d'adapter leurs droits, grâce au dialogue entre les responsables des secteurs de l’économie et de la culture et les représentants des travailleurs. Un statut spécifique, des mesures d'accompagnement, des programmes d'occupation temporaire pour les professionnels reconnus ont été mis sur pied, afin de leur donner accès aux assurances chômage. Un fonds régional d'encouragement à l'emploi des intermittents du spectacle et de l'audiovisuel a été créé par les cantons de Vaud et de Genève pour favoriser l'engagement d'intermittents pour leur permettre d’atteindre le taux de cotisations de 12 mois sur 2 ans3. Dans le domaine de la musique, il n'y a pas eu d'avancées aussi concrètes au niveau de la protection sociale et de l’organisation de la profession. La prise en compte des particularités de ces métiers n'a pas donné lieu à un rassemblement des intéressés pour se donner les moyens d'améliorer leurs conditions de travail. Néanmoins le niveau des études des musiciens et le degré achevé de virtuosité de la plupart des professionnels de ce secteur rend peu crédible l'hypothèse d'un manque de capacité. L’individualisme dont on accuse souvent les musiciens joue certainement un rôle, mais il paraît inconséquent de laisser la responsabilité d'une politique culturelle cohérente aux seuls artistes. 3 Selon les critères d'admission de l'assurance-chômage, est professionnel dans le domaine des arts de la scène celui qui a travaillé dans ce secteur 6 mois sur 2 ans. Ensuite il doit cotiser 12 mois sur les 24 du délai-cadre pour pouvoir le renouveler. 11 Le SMS (Syndicat des musiciens suisses), né en 1997, cherche à regrouper le plus grand nombre de musiciens de jazz et musique improvisée vivant dans le pays. Récemment restructuré, il reçoit une subvention du Département fédéral de l'intérieur de 65'000 frs par an. Ce rassemblement a pour but l'amélioration de la protection sociale, un accès renforcé à la diffusion et la participation active à la politique culturelle du pays en faveur des musiciens. Il participe aux travaux du groupe "Suisseculture Sociale". Il est en négociation pour proposer à ses membres d'adhérer à une Fondation de prévoyance collective qui leur permettrait de cotiser au 2e pilier avec leurs revenus d'indépendants. L'action du SMS peut devenir une source concrète de changements dans les prochaines années si un nombre conséquent de musiciens y adhèrent. Encore faut-il que ses actions soient connues et relayées dans les milieux concernés par des informations appropriées. 2.6. Droits d’auteurs Principalement régis par la SUISA, les droits d’auteurs sont une importante ressource financière pour les musiciens. Perçus principalement sur la radiodiffusion et la vente de phonogrammes, leurs revenus sont directement influencés par la diffusion de la musique dans les médias. Contrairement à la plupart des pays qui nous entourent, la Suisse ne s’est pas dotée d’une loi sur les quotas de diffusion nationale. Jusqu’à présent la seule exigence formulée est que les programmes doivent accorder une part “ appropriées ” à la musique suisse, mais sans que cette appellation, au demeurant fort vague, ne soit contrôlée. La SSR (Société suisse de radiodiffusion) reçoit plus d’un milliard de francs de subventions de la Confédération, issus principalement des redevances. Un projet de réglementation proposé par les associations de créateurs de musique, réuni dans l’association “ Suisseculture ” pour promouvoir une meilleure diffusion de la musique suisse, préconise l’application de quotas de 20%, alors que la diffusion de musique suisse par la SSR ces dernières années se situe entre 7 et 9 % et s’oriente plutôt vers la baisse4. Le SMS et la faculté de la Haute Ecole de musique de Lucerne ont lancé une étude sur la présence actuelle effective de jazz et musique improvisée sur les ondes des stations SSR. Cette recherche scientifique, baptisée "Media Research", sera menée par l’Institut des sciences de communication de l'Université de 4 SUISA - Rapport annuel 2000, p. 20 12 Lugano et la section “ Recherche et Développement ” de la Haute Ecole de musique de Lucerne. Elle ne pourra être conduite que si un subside du Fonds national lui est accordé, ce qui devrait être connu courant juin. La Fondation Suisa pour la musique, qui a pour mission de promouvoir la musique suisse, est financée par un fonds issu de la société d’auteurs. Elle alloue des subventions pour les tournées et pour l’enregistrement de CD. Présente dans tous les rassemblements internationaux de la musique (Midem. Musicora, Womex, etc…) elle informe le public sur les compositeurs suisses. Malheureusement le reflet qu’elle présente n’est pas comparable au dynamisme dont font preuve les organismes similaires des pays voisins, et elle fait figure de parent sous-développé sur le plan de la promotion de la création musicale actuelle. 13 3. Réflexions sur la politique culturelle en France En France, pays gouverné par le centralisme d'Etat propre au républicanisme, il existe un Ministère de la Culture, créé en 1945 par André Malraux sous la présidence de Charles De Gaulle. Sa mission est de définir et d'appliquer une politique culturelle cohérente qui se concrétise dans les régions par les différentes agences réparties dans le pays. L'analyse des tentatives de démocratisation de la culture développées ces trente dernières années a fait apparaître que les efforts pour mettre la culture à la portée de tous ont échoué5. Les pratiques culturelles restent toujours le privilège des classes les plus éduquées. À partir de ce constat, on tente désormais de développer une démocratie de la culture, qui consiste à prendre en compte la pratique culturelle et la demande de la population et d'y adapter la politique culturelle.6 Cela se traduit par la mise sur pied d'expertises pour comprendre le fonctionnement de tous les secteurs de la culture, du public aux artistes en passant par les organismes et les institutions, de l'éducation à la création en passant par la diffusion. Plusieurs structures nationales sont issues des problématiques relevées entre les organismes et les destinataires de la politique culturelle, dont les plus connues sont les initiatives dans le soutien aux interprètes de rap et de hip-hop. Pour examiner la situation du musicien, je vais limiter l'étude détaillée à ce qui existe actuellement dans la région Région Rhône-Alpes, qui est un reflet de ce que l'on trouve dans les autres régions, avec des niveaux de développement divers suivant les départements. 3.1 Reconnaissance de la gestion culturelle Dans le domaine de la formation en gestion culturelle, la Région Rhône-Alpes ne manque pas de ressources. Créé en 1983 et soutenue par la DRAC (Directions Régionales des Affaires Culturelles), l'Agence Rhône Alpes du Service aux Entreprises Culturelles (ARSEC) a pour mandat d'aider les organismes, associations, projets à se structurer pour assurer leur viabilité sur le marché. Elle intervient en tant que consultant et centre de ressources et d'informations, mais elle a surtout un rôle 5 cit. de René Rizzardo - Observatoire des politiques culturelles - Grenoble in interview filmé de F. Passard “… repenser le fonctionnement de l'appareil d'action culturelle, en faisant en sorte d'inviter ses acteurs (artistes, professionnels de la culture) à se rapprocher des lieux de vie, des espaces où la population (et non les publics) agit sur elle-même dans son travail comme dans ses loisirs. ”, Jean-Michel Djian, in La Politique culturelle. Paris : Le Monde Éd. ; Marabout, 1996 6 14 actif dans la formation. En plus de l'organisation fréquente de séminaires destinés aux responsables d'entreprises culturelles ou de collectivités publiques, elle collabore avec l'Université de Lyon au programme du DESS (diplôme d’études supérieures) en "Gestion et développement de projet culturel". Le champ culturel est désormais considéré comme un secteur économique à part entière et requiert des compétences et des savoir-faire nouveaux, inséparables d'une bonne appréhension des enjeux artistiques et du développement culturel. C'est ainsi que s'est développée l'offre de formation, d'ailleurs confortée par un attrait prononcé des étudiants pour les nouveaux métiers de l'administration, de la gestion et de la médiation culturelle malgré la fragilité et le caractère encore relativement limité des débouchés professionnels offerts. L'Observatoire culturel de Grenoble, rattaché à l'Université, est un pôle de réflexions et de formation globale sur les politiques culturelles. De nombreux séminaires, colloques, réseaux sont issus de ses actions. Elle propose également un DESS en gestion culturelle et artistique. 3.2. Organismes chargés de l'accompagnement création et de la diffusion artistique de la La politique de décentralisation culturelle a permis la création des directions régionales pour les arts et la culture (DRAC), qui diffusent les directives nationales et irriguent la France par région. Elles favorisent la mise en place de réseaux en réunissant les diverses institutions d'importance lors de réunions fréquentes où s'échangent les expériences et les propositions de partenariats sur les accueils et les créations qu'elles promeuvent. Pour le secteur plus particulier de la musique, l'AMDRA (Agence Musique et Danse Rhône-Alpes - anciennement ARDIM) est un centre de ressources et d'actions qui relayent la politique nationale du ministère de la Culture à l'échelon régional, en concertation avec les collectivités locales, à destination des professionnels de la culture. Elle participe au Réseau Musique et Danse, chapeauté par la Cité de la Musique à Paris et est ainsi reliée à tous les autres réseaux de France, d'Europe et du Monde. Éditant des publications régulières, elle met à disposition des outils d'informations et de connaissances. Dans le domaine de la formation artistique professionnelle, elle développe des initiatives pour favoriser l'insertion des jeunes artistes. Elle réunit lors de conseils généraux les représentants des professions concernés par sa mission afin d'analyser leurs besoins et définit des plans d'action régionaux, suivant une problématique d'équité territoriale. 15 Aux niveaux national et régional existent plusieurs associations de services (ex. l'IRMA - Centre de Ressources sur les musiques actuelles), qui fournissent de nombreuses prestations permettant notamment aux acteurs culturels : • de se former en administration culturelle (management, organisation de spectacles, recherche de fonds, édition, etc… ) • de participer à des réseaux d’échanges entre professionnels grâce à l’organisation de rencontres, séminaires, etc. • d’adhérer à des associations faîtières qui ont les moyens de maîtriser les outils d'informations actuels, notamment dans le domaine de l'internet, du multimédia et de l'informatique (ex. Réseau Européen des Centres d'Informations sur le Spectacle Vivant (ENICPA) L’influence de ces structures apporte évidemment des conséquences directes sur l’organisation des groupes professionnels, presque tous représentés par des agences ou des tourneurs. De ce fait la profession de musicien jouit de plus de reconnaissance dans la société française et apporte à ceux qui la pratiquent une conscience accrue de leur métier. Les aspects promotionnels sont mieux maîtrisés et apportent de ce fait un supplément important pour la valorisation de la création. Néanmoins l’exemple de la France ne doit pas faire oublier que la plupart des pays européens ne jouissent pas d’une telle valorisation des métiers artistiques, et reste un idéal que beaucoup aimeraient imiter. 3.3. La situation des musiques actuelles Le journal “ Divers Cités Culture ” est une publication transversale de la région Rhône-Alpes qui réunit des contributions provenant de plusieurs secteurs de la création artistique et des informations sur les activités des départements de l'Ain, du Rhône, de la Loire, de l'Ardèche, de la Drôme, de l'Isère, de la Savoie, de la Haute-Savoie et la Suisse romande. Pour l'instant trimestrielle, elle a vu le jour en 2000. Par l'intérêt crucial que la comparaison et l'échange en matière de pratiques culturelles revêt, elle pourrait bien devenir une tribune importante des représentants institutionnels et des artistes. La revue comporte un agenda des manifestations par département et des articles rédactionnels sur des thèmes en rapport avec les préoccupations des acteurs de la culture. Le n° 9 (février, mars, avril 2001) fait justement un état de la situation des musiques actuelles. Le domaine des musiques actuelles ne jouit pas en France de structures équivalentes à celles existant pour le théâtre en matière de statut ou de priorité nationale. Il n'existe pas de projet national qui pourrait s'apparenter à un 16 programme permettant de répondre à l'ensemble des questions posées par les besoins émergents de cette scène artistique. Chaque région cherche à développer ce secteur en suivant l’ordre des priorités qu’elle s’est fixées. Néanmoins on voit poindre des initiatives importantes aux quatre coins du territoire, en raison de l’intérêt commercial du marché de la musique, qui se développe grâce aux quotas et à la préférence culturelle affichée par le gouvernement pour riposter à l’envahissement des productions américaines. Le Brise-Glace, fleuron du nouveau label SMAC (Scène de Musiques Actuelles) ouvert en novembre 1998 à Annecy, fait bien des envieux par l’exemplarité de sa structure. Logés dans une architecture moderne, sept studios de répétition, un centre de documentation et d'information, l’organisation de débats, de sessions de formation et une programmation régulière en font le siège des musiques amplifiées en Haute-Savoie. Cette structure offre régulièrement des résidences à certains groupes sélectionnés, pour une durée pouvant aller jusqu’à plusieurs semaines, pendant laquelle une aide à la professionnalisation leur est apportée. Ces moyens importants mis à leur disposition, le soutien et l'accompagnement artistique qui en découlent peuvent favoriser un essor considérable des groupes sur les différents marchés. Cette dynamique a donc pour ambition d’aménager conjointement à des scènes adaptées à ces modes d’expression, des studios de répétition; elle est plébiscitée par tous les responsables des centres régionaux pour la musique. De véritables laboratoires de formation pour les artistes et le public commencent à poindre dans tous les départements, chacun cherchant à se particulariser en mettant en valeur ses propres spécificités. Le déficit de salles et de structures dédiées à l'accompagnement et à la diffusion artistique est constaté par plusieurs responsables comme une carence qui, en plus de mener au découragement des musiciens, est également la cause de la difficulté de la scène régionale à percer et du manque de reconnaissance nationale. 3.4. Protection sociale des artistes Pour pallier la déficience de protection sociale des artistes et techniciens du spectacle, l'Etat français a mis en place de manière expérimentale le "Guichet unique" dès novembre 1999. Ce guichet unique est un service gratuit car subventionné, qui permet à l'entrepreneur d'accomplir en une seule fois et auprès d'un seul organisme, les formalités de déclaration et de paiement des cotisations sociales des intermittents du spectacle, formalités qu'il accomplissait précédemment auprès de six organismes distincts (URSSAF, Congés spectacles, GRISS, ASSEDIC, AFDAS et Centre Médical de la Bourse). Les entrepreneurs occasionnels de spectacle vivant qui n'organisent pas plus de six représentations 17 par année civile (dans le cas contraire, ils sont assujettis à la possession d’une licence d’entrepreneur de spectacles vivants) y sont astreints. Ce système a été reconduit. La simplification des démarches administratives des employeurs occasionnels dans ce secteur d'activité doit permettre de lutter contre le travail dissimulé qui porte préjudice à la protection sociale des artistes et techniciens du spectacle vivant et reste toutefois une pratique courante dans le domaine informel. Pour les groupes formés en association et les indépendants, il existe un grand nombre d’agences spécialisées dans les déclarations salariales, qui pour un coût abordable exécutent le travail administratif inhérent à leurs emplois. 18 4. Questionnaire réponses aux musiciens. Analyse des J’ai envoyé ou remis un questionnaire de 28 questions à une vingtaine de musiciens professionnels du Canton de Genève, tous pratiquant la musique improvisée. Sur la douzaine que j’ai reçues complétés, il y a suffisamment de réponses convergentes pour en tirer quelques conclusions. Les musiciens qui ont participé à mon enquête sont tous impliqués depuis plus de 5 ans dans ce métier, entre 15 et 30 ans pour la plupart d'entre eux. 4.1. Fonctionnement De manière générale, les musiciens assurent eux-mêmes la promotion de leurs groupes. Ceci pour la bonne raison qu’il n’y a pas d’autres ressources, et qu’il leur semble qu’ils sont les plus motivés pour le faire. Mais la satisfaction qui découle de ce fonctionnement est inférieure à 50% pour les trois/quart et seuls les individualistes chevronnés n’attendant rien de personne y voient une solution appropriée ! Les cas de satisfaction nettement supérieure proviennent des groupes représentés par des agences ou réunis en association dotée d’un administrateur, ou quand de bons résultats sont obtenus par un musicien chevronné en relations publiques et en organisation (ex. Peter Schärli Sextet). Ceux d’entre eux qui sont membres ou ont constitué des associations (1/4 d’entre les productions étudiées) l’ont fait pour les groupes dont la réputation a traversé les frontières ou/et qui réunissent un nombre important de musiciens (BBL, Fanfare du Loup, Le CoCo) et restent encore peu nombreux. 4.2. Promotion de la musique improvisée La plupart reconnaissent l’aspect peu commercial du genre qu’ils ont choisi. Néanmoins la longévité dans la profession de la plupart et la discographie représentée par ces musiciens prouvent qu’ils ont trouvé un public fidèle et qu’ils sont constants dans leurs choix artistiques. Ils estiment insatisfaisant d’assurer eux-mêmes la promotion de leur groupe, leurs qualifications n’étant pas suffisantes pour un niveau professionnel dans la gestion et le temps nécessaire leur manquant. De plus, certains soulignent l’aspect schizophrénique entre l’assurance et le bagout indispensables pour se vendre et le doute permanent dans lequel se trouve l’artiste. 19 Un grand handicap semble provenir du manque de soutien des médias et du peu de diffusion sur les radios et télévisions. Les droits d’auteur représentent souvent une partie importante du revenu de musiciens et seule la diffusion et la reconnaissance permettent d’en assurer la régularité. Les chroniques dans les journaux ou les critiques de leurs productions restent rares et les seuls mensuels leur étant dédiés sont souvent destinés aux spécialistes. Ils ne sont pas reliés à suffisamment de réseaux, et le manque de contacts avec les marchés internationaux et professionnels est souligné par tous comme un point regrettable pour la diffusion de leur travail. Leur souhait d’y être représenté activement par des professionnels avertis et formés de manière appropriée, soit à travers des agences soit par des représentants issus des institutions, est quasi unanime. En dehors de quelques invitations nées des initiatives de Pro Helvetia, la plupart des tournées internationales auxquelles ils ont participé ont été organisées par leurs propres moyens. Le caractère occasionnel des aides à la diffusion est vécu comme un frein à un vrai essor, tout comme le manque de suivi des carrières de ces groupes par les responsables culturels se donnant le temps et les moyens de comprendre leur démarche artistique. Les invitations officielles ne sont pas toujours aptes à insérer des groupes dans les circuits de la musique existant dans les pays étrangers, alors que la reconnaissance dans les milieux professionnels a une valeur largement plus importante que le fait d’être invité parce que l’on vient de Suisse. De plus la politique des institutions n’est pas toujours perçue positivement par les artistes locaux, qui fustigent le fait que seuls les musiciens reconnus reçoivent aisément un soutien, alors qu’il serait plus judicieux d’aider à émerger les ensembles moins connus et témoignant d’une vitalité créatrice. En effet, vaut-il mieux pour les institutions officielles soutenir les tournées internationales du Big Band de Georges Gruntz, compositeur et musicien de jazz suisse reconnu, qui se produit principalement avec des musiciens internationaux, que de soutenir la Fanfare du Loup, ensemble de musiciens du cru qui ont développé depuis 15 ans un répertoire original et apprécié du public ? Les critères de sélection sont souvent ignorés, et un refus est dès lors interprété comme un manque de reconnaissance. 4.3. Perception du rôle des institutions Sur la question de savoir qui de la Municipalité, du Canton ou de l’Etat devrait se soucier prioritairement du développement de ce secteur, les réponses sont très diverses, bien que la plupart pense que tous les échelons devraient œuvrer à leur 20 reconnaissance. Il m’est apparu qu’un manque d’informations sur les politiques culturelles ne leur permet pas d’avoir un avis très clair sur ce sujet, notamment l’alinéa sur l’encouragement à la culture ajouté à la nouvelle Constitution suisse et la possibilité d’évolution qu’il implique n’ont pas été mentionnés. Pour la moitié des réponses, ce serait à la Ville de jouer un rôle plus dynamique, et pour l’autre ce serait à l’Etat. Les points concernant l’aide à la création sont identifiés comme devant revenir à la Ville, tandis que l’Etat devrait se concentrer sur les aspects de la formation et de la diffusion et la Confédération sur la reconnaissance de la profession pour permettre d’adapter la réalité à un statut officiel. 4.2. Statut professionnel et prévoyance sociale La majorité se définit comme travailleur au noir ou faux indépendant (ce qui est à peu près pareil) ! Cela signifie que les cachets ne sont pas soumis à des déductions pour les cotisations sociales, et que les musiciens ne sont donc pas reconnus officiellement comme indépendants. Seuls ceux qui ont fondé une association avec d’autres membres de leurs groupes déclarent leurs revenus. Cette possibilité n’est néanmoins utilisée que dans les ensembles ayant des cachets relativement réguliers. L’administration découlant de la déclaration en tant qu’indépendants représentant un surplus de travail et un coût qu’ils n’estiment pas pouvoir engager, en raison du côté trop aléatoire de leurs engagements et de l’inconstance de leurs revenus. La plupart sont membre de sociétés d’auteurs dont ils touchent des revenus très inégaux. La composition de musiques de films ou d’œuvres pour le théâtre ou la danse sont les plus rentables. Un grand nombre d’entre eux souhaitent la création d’un lobby équivalent à ceux rencontrés dans le milieu du théâtre et du cinéma, afin de donner du poids à des revendications pour la reconnaissance et l’amélioration de leurs droits. 4.5. Investissements avancés par les musiciens La moitié d’entre eux a investi de l’argent pour la promotion. Cela peut représenter 3'000 frs par an pour certains groupes s’ils doivent auto-produire leurs disques. Sans compter qu’ils ne font pas état des investissements en matériel qu’ils ont la plupart du temps consenti pour s’équiper en bureautique pour assurer leur travail d’organisation. Le travail administratif peut prendre 10 heures par semaine, mais est rarement compté. Il ne fait pas en général l’objet d’un 21 défraiement supplémentaire pour celui qui trouve les concerts. C’est seulement quand une association a été fondée qu’un poste pour la gestion a pu être créé. 4.6. Investissements supplémentaires envisagés Beaucoup sont prêts à passer du temps et à s’investir pour améliorer leur condition, bien qu’ils pensent qu’ils font déjà le maximum avec leurs possibilités. L’acceptation d’une vie où domine la précarité qui découle de revenus irréguliers est une preuve d’engagement pour leur art et démontre un courage certain dans une société où la consommation et le rendement sont les valeurs acceptées par la majorité. Néanmoins la crainte justifiée que des bouleversements administratifs leur apportent des tracas supplémentaires sans amener de changements constructifs à leur situation fait hésiter plusieurs d’entre eux à lancer le pavé dans la mare. Un rassemblement de la profession dans un sens syndical paraît une bonne solution pour pallier le manque avéré de reconnaissance et de visibilité. 22 5. Conclusions et propositions 5.1. Au plan de la gestion L'organisation d'un groupe, d'une tournée, repose souvent sur les épaules des musiciens eux-mêmes. De ce fait, ils ne sont pas associés à d'autres professionnels possédant des ressources complémentaires, comme dans les métiers du spectacle qui nécessitent pour exister metteur en scène, administrateur, technicien, producteur, relation publique, etc. Ils ne peuvent donc pas compter sur l'irrigation de compétences et de réflexions découlant du rassemblement des professions qui ont à leur disposition des outils d'organisation mieux affûtés que les leurs. Le “ management ” culturel est une profession trop récemment reconnue en Suisse et dont la formation est actuellement en développement. L’amélioration de la gestion professionnelle de projets artistiques, l’encadrement et le conseil pour la promotion culturelle sont des secteurs qui doivent trouver une reconnaissance et un accès accru. Pour cela il est nécessaire que les gestionnaires travaillent en confiance avec les artistes, et ne jouent pas avec la faiblesse de leur statut économique pour se servir d’eux à des fins politiques, prestigieuses ou commerciales. La formation continue dans l’administration culturelle devrait être soutenue financièrement par les collectivités, du moins pour ce qui concerne l’écolage, afin que les responsables des secteurs culturels aient véritablement les moyens de développer une politique appropriée dans ce secteur en mutation. Il est capital pour ces professionnels de pouvoir bénéficier d’échanges fructueux et de réflexion commune avec leurs homologues d’autres cantons car il existe un déficit d’organismes régionaux et trans-régionaux dans notre pays. Des fonds issus des milieux économiques ou des affaires sociales pourraient contribuer au développement de ces métiers, afin de ne pas faire porter à la seule politique culturelle les frais d’un réajustement de ce secteur. 5.2. Au plan de la prévoyance sociale L'un des premiers défis que l'on voit émerger, quand on remue le couteau dans la plaie de la reconnaissance sociale (et économique) du musicien, c'est la définition du professionnel. En matière artistique, c'est effectivement avancer sur un terrain miné que de proposer d'en ranger certains dans une catégorie "artistes reconnus" et de laisser dans le domaine des “ amateur ” ceux qui n'auraient pas réussi à apporter la preuve de leur appartenance à ce pôle 23 d'excellence. Pourtant il faut d’urgence définir des critères valables permettant d’être admis dans les assurances sociales si l’on veut que la juridiction se penche sur des adaptations à leur besoin particulier. Quelle définition adopter ? Les certificats, diplômes et autres filières officielles n'ont pas vraiment l'heur de séparer le bon grain de l'ivraie. Le revenu fiscal est inapproprié, la plus grande partie des gains effectués n'étant pas déclarée. La durée de la carrière peut-être, mais alors comment intégrer les jeunes professionnels talentueux ? Le temps consacré à la pratique artistique, mais l'on sait que, mue par le désir de l'accomplissement du créateur, c’est une nécessite vitale pour celui qui l'exerce… Le succès n'est pas non plus un critère d'excellence, il peut être dû à une démarche orientée vers le commercial. Pourtant faute de définition appropriée, sur laquelle les intéressés se pencheront, je n'en doute pas, avec intérêt, peut-être faut-il se contenter de commencer avec un étalon “ bricolé ” qui pourra ensuite être ajusté jusqu'à ce qu'il soit adopté par l’ensemble des partenaires. En s’inspirant du modèle pratiqué dans le milieu des arts de la scène, on peut imaginer quelques définitions qui permettraient d’entamer la réflexion. Proposition de critères d’admission à l’assurance-chômage Si l'on applique les directives appliquées au domaine des intermittents, il faudrait définir le cachet de musicien par concert comme représentant au moins un jour complet de travail. De plus il faudrait compenser la perte de salaire résultant de ce que les répétitions ne sont jamais prises en compte pour les musiciens de la façon suivante : ∑ Doubler chaque cachet journalier déclaré d'une part équivalente de répétition comptée "à blanc". Pour être admis par la caisse de chômage, il faudrait avoir obtenu 6 mois de cachets en deux ans, soit 132 indemnités journalières (22 jours ouvrables par mois x 6). ∑ Cela ramènerait à 66 cachets de concerts et 66 répétitions "à blanc" perçus en 2 ans pour être reconnu comme musicien professionnel par les caisses de prévoyance sociale et du chômage. Bien entendu cela diminuerait la somme de salaire assurée de moitié, mais cela ne vaudrait-il pas mieux pour commencer que d’être sans filet social ? Pour lutter contre la précarité inhérente à la profession de musicien, un fonds romand d’encouragement à l’emploi des musiciens pourrait être créé pour les soutenir dans le renouvellement de délai-cadre, sur le modèle de celui des Intermittents du spectacle. On pourrait exiger des musiciens revendiquant un statut professionnel qu’ils s'astreignent à une gestion simplifiée, mais néanmoins conforme aux modèles en 24 vigueur dans la gestion culturelle. Un projet comportant les différents postes de production devrait être établi pour chaque groupe souhaitant être soutenu. Il comporterait un plan financier qui inclue le travail administratif effectué personnellement pour donner une série de concerts, soit les répétitions, la diffusion, la composition, la promotion. Dans la rubrique "apport personnel" on additionnerait le montant de tout ce qui n’est pas couvert pour réaliser le projet, et qui représente effectivement l’investissement personnel. Cela ferait apparaître que c’est le musicien qui investit le plus financièrement dans sa création et que les plus grands mécènes de la culture sont les artistes eux-mêmes ! Cela inciterait les institutions à encourager des projets reconnus d’importance artistique, qui n’atteignent pas l’équilibre financier. Un collaborateur du Département municipal des Affaires sociales pourrait être engagé et formé pour donner des conseils et des informations relatives à l’admission par les instances des caisses de prévoyance, de chômage, d’assurances sociales et superviser ces plans de financement. L’administration est la seule capable d’entreprendre des changements dans l’aménagement de la législation et le problème de la sécurité sociale doit être résolu par l’ensemble de la société. En ce qui concerne les cotisations sociales, un service pourrait se charger d’effectuer les déclarations simplifiées sur le modèle du Guichet Unique en France. On pourrait imaginer que les musiciens jouissent de dispositions particulières, inspirées de celles en vigueur depuis janvier 2001 à Genève pour les femmes de ménage, avec lesquelles ils ont beaucoup d’affinités sur le plan de la précarité sociale7. Cela faciliterait le travail des organisateurs occasionnels et les encouragerait à régler la facture sociale découlant de l’emploi d’artistes. Pour pallier la perte de recettes, déjà peu intéressantes dans ce secteur, il pourrait exister un fonds de subventions uniquement délivrées pour financer ces déductions, qui ne viendraient pas ainsi ponctionner les petits cachets. 5.3. Au plan de la structuration de la profession Il serait profitable d’encourager les groupes à s’organiser en associations pour représenter leurs créations. Le travail supplémentaire occasionné par l’administration de ces organismes devrait être confié à des professionnels de la gestion ou des musiciens capables d’accomplir ces tâches. Relayés ensuite auprès des organes cantonaux ou régionaux, ils auraient plus de chance 7 Brochure éditée par l’OCIRC “ contrats type de travail pour les travailleurs à temps partiel dans l’économe domestique) 25 d’instaurer un dialogue constructif avec les représentants des institutions officielles. Le statut de musicien vivant à Genève est un sujet rarement évoqué par les responsables des institutions. La problématique qu’il suscite fait hésiter à le mettre en question. Les associations locales œuvrent en faveur de la promotion des musiques qu’ils ont choisi de défendre et développent de nombreuses activités en regard des postes de travail qu’elles salarient. Elles n’ont pas pour l’instant la mission ni les moyens de défendre les droits des artistes. En raison du nombre croissant de professionnels de qualité sur la scène des musiques actuelles, elles ne peuvent pas défendre les carrières personnelles de certains musiciens sans être soupçonnées de faire preuve d’un favoritisme qui nuirait à leur actions. Basis (Bureau indépendant pour les arts de la scène) est une petite structure administrative qui accomplit à Genève un travail de longue haleine depuis plus de 10 ans, en réunissant en son sein quasiment toutes les compagnies et professionnels du secteur du spectacle. Par l’information, par les conseils, mais aussi par une présence active dans les milieux romands, tournée vers la diffusion comme sur la création, elle est une mine de renseignements pour les troupes sur le chemin de la professionnalisation. Publiant un journal, présente sur internet, participant aux débats sur l’avenir de la profession dans les niveaux régionaux et fédéraux, elle contribue à développer des réseaux indispensable au rayonnement de la création théâtrale romande. Sur le même concept, il semblerait adéquat de rassembler les protagonistes des musiques actuelles dans une association coopérative cantonale ou régionale. C’est la solidarité entre les musiciens est le fer de lance de l’évolution nécessaire pour que la réalité sociale du musicien gagne en légitimité. Seul un rassemblement des musiciens relayé aux niveaux régional et fédéral posséderait l’envergure nécessaire pour constituer un lobby suffisamment fort pour défendre leurs intérêts. 5.4. Au plan de la promotion nationale et internationale Il serait judicieux que des initiatives pour la promotion de la création musicale soient régulièrement coordonnées au niveau national, avec des moyens de promotion et de valorisation appropriés pour témoigner de la valeur des artistes de notre pays. La Suisse, pour plusieurs années encore se tenant en dehors de l’Europe, doit prouver qu’elle est capable de se projeter dans l’avenir. En réaction aux scandales des fonds juifs et de l’argent sale qui ont éclaboussés la Suisse, d’énormes crédits ont été débloqués pour rectifier son image dans le 26 monde. Un travail sur le long terme est seul à même d’améliorer la visibilité de nos artistes qui défendent les valeurs de la liberté d’expression. L’Europe a doté de fonds les réseaux d’échanges culturels et mis en place des projets importants pour faire circuler la création. Il n’est pas raisonnable que la Suisse attende d’adhérer à l’Union européenne pour prendre des initiatives pour promouvoir la politique culturelle. La coordination à un niveau national devrait être une priorité pour se rallier plus facilement aux réseaux mis en place dans les pays européens. Un marché de la création de niveau international pourrait être instauré, comme dans les pays voisins, tant il est évident que ces manifestations sont porteuses de fructueux échanges, essentiels dans la circulation des spectacles vivants. Pour pouvoir se profiler avantageusement dans les réseaux européens, il est indispensable que les groupes soient relayés par des associations ou agences professionnelles, appliquant des conditions de travail compatibles avec celles en vigueur dans les législations des pays voisins. Beaucoup de groupes ont de la peine à trouver des contrats en dehors de notre pays, ce qui est une limitation navrante, étant donné le marché très restreint que représente notre pays. Pour développer la diffusion, il serait donc approprié de créer en France une structure administrative représentant des groupes suisses dans l’espace européen. Cela leur permettrait de remplir les conditions imposées aux organisateurs de spectacle en vigueur dans les autres pays (impôt, TVA, charges sociales, etc.). 5.5. Propositions pour le futur immédiat Dans le rapport "Payante, la culture ?" les nouvelles directives de l'Office fédéral de la culture préconisent d'offrir un plus grand accès aux conseils et services pour les artistes, de même que le développement des aides "immatérielles" afin de combler les lacunes dans l'information et l'accès à des droits plus adaptés à la réalité de la profession. Dans le rapport cité, il est conseillé aux autorités chargées des affaires culturelles de pourvoir des postes d'experts pouvant exercer la fonction de conseil auprès des intéressés de réfléchir avec eux aux possibilités d'évolution de la politique culturelle à leur égard sur le plus long terme. 8 Le SMS conçoit d’avoir dans l’avenir des représentants dans les différentes régions linguistiques du pays, et si elle tient ses engagements et qu’elle trouve le 8 Op. cité p. 321 “ Les autorités chargées des affaires culturelles devraient assurer davantage une fonction de conseil auprès des intéressées et, dans cette optique, pourvoir leurs postes d’experts dignes de ce nom. ” 27 soutien indispensable à son action, son influence sur le paysage de la musique improvisée pourrait être décisive. Mais pour que les informations circulent, pour suivre l’évolution sur le terrain et pour que les directives choisies soient réellement appliquées, un niveau régional ou cantonal est indispensable. Sans attendre l’entrée dans l’Europe et l’éventualité de bénéficier des Fonds structurels dévolus à la culture dans l’Union, la Suisse doit essayer de se mettre au niveau des autres pays pour ce qui concerne la mise en place de structures d’aide à la création et à la diffusion. Il est primordial que les autorités en charge de la culture comprennent l’intérêt de soutenir les associations réunissant les artistes professionnels et restent à l’écoute des problématiques soulevées par leurs besoins particuliers. Sans une ligne de subvention attribuée à la structuration de ces professions, on ne pourra pas espérer un essor réel du statut de musicien. Le milieu de la musique, comme celui des artistes en général, est très attaché à son indépendance, sans laquelle d’ailleurs il n’existerait pas une scène aussi active dans notre pays. Les initiatives en faveur des artistes doivent être discutées avec les associations de musiciens, mais le débat doit être entendu et relayé dans les sphères politiques, économiques et sociales. À Genève, la Fête de la Musique pourrait être l’occasion rêvée de lancer et relayer ensuite cette discussion. On peut espérer que la promotion fantastique faite pour la musique lors de cet événement produise une réflexion toujours plus constructive sur le rapport entre le contenu et le contenant et débouche prochainement sur des initiatives valorisantes pour le métier de musicien. 28 PROJET POUR LA CONSTITUTION D'UN COLLECTIF DE SERVICES ADMINISTRATIFS A DESTINATION D'ARTISTES ART ' BURO Préambule A Genève, la gestion administrative de projet artistique, soit la production, la promotion et la diffusion des créations artistiques musicales et plastiques, est réalisée par les artistes qui la produisent. Nombreux sont les artistes indépendants qui ne parviennent pas, faute d'information, de réseau approprié, de suivi, de soutien, à faire connaître leur travail et à le diffuser hors de cercles locaux. Travaillant depuis plusieurs années avec des musiciens et artistes de la scène, nous avons discerné des problèmes importants liés à la production artistique, particulièrement flagrants dans le domaine de la musique. Nous désirons utiliser notre expérience et créer un pôle de compétences complémentaires pour essayer d'améliorer le fonctionnement de l'aide à la création. Quoi Notre objectif est de nous allier aux différentes associations et institutions, de Genève et d'ailleurs - en Suisse comme en Europe - pour mettre en place un véritable réseau synergique de communication et d'échange qui servirait les artistes. La coordination entre les différents partenaires étant primordiale pour développer ce secteur, il nous paraît nécessaire d’engager des actions en faveur de la structuration des professions artistiques ou culturelles. Des relations régulières avec les différentes institutions doivent se mettre en place et les informations sur les priorités en matière culturelle mises à la connaissance des artistes par le biais d’intermédiaires à leur service. Qui Nous disposons d'une bonne formation de base dans le domaine de la gestion administrative et culturelle, et sommes au bénéfice d'expériences dans des domaines spécifiques : production, création, promotion, administration, diffusion ainsi que d'une bonne connaissance du terrain. Nous avons de la satisfaction à nous réaliser dans ce domaine . 29 Comment Nous souhaitons créer une structure malléable, ouverte et c'est pour cette raison que nous avons opté pour la forme associative. Une telle structure nous permettra de continuer nos activités professionnelles, liées ou non à l'Association. Elle permettra à celle-ci de se développer progressivement, en fonction des mandats reçus. Objectifs concrets • Développer une stratégie de promotion culturelle à destination des musiciens indépendants vivant à Genève • Négocier avec les pouvoirs politiques et les collectivités publiques pour la reconnaissance et la défense d’un statut de musicien • Contacts avec d'autres associations et institutions existantes afin d'œuvrer pour la complémentarité • Disposer d'une représentation active dans le milieu culturel genevois, romand, suisse et international • Créer des réseaux de compétences et de collaborations • Création de bases de données, répertoires • Aider à la constitution des associations d'artistes en mettant à disposition des statuts types et des conseils • Tenir à disposition des contrats types pour l'engagement de personnel • Déclarations des cachets de musiciens auprès des caisses d’assurances sociales Compétences du bureau • • • • Administration Comptabilité Assurances sociales Relations publiques 30 • Organisation • Informatique • Gestion culturelle Les responsables du bureau se donnent pour but d'améliorer graduellement leurs compétences professionnelles relatives à l'administration culturelle grâce à la formation continue existant dans ce secteur. Fonctionnement Une association est constituée pour défendre les buts définis. Le bureau est engagé par l’association pour effectuer le travail découlant des buts. Le comité se charge de la gestion de l’association et des relations avec ses membres. Concrètement Ouvrir un bureau avec une permanence à Genève de deux demi-journées par semaine. Trois autres demi-journées seront consacrées au travail administratif. Pour débuter, il faut envisager environ deux mois de mise sur pied de la logistique administrative. Il faudrait pourvoir pour débuter deux postes à mi-temps et un autre poste de consultant au mandat. Une recherche de locaux adéquats, éventuellement partageables avec une autre association, pourra être amorcée dès la mise sur pied de l’association. Ressources financières Les ressources financières seront constituées de • Cotisations de membres individuels ou de personnes morales • Dons • Subventions publiques ou privées • Cachets Membres actifs : Ils payent une cotisation annuelle et une quote-part sur tous les cachets déclarés par l’association. Ils ont le droit d’assister aux réunions du comité. 31 Membres passifs : Ils payent une cotisation annuelle (entre 40 frs et 100 frs). Ils peuvent consulter à la permanence ou poser des questions par le biais du site de l'association. Ils sont convoqués à l’assemblée générale annuelle. Mandats : Toute institution, association ou membre individuel peuvent proposer des mandats au bureau. Celui-ci fait une estimation du coût avant d'entreprendre le travail, qui s’il est accepté donne lieu à un contrat. Une partie du budget est affectée aux frais du bureau (env. 30 %) Montage financier Subvention fédérale Subvention Ville de Genève Subvention Canton Subventions autres Mandats rémunérés Cotisations Apport personnel OFC, DDC DAC DIP, Dpt Affaires sociales Loterie Romande, Fondations Outils, temps, bureautique, téléphone, etc. ANNEXES • Questionnaire sur le statut et la promotion de la musique improvisée à Genève • Questionnaire sur l’organisation et la promotion des groupes • Réponses des musiciens résumés sous forme de bases de données 32 Questionnaire sur le statut et la promotion de la musique improvisée à Genève Nom, prénom naissance Instrument Année de 1. Depuis combien d'années pouvez-vous compter sur des revenus réguliers grâce aux concerts ? 2. Quelle proportion de votre revenu représente, en dehors de l'enseignement, votre activité de musicien ? 3. Quel est le statut professionnel en tant que musicien qui vous définit le mieux (indépendant, salarié, faux indépendant, intermittent, chômeur, travailleur au noir, mixte, etc.) ? 4. Etes-vous affilié à des organisations de prévoyance professionnelle ? Payez-vous des cotisations sur les cachets que vous recevez comme musicien ? 5. Exercez-vous un autre emploi rémunéré ? De manière régulière occasionnellement ? 6. Dans combien de groupes jouez-vous actuellement ? 7. Etes-vous membre d'organismes énumérés ci-dessous ? Si oui, lesquels Syndicats Société d'auteurs et d'interprètes Association de musiciens Agence artistique professionnelle Coopérative de gestion artistique 33 9. Quel(s) institutions ou administration devrait avoir pour mission de vous aider à améliorer l'efficience de votre travail ? (cochez selon votre choix, et ajoutez un chiffre pour définir la priorité) Fédéral Cantonal Municipal Autre (quel(s) ?) 10. Quels outils de promotion vous manquent pour effectuer votre travail ? Bases de données consacrées à la promotion artistique Site internet consacré à la promotion des groupes Participation aux "marchés" de la musique actuelle, de type Midem, Womex, Bourges, Chaînon-Manquant, etc.. Participation à des réseaux nationaux ou internationaux Autre (quel(s) ?) 11. Connaissez-vous l'existence d'agence ou d'organisme dédiés à la promotion, la diffusion, la défense des droits ou l'organisation pour les artistes indépendants d'autres domaine que celui de la musique ? Si oui, lesquels ? 12. Pensez-vous que l'activité d'agent artistique dans le domaine de la musique improvisée soit viable en Suisse romande ? Pourquoi ? 13. Quelles sont à votre avis les limites de l'auto-production ? 14. Avez-vous des propositions à faire pour l'amélioration de votre situation professionnelle ? Si oui, lesquelles ? 15. Que seriez-vous prêt à engager pour l'amélioration de votre statut ? 34 Groupe n° ……. Nom du groupe Nbre de musiciens Durée d'existence du groupe Qui organise les concerts et les tournées de ce groupe ? (vous, un membre du groupe, un(e) proche, autre) ? Etes-vous satisfait de cette manière de fonctionner ? Evaluez entre 0 et 100% Combien d'heures par mois en moyenne sont consacrées à l'administration et à l'organisation de concerts par le responsable pour ce groupe ? Avez-vous investi des fonds personnels dans l'administration et la promotion de ce groupe ? Si oui, combien par an ? Avez-vous créé une raison sociale (association, etc.) pour ce groupe ? Si oui laquelle ? Avez-vous enregistré un ou plusieurs CD ? Titres Ce(s) CD a-il bénéficié de subventions ? Si oui par quelle instance ? Avez-vous tourné dans le territoire européen ou international ? Avez-vous bénéficié de soutien pour la diffusion de votre travail (tournées) avec ce groupe ? Si oui de quelle nature (financière, aide à l'organisation, services, etc.) et par quelle instance ? 35